Editorial


Par MELHEM KARAM 

 

I - NETANYAHU BOMBARDE SAIDA POUR FAIRE ÉCHOUER LA MISSION D’ALBRIGHT
II - HIROSHIMA, NAGASAKI... ET LA MÉMOIRE DE L’HISTOIRE

Jécris cet article et le bruit des bombes assourdit nos oreilles. Le Sud s’expose aux massacres les plus hideux, per-pétrés par des assassins professionnels et des hors-la-loi, rassemblés par le dépit, le désir d’occuper des territoires, de commettre des actes de terrorisme et de destructions. Au point qu’ils ont pilonné Saïda, pour la première fois, causant la mort de six personnes et en blessant une quarantaine d’autres. Ceci a porté Dennis Ross à dire: “Les médiateurs doivent entreprendre une grande action, car le processus de paix se heurte à des obstacles et il devient difficile de le sortir de l’impasse”. Les rencontres du coordonnateur US avec Netanyahu confirment en permanence la régression de ce processus. Au lieu que les réunions successives poussent vers un pas en avant, le résultat se traduit par le défaitisme, la fuite et la morosité de la part du diplomate connu pour sa souplesse. Cela a amené Ross à considérer que les efforts déployés en vue de sauver la paix en sont à leur début, plutôt dans un stade timide et modeste. Telle est l’impression qu’il a emportée avec lui. Mais ce qui l’a un peu consolé, c’est d’avoir rétabli le mécanisme du dialogue entre les Palestiniens et les Israéliens, autour d’une possible coopération au plan sécuritaire. Quand il est question de sécurité, cela signifie clairement qu’il s’agit d’un prélude à des sujets plus importants et plus vastes. Ross est retourné avec un pseudo-sourire de satisfaction sur les lèvres, résultant d’une initiative prise par Netanyahu, à savoir: la levée du blocus imposé à Ramallah et à Hébron. Ainsi, Bethléem et les localités entourant Jérusalem sont considérés comme des zones militaires inaccessibles où l’entrée est interdite. Cette sanction frappe, durement, l’économie palestinienne, prive l’Autorité palestinienne de quarante millions de dollars et réduit au chômage des dizaines de milliers d’ouvriers palestiniens. Les doigts de l’accusation se tournent toujours vers Netanyahu, parce qu’il est le saboteur, le vengeur et le sanctionneur neutralisant tous les efforts des Etats-Unis qui tentent - du moins ils le prétendent - de raviver le processus de paix. Israël poursuit ainsi la démolition des maisons et des édifices au nord de Jérusalem. Netanyahu a dit, en des termes ne donnant lieu à aucune interprétation, que la levée des sanctions sera la conséquence de la pression exercée par Yasser Arafat sur les intégristes palestiniens. La gratitude exprimée au président palestinien ne leurre personne; il s’agit uniquement d’une action médiatique trompeuse. Saëb Erakat estime qu’en prolongeant les sanctions, Netanyahu accentue la haine et la confrontation entre les Palestiniens et Israël. C’est un prétexte auquel il a recours afin de bloquer le processus de paix que Netanyahu fait avorter. Car toutes les mesures prises par le Premier ministre israélien ont un seul but: provoquer l’échec de la mission de Madeleine Albright; aussi mobilise-t-il à cette fin, toutes ses armes. Ce qui a amené les Etats-Unis à dire, par la bouche d’un de ses hauts responsables, que Washington observe de près l’action de Yasser Arafat sur tous les fronts: l’arrestation des fondamen-talistes islamiques, la saisie des armes que certains portent d’une manière illégale dans les zones soumises au régime d’autonomie. Le responsable américain a jouté: Madeleine Albright veut rencontrer Yasser Arafat et il lui importe de le voir adopter une position sérieuse envers les fondamentalistes hostiles au processus de paix, avant de visiter la région. Serait-ce une transaction? Du chantage? Des conditions préalables? Toute chose est possible et tolérée sur le marché de la politique, devenue avec Netanyahu un marché où se vendent les dignités et les valeurs politiques à un prix dérisoire.

II - Cette semaine nous rappelle deux massacres mondiaux qui resteront une honte pour l’Histoire: ce sont Hiroshima, Nakaza-ki et les deux bombes atomiques ayant causé une extermination collective. Takachi Hiroaka, maire de Hiroshima, a harangué en ces termes près de quinze mille personnes qui manifestaient face à l’île de Longve: “Je souhaite que nos appels et les vôtres, de même que les souhaits de millions d’êtres humains, deviennent une vague puissante de paix, capable de mobiliser toutes les capacités et les énergies, en vue de l’édification d’un monde apte à vivre en paix sans armes nucléaires”. Par son discours, le maire faisait allusion à l’impact de l’opinion publique, dont la mobilisation efficace a provoqué une marche contre l’armement atomique et qui s’est amplifiée d’une manière frappante au cours des dernières années. Cette insistance dans la demande relative à la suppression des armes atomiques, se concrétise avec une force permanente et une multiplicité de mouvements, d’organisations, de climats et d’en-gagements personnels proclamant la nécessité de sauvegarder le monde des fléaux de toutes sortes, de la pollution et de l’assassinat collectif. Depuis octobre 1993, le Vatican par la voix de Mgr Renato Martini a dénoncé l’utilisation des armes de destruction massive de l’être humain. En 1996, la Cour internationale de Justice de La Haye, a condamné tout l’armement atomique, considérant comme un acte inhumain et illégal l’emploi des armes nucléaires. De plus, elle insiste sur la nécessité de supprimer l’armement atomique. Au cours de la même année, le comité de Canberra dont faisait partie le commandant Cousteau, que nous avons perdu dernièrement, est parvenu à une formule selon laquelle seule la suppression des armes nucléaires peut prévenir leur expansion. En décembre 1996, soixante-trois généraux et amiraux ont lancé un appel mondial en vue de la suppression des armes atomiques, les considérant comme dangereuses et inefficaces, militairement; puis, très coûteuses, économiquement; en plus du fait qu’elles sont amorales. La convention interdisant la prolifération des armes nucléaires exige des Etats signataires d’œuvrer en vue de leur suppression. D’autant que l’article six de son règlement stipule que “toutes les parties signataires sont tenues d’engager des pourparlers, à l’effet de parvenir au moyen idéal pour arrêter la course à l’armement nucléaire dans un proche avenir. Et ce, partant d’une bonne intention et d’une conviction profonde de leur part”. Le fait pour les personnes réunies, en cette circonstance, d’être parvenues à l’appellation “Hiroshima ou la terre du bonheur”, constitue une prise de position efficace. L’édification de la paix et de la sécurité permanentes pour nos peuples et pour tout l’univers, signifie l’édification de la terre du bonheur total. Ceux qui se sont rencontrés à cette occasion, sont appelés à poursuivre leur mou-vement et à s’en tenir à leurs engagements internationaux, aux fins d’arrêter ces massacres, les programmes de modernisation des “arsenaux” nucléaires et le programme d’accroissement des armes atomiques. Une telle tendance exige une option politique et financière dont l’opinion publique contribuerait à la concrétisation. Une majorité parlementaire devrait voter contre l’armement, en vue de réaliser la “terre du bonheur” et de transformer les budgets astronomiques, consacrés aux tueries et aux destruc-tions, en conventions visant à répondre aux besoins sociaux des citoyens et à leur bien-être. De même, on affecterait à des fins plus bénéfiques les sommes colossales que les Etats utilisent pour s’engager davantage dans une course dangereuse, coûteuse, inutile et, surtout, illégale, celle de l’armement nucléaire.

Photo Melhem Karam


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