LORS DE SA VISITE DE 20 HEURES A BEYROUTH
LE PRESIDENT CHIRAC:
Le président Hraoui accueillant le chef de l’Etat français à sa descente d’avion.
«IL N’Y A PAS DE LIBAN AVEC TOUT SON GENIE PROPRE, SA TRADITION, SON HISTOIRE SANS LES CHRETIENS»
La visite fut courte, 20 heures, moins spectaculaire que celle d’avril, mais intensément remplie avec un moment fort et culminant: la rencontre-débat du chef de l’Elysée avec les universitaires libanais. Après Damas, Tel-Aviv et Jérusalem, les territoires autonomes et Amman, l’étape libanaise (suivie de celle du Caire) avait son importance, du fait des liens d’amitié séculaire liant le Liban à la France mais, aussi, vu l’intérêt pour le Liban de l’achèvement du processus de paix dans les meilleures conditions, le respect de sa souveraineté et de son intégrité territoriale. Sachant que Jacques Chirac est venu en tournée dans cette région, comme il l’a dit en «homme de paix». Il devait avoir, sans doute, beaucoup de choses à dire aux hauts responsables libanais, aux membres de la «troïka» avec qui il a eu des apartés, sur les résultats de sa visite au P.O., qui confirme la détermination de la France, entraînant avec elle l’Europe, à jouer un rôle actif dans le processus de paix. D’où son insistance à l’application des résolutions internationales. Contrairement à sa visite du mois d’avril, le président Chirac ne fera aucun discours politique officiel. Il a choisi plutôt de transmettre son message politique au peuple libanais et à ses dirigeants, comme au voisinage à travers un dialogue «chaud» avec la jeunesse universitaire du pays, complété par sa brève conférence de presse. A maintes reprises, il affirmera l’attachement de la France à l’indépendance et à la souveraineté du Liban, invitant les jeunes à rester au pays, à lui faire confiance, à ne pas choisir la voie de l’émigration et exhortant les hommes d’affaires de la diaspora à y revenir ou, du moins, à y invester. Ce double appel, il l’adressera en premier lieu aux Libanais chrétiens. Le volet économique occupera, certes, une grande place dans cette courte visite, ainsi que le culturel. Concernant les propos de Chirac sur la présence syrienne au Liban, il serait utile et intéressant de lui remettre un dossier complet sur le rôle des Syriens au Liban bien avant 1975, en égard à la vérité historique dans son intégralité. On pourrait de même évoquer la place qu’occupait la démocratie au Liban avant 75, notre situation actuelle étant loin d’être idyllique! Les Libanais continueront toujours à espérer que la France sera aux côtés du Liban, afin que la paix ne se fasse pas à ses dépens.
Les deux “Miss Liban 95 et 96” Dina Azar (à gauche) et Nesrine Nasr ont offert des bouquets de fleurs à M. Chirac à son arrivée à l’AIB.
C’est à 19h.10 que l’avion présidentiel aux couleurs tricolores a atterri le jeudi 24 octobre à l’Aéroport international de Beyrouth, précédé quelques minutes plus tôt d’un autre avion absolument similaire qui transportait la délégation accompagnant le chef de l’Etat français. L’utilisation de deux avions semblables, sans qu’on sache dans lequel se trouvait M. Chirac était due sans doute, à des mesures de sécurité. A l’A.I.B., tout le cérémonial officiel avait été mis en place pour cet hôte de marque qui, après son explosion de colère à Jérusalem, fait figure de héros aux yeux des Arabes. Le président Chirac est accueilli à sa descente d’avion par le président Hraoui, alors que “Miss Liban 96”, Nisrine Nasr et “Miss Liban 95”, Dina Azar, lui offrent des bouquets de fleurs. Les deux chefs d’Etat écoutent les hymnes nationaux français et libanais avant de passer en revue la garde présidentielle. Puis, M. Chirac salue les personnalités officielles libanaises, diplomatiques européennes responsables de l’UFE venues l’accueillir et, à leur tête, les présidents Berri et Hariri et le général Lahoud commandant en chef de l’armée. Le président Hraoui salue, de son côté, les membres de la délégation accompagnant le chef de l’Elysée. Au nouveau salon d’honneur de l’AIB inauguré pour la circonstance, les chefs d’Etat français et libanais ont un bref aparté de dix minutes, alors qu’à l’extérieur la pluie qui avait cessé au moment de l’arrivée, reprend de plus belle et on a juste le temps de retirer le tapis rouge pour la circonstance.
