LE VOYAGE SANS RETOUR DU BOEING 747 DE LA TWA
L’hypothèse de l’attentat semble prévaloir sur celle de l’accident
Une partie du fuselage captée par un membre des équipes de recherches dont la lenteur provoque l’impatience et la colère des parents des victimes.
Bien que le terme attentat soit sur toutes les lèvres et que les médias l’aient avancé au lendemain de la catastrophe aérienne du Boeing 747 de la TWA, les autorités américaines évitent de se prononcer en attendant les conclusions du FBI. Pour que celles-ci soient déterminantes, il faudra retrouver les deux boîtes noires perdues dans les profondeurs de l’océan. Les plongeurs s’y emploient sans relâche en dépit d’une mer houleuse et de conditions atmosphériques particulièrement dures. Plusieurs revendications sont déjà parvenues aux chaînes de télévisions. Mais le président Clinton, dès la veille de l’ouverture des 26e Jeux Olympiques, s’était montré prudent. “Nous ne savons pas ce qui a causé cette tragédie. Nous en trouverons l’explication. Ne tirons pas des conclusions précipitées. Attendons de connaître les faits.”
Des débris du Boeing accidenté et divers objets recueillis en mer sont acheminés vers la terre ferme en vue d’un premier examen.
Toutes les pièces sont recueillies et assemblées avec un soin extrême.
LE VOL 800 DU BOEING 747-100 DE LA TWA
En raison d’une panne d’un chargeur mécanique, le vol 800 du Boeing 747-100 de la TWA, en provenance d’Athènes, avait accusé une heure de retard mercredi 17 juillet. Il décolle néanmoins vers 20h30 de l’aéroport J.F. Kennedy de New York en direction de Roissy-Charles-de-Gaulle à Paris où il est attendu pour 8h15. Sur le tableau, on annoncera qu’il a été annulé pour amortir le choc auprès des parents des victimes. Car entre-temps, il s’était abîmé en mer. Dix minutes après son décollage, ses traces sont perdues. Victime de plusieurs explosions en plein ciel à près de 4500 mètres d’altitude, à 24 kilomètres au large de Long Island, le voici tombé comme “une boule de feu” dans l’océan emportant avec lui pour un voyage sans retour 230 passagers dont 35 membres d’équipage: 161 Américains, 42 Français 11 Italiens. Toutes les victimes ont un nom, une famille, des êtres chers qui les attendent des deux côtés de l’Atlantique. Certaines ont particulièrement ému le monde notamment un couple d’Italiens revenant d’un voyage de noces, 16 adolescents américains de Pennsylvanie entreprenant un voyage linguistique en France et en Suisse. Le veinard aura été ce voyageur venu trois heures à l’avance à l’aéroport et transféré sur une ligne directe sur Rome. Les malchanceux, ceux qui n’avaient pas programmé Paris et qui se sont retrouvés embarqués sur cette ligne. Une immense tragédie qui a valu à Paris comme à New York la mise sur pied de cellules de crise et le recours à l’apport précieux des hommes de religion et des psychiatres spécialisés. Dimanche 21 juillet pendant que les recherches se poursuivaient les familles et proches des victimes ont participé à une cérémonie oecuménique organisée à l’aéroport JFK largué fleurs et couronnes sur la côte tandis que des offices religieux étaient célébrés à travers tous les Etats-Unis à la mémoire des disparus, notamment en Pennsylvanie où l’on ne parvient pas à effacer le souvenir des 16 jeunes adolescents partis dans la joie de l’exploration et qui ne reviendront jamais.
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1) Nancy Copozza, du New Jersey, tient en main la photo d’un ami français de la famille Ludovic Chanson (11 ans) ayant péri dans la catastrophe aérienne; près d’elle, son fils Luke.
2) Qui pourra jamais consoler une mère et sa fille de la perte d’un être cher.
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3) Les sauveteurs ramènent une partie de l’aile de l’avion à bord d’un hors-bord.
4) Les gardes-côtes US rassemblent les premiers bagages repêchés des victimes.
Les “US Coast Guards” hissent à bord une partie de fuselage de l’appareil. La découverte de la boîte noire risque de prendre du temps.
