Voici un homme politique diffé-rent des autres, se distinguant autant par son courage et son franc parler, que par ses prises de position inébranlables, basées sur des principes et des constantes dont il ne dévie pas, la plus marquante étant sa fidélité aux amis. Ses qualités morales et humaines l’ont porté au summum de sa profes-sion initiale, l’avocature, comme des charges qu’il a assumées avec compétence et un zèle hors pair, en tant que député et ministre. Sur le plan de la culture, on peut le classer parmi les éléments les plus représentatifs de l’intel-ligentsia libanaise, étant donné qu’il s’est affirmé en tant que tribun, doublé d’un homme de lettres et d’un poète occupant la tête de liste parmi ses pairs.

ANCIEN MINISTRE ET DÉPUTÉ DE JEZZINE
EDMOND RIZK:“NOUS NOUS ACHEMINONS VERS L’INSTAURATION D’UN RÉGIME POLICIER AU LIBAN”

SITUATION DÉLICATE ET INQUIÉTANTE
Notre première question a porté, tout naturellement, sur Jezzine, sa ville natale et sa circonscription qu’il a représentée si dignement à la Chambre des députés. “La situation y est très délicate, chargée de tension et d’angoisse quant à l’avenir. Notre région qui est fermement attachée à son identité libanaise, sent qu’elle est abandonnée à son sort; l’Etat l’ignore et ne lui offre pas ce qu’elle est en droit d’attendre de lui.”

- L’Etat voudrait, sans doute, répondre à vos souhaits, mais le fait accompli qui prévaut dans les régions situées le long du “cordon frontalier l’en empêche...
“Jezzine ne se trouve pas à l’intérieur de ce cordon et, partant, la localité n’est pas concernée par la résolution 425. En dépit de cela, l’Etat refuse de la récupérer ou de la réintégrer.”

- Pourquoi?
“Là est la question ou plutôt le grand doute inquiétant. Il s’agit d’une situation anormale, Comment les parents peuvent-ils s’abstenir de prendre en charge leur fils kidnappé! La situation de l’Etat à Beyrouth est responsable de ce qui se passe à Jezzine.”

- N’y aurait-il pas une raison l’empêchant d’agir dans le sens que vous souhaitez?
“A vrai dire, à ce cas s’appliquent les dispositions du Code pénal concernant la renonciation d’un citoyen à sa paternité, en ce sens qu’il s’abstient de s’occuper de son fils.”

TOUS LES SERVICES ÉTATIQUES Y FONT ACTE DE PRÉSENCE
- Jezzine est placée sous mainmise de qui l’on sait et ne fait pas l’objet d’un kidnapping!
“Quand il a été donné à l’Etat de récupérer sa capitale, Saïda, le Chouf, ainsi que d’autres régions au Sud et dans la Békaa ouest, il n’a pas manifesté sa disposition à étendre sa souveraineté à Jezzine. Aussi, cette région est-elle restée sous le contrôle des forces du fait accompli, actuellement représentées par l’Armée du Liban Sud. “Pourtant, il n’y existe pas de présence israélienne directe. Combien de fois avons-nous demandé à l’Etat de prendre en charge la sécurité de la région, d’autant qu’une brigade de l’armée libanaise avait commencé à s’y déployer en 1976, relevant du commandement militaire de Yarzé. “De même, plus de cent éléments des Forces de sécurité intérieure y stationnent. La Sûreté générale y tient un bureau, de même que tous les services étatiques qui exercent leurs missions sans aucun accroc. “L’Etat doit trouver une solution logique et digne à Jezzine, dont la situation ne peut être comparée à celle qui prévaut le long du cordon frontalier. Malheureusement, l’Etat insiste à nous rattacher aux zones occupées et nous traite sur cette base. Il ajourne l’étude de ce problème et rattache Jezzine au Sud occupé et le Sud, au conflit régional. “Je voudrais, ici, ouvrir une parenthèse:Notre insistance à demander le retour de l’Etat à Jezzine, n’affecte nullement l’unité des volets libanais et syrien dans les négociations, lesquelles se basent sur les résolutions 425 et 242. Or, le Liban Sud n’est pas concerné par ces résolutions, car aucune portion de son territoire n’est occupée depuis 1967 ou 1973.”