TROIS DOSSIERS ESSENTIELS: PROCESSUS DE PAIX, RELATIONS ECONOMIQUES ET CULTURELLES
Le convoi officiel se dirige vers le palais présidentiel de Baabda où M. Chirac passera la nuit. Les deux chefs d’Etat s’entretiennent en tête-à-tête pendant une trentaine de minutes, avant de présider une réunion élargie groupant les délégations française et libanaise chargées d’étudier trois dossiers: le processus de paix régionale, les relations économiques et les affaires culturelles. Etaient présents à cette réunion élargie, du côté français: le ministre des A.E. Hervé de Charette et son conseiller, Jacques Champagne de Labriole; le ministre du Commerce extérieur Yves Galland; l’ambassadeur de France à Beyrouth, Jean-Pierre Lafon et le porte-parole de la présidence, Catherine Collona. Côté libanais: le Premier ministre Hariri, le ministre des A.E. Farès Bouez; le ministre d’Etat chargé des Finances, Fouad Sanioura; le ministre de l’Economie, Yassine Jaber; le secrétaire général du palais Bustros, Zafer el-Hassan; le gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé; l’ambassadeur du Liban à Paris, Naji Abi-Assi et Samir Khoury, directeur des Affaires politiques au ministère des A.E. Il n’y a eu aucune déclaration à l’issue du tête-à-tête et de la réunion élargie, pas plus qu’au cours du dîner qu’a offert le président Hraoui en l’honneur de son hôte au palais de Baabda et ayant groupé, en plus de la délégation française, de nombreux ministres, députés et ambassadeurs européens. La discrétion était, semble-t-il, de mise cette fois, alors que lors de la première visite de Chirac à Beyrouth en avril dernier, toutes les minutes de cette visite étaient retransmises en direct.
Les deux chefs d’Etat passant en revue la garde présidentielle.
CLOU DE LA VISITE: LA RENCONTRE AVEC LES UNIVERSITAIRES
L’événement marquant de la journée du vendredi 25 octobre et même de l’ensemble de la visite de 20 heures de Chirac à Beyrouth, sera sa rencontre avec une centaine d’universitaires des différentes Facultés et formations, à la salle Montaigne de l’Espace culturel français de Beyrouth. Durant 90 minutes, ils ont posé leurs questions de façon directe. Le président Chirac, sans se laisser désarçonner et avec diplomatie, a eu réponse à tout, même s’il n’a pas toujours été convaincant. Il semble, en tout cas, que c’est par le biais de cette rencontre que le chef de l’Elysée a voulu transmettre son message, non seulement à la jeunesse libanaise mais, aussi, aux officiels et à l’ensemble du peuple libanais. A l’issue de ce dialogue avec la jeunesse universitaire qui a duré deux heures (de 9h15 à 10h45), M. Chirac s’est rendu place de l’Etoile sous une pluie torrentielle pour une brève visite au président de la Chambre, Nabih Berri qu’il a, d’ailleurs, félicité pour sa réélection, «avec difficulté», dit-il non sans humour. L’entretien de 40 minutes a porté, essentiellement, sur le Liban-Sud. Le président de la Chambre a insisté sur la nécessité d’activer le rôle européen au Proche-Orient et de faire pression sur Israël pour qu’il applique les résolutions internationales. Il a de même invité le président Chirac à se rendre au Sud, qui a promis de le faire lors de sa prochaine visite au Liban. A l’issue de cette rencontre, le président Chirac dira: «J’ai constaté qu’il y avait dans nos analyses, dans nos inquiétudes, également et dans nos espoirs une très grande convergence de vues». De son côté, M. Berri affirmera: «Au nom des députés et du peuple libanais, je souhaite la bienvenue à un héros français dans le monde arabe et un héros arabe en France et en Europe. Le Liban est présent continuellement dans le cœur, l’esprit, la conscience du président Chirac et nous aurions souhaité qu’un nombre de nos chefs d’Etat arabes eût l’arabisme de ce grand homme». M. Berri a de même proposé de donner le nom de Jacques Chirac au lycée que la France a l’intention de construire à Nabatiyeh.
