LE DIALOGUE CHRISTIANO-SYRIEN ET LA NOMENKLATURA LIBANAISE... |
“De
quoi pouvons-nous parler avec le patriarcat maronite?”, a demandé
M. Abdel Halim Khaddam, vice-président syrien lors de sa visite,
dimanche dernier, au palais de Baabda. Question pour le moins étrange
de la part de celui qui est en charge du dossier libanais depuis belle
lurette! “Nous ne traitons à Damas que d’Etat à Etat”, a
ajouté M. Khaddam qui avait, naturellement, d’autres tâches
à accomplir chez nous, notamment celle de raccommoder les pôles
du pouvoir...
Dans un de ses discours prononcés en plein drame libanais, le président Hafez Assad a affirmé: “La Syrie reste à égale distance de tous les Libanais, toutes confessions confondues”. Cela exige, normalement, l’engagement d’un dialogue direct avec toutes les parties libanaises et le souci permanent de Damas de traiter avec elles sur le même pied d’égalité. Ceci ne s’est pas encore produit, plusieurs années après l’accord de Taëf, censé ressouder les différentes fractions nationales. Comment? par la formation d’un Cabinet d’union ou de salut public, d’où ne seraient pas exclus certains groupes déterminés, on sait lesquels. Au cours de sa récente visite à Beyrouth, M. Abdel-Halim Khaddam, vice-président syrien, en charge du dossier libanais, a déclaré en réponse à une question relative au dialogue entre Bkerké et Damas: “En tant qu’Etat, la Syrie tient à traiter avec l’Etat libanais et non avec des instances civiles ou religieuses”. Et d’ajouter: “Que pourrions-nous discuter avec le patriarcat maronite?” En voilà une question qui étonne de la part d’un responsable syrien, bien informé de la manière dont le pouvoir est exercé dans nos murs! Et des procédés utilisés par les gouvernants en place pour exclure une large frange de notre peuple... En bouchant toutes les voies susceptibles de combler la brèche séparant le sommet de la base et la fracture sociale. Cette situation nous ramène à l’esprit ce qu’un ancien ministre français, Alain Madelin a dit, au lendemain de la victoire de la gauche, pour justifier la cuisante déconfiture de la droite: “...La nomenklatura, on peut la comprendre, n’aime pas les idées qui remettent en cause son autorité et ses privilèges... Elle rêve d’une perestroïka, c’est-à-dire de demi-mesures et de demi-réformes qui infléchissent le système tout en préservant ses privilèges”. Si donc cette nomenklatura refuse de prêter l’oreille aux détracteurs du pouvoir et les accuse d’entreprendre une action en vue de la déloger, sans proposer un programme de rechange... qui est habilité à dialoguer avec la partie opposée au sérail? Si la Syrie s’abstient de favoriser un tel dialogue - tout en prétendant vouloir rester à égale distance de toutes les parties libanaises - elle renie la prise de position du président Assad et prend position en faveur d’une fraction aux dépens de l’autre. Cela dit et pour revenir au dialogue entre Damas et Bkerké il faut bien préciser que le patriarcat maronite ne l’a pas cherché, le cardinal Sfeir ne cessant de répéter: “Nos portes sont ouvertes à tout le monde”. Et tout dernièrement il a ajouté: “Surtout au Dr Bachar Assad”, quand on lui a fait état d’une rumeur selon laquelle le fils et dauphin du chef de l’Etat syrien, envisagerait de lui rendre visite... Ceci n’empêche pas Sa Béatitude de dénoncer les erreurs et de soutenir que “toute violation des droits de l’homme porte atteinte à l’Etat à qui incombe le devoir de les défendre”. |