Par MARY
YAZBECK AZOURY
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“TOUS DEUX SONT MORTS...”
“Seigneur, votre droite est terrible...” “... Gloire, jeunesse,
orgueil, biens que la tombe emporte...” Qui mieux que Victor Hugo peut
exprimer en quelques vers l’horreur de la mort? “Non l’avenir n’est à
personne! Sire! L’Avenir est à Dieu! A chaque fois que l’heure sonne,
Tout ici-bas nous dit adieu. L’avenir! L’avenir! Mystère!” Lady
Di et Dodi sont morts... Tous les regrets du monde n’y pourront rien. Il
a suffi d’un instant, d’un tout petit instant pour que la romance bascule
dans l’horreur. L’horreur d’une mort stupide. Mais y a-t-il des morts intelligentes?
Et pourtant... On ne peut s’empêcher de dire “Si”... Aujourd’hui,
Diana a trouvé le repos éternel, elle est libre pour toujours.
Le monde entier la pleure. Comme il a pleuré la reine Astrid! Comme
il a pleuré Grace Kelly! Comme il a pleuré John Kennedy!
Comme il a pleuré Elvis Presley! Et pourtant... “Tout s’efface,
tout se délie, Le flot sur le flot se replie, et la vague qui passe
oublie...”
***
NOUS SOMMES TOUS DES VOYEURS
Le terrible accident de Lady Di et de Dodi a fait pleins feux
sur les journalistes, sur les “paparazzi”, mot inventé par Fellini,
dans “La Dolce Vita” et qui désigne les photographes de presse,
prêts à tout, pour obtenir une photo inédite. Mais
est-ce que ces “paparazzi” auraient survécu s’il n’y avait un marché
plus que florissant et juteux pour eux? En fait, c’est toute la société
qui est mise sur le grill, car s’il n’y avait pas de lecteurs pour ce genre
de romans-photos, il n’y aurait pas eu d’éditeurs et l’espèce
accusée des paparazzi aurait disparu de la planète. Or, tout
le monde sait bien que “News of the World” vend cinq fois plus que “The
Observer” ou “The Sunday Times”. Pourtant, le premier est considéré
comme un journal “populaire” et les deux autres “de qualité”. Qui
de nos jours recherche la qualité? Une infinie minorité!
Les journalistes de qualité ne roulent pas sur l’or (en général)...
alors que les maîtres-chanteurs font fortune! Or, tous les Instituts
et Ecoles de journalisme insistent sur la responsabilité juridique
et morale du journaliste. Ils rappellent sans cesse qu’il y va de la conscience
et de l’honneur du journaliste d’informer, de voir, de savoir, de savoir-faire
et de faire savoir, en tout bien tout honneur. Mais que se passe-t-il en
réalité sur le terrain? C’est la concurrence la plus éhontée,
la plus féroce, la moins fair-play que se livrent les médias,
dans le monde démocratique.
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UN UNIQUE JOURNALISTE BÉATIFIÉ
On pourrait affirmer sans beaucoup se tromper, que si tous les
journalistes ne vont pas en enfer, du moins une grande partie d’entre eux
le fréquentent. Toutes les professions ont produit des “saints”
et des “bienheureux”... Même les professions les moins “sages” même
les milieux les plus débauchés. Dans le journalisme, il y
a un seul cas unique en son genre; le père Titus Brandsma, carme
néerlandais, journaliste au “De Gelderlander”, mort en déportation
à Dachau le 26 juillet 1942; il a été béatifié
le 3 novembre 1985 par Jean-Paul II. Il faut croire que le milieu journalistique,
que ce soit la presse écrite ou l’audiovisuel, n’offre pas un terrain
très fertile pour l’éclosion de la sainteté.
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DES ANNONCES AFFRIOLANTES
A l’aube du troisième millénaire, à croire
que la fin du monde est proche, le mot d’ordre quasi général:
“Aimons donc! Aimons donc! De l’heure fugitive Hâtons nous, jouissons.”
Il est évident que Lamartine employait le mot “jouissance” au sens
le plus général du terme. Mais de nos jours, les annonces
que l’on voit dans la presse internationale sous la rubrique “personnelle”
s’adressent davantage aux jouissances sexuelles qu’aux autres. On peut
lire dans la presse étrangère, ou sur Internet (j’ignore
si ce genre d’annonces existe dans la presse arabe) des annonces ainsi
libellées: “Veuve bien pourvue, indépendante financièrement,
cherche compagnon attentionné, doux, compréhensif voulant
faire le tour du monde. Age peu important, pourvu qu’il soit majeur”. Idem
pour le sexe faible: “Homme riche adulte intéressant, jeune de cœur
et d’esprit, cherche dame, demoiselle attirante, sans complexe, voulant
couler des jours agréables, sans travailler, auprès de lui.
Majeure obligatoirement.” Quand on est jeune, chômeur, pas très
travailleur, sans complexe; doué d’un libido même moyen, normal,
comment résister à l’appel au plaisir, à la jouissance.
“Le temps d’aimer ne dure guère, pourquoi demain...” car “Demain
de quoi sera-t-il fait?”
***
“I GIVE UP THE THRONE FOR THE WOMAN I LOVE”
Qui n’a entendu sans grande émotion la phrase célèbre
prononcée par le roi Edward VIII? “Je renonce au trône pour
la femme que j’aime...” C’était en 1936 et tout ce que l’on a pu
retenir c’est un enregistrement effectué sur disque, alors, par
la BBC... Au fil des ans, on a perfectionné l’enregistrement et
les amateurs sentimentaux peuvent se procurer le discours célèbre
du futur duc de Windsor, qui a renoncé à beaucoup de choses
pour sa chère Wallis. De nos jours, personne ne renoncerait à
rien. On s’aimerait n’importe où, n’importe comment, avec n’importe
qui et n’importe quand... Les mœurs ont évolué. On n’est
plus choqué facilement. Pourtant, demeurent, heureusement, quelques
tabous, quelques interdits: pédophilie, incestes, viols, etc...
Même les plus dévergondés n’admettent pas certains
actes. Cette libéralisation des mœurs mène à quoi?
Quelle est la cause de cette évolution? Probablement, la culture
sans cesse plus grande des différentes couches de la société.
Culture prise au sens le plus large du terme. Freud est connu, l’analyse
du comportement de l’individu est éclairée par la psychologie,
même embryonnaire; elle distingue des nuances qui, autre-fois, n’apparaissaient
pas. On ne juge plus, on ne condamne plus comme autrefois. En d’autres
temps, on n’aurait jamais sans doute imprimé la phrase: “Lady Di
s’est tuée dans un accident de voiture avec son amant...” On ne
peut pas dire que la situation est meilleure; disons qu’elle est différente!
“Requiescat in pace”.