UN MANNIFIQUE
HIT!
Heat qui signifie
“flics” en argot est un film profondément humain où deux prédateurs que
tout oppose a priori, finissent par se respecter et accepter les règles
du jeu.
D’un côté, Al Pacino dans le rôle de l’irascible Vince Hanna, lieutenant
du L.A.P.D. affronte de l’autre Robert De Niro alias Neil McCauley, criminel
professionnel d’autant plus dangereux qu’il est calme et posé.
Les seconds rôles sont de premier choix : avec un Val Kilmer (héros
masqué de Batman Forever dont le 4ème épisode est en préparation)
dans le rôle de Chris Shiherlis, complice en mal d’amour. Ainsi que Tom
Sizemore, troublant depuis son rôle ambigu dans Strangedays, sans
oublier Jon Voight (Runnaway Train) en tête pensante de cette organisation
criminelle.
Une loyauté quasi-chevaleresque enchaîne les héros dans ce western
urbain où l’esprit familial - pour ainsi dire tribal est très présent.
Les deux clans guidés par des “parrains” autoritaires et déterminés
ont leurs hommes de mains ; quant aux femmes - source de paix ou de
tracas - elles tiennent le haut du pavé.
Avec un De Niro saisissant, hypnotisant qui semble s’accommoder de
n’importe quel rôle et un Pacino qui en fait parfois trop mais reste crédible,
nul doute qu’il y avait là de quoi faire trembler leurs rivaux à la cérémonie
des Oscars si le film était en compétition !
La compréhension réciproque qui unit les deux hommes est doublée d’une
admiration tacite. Leurs existences respectives sont cependant guidées
par le déterminisme où leur “profession” les confine.
Leurs destins sont liés, l’un doit fuir pour survivre et l’autre doit
traquer pour vivre. Chacun sait ce qu’il doit faire et l’effectue sans
illusion mais avec un professionnalisme comparable à leur rôle d’acteurs.
- De Niro, Pacino,
- deux pointures dirigées
- d’une main de maître
par
- un Mann en grande
forme.

A partir de là, le verdict final devient inéluctable.
Ils flairent leur présence mutuelle et se rencontrent pour la première
fois autour d’un café dans une scène d’anthologie avant le duel ultime.
Les deux comédiens n’avaient pas joué ensemble depuis le deuxième épisode
du Parrain où aucune scène ne les réunissait cependant.
Les échecs sentimentaux des deux protagonistes
sont compensés par leurs “coups”. Braquages sans failles contre coups
de filet tonitruants.
Le L.A.P.D. dispose de moyens considérables, ce qui n’est pas un luxe
pour affronter McCauley et ses acolytes.
Nos bandits cossus ne se déplacent pas pour moins de 2 millions de
dollars et effectuent leurs opérations pour la griserie essentiellement -
leur drogue c’est l’action, qu’importe le prix !
La côte ouest semble porter bonheur à M.Mann depuis Miami Vice.
On reconnaît, en effet bien là le réalisateur de la série culte des
“mid-eighties”.
Empruntant une certaine atmosphère à la série télévisée, l’entente
virile saillit plus encore dans Heat. La présence féminine est complémentaire
à la mâle complicité de ce duo infernal.
La fusillade dans le downtown de L.A. n’est pas sans rappeler
certaines scènes explosives de Miami Vice. La Cité des Anges semble
alors peuplée de démons. Le bruit sourd des coups de feu est amplifié de
sorte que l’on est projeté dans le film. La noirceur prime, même en plein
soleil. Et on ne peut s’empêcher, une fois de plus de s’attacher au bandit
brillamment interprété par De Niro, fragile derrière sa carapace de tueur !
On lui pardonne même, tout comme sa fiancée en lui souhaitant de s’en
sortir, mais Mann ne cède pas au Happy End cher au cinéma américain.
Le chasseur devient la proie à un moment-clé du film à travers ce jeu
de cache-cache d’environ trois heures. Hanna croyant avoir coincé McCauley
s’aperçoit que ce dernier l’a dupé. De là naît une estime qui va se poursuivre
tout au long du thriller.
Alors que sa vie sentimentale tourne au vinaigre, le lieutenant Hanna
se concentre sur sa seule raison d’être : sa pâture.
McCauley, quant à lui, s’attache à ce qui le perdra : l’amour.
Il se laisse séduire par Edie (Amy Brenneman), une jeune graphiste
qui va bouleverser tous ses projets.
Un tueur est par définition dépourvu de sentiments. Dès lors qu’il
est devenu humain, McCauley devient ainsi vulnérable et faillit à sa devise :
“Pouvoir tout plaquer dans les 30 secondes dès que l’on sent les flics
rôder”.
Mann opte volontairement pour une vision déshumanisée de l’Amérique
moderne à travers cette violence qui lui colle à la peau et expose son
point de vue sans candeur.
Dans la séquence finale, le respect et la fraternité qui unissent McCauley
et Hanna semblent triompher au-delà de leur mission.
Heat est une analyse sociologique des passions humaines parfois
brutales, souvent maladroites et destructrices.
Cette super-production mérite d’être vue, ne serait-ce que pour la
distribution et la performance d’acteurs mais il serait imprudent de croire
que le scénario ait été négligé.
Heat vous réclame deux heures cinquante de votre temps ... un
bon investissement en somme.
FILMOGRAPHIE
Al Pacino
Vu récemment dans :
Carlito’s Way (1993) et Scent of a woman (1992) pour lequel il a obtenu
l’Oscar du meilleur acteur.
On le verra prochainement dans une adaptation de la pièce de Shakespeare
Richard III qu’il réalisera et interprétera lui-même. Avec comme interprètes
Wynona Rider (Dracula) et Kevin Spacey (Usual Suspects).
Ainsi que dans Donnie Brasco en agent du FBI infiltrant la mafia, où
il sera accompagné de Johnny Depp.
Robert De Niro
Vu récemment dans :
Cape Fear (1991) et Frankenstein (1995).
On le verra prochainement dans The Fan où il interprétera un supporter
qui harcèle son joueur de base-ball favori (Wesley Snipes).
Egalement dans Sleepers dans le rôle d’un prêtre, où il donnera la
réplique à un jeune avocat incarné par Brad Pitt (Seven).