NOUVEL AMBASSADEUR D’ALLEMAGNE À BEYROUTH

PETER WITTING:

“LES LIBANAIS MANIFESTENT UNE GRANDE VITALITÉ ET UNE VOLONTÉ HORS PAIR DE RECONSTRUIRE LEUR PAYS”


M. Peter Witting à Jeanne Massaad: “Quelques dizaines de milliers de Libanais très estimés,
travaillent chez nous en tant que médecins, ingénieurs, dans la gastronomie et le commerce”.

Né le 11 août 1954, M. Peter Witting, nouvel ambassadeur d’Allemagne à Beyrouth, a fait des études d’Histoire, de sciences politiques et de droit à Fribourg, Canterbury et Oxford. Titulaire du titre de docteur obtenu en 1980, il est entré au ministère allemand des Affaires étrangères deux années plus tard et a occupé son premier poste à Madrid, en 1985 et 88, en tant qu’attaché culturel d’ambassade. De 1988 à 1991, il a fait partie de la représentation allemande auprès des Nations Unies à New York; puis, a été l’un des proches collaborateurs (de 1991 à 1997), de deux chefs de la diplomatie allemande: MM. Genscher et Kinkel, avant d’être nommé, le 5 mai 97, chef de la mission diplomatique de son pays au Liban.

LE LIBAN EST L’UN DES PAYS LES PLUS IMPORTANTS DU P.O.
A la question: “Que signifie le Liban pour l’Allemagne?”, M. Witting répond: “Pour l’Allemagne, le Liban fait partie des pays les plus importants du Proche-Orient. Les Allemands éprouvent du respect pour le Liban et ont beaucoup de sympathie pour les Libanais. Par notre propre expérience, nous savons très bien ce qu’il est exigé d’un peuple pour reconstruire un pays détruit. La grande vitalité des Libanais, la volonté de reconstruction, malgré tous les problèmes à régler et les grands progrès déjà achevés sont hors pair. “En Allemagne, il y a quelques dizaines de milliers de Libanais très estimés travaillant comme médecins, ingénieurs, dans la gastronomie ou le commerce. C’est, entre autre, grâce à leur don des langues qu’ils sont parfaitement intégrés dans la vie sociale. Ils forment un pont humain entre nos deux pays, pour ainsi dire. D’autre part, c’est une expérience particulièrement agréable que de voir combien de cordialité et d’intérêt on me témoigne en tant que représentant de l’Allemagne”.


L’ambassadeur d’Allemagne, son épouse Huberta
et leur fille Valeska (6 ans).

AIDE ALLEMANDE
- Votre pays contribue-t-il à la reconstruction du Liban et à la remise en état de nos infrastructures? “Oui, bien sûr. Cela se manifeste, particulièrement, sur le plan économique. A peu près un tiers de tous les projets de reconstruction réalisés par des entreprises étrangères ont été exécutés par des compagnies allemandes. Au-delà de cet engagement privé, l’Etat allemand soutient, financièrement, un bon nombre de projets: sur le plan de la formation professionnelle, dans le domaine de l’environnement et, aussi, sur une grande échelle des projets techniques et sociaux. Il ne faut pas oublier notre forte présence culturelle avec deux écoles allemandes: l’Institut Goethe à Beyrouth et à Tripoli, ainsi que l’“Orient-Institut”, centre de recherches pour le Proche-Orient de réputation internationale. “Mais cela ne veut pas dire que l’on a déjà atteint les limites de notre coopération. Sur le plan économique, par exemple, je vois surtout encore de bonnes possibilités au Liban pour les entreprises allemandes. En tant qu’ambassadeur, je veux tout mettre en œuvre pour que l’Allemagne continue à soutenir la reconstruction du Liban”.

DÉCHETS TOXIQUES ET VISITE PAPALE
- Y aurait-il un contentieux entre le Liban et l’Allemagne autre que celui des déchets plastiques qu’elle a commencé à rapatrier?
“Non, il n’y a point de contentieux entre nos deux pays. Je suis, quand même, très content que l’on soit arrivé à résoudre le problème des déchets plastiques. C’est, surtout, un succès obtenu par la coopération entre les autorités allemandes et libanaises. Il ne faut pas oublier que les déchets y ont été transportés par des individus criminels et non pas par les autorités allemandes. Entre-temps, les coupables sont tous entre les mains de la justice. “L’exportation illégale des déchets est un problème international que l’Allemagne prend très au sérieux. C’est un crime contre l’environnement qui ne touche pas, seulement, à la vie et à la santé des hommes mais, aussi aux ressources naturelles d’un pays. Il faut déployer des efforts internationaux pour combattre de tels crimes. La coopération avec les autorités libanaises et, particulièrement, avec le ministre de l’Environnement a été excellente. Nous allons profiter de ces expériences pour notre travail futur dans le domaine de la protection de l’environnement.”

- Comment évaluez-vous la visite de S.S. Jean-Paul II au Liban?
“La visite du Pape au Liban a été pour moi, personnellement, une semaine après mon arrivée, un grand événement. Pour le Liban, c’était certainement un moment historique. Son message touchant sur la cohabitation pacifique des religions et des communautés et du respect mutuel entre chrétiens et musulmans, a été exprimé, non seulement pour le Liban, mais pour le monde entier. La façon dont la jeunesse, surtout, a réagi, ne pouvait qu’impressionner. Je pense que cette visite du Pape couronnée de succès, a été importante pour l’image que le Liban reflète sur le monde. A l’étranger, la confiance dans ce pays a augmenté.”