JEZZINE NON CONCERNÉE PAR LA 425
- Est-il possible que l’Etat libanais persiste à vouloir lier Jezzine à la résolution 425?
“Ceci aurait paru illogique, s’il s’était comporté différemment. Il refuse de traiter Jezzine d’une manière convenant à sa situation, en ce sens que l’armée libanaise, la gendarmerie, la Sûreté générale et toutes les institutions étatiques y sont présentes. Les effectifs de l’armée dépassent en nombre ceux de l’ALS. Et malgré cela, il tient à la rattacher à la résolution 425 et au cordon occupé.”

- Qu’en est-il des rumeurs laissant prévoir un retrait israélien de Jezzine?
“Je répète qu’il n’y a pas à Jezzine de forces israéliennes. Puis, la plupart des effectifs de l’armée du Liban-Sud sont natifs de la région et ne sont liés d’aucune façon à Israël. En fait, ils défendent leur terre, leur dignité et leur présence. “Quand le retrait israélien s’est produit en 1985 de Awali à l’est de Saïda, il a été suivi d’une offensive intégriste et des forces mixtes. Cela a provoqué l’exode des habitants de l’est de Saïda et d’Iklim el-Kharroub. Bien des maisons ont été détruites dans les villages, faisant de nombreuses victimes. Les fils de la région de Jezzine ont résisté à Kfarfalous, contrairement à ce que prévoyait le plan israélien qui projetait de restreindre l’occupation au cordon frontalier. Les habitants de Jezzine ont défendu et protégé la région, non les Israéliens. C’est pourquoi, on parle ici du fait accompli.”

L’ALS, UN FAIT ACCOMPLI
- Pourtant, l’ALS est liée à l’occupation israélienne et ses effectifs touchent leur solde de l’Etat hébreu!
“Cela est vrai, mais il s’agit d’un fait accompli découlant, au juste, du fait pour la brigade de l’armée libanaise, dépêchée par l’Etat ou le gouvernement libanais sous le commandement du colonel Saad Haddad, d’avoir été encerclée et neutralisée par les “forces mixtes”, celles des Palestiniens et des partis. L’Etat l’a abandonnée et cette brigade a constitué le noyau de ce qu’on appelle, aujourd’hui, l’Armée du Liban-Sud.”

- Qu’est-ce qui l’a placée à la merci d’Israël?
“C’est la conséquence de son encerclement par les “forces mixtes” et de son abandon par l’Etat. Sa mission initialement officielle, devait être assurée par décision de l’Etat.”

- Ce que vous dites est-il pour l’Histoire ou préconisez-vous une solution déterminée?
“La solution réside dans la non falsification de l’Histoire, en cessant de faire assumer à une partie des Libanais des responsabilités allant à l’encontre de la vérité.”

L’EXODE EST LA GRANDE OBSESSION
- Les fils de Jezzine courraient-ils quelque risque si “l’armée de Lahad” était dissoute?
“Le danger pour Jezzine résulte, actuellement, de la peur et de l’angoisse engendrées par la situation qui prévaut sur le terrain, entraînant un état d’étouffement au double plan social et économique. Ceci a provoqué un exode sur une large échelle, à tel point qu’il ne reste à Jezzine que 7 pour cent de sa population évaluée à 150.000 âmes. “Le premier danger réside dans le fait de vider la région de ses habitants, lesquels craignent de connaître le même triste sort que ceux de l’est de Saïda et d’Iklim el-Kharroub. L’exode, voilà la grande obsession. “C’est pourquoi, nous disons à la résistance que les objectifs déclarés de ses opérations, ne peuvent égaler les préjudices qu’elles causent. Ces opérations aboutissant, pratiquement, à l’ébranlement de la confiance et, partant, à l’exode. Du même coup, elles servent les desseins d’Israël du point de vue de l’implantation ou de la partition.”