Le chef de l’Elysée serrant la main au président de la Chambre Nabih Berri et au Premier ministre Rafic Hariri, venus l’accueillir à l’AIB.
DE LA PLACE DE L’ETOILE A KRAYTEM
Le président Chirac gagne, ensuite, Kraytem, pour y rencontrer le premier ministre: Il aura droit, comme il se doit, à un accueil populaire devant la résidence de M. Hariri. Les deux hommes ont un entretien en tête-à-tête d’une heure, suivi d’un déjeuner auquel le chef du gouvernement (sortant et désigné) avait convié plusieurs ministres et personnalités. Le déjeuner prend un peu plus de temps que prévu. Aussi, M. Chirac écoutera-t-il la conférence de presse qu’il a donnée à l’hôtel Bristol. Le ministère de la Défense à Yarzé sera la dernière étape de la journée. M. Chirac y est accueilli avec tout le cérémonial de circonstance par le ministre de la Défense, Mohsen Dalloul et le commandant en chef de l’armée, le général Lahoud. Il visite en leur compagnie le monument pour la paix érigé par le sculpteur français, Armand, à l’entrée du ministère de la Défense. Après cela, brève halte au palais de Baabda où il fait notamment ses adieux à la première Libanaise avant de se rendre à l’A.I.B., avec le président Hraoui. MM. Berri et Hariri, ainsi que plusieurs responsables sont là pour la cérémonie officielle d’adieu. A 16 heures, l’avion présidentiel décolle amenant Chirac au Caire, dernière étape de sa tournée proche-orientale.
PRESIDENT CHIRAC
Au cours de sa conférence de presse à l’hôtel Bristol, M. Chirac sera interrogé aussi bien sur le processus de paix au Proche-Orient, le rôle de la France et de l’Europe dans ce processus, que sur des questions plus spécifiques au Liban. D’ailleurs, la première question qui lui est posée porte sur son amitié avec M. Hariri; plus précisément sur le point de savoir à quand elle remonte. Il répond: “Nous nous sommes rencontrés il y a longtemps et nous partageons le même amour pour le Liban”. Concernant le rôle de la communauté Européenne dans le processus de paix, il affirme: “Chacun dans une négociation difficile a quelque chose à apporter. L’U.E., comme la France, apporte ce qu’elle peut, c’est-à-dire un peu d’amitié et de confiance à toutes les parties”. A propos d’une autre question sur l’Europe, il dit: “L’Europe, comme la paix, est un travail et un compromis constants entre des intérêts parfois divergents. Mais nous progressons”. Concernant les résultats de sa tournée au PO, il estime avoir “réussi à rapprocher les points de vue, car nous avons insisté sur des principes importants (...) Pour ma part, j’ai fait des propositions qui vont contribuer à créer une dynamique et j’ai essayé de participer à cette dynamique”.
Chirac et la troïka.
IL N’Y A PAS DE LIBAN SANS LES CHRETIENS
A la question: “Quel est votre message aux Libanais, surtout aux chrétiens, d’autant qu’on sent que vous sacrifiez des siècles d’histoire pour des intérêts économiques?” il répond: “Ceux qui pensent cela se trompent. Il n’y a pas de Liban avec tout son génie propre, sa tradition, son Histoire, sa civilisation, sans les chrétiens. Le Liban a vocation à être multiconfessionnel ou alors ce n’est pas le Liban. “Le message, poursuit-il, que je veux donner aux chrétiens, est celui d’avoir confiance dans leur pays, dans son avenir; de rester ici, de ne pas chercher à faire leur vie ailleurs. Et à ceux qui sont partis pour des raisons de sécurité, je leur dis: Revenez et même si vous avez fait votre vie ailleurs, investissez sur votre terre.”
