VERS UN NOUVEAU CAMP DAVID? L’HYPOTHÉTIQUE RELANCE DU PROCESSUS DE PAIX:
UN DOSSIER BRÛLANT ENTRE LES MAINS DE MADELEINE ALBRIGHT 

Après six mois d’hésitations, le secrétaire d’Etat américain, Madeleine Albright, a été contrainte de jouer tout son prestige, entamant une tournée à hauts risques au Proche-Orient. A-t-elle des dons de magicienne, cette fille de Prague avec laquelle un Israélien du kibboutz de Kfar Ruppin s’est subitement découvert des liens de parenté? La veille de son départ de Washington, elle avait déjà placé la barre assez bas, estimant qu’il en faudrait du temps pour “sortir de l’abîme” le processus de paix. Elle précisait, ensuite, à l’adresse des quatorze journalistes qui l’accompagnaient, qu’il fallait en premier lieu “restaurer une certaine confiance mutuelle” Elle l’a redit, lors d’une conférence de presse, à l’issue d’une réunion de trois heures avec le Premier ministre israélien, toujours inflexible qui, fort curieusement, annonce la paix en prenant toutes les mesures pour la saper à la base. Elle a, surtout, accentué les pressions sur l’Autorité palestinienne afin qu’elle s’emploie à éradiquer le terrorisme.

Le chef du département d’Etat U.S. entourée de Benjamin Netanyahu, MM. David Lévy et Yitzhak Mordekhai, respectivement ministres israéliens des Affaires étrangères et de la Défense. 
Mme Albright s’est rendue en compagnie 
de Mme Léah Rabin au cimetière où est inhumé Yitzhak Rabin, l’ancien Premier ministre israélien.
“Les Etats-Unis doivent frapper le poing
sur la table pour faire avancer le processus de paix”, a dit Ezer Weizman, chef de l’Etat hébreu, en accueillant le secrétaire d’Etat US. 
 

DANS LA HOTTE DE Mme ALBRIGHT
Telle semble être sa priorité, lors de sa rencontre jeudi à Ramallah avec Yasser Arafat qui avait fait arrêter la veille trente-cinq islamistes. Ce qui n’a pas empêché les Palestiniens de manifester - tout comme les Israéliens pour des causes opposées - brûlant les pneus et représentant la statue de la liberté avec la tête de Mme Albright, une épée à la main et l’enfonçant dans le corps du peuple palestinien. Si “extirper et détruire” le terrorisme palestinien est la priorité du secrétaire d’Etat, celle-ci n’en a pas moins apporté dans sa hotte quelques propositions pour infléchir la position israélienne en faveur de l’ouverture d’un aéroport civil dans les territoires et garantir un droit de passage entre Gaza et la Cisjordanie. Mais elle a dû prêcher dans l’oreille d’un sourd, car en rencontrant le président de l’Autorité palestinienne, elle ne lui a fait part que d’exigences de fermeté à l’encontre des islamistes sans aucune concession israélienne, du moins à court terme, car le blocus économique pourrait enfin être levé. Le souvenir des attentats des 31 août et 4 septembre est encore omniprésent. Et on se trouve toujours confronté à un dilemme insoluble: paix-sécurité. L’une ne va pas sans l’autre et Netanyahu, qui a promis la sécurité à ses concitoyens, n’a été, en fait, que l’initiateur d’un processus suicidaire avec force provocations et bévues qui ont précipité dans l’abîme tous les espoirs de paix.

Mme Albright s’adressant aux 
représentants de la Presse, à l’issue de 
son entretien de trois heures avec 
le Premier ministre israélien. 
Le chef de la diplomatie américaine fleurissant 
le mémorial (de Vad Mashem) érigé en souvenir des 
six millions de victimes juives du génocide nazi. 
UNE NOUVELLE APPROCHE?
A la veille de la tournée proche-orientale de Madeleine Albright qui la mènera d’Israël en Cisjordanie, Egypte, Syrie, Jordanie et, également, pour quelques heures au Liban “sauf contre-temps”. Netanyahu avait annoncé avec fracas la suspension des accords d’Oslo, conclus il y a quatre ans et l’arrêt des négociations avec les Palestiniens, initiative fortement contestée par son ministre des Affaires étrangères David Lévy (qui se dit optimiste quant à la relance des négociations avec la Syrie) et le chef du Parti travailliste, Ehud Barak. De son côté, le président Ezer Weizman a pressé le secrétaire d’Etat d’inciter les Etats-Unis à prendre une initiative musclée et de “frapper du poing sur la table” en vue de la reprise des négociations. “Il faut une direction forte pour prendre des décisions difficiles”, a-t-il souligné, cette initiative pouvant mener à une sorte de nouveau Camp David. Celui-ci avait permis, à l’issue de six mois de négociations, la signature d’accords de paix entre Israël et l’Egypte, en 1979. Mais Ehud Barak qui a présenté à Mme Albright un plan pour la relance des négociations, a estimé que “les seules pressions qui doivent être exercées sont celles de la population israélienne, afin que le gouvernement respecte les accords conclus.” Ces accords devraient-ils être révisés? Une certaine tendance qui se manifeste depuis quelque temps aux Etats-Unis, est exprimée par l’ancien secrétaire d’Etat, Henry Kissinger, qui estime que “toutes les possibilités (des accords d’Oslo) ont été épuisées” et que le processus lancé depuis “mérite moins d’être relancé que corrigé de fond en comble”. Qu’en pensent les différents chefs de file dont certains, les présidents Moubarak, Arafat et le roi Hussein se sont réunis au palais présidentiel de Kobbeh au nord-est du Caire dans le cadre d’un mini-sommet, la veille de la visite de Mme Albright et sollicité celle-ci, après avoir condamné le terrorisme, d’exhorter l’Etat hébreu à reprendre les négociations.” Dans le cas contraire, pourrait-on craindre les bruits de botte qui mettraient la région au bord du gouffre?


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