- Cela est-il possible?
“Ce qui se passe, à présent, va dans ce sens. Je ne peux imaginer une région comptant 150.000 habitants, vidée à tel point de sa population dont il ne reste que quelques milliers. “Je veux mettre l’accent, ici, sur le cachet libanais de la région de Jezzine: elle n’est ni chrétienne, ni musulmane, bien qu’elle compte une majorité chrétienne déterminée. Cependant, elle est essentiellement libanaise où le chrétien et le musulman ont toujours vécu en paix et en sécurité. On ne relève dans ses registres aucun fait répréhensible: ni affrontements sanglants, ni vendetta, ni esprit de vengeance... “La dislocation de Jezzine, signifierait une destruction de la formule libanaise, de la vie en commun et du modèle unique en son genre au Sud”.

- Le Vatican se préoccupe, dit-on, du sort de Jezzine...
“Le Saint-Siège a déjà manifesté de l’intérêt pour cette région, non en tant que région chrétienne uniquement, mais parce qu’elle consacre la vie en commun. L’émissaire papal s’est préoccupé des problèmes locaux dans tous les villages du caza abstraction faite de la confession de leurs habitants”.

- L’initiative papale sera-t-elle reprise une fois de plus?
“Je l’espère et, ce par la nomination d’un remplaçant au père Bodigard, décédé, d’autant que le lieu de sa résidence existe toujours; c’est la maison de ma sœur”.

QUID DE KFARFALOUS?
- Que se passe-t-il sur la voie de passage de Kfarfalous?
“En dépit de tout, je suis optimiste quant à sa réouverture et, alors, “Jezzine la triste”, redeviendra la reine des centres de villégiature du Liban-Sud”.

- Vous avez été l’un des artisans de l’accord de Taëf; puis, vous avez été exclu de la scène politique; pourquoi?
“J’étais l’un des dix-sept membres du comité de rédaction dudit accord, ayant œuvré à l’effet de parvenir à une entente, au moment où celle-ci était interdite, la marge de mouvement étant, alors, limitée. “J’ai proposé d’inclure la Déclaration universelle des droits de l’homme dans le préambule du document d’entente, devenu par la suite la nouvelle Constitution et, aussi, d’adopter les critères de la compétence et de la spécialisation dans les fonctions publiques. “La tension avait atteint son paroxysme, suite à l’amenuisement des prérogatives du président de la République. Nous croyions pouvoir compenser ce fait à travers l’esprit d’entente et l’équilibre national. Nous nous sommes trompés, car il s’agit moins d’une question de textes, que de la capacité de les appliquer et de la qualité des hommes à qui est confié le soin de les mettre en application”.

POURQUOI J’AI DÉMISSIONNÉ?
- Dans le premier Cabinet constitué après Taëf, vous déteniez un portefeuille ministériel; qu’avez-vous fait au plan politique et national?
“J’ai détenu dans cette équipe ministérielle qui s’est maintenue de novembre 89 à décembre 90 les portefeuilles de la Justice et de l’Information, de même que celui des Télécommunications à titre intérimaire. Je me suis astreint au document de Taëf, dans son esprit et sa lettre, ainsi qu’il est apparu dans le mouvement judiciaire que j’ai élaboré. “J’ai considéré que nous avions la responsabilité de réaliser l’entente et d’édifier l’Etat de la loi et des institutions. Malheureusement, j’ai constaté que les projets de l’Etat étaient différents. Aussi, me suis-je éloigné du pouvoir et personne ne m’en a exclu. “Je me suis retrouvé dans la position de l’homme refusant tout ce qui allait à l’encontre de sa conviction. Je me rappelle qu’une fois j’ai émis le désir en Conseil des ministres de démissionner, en signe de protestation contre les ingérences dans les nominations de magistrats et le président Nabih Berri qui était, à l’époque, ministre des Ressources hydrauliques et électriques m’a dit: Votre démission provoquera le torpillage, non seulement du gouvernement, mais du régime”.