LE PRESIDENT CHIRAC AUX ETUDIANTS LIBANAIS: “AYEZ CONFIANCE EN VOTRE PAYS ET CONSTRUISEZ L’AVENIR” Le vendredi 25 octobre a eu lieu la rencontre du président Jacques Chirac avec la jeunesse étudiante libanaise. Cent-cinquante représentants de toutes les universités du Liban s’étaient réunies, ce matin-là, au Centre culturel français, pour un débat politique et social “franc”, comme il a tenu à le préciser. Ils s’étaient mis d’accord pour aborder les grandes questions qui les préoccupent en les groupant en cinq thèmes principaux: le processus de paix, les problèmes internationaux, l’avenir du Liban, la francophonie et les problèmes de la jeunesse. La presse, étrangère et locale, était autorisée à assister au meeting, les questions étant réservées aux étudiants. POUR PARLER DU LIBAN, J’AI SOUHAITE RENCONTRER SA JEUNESSE Avant le début du dialogue, le président a voulu préciser quel était l’objectif de cette rencontre. Il a, ainsi, parlé des épreuves terribles que les Libanais ont dû surmonter, ainsi que des destructions considérables survenues dans le pays mais, aussi, du dynamisme de ce peuple et sa grande volonté de renaître et retrouver son intégrité. Cette vitalité étant suffisante selon lui, pour rendre l’espoir à l’avenir du pays. “C’est pour parler de cet avenir que j’ai souhaité rencontrer la jeunesse”, a-t-il dit. Et pour exprimer l’affection sincère et l’attachement de la France au Liban qui est depuis toujours pour elle “une fenêtre sur l’Orient”. Parlant du Liban démocratique et multi-confessionnel, il a terminé par souhaiter aux jeunes de rester solidaires et unis et d’avoir confiance en leur pays pour pouvoir le reconstruire. “LA FRANCE SERA TOUJOURS A VOS COTES” Sur le processus de paix, M. Chirac répond que, comparée à ce qu’elle était avant, la situation s’était de loin améliorée au Proche-Orient et que des progrès considérables ont été réalisés, notamment par les tentatives de certains hommes de paix et de bonne volonté, comme Arafat et Rabin. “Certes, il reste quelques dangers et, actuellement, la situation n’est pas sans inquiétude, a-t-il dit. Il s’agit de retrouver la sécurité et celle-ci va mener à la paix. La France sera toujours à côté du Liban, pour que celui-ci retrouve son intégrité et sa souveraineté sur tout son territoire. “A Jérusalem, lors de ma visite, j’ai d’ailleurs parlé de ceci à M. Netanyahu. Je pense que la France, en raison des bonnes relations qui la lient à Israël, est capable d’apporter un surplus de confiance et de cœur au processus de paix”. “Non, a-t-il affirmé, ce ne sont pas des intérêts que cherche la France, mais elle veut exprimer sa volonté de paix, avec la coopération des Etats-Unis et de l’Union européenne. Cette dernière, bien qu’elle ne soit pas habituée à intervenir politiquement, pourra avoir une grande influence sur les Etats-Unis à l’ONU, qui sont favorables envers Israël, en raison des dettes américaines. L’ONU étant une organisation qu’il faut respecter, parce qu’elle a déjà empêché beaucoup de conflits.” “LES SYRIENS DEVRONT S’EN ALLER EUX AUSSI” “Les Syriens sont venus au Liban suite à la demande du gouvernement, et y sont restés, a dit Chirac, mais bientôt, ils devront s’en aller aussi”. “Certes, la démocratie doit revenir petit à petit. Puis, il y a eu des élections. Même si le pays est occupé et même si ces élections n’étaient pas totalement honnêtes. Mais, voyez-vous, quelques années plus tôt, tous les problèmes politiques étaient résolus au canon et par les attaques terroristes”. Par ailleurs, le président assure aux jeunes que la