LES SECRETS A DECHIFFRER
L’Amérique traumatisée a aussitôt établi des liens entre la tragédie de l’attentat contre le Boeing 747 de la Pan Am qui avait causé la mort de 270 passagers au-dessus de l’Ecosse le 21 décembre 1988. Elle s’est remémorée l’attentat du World Trade Center survenu en mars 1993, celui encore proche d’Oklahoma City (1995). La sécurité dont elle bénéficiait n’est plus qu’un mythe. Il en faut si peu pour tout faire basculer! Il a suffi de 200 grammes de Semtex enfouis dans une radio-cassette à travers le fouillis des vêtements d’une valise pour provoquer l'explosion du Boeing de la Pan Am au-dessus de Lockerbie en Ecosse. Il n’en fallait pas plus pour faire exploser le Boeing de la TWA en plein ciel. Un missile aurait été tiré sur le 747. Pour la première fois depuis le début de l'enquête, le FBI n’écarte pas cette hypothèse avancée dès le premier jour par les chaînes de télévision américaines. Au bout de laborieuses recherches et analyses, des traces d'explosifs, résidus chimiques, ont été détectés sur une aile des bagages. Ces premiers tests devraient être confirmés par des examens plus sophistiqués. Mais la prudence est toujours de mise. Et l’enquête avance avec une extrême lenteur au grand désespoir des familles dont la plupart n’ont pu ni retrouver ni identifier les dépouilles de leurs êtres chers, enfouis à 40 km dans les eaux de l'océan. Pourtant, des secours exceptionnels avaient été mis en place dès l’annonce de l'explosion: dix vedettes, six hélicoptères, un avion C130 Hercule, équipé d’appareils à infrarouge en mesure de détecter les sources de chaleur, tout un équipage dressé pour retrouver les traces d’une navette spatiale. Repêcher l’une des deux boîtes noires mémorisant les informations et permettant de suivre la trajectoire de l’avion jusqu’à l'accident est devenue une priorité pour les enquêteurs. Des navires dotés de matériels acoustiques sophistiqués avaient cru déceler les signaux électroniques émis par ces boîtes noires. En fait, ils s’étaient mépris à ce sujet craignant que ces boîtes noires si précieuses ne soient enfouies dans le sable et hors d’atteinte. Selon le vice-président du Bureau national pour la sécurité des transports (NTSB) l'enquête s’oriente désormais vers la recherche par sona du fuselage du Boeing. Une caméra vidéo devant explorer les fonds marins afin d’orienter les recherches des plongeurs et “retrouver les enregistreurs dans l’épave”.
Une partie de la carlingue du Boeing immergé au large de Long Island.
Vedettes et hélicoptères sillonnent l’Atlantique en dépit des dures conditions climatiques.
POLEMIQUE AUTOUR DE LA VETUSTE DE L'AVION
L’hypothèse de l’attentat avait été émise en raison de la série d'explosions en plein ciel dont a été victime le 747 et de l'absence d’appel de détresse. Par contre, la découverte en mer de gilets de sécurité gonflés, l'étendue de la nappe de kérozène avaient privilégié celle de l’explosion. D’autant que le 747-100 de la TWA avait 25 ans d’âge. Ce facteur semble ne pas entrer en ligne de compte, la sécurité d’un avion n’étant pas liée à son ancienneté. Un avion datant de 25 ans et régulièrement entretenu peut être plus sûr qu’un avion plus récent, effectuant plus d’arrêts. Le vol long-courrier est moins astreignant pour un appareil que le court-courrier entraînant davantage de décollages, vol avec pressurisation et atterrissage. Il est admis que dans trois vols sur quatre, les accidents sont causés par des erreurs de pilotes. Les secousses que subissent les passagers en plein vol, contrairement à ce que ceux-ci craignent, ne comportent aucun risque. 18% des catastrophes surviennent au décollage, 11% à l’étape initiale de la montée et 40%, alors que les voyageurs sont heureux d’être parvenus à destination, entre la phase terminale et l’atterrissage. Qu’en est-il du Boeing de la TWA? Selon la Mossad coopérant avec la CIA, l’information est rapportée par le “Yedioth”, il semble qu’un terroriste aurait pris l’avion à Athènes portant avec lui une bombe en pièces détachées qu’il aurait réunies dans les toilettes de l’appareil et introduites dans l’aéroport Kennedy. Une hypothèse parmi tant d’autres. Tout étant désormais possible dans un contexte où les mesures de sécurité ont été quelque peu relâchées et où le génie diabolique des hommes transgresse toutes les frontières.
EVELYNE MASSOUD
Des débris du Boeing accidenté et divers objets recueillis en mer sont acheminés vers la terre ferme en vue d’un premier examen.
Les autorités américaines demeurent dans l’expectative. Point de presse de Robert Francis vice-président du NTSB.