IL NE RESTE PLUS RIEN DE TAËF
- Vous vous êtes exclu, mais rien n’a changé: le “rouleau compresseur” poursuit sa marche et on a reconduit le mandat présidentiel!
“J’ai été conséquent avec moi-même, en agissant de façon à me conformer à l’esprit de Taëf, sans souscrire aux agissements ayant constitué une trahison à cet esprit. Je ne voudrais pas énumérer les abus et déviations accomplis par ceux qui étaient à Taëf et par ceux qui en tirent profit. Je me limite à affirmer que je n’ai permis à personne d’interférer dans les affaires de la Justice et le mouvement judiciaire”.

- L’accord de Taëf “marche-t-il”?
“Rien ne marche et cet accord est tombé de la même manière que l’accord du Caire (de 69). J’admets que le “rouleau compresseur” avance, c’est pourquoi je crois qu’il y a une nécessité urgente de mettre sur pied une véritable opposition disposant d’un programme clair, destiné à remettre le système démocratique sur les rails. Car nous vivons en dehors d’un tel système en ce moment d’une manière générale. “Les comportements au niveau des organismes de l’Etat confirment que nous nous acheminons vers l’instauration d’un régime policier au Liban, preuve en est l’interdiction formelle des rassemblements par décision du Conseil des ministres. On dirait que la tendance est en faveur du bâillonnement des libertés; on veut vider le Liban de sa principale raison d’être, à commencer par la liberté politique. “C’est ce qui se produit, en fait, par rapport à l’information, à l’économie, au mouvement syndical jusqu’à atteindre les libertés individuelles et publiques. “Ceci exige une opposition lucide non confessionnelle, ni sectaire, ayant pour tâche essentielle d’arrêter l’évolution du pays vers le gouffre”.

OCCUPATION EXTÉRIEURE ET RÉPRESSION INTERNE
- Pourquoi ne réclamez-vous pas la publication des procès-verbaux de Taëf?
“Je crois que cela n’est plus utile, car le problème a dépassé Taëf et ceux qui y ont participé. Nous nous trouvons dans une étape n’ayant aucun lien avec Taëf, sauf en parole. Nous sommes, en réalité, dans un état excluant l’entente, la compréhension et l’équilibre”.

- Comment qualifiez-vous cette situation?
“Nous nous trouvons dans un état d’occupation extérieure pratiquée par Israël au Sud et dans la Békaa ouest et dans un état de répression intérieure exercé par les gens du pouvoir avec une couverture non libanaise”.

- On prête aux responsables l’intention d’élaborer une nouvelle loi électorale... Quelles sont vos suggestions à ce sujet?
“La proposition la plus dangereuse est celle émanant du chef du gouvernement qui préconise la transformation du Liban en circonscription unique. Cela se traduirait par le bâillonnement de la liberté et la rupture du lien entre le peuple et le pouvoir, le rapport entre l’électeur et le député étant la base du système parlementaire et démocratique; quand ce lien se perd ou est compromis, le système se métamorphose en celui des républiques bananières. “J’ai payé cher le prix de ma détermination à ne pas transgresser les principes démocratiques et à ne pas aller à l’encontre de la vérité. Je n’ai jamais transigé sur ces principes; aussi, suis-je redevable à mon histoire personnelle et à une ligne de lutte. J’exprime ma grande inquiétude et j’invite les Libanais à repousser les tentatives anesthésiantes de falsification et de camouflage. “Le Libanais sait parfaitement à qui il a à faire; il connaît les institutions et les hommes chargés de les gérer, de même que les discours que ces derniers parviennent à peine à lire, parce que d’autres en ont écrit les textes”.