liberté d’expression sera sauvegardée au Liban. “LIBANAIS, REVENEZ DANS VOTRE PAYS” La politique de reconstruction a été suivie par un relèvement considérable des impôts. Pourtant, selon le président, il est important de reconstruire, même s’il faut engager des dettes. La solution, selon lui, pourrait être de persuader les Libanais expatriés riches d’investir dans leur pays. Le président a dit, aussi, qu’il fallait dénoncer les déchets chimiques venus d’Europe et qu’il laissera le soin aux autorités libanaises de traiter avec l’urbanisme sauvage qui frappe les sites archéologiques à Beyrouth. Entre autres, il a refusé de se mêler des questions de politique intérieure. notamment, celle du Dr Samir Geagea et a assuré que le général Aoun est libre de revenir quand il le veut au Liban. FRANCOPHONIE “Je n’ai pas d’hostilité envers l’anglais”, a déclaré le président Chirac. Mais je milite pour la francophonie et je demande à tous les chefs des grandes cultures de faire de même, afin d’empêcher leur effacement. J’ai déjà demandé au gouvernement libanais de faciliter tout ce qui est francophone, entre autres en ce qui concerne les médias francophones libanais qui, bientôt, pourraient disparaître et je souhaite que les choses s’améliorent. VIE UNIVERSITAIRE La collaboration entre les universités françaises et libanaises existe déjà. On a en France hélas! certains déficits mais on tente d’aider le Liban”. “Malgré ce que vous pensez, a dit Chirac, je suis sûr que ce que vous dites est transmis et que nombre de responsables vous écoutent. Rappelez-vous qu’il n’y a pas de démocratie en s’abstenant, ni d’avenir sans jeunesse”. Il s’agit d’avoir une vision des choses plus fondée. Le président Chirac a terminé en souhaitant la prospérité aux jeunes et en lançant un appel à tous les Libanais, notamment, aux chrétiens qui vont faire leur vie ailleurs, loin des racines leur demandant de revenir dans leur pays et d’avoir confiance en l’avenir. RANIA GHANEM |
“IL FAUT SAVOIR PRENDRE DES RISQUES”
“Vous avez invité les Libanais, notamment ceux de la diaspora, à investir au Liban. Or, il y a un sentiment général qu’aucun développement ne peut être acquis si une vraie paix n’est pas instaurée au Proche-Orient... “Il y a un moment dans la vie, affirme-t-il, où il faut savoir prendre des risques. Savoir faire des choix. Ma conviction est que la paix avec, naturellement, des satisfactions, des difficultés, des hauts et des bas, la paix progressera. Je crois qu’elle est inéluctable. Deuxièmement, le Liban est une terre qui a une grande Histoire et son avenir devant elle. A partir de là je dis aux Libanais qui ont donné la preuve de leur subtilité et de leur capacité à créer de la richesse: Faites confiance et investissez. Naturellement, il y a un risque, mais quel investissement est-il sans risqué? - Y a-t-il effectivement, une continuation du processus de paix au P.O.? “Il y aura sans aucun doute une continuation pour ce qui concerne le processus de paix. Si vous voulez savoir si la France continuera à apporter son soutien à toutes les actions susceptibles d’être positives pour la paix, je dis oui, sans aucun doute. “J’ai vu qu’il y avait eu quelques interrogations, voire quelques polémiques. Tout cela n’est pas de nature à m’influencer le moins du monde. J’apporterai tous mes soins à essayer de faire progresser la paix. C’est mon seul objectif. Je suis venu ici en homme de paix et je continuerai à l’être pour cette région que j’aime bien”.
Réunion élargie des deux délégations co-présidée par les présidents Chirac et Hraoui.
