POUR OU CONTRE LES PRISES DE POSITION DE BKERKÉ... Le chrétien libanais n’a-t-il plus le droit d’exprimer son opinion sur les problèmes nationaux, engageant l’avenir de la patrie? On serait enclin à répondre à cette question par l’affirmative, en prenant connaissance des protestations émises par certains dignitaires religieux et politiciens musulmans. Ces derniers s’élèvent contre les déclarations du patriarche maronite, pour avoir soutenu que la décision nationale est hypothéquée par la présence de l’armée syrienne et, aussi, pour avoir dénoncé la passivité du Pouvoir à l’égard de Jezzine. Après avoir été marginalisée par une mauvaise application de l’accord de Taëf - dont les artisans réclament la révision - la fraction chrétienne de notre peuple paraît n’avoir plus la latitude, ni le droit d’exprimer son opinion, à propos de questions vitales engageant l’avenir de la patrie. Ainsi, pour avoir déclaré que “la liberté de décision du Liban est hypothéquée par la présence de l’armée syrienne dans notre pays” et observé que “Jezzine est pris entre deux feux, ceux d’Israël et de la Résistance” - ce qui n’est pas un crime de lèse-majesté, S.Em. le cardinal Sfeir s’est attiré la critique de certains hommes politiques et dignitaires religieux de haut rang, dont le président du Conseil supérieur chiite. En effet, l’imam Mohamed Mahdi Chamseddine prenant la parole au cours de la séance oratoire ayant marqué, dimanche dernier, le dix-neuvième anniversaire de la disparition de l’imam Moussa Sadr, s’est dit “étonné d’entendre, de temps à autre, certaines déclarations susceptibles de semer le doute dans les esprits... parce qu’elles ne sont pas en faveur de la première cause du Liban, à savoir: libérer les portions de notre territoire de l’occupation israélienne, sans devenir l’otage de l’Etat hébreu”... Dans le même temps, l’imam Chamseddine a reconnu que “l’accord de Taëf n’étant ni un Coran, ni un Evangile, comporte certaines lacunes qu’on devrait réviser”. C’est, d’ailleurs, ce que préconise le patriarche maronite, l’éminent prélat ayant rappelé, comme tant de citoyens soucieux de voir le Liban recouvrer sa souveraineté et son indépendance, que le redéploiement des forces syriennes stationnées en territoire libanais ne s’est pas opéré comme le prévoit, justement, l’accord de Taëf... auquel Sa Béatitude a souscrit, pour contribuer à l’arrêt des affrontements. De même, chaque fois que les notabilités de Jezzine et les députés de la circonscription élèvent la voix pour dénoncer la négligence du Pouvoir à leur égard, on les soupçonne et même on les accuse “de faire le jeu de l’ennemi israélien”. Comment? En cherchant à favoriser l’application de la formule “Jezzine, d’abord”. Ce qui reviendrait à séparer le problème de cette localité de celui du Liban-Sud. Or, les Jezziniotes n’ont cessé depuis longtemps d’inviter l’Etat à faire acte de présence dans leur caza et, surtout, d’y déployer l’armée libanaise en force, pour y assurer la sécurité de ses habitants, avant que ces derniers prennent le chemin de l’exode... Le cas de la voie de passage de Kfarfalous est un exemple, entre tant d’autres, prouvant que Jezzine a été abandonnée à son sort par les Pouvoirs publics. Ceci étant, les responsables sont-ils en droit de blâmer sa population de se lier au diable pour assurer leur survie? Il est heureux qu’un homme politique connu pour sa pondération et son bon sens, le président Hussein Husseini, ait soutenu les prises de position du cardinal Sfeir (au sujet de la présence syrienne et d’autres sujets nationaux). “Le dossier des relations libano-syriennes, a affirmé l’ancien chef du Législatif, est une question de confiance et les hommes au pouvoir n’ont rien fait pour la renforcer; ils ont exploité ces relations à des fins personnelles, causant ainsi un grand préjudice aux intérêts de la patrie”. |