ÉCHEC DE LA DÉMOCRATIE AU LIBAN
- Vous vous prononcez en faveur d’une opposition capable de rectifier le cours de la vie politique; ne voyez-vous pas que l’opposition actuelle s’expose à la liquidation? Et que pensez-vous, en tant que juriste, de la poursuite engagée contre Najah Wakim, député de Beyrouth?
“L’affaire Wakim témoigne de l’échec du système démocratique au Liban, comme le cas de la CGTL témoigne de la chute des libertés syndicales et la loi sur l’audiovisuel sonne le glas de la liberté d’expression. “De même, les mesures gouvernementales interdisant ou restreignant l’importation des produits de la terre ou instituant des surtaxes sur les voitures importées, prouvent le torpillage du système d’égalité, alors que les poursuites judiciaires engagées contre les parlementaires, les syndicalistes et les représentants des médias indiquent que la Justice est tombée. “Nous vivons donc dans un état d’effondrement généralisé. D’aucuns appellent encore au rétablissement de l’équilibre, alors que d’autres pèsent de tout leur poids pour faire perdre à la patrie cet équilibre.

C’EST LA BATAILLE DES LIBERTÉS ET NON DE NAJAH WAKIM
- Najah Wakim l’emportera-t-il dans cette nouvelle épreuve de force ou serait-il mis k.o. cette fois?
“C’est une erreur de considérer cette bataille comme étant celle de Najah Wakim; c’est la bataille des libertés. Je suis, quant à moi, avec Najah, parce que je suis avec la liberté. La Justice en elle-même est un pouvoir et non un outil aux mains de l’autorité; elle est chargée d’assurer la justice parmi les citoyens. Aussi, doit-elle confirmer cette vérité, son rôle ne pouvant et ne devant pas être défini par la politique et les politiciens. “Comment peut-on poursuivre un député pour un crime qu’il n’a pas commis? Puis, comment s’adresse-t-on à l’Ordre des avocats pour obtenir l’autorisation de le poursuivre et non à la Chambre des députés dont il est membre et jouit de son immunité?”.

- Qu’auriez-vous à dire des réformes constitutionnelles préconisées par le chef de l’Etat?
“Après le morcellement et la chute du document d’entente nationale, il est devenu naturel de reconsidérer les prérogatives présidentielles, afin de rétablir l’équilibre dans notre système politique. En tant que membre du comité de rédaction de l’accord de Taëf, j’avais proposé que notre président de la République jouisse des mêmes prérogatives que celles conférées à tous les chefs d’Etat dans le monde, telles que définies par le régime parlementaire et démocratique. Mais la question est de savoir, maintenant, si nous voulons un président de la République au sommet de la pyramide étatique ou pas”?

COMPROMIS ET COMPROMISSIONS
- Si le chef de l’Etat avait été habilité à nommer les membres du Conseil constitutionnel, ne croyez-vous pas qu’une telle instance juridique se serait mieux acquittée de sa mission?
“Toutes les nominations ou presque ont fait l’objet de compromis. Malheureusement, l’accord de Taëf a été mis au rancart et ceci constitue un poids, autant pour le Liban et la Syrie qui y a été impliquée. Car on attribue à Damas la responsabilité des décisions qui ont été prises depuis Taëf. “Or, la Syrie a intérêt à réaliser l’entente interlibanaise véritable et à instaurer un pouvoir équilibré au Liban. Toutes les parties libanaises sont acquises à l’idée qu’il faut établir les meilleures relations avec Damas, la capitale syrienne n’ayant pas intérêt à soutenir la fraction la moins populaire et la moins représentative sous notre ciel”.

- Mme Nayla Mouawad dit que son mari, feu le président René Mouawad a payé de sa vie pour l’entente. Partagez-vous son point de vue?
“J’affirme que le président Mouawad était un homme acquis à l’entente; il a été le martyr de l’unité nationale et de la concorde, toutes deux n’ayant pas été réalisées”.