DE CHARETTE DE BKERKE AU PALAIS BUSTROS
Parallèlement à ses entretiens avec les responsables libanais, le président Chirac avait chargé son ministre des A.E., Hervé de Charette, de se rendre à Bkerké où il a eu un entretien de 75 minutes avec S.B. le patriarche Sfeir à qui il a transmis un message écrit du chef de l’Elysée. M. De Charette devait évoquer les liens d’amitié séculaires de la France avec le Liban et, surtout, avec la communauté maronite. “C’est ce message d’amitié, d’affection et de respect personnel que je suis venu apporter ici”, affirme-t-il en quittant Bkerké porteur d’une réponse du cardinal Sfeir au message de M. Chirac. Quant au patriarche, il a insisté lors de son entretien avec le chef du Quai d’Orsay sur les constantes qu’il proclame dans ses homélies dominicales. De Bkerké, le ministre français des A.E. se rend au palais Bustros pour un entretien avec son homologue libanais, Farès Bouez, sur les derniers développements relatifs au processus de paix, au comité consultatif, au groupe de surveillance et aussi, à l’accord de partenariat libano-européen dont certains points sont toujours en suspens. Il fut question, également, de l’audiovisuel et de la possibilité de créer une chaîne francophone. LES RELATIONS ECONOMIQUES De son côté, le ministre français du Commerce extérieur, Yves Galland, a fait le point de la coopération économique entre Beyrouth et Paris avec son homologue libanais, Yassine Jaber et s’est entretenu du même sujet avec les représentants des entreprises françaises implantées au Liban. Il serait important de relever le net développement qu’ont connu, cette année, les relations économiques entre la France et le Liban, surtout après la visite de Chirac en avril, marquées par un accroissement des échanges commerciaux et la participation active des investisseurs français au processus de reconstruction. Une soixantaine d’entreprises françaises sont implantées au Liban dont: E.D.F., France Telecom, Bouygues (chargé de l’aménagement d’une ligne de protection maritime du front de mer à Beyrouth), Alcatel, etc... Les contrats signés par ces sociétés avec les secteurs privé et public s’élèvent à 490 millions de dollars. Le projet confié à Bouygues par Solidere est estimé à 255 millions de USD.
UNE EXPOSITION GEANTE A L’IMA EN SEPTEMBRE 98
Sur le plan culturel, le ministre de la Culture et de l’Enseignement supérieur, Michel Eddé, et le président de l’Institut du Monde Arabe (IMA) à Paris, Camille Cabana, ont signé une convention relative à l’organisation d’une grande exposition à l’IMA sur la Culture et la Civilisation libanaises qui se tiendra de septembre 98 à mars 99. Cette exposition s’accompagnera de multiples activités culturelles et artistiques. “Cette exposition géante, précise M. Eddé, permettra de dévoiler à la face du monde, les richesses archéologiques du Liban et le rôle qu’il a joué tout au long de son Histoire”.
NELLY HELOU
Bilan positif de la visite de Jacques Chirac au Proche-Orient. Le chef de l’Etat français a posé les jalons d’un coparrainage de paix dans la région. La visite du président Chirac au Proche-Orient constitue, incontestablement, l’initiative diplomatique la plus élaborée de son septennat. Selon le ministre des Affaires étrangères, “M. Chirac a réussi une formidable percée au Proche-Orient”. En Syrie, première étape de son périple, il a réussi à convaincre le président Assad de la nécessité d’une présence européenne aux côtés des Américains, dans le processus de paix; a réglé les anciens contentieux économiques existant entre Damas et la France; a conclu des accords de partenariat bilatéraux, laissant conclure que “la nouvelle politique française au Proche-Orient passait par Damas”. Tout au long de son voyage, M. Chirac a eu le courage de dire tout haut la vérité telle qu’il la pensait. Dans la plus pure tradition gaulliste, il s’est opposé à la complicité de ceux qui veulent enterrer la paix. NON A LA “VOIE IMPERIALE” En parlant clairement de la nécessité d’un Etat palestinien, il a enclenché une autre dynamique dans la région et fait basculer l’idée d’une seule présence américaine dans cette partie du globe. Il a souligné que l’Europe doit refuser la loi impériale qui prévaut dans cette région et fait que l’axe américano-israélien impose quasiment ses volontés à des pays arabes impuissants. Le président Chirac a rappelé quelques vérités simples: - La sécurité d’Israël ne peut être garantie que par la paix, non par la force. - Les Palestiniens sont une nation, ils ont le droit à un Etat; cet Etat est le seul à pouvoir offrir à Israël les garanties nécessaires à sa sécurité”. Le président Chirac a eu le courage de parler fort le langage de la justice qui est, peut-être, aujourd’hui le meilleur moyen de conjurer la guerre. (De notre correspondante à Paris, Marie Bteiche) |