Editorial


Par MELHEM KARAM 

 

POUR NE PAS ÊTRE CLASSÉS PARMI LES ARRIÉRÉS FOURBES

Les propos autour de la fin du gouvernement sont transposés du murmure à la proclamation. Ce que la coterie du président Ha-riri a essayé de classer parmi les rumeurs, les paroles tendancieuses d’envieux et la propagation de mensonges, est devenu une vérité palpable, les gens en ayant eu assez du procédé et de la pratique. Après l’apparition de prémices annoncia-trices de fin de règne, la coterie a commencé à se disperser: le refus se manifeste partout, de même que l’éloignement et l’exclusion, les démissions et les révocations. La foi dans les miracles s’est amenuisée; aussi, les gens sont-ils revenus à leur réalité, persuadés qu’il n’existe pas sur terre des exploits hors du commun, mais des faits ordinaires et tangibles. Des lavages de cerveaux sont effectués pour les présenter comme étant des mi-racles, partant du principe “qu’une vérité éclatante, sincère et parfaitement saine, mais non adroitement propagée, tombe entièrement, face à un mensonge qu’on propage avec intelligence et dextérité”. Cela aussi est du passé, le passé des mensonges du nazisme et du sionisme. Les gens sont devant un fait: le pouvoir doit être comme il mérite de l’être, sinon il est appelé à s’éclipser. Nul n’est disposé à se brûler les doigts et son renom, ni son crédit pour protéger des gens dans l’erreur ou induits en erreur, à qui il importe de perpétuer leur entêtement et de l’amplifier, serait-ce aux dépens du torpillage de toutes les vérités et les données. Les tentatives en cours visant à amadouer les mécontents ou à les neutraliser, ne serait-ce que pour quelque temps, n’ont pas donné leurs fruits. Ceux qui ont voulu jouer le “bon rôle”, le rôle du conseiller, du guide et du soutien, ont réalisé que le refus d’accepter leurs conseils leur acquiert des inimitiés dont ils peuvent se passer. Puis, leur rôle ne consiste pas à les amonceler contre eux, sur l’autel de l’entêtement de particuliers. De même, ils ont réalisé que les laves du volcan sont sur le point de couler, l’attachement aux majorations, au relèvement des prix et des impôts, devant inciter, indubitablement, à la descente dans la rue. A ce moment, la violence et la répression ne seront d’aucun profit, car elles n’engendreront que le sang et le repentir. En disant cela, nous ne voulons que tirer des déductions et les leçons des événements, loin de l’exagération amplifiée et du rapetissement des choses, ce qui a pour conséquence de fausser l’analyse et, partant, les résultats. Pour ne pas être classés dans la case des arriérés, nous devons nommer les vérités par leurs noms. Il ne nous suffit pas de dire à l’aveugle qu’il est aveugle, mais de placer notre doigt dans son œil. Notre serment à Dieu, à la patrie et à la profession exige cela de nous. Ce que le gouvernement pratique engendre dans le cœur des gens, une colère et un mécontentement sans limites. D’autant que les gens ont le sentiment que leur satisfac-tion n’est pas le but visé; qu’ils sont les derniers dont on écoute l’opi-nion et auxquels on a recours, que ce soit aux élections ou quand sont en jeu des questions vitales. Ceux qui veulent appliquer des décisions fausses, savent que le peuple les rejette. Ils s’adressent aux gens crédules aimant le Liban, pour essayer de les convaincre de la jus-tesse de leurs actes et obtenir leur soutien, mais le résultat est un refus permanent. Au lieu d’amadouer les grands, pourquoi n’engageraient-ils pas le dialogue direct avec le citoyen, pour le persuader qu’ils ne lui veulent pas du mal, encore moins lui imposer quoi que ce soit ou l’opprimer? Le dialogue sera, alors, valable; toute autre tentative demeure inutile et infructueuse. Ceci si nous voulons être sincères et équitables, non fourbes, nous employant à faire luire les murs secs, pour les faire briller pendant quelques instants; puis, tout retrouve son aspect naturel. Les gens en ont assez de ces pratiques. Aussi, se sont-ils promis de se venger de leurs auteurs, pour rechercher une voie honnête et un plan sain, seuls capables de leur restituer leurs droits spoliés qui se vendent à des prix dérisoires. Le pire de ce qu’affrontent les gouvernants, c’est le fait pour tous d’avoir honte de proclamer leur appui au gouvernement, car ceci est honteux et couvre des horreurs affectant le peuple dans sa vie, ses biens, son existence, sa dignité, autant que la foi dans sa culture, sa raison et sa capacité d’appré-ciation. Ce sont autant de données qui s’empilent pour provoquer l’éveil du volcan, dont les laves s’amplifient au point de devenir un torrent impos-sible à contenir. Ici, les gens dressent un bilan avec eux-mêmes, pour voir ce qu’ils ont fait et ce qu’a accompli le gouvernement. Les résultats s’avèrent faibles et stériles: rien n’a été réalisé, la tendance étant de causer du tort au citoyen et à l’homme. Les gens sentent que leur opinion n’a pas de valeur et quoi qu’ils fassent, l’entêtement s’empare de ceux qui se prélassent dans la griserie de la victoire sur le peuple, sur son gagne-pain, ses acquis, son école et ses enfants. Ainsi, le mécontentement fermente et s’amoncelle la poudre qui est le combustible de l’explosion. En attendant cela, ceux qui ont commis les abus cherchent à assurer leur sécurité qu’ils sont prêts à acquérir à tout prix. Quant à ceux à qui il importe de ne pas être classés parmi les retardataires fourbes, ceux-là à l’exclusion des autres, clament à haute voix la vérité, laquelle leur coûte certainement un prix qui ne peut être exorbitant, car le prix le plus cher est celui de la vérité. Cette vérité, le Libanais la paye de sa vie, de sa dignité, de sa démocratie et de sa liberté.

Photo Melhem Karam


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