L’U.E. SOUTIENT LE P.O.
L’Allemagne peut-elle jouer un rôle efficace dans la crise arabo-israélienne séparément ou dans le cadre de l’Union Européenne? L’action entreprise par l’émissaire européen, M. Moratinos, a-t-elle quelque chance d’aboutir?
«L’Europe et le Proche-Orient sont des voisins. Tout ce qui se passe dans cette région concerne directement l’Europe et l’Allemagne. Nous voulons que le processus de paix au Proche-Orient aboutisse. Nous avons, aussi, un intérêt direct quant à un Liban stable et indépendant, en accord avec les résolutions du Conseil de Sécurité de l’ONU. L’Allemagne s’investit pour un rôle politique actif de l’Europe au Proche-Orient. Pour cela, nous soulignons notre soutien à l’émissaire européen M. Moratinos. Le travail qu’il a réalisé dans le cadre de ses possibilités nous paraît tout à fait remarquable. “Néanmoins, il ne faut pas oublier que l’Union Européenne soutient le Proche-Orient, non seulement de manière politique mais, surtout, économique. Depuis des années, l’Union Européenne offre une aide économique massive à la région tout entière et, aussi, au Liban. Puis-je ajouter que la contribution de l’Allemagne s’élève à près d’un tiers quant aux prestations économiques de l’Union Européenne? D’ailleurs, nous voudrions que la conclusion de l’accord de partenariat entre l’Union Européenne et le Liban se réalise, votre pays pouvant servir de pont entre l’Europe et le Proche-Orient”.

CETTE RÉGION M’A TOUJOURS FASCINÉ
- Est-ce votre premier contact avec le monde arabe et le Proche-Orient? Dans l’affirmative, quelles sont vos premières impressions depuis votre arrivée à Beyrouth?
“Le Proche-Orient m’a toujours fasciné. Quand j’étais en poste à New York, la guerre du Golfe m’a beaucoup occupé en tant qu’expert au Conseil de Sécurité. Depuis, le Proche-Orient ne m’a plus quitté. Ayant été collaborateur personnel des ministres des Affaires étrangères, MM. Genscher et Kinkel, j’ai souvent eu l’occasion de voyager, d’y venir et de participer aux entretiens. “J’accompagnais M. Kinkel et une grande délégation économique lors d’une visite en juillet 1995 à Beyrouth. J’étais enthousiasmé à l’époque et fasciné par la volonté de reconstruction des Libanais et, bien sûr, par la beauté du pays. Je me disais à l’époque, que j’aimerais y travailler un jour. Mon vœu a été exaucé. Jusqu’à maintenant, je n’ai pas été déçu, au contraire. La jovialité avec laquelle ma famille et moi-même avons été reçus au Liban a été une expérience fabuleuse”.

L’OTAN ET L’EUROPE
- Croyez-vous que l’extension de l’Otan à l’Europe de l’Est posera quelques problèmes et de quelle nature?
“L’Otan et la Russie ont signé le 28 mai, à ce sujet, un “acte fondateur” à Paris. C’était, vraiment, une bonne solution d’un long procès. “L’OTAN a garanti la paix en Europe pendant plus de quarante ans; c’est une histoire à succès. Quelques pays d’Europe centrale et de l’Est veulent joindre l’OTAN. Nous sommes en faveur de son élargissement, selon les conditions individuelles des pays concernés. “La Russie doit participer à la sauvegarde de la sécurité en Europe dont la stabilité ne peut se réaliser sans elle”.

MON MEILLEUR SOUVENIR
- Quel est votre meilleur souvenir de diplomate?
“Dans mes années de proche collaboration avec MM. Genscher et Kinkel, j’ai voyagé dans le monde entier et vécu beaucoup de situations. Mais le plus touchant était de voir comment la réunification de l’Allemagne a eu lieu. Je n’oublierai jamais le moment où le ministre des Affaires étrangères, M. Genscher, après avoir eu des entrevues à New York, déclara du balcon de l’ambassade d’Allemagne à Prague en septembre 1989, que “tous les réfugiés de l’Allemagne de l’Est à l’époque pouvaient se rendre en Allemagne de l’Ouest”. “C’était une des pierres qui a mis l’affaire en branle: l’écroulement du mur; ensuite, la réunification des deux Etats allemands. La réunification allemande est un grand bonheur pour notre peuple. Mais nous devons, aussi, faire face à d’énormes problèmes, consentir des sacrifices matériels pour que l’Allemagne de l’Est se remette économiquement. Néanmoins, il est tout aussi important que les Allemands de l’Est et de l’Ouest se rapprochent les uns des autres”.

JEANNE MASSAAD

HUBERTA WITTING:
“JE ME SENS TRÈS À L’AISE AU LIBAN”

Ancien porte-parole du président du parlement allemand, Mme Huberta Witting, épouse de l’ambassadeur d’Allemagne, est diplô-mée en Histoire, Sciences politiques et philologie française. Ancienne correspondante politique à Bonn de plusieurs journaux, elle a publié un livre sur la résistance, intitulé: “Démocratie: aujourd’hui la résistance”. “Connaissant Beyrouth par une amie d’enfance et une marraine libanaise, confie-t-elle, je me suis sentie très à l’aise dès le premier jour de mon arrivée au Liban, d’autant que nous y avons été accueillis, mon mari, moi-même et notre fille Valeska (6 ans) avec chaleur et hos-pitalité”.


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