Chronique


De RENE AGGIOURI 

 

SUR LE RING?...

Quiconque a assisté à un match de boxe en salle ou sur l’écran, connaît le rôle de l’arbitre: il compte les coups qu’échangent les adversaires, les sépare quand ils en viennent au corps à corps prolongé, signale les coups bas, etc... Le rôle de l’Amérique en tant que “parrain” du processus de paix est-il le même que celui d’un arbitre de match de boxe? Dans un match de boxe, chacun des adversaires est censé mettre l’autre hors-jeu par knock-out ou aux points ou par abandon. Un processus de paix n’est pas, à ce qu’on sache, un match de boxe. Il a pour but, un accord entre les partenaires pour vivre en bons voisins et non pas la mise hors-jeu du plus faible. Or, tout se passe avec M. Netanyahu comme s’il ne cherchait qu’à mettre M. Arafat hors-jeu. Et dans ce match, inégal, l’Américain se contente de marquer les coups et de recommander plus de “retenue” quand le combat devient trop chaud. Si Mme Albright ne veut pas adopter un autre rôle, on peut prédire des catastrophes. Si elle ne se résoud pas à aller à l’essentiel au lieu de s’en tenir à l’accessoire, elle laissera libre cours aux manœuvres imbéciles de M. Netanya-hu. Imbéciles, parce que leurs conséquences sont tragiques pour tout le monde. On en a eu déjà des prémices tout récemment au Liban-Sud où douze soldats israéliens sont morts pour rien et où des civils libanais sont tués tous les jours ou con-damnés à fuir. A Jérusalem, aussi, le terrorisme a fait des ravages, alors qu’en Cisjordanie et à Gaza, les populations sont réduites à la misère par l’effet du bouclage des frontières.

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Il existe pourtant en Israël même, des voix autorisées pour dénoncer la politique de M. Netanyahu (alors qu’elle reçoit l’appui de M. Clinton). Dans une déclaration à l’agence Reuter, le 3 septembre, M. Aba Eban, par exemple, retiré de la scène politique depuis dix ans et qui fut, selon Reuter, “la voix diplomatique internationale d’Israël”, a eu “des mots durs pour le dirigeant d’extrême droite, Benjamin Netanyahu”. Le processus de paix est devenu plus difficile, dit M. Eban, “depuis que le gouvernement Netanyahu l’a précipité dans la crise, en mars, en décidant de construire des maisons juives dans la partie arabe de Jérusalem”. Notons que M. Eban ne rejette pas la faute sur M. Arafat ou sur les terroristes, comme le font les dirigeants actuels d’Israël. “En échange de la paix, déclare Eban, nous devons rendre le Golan à la Syrie et mettre fin à cette aventure ridicule au Liban. “Un Etat palestinien est inévitable, ajoute M. Eban. Le colonialisme est dépassé”. Et encore: “Un Etat juif qui engloberait la Cisjordanie n’a jamais été qu’une illusion. “Le Grand Israël n’a pas existé, parce qu’il ne le mérite pas. C’était une idée fausse à cause du rapport des forces”. Pourtant, cette illusion continue d’être entretenue par les barbus, les armes à la main, lecteurs de la Bible et qui terrorisent leurs voisins arabes.

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Mais à propos, que dit donc la Bible? Que le peuple juif a reçu une promesse. Abraham en fut le premier dépositaire, dont la descendance n’est pas exclusivement juive d’ailleurs! Moïse en a hérité, mais entre-temps, il y eut l’exil en Egypte. Pendant ce temps, cette “terre promise” était-elle restée en déshérence? Nombres 13-14: “Avant d’entrer avec tout son peuple dans la terre promise, Moïse envoya un petit groupe d’éclaireurs pour l’explorer. Il choisit un homme par tribu. “Au bout de quarante jours, ils revinrent et racontèrent: “Nous avons trouvé ce pays riche et fertile. On dirait vraiment qu’il y coule le lait et le miel. “Le pays de Canaan est très fertile, dirent les éclaireurs au peuple d’Israël. Les fruits merveilleux que nous avons rapportés le prouvent. Mais il est habité par des peuples puissants, qui ont bâti de grandes villes...” etc... etc... Le peuple d’Israël, ajoute la Bible, prit peur et voulut retourner en Egypte. “Moïse et Josué essayèrent de les calmer: ce pays est celui que Dieu nous a promis... Mais le peuple se révoltait et ne voulut pas entendre raison.” On connaît la suite: Dieu punit Moïse avec son peuple pour avoir douté et ce n’est que la génération suivante qui fut autorisée (par Dieu) à pénétrer en terre cananéenne, à la conquérir en chassant ses habitants.

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C’était il y a cinq mille ans environ. En 1916, un certain Lord Balfour devait prendre le relai de Dieu en renouvelant “la promesse”. Et depuis, de promesse en promesse, cette terre ne connaît plus la paix. Que vient faire Dieu dans cette galère? Et que peut Mme Albright si Dieu est engagé?

 
 
 


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