LA LOI SUR L’AMNISTIE GÉNÉRALE, BÂTARDE...
- Que suggérez-vous sur ce plan?
“Il faut généraliser l’amnistie et fermer définitivement la page de la guerre, car la loi sur l’amnistie qui a été promulguée n’est pas constitutionnelle; c’est une loi bâtarde, en ce sens qu’elle blanchit les auteurs des crimes politiques et en exempte ceux dont des leaders politiques sont responsables”.

- Quelle sorte de circonscription a votre préférence?
“La petite circonscription. Le fait pour l’accord de Taëf d’avoir opté pour le district (mohafazat), figure parmi les anomalies ayant résulté de la mauvaise application de l’accord de même nom; autrement dit, par l’élaboration d’une loi électorale retenant le mohafazat comme circonscription électorale. “Pourtant à Taëf, nous avons opté pour le caza, après un nouveau découpage administratif. J’ai refusé d’être député sur base d’une loi tronquée et les gens sont opprimés, car ils ont été privés du droit de choisir leurs représentants”.

- Vous êtes en faveur d’une amnistie générale et le président de la République n’est pas éloigné de cette idée...
“Si le président ne s’exécutait pas, je crois que sa conscience en souffrirait pour n’avoir pas traité les Libanais sur le même pied d’égalité. Mais je ne pense pas qu’il irait jusqu’au bout de sa pensée et de son désir et dirait, par la suite, qu’il a essayé mais n’a pu mettre son idée en application”.

POUR UN LIBAN UNIQUE ET UNIFIÉ
- Au cours d’une conférence de presse, vous avez évoqué le cas du Dr Samir Geagea. Que prévoyez-vous pour l’ancien chef des Forces libanaises dissoutes?
“Je m’attends à l’alternative suivante: un changement au Liban permettant de réaliser l’entente véritable englobant le Dr Geagea et le général Michel Aoun, à l’instar des chefs des milices et tous ceux qui ont été récompensés en accédant au pouvoir; ou bien il continuera à être un témoignage vivant du refus de l’autorité à lui rendre justice, alors que d’autres ont avoué les pires forfaits et n’ont pas comparu devant les tribunaux. Samir Geagea restera l’un des symboles de l’injustice, du refus populaire et des comptes que l’Histoire réclamera un jour au Liban à ceux qui y assument les responsabilités”. Par ailleurs, M. Rizk s’excuse de ne pas évoquer sa longue histoire avec les Kataëb se contentant de revenir à une ancienne suggestion, en vertu de laquelle il appelle à un nouveau congrès constitutif avec la participation de toutes les parties actuellement en litige, à l’effet de raviver l’esprit de ce parti et de le replacer sur la ligne définie par son fondateur. “Car dit-il, je suis partisan du Liban unique et unifié”.

LE GOUVERNEMENT DÉFIE LES GENS...
- Comment jugez-vous la gestion gouvernementale de la chose publique?
“L’arrogance et le complexe de supériorité qui caractérisent la gestion du Cabinet constituent un défi aux sentiments des citoyens. De même, le fait d’accaparer la décision et de ne pas s’en tenir au principe de la consultation au niveau du pouvoir, accentue la brèche entre le gouvernant et les administrés. Ceci s’applique au pouvoir d’une manière générale, que ce soit au sein du Conseil des ministres ou à la Chambre des députés où l’on n’entend toujours qu’une voix. “Quant à la formation parlementaire opposante, son action et son efficacité s’exercent dans une marge étroite; elle ne touche pas suffisamment le public. En d’autres termes, à l’exception du “phénomène Najah Wakim et Zaher el-Khatib”, l’opposition paraît plus proche de la bourgeoisie”.

(Propos recueillis par JOSEPH MELKANE)


Home
Home