“Madeleine Albright et l’Amérique complotent
pour obtenir des garanties sécuritaires à l’Etat hébreu
et servir l’intérêt sioniste”.
L’entretien avec le chef du Mouvement de l’Unification
islamique (MUI) est toujours intéressant, d’autant que l’homme se
distingue par son franc-parler, sans jamais cacher son opinion à
propos des problèmes de l’heure.
On peut ne pas partager son avis, ni souscrire à
toutes ses idées ou à la conception qu’il se fait des idées
et des hommes. Mais on ne peut pas s’empêcher d’écouter ses
réflexions hardies.
Notre première question a porté, naturellement,
sur la fermeture de sa station radiophonique (la “Voix du droit”) par la
manière forte, ayant occasionné la mort de trois de ses partisans,
alors que des dizaines d’autres ont été arrêtés
ou blessés, au cours des affrontements qui les ont mis aux prises
avec les forces de l’ordre.
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SE PROMETTANT DE PROVOQUER LA “CHUTE POLITIQUE” DE HARIRI
CHEIKH SAÏD CHAABANE:
“NOUS ROUVRIRONS NOTRE STATION
RADIOPHONIQUE ET REPRENDRONS NOS ÉMISSIONS”
HARIRI, UN DESPOTE ET UN DICTATEUR
“L’Autorité, dit-il, est despotique et dictatoriale; elle ne
respecte ni son peuple, ni l’opinion de l’autre et étouffe les libertés
au Liban. Il existe, semble-t-il, un projet politique visant à éliminer
les voix qui n’approuvent pas ce en quoi croit Hariri.
“Ce qui s’est passé à Tripoli, a été une
opération criminelle, visant à réduire au silence
les citoyens auxquels on refuse d’avoir une voix libre. Le fait de
tuer de telles personnes rappelle les grands crimes de l’Histoire et le
Dieu de la terre punira Hariri, à moins qu’il se rétracte
et restitue la liberté, surtout à ceux qui ont une opinion
à exprimer.
“Nous ne disons pas: Donnez aux ouvriers des stations radiophoniques
et de télévision. Cependant, les gens ayant une opinion,
même contraire à celle du gouvernant, doivent jouir de la
liberté d’expression, car l’échange des idées améliore
les conditions de vie de l’homme.
“Notre pays était à l’avant-garde des tribunes de la
liberté et Hariri l’a transformé en prison, par la décision
qu’il a prise, privant les citoyens libres de leur droit à s’exprimer
sans contrainte. C’est le dictateur du Liban et je souhaite que Dieu l’en
débarrasse”.
NUL NE PEUT ME PRIVER DE MA LIBERTÉ
ET DE MA DIGNITÉ
- Pourquoi ne vous êtes-vous pas conformé à
la décision gouvernementale, à l’instar d’un grand nombre
de stations qui ont cessé d’émettre?
“Nous ne nous soumettons à la volonté de personne aux
dépens de notre dignité qui nous vient de Dieu, autant que
notre liberté. Hariri ne peut me priver de la liberté que
m’a accordée Allah, car elle est dans l’essence de mon Islam, de
mon humanisme et de ma vie, laquelle n’a pas de sens sans liberté.
“Non, je n’obéirai pas à Hariri, parce qu’il ne se soumet
pas à la volonté du Très-Haut”.
- Qu’envisagez-vous de faire après ce qui s’est passé
à Tripoli?
“Nous persévérerons dans notre conduite et continuerons
à exprimer notre opinion. Aussi, rouvrirons-nous la station et recommencerons
à émettre. Je renverserai Hariri, politiquement, car je ne
l’ai pas affronté avec les armes. Il peut tuer cent mille personnes
mais, en définitive, il se suicidera lui-même. Quant à
nous, nous continuerons à vivre”.
- M. Omar Meskaoui, ministre des Transports, natif de Tripoli, a
tenté, vainement, d’atteindre le président du Conseil pour
tenter de parvenir à une solution de compromis sans y parvenir.
Pourquoi?
“C’est normal, car Hariri est un dictateur. La médiation auprès
de lui n’a pas abouti, parce qu’il ne respecte ni les ministres, ni les
députés. Il les méprise et nous méprise; Dieu
le méprisera. C’est la fin de tout homme qui ne respecte pas son
prochain, ni l’opinion de l’autre.
“Les ministres et les députés qui ont assisté
à ce qui s’est passé dans la capitale nordiste, doivent témoigner
de ce qu’ils ont vu et proclamer que Hariri est un criminel, sinon nous
les considérerons indignes de la confiance placée en eux”.
“HARIRI VEUT SUCER NOTRE SANG”
- Comment évaluez-vous votre relation avec le président
Hariri?
“Il a défini la nature de cette relation, car il veut sucer
notre sang, mettre fin à notre liberté et à notre
existence. S’il l’avait voulu, il l’aurait basée sur l’amitié,
la fraternité et la coopération. Or, il a opté pour
la voie criminelle. S’il venait à changer, nous changerions. Et
s’il regrette ce que ses mains ont commis, dédommage les pertes
en vies humaines et les dégâts matériels, tout en modifiant
sa politique d’une manière radicale, il n’y aurait pas de rancune
éternelle entre nous. Nous rendons le mal par le mal et le bien
par le bien”.
- Qu’en est-il de votre relation avec les députés du
Liban-Nord et, tout particulièrement, avec le président Omar
Karamé?
“Je souhaite que les parlementaires nordistes assument leurs responsabilités.
Tout en les considérant comme des frères, nous les blâmons
pour n’avoir pas dénoncé ce qui s’est passé à
Tripoli. S’ils ne le font pas, ils ne seront pas au niveau de la responsabilité
et de l’honneur”.
NOUS BLÂMONS LA SYRIE POUR N’AVOIR PAS
ARRÊTÉ LE MASSACRE!
- Comment qualifiez-vous vos rapports avec la Syrie?
“Nos relations avec elle doivent rester bonnes, qu’elle nous soit favorable
ou hostile. De toute manière, nous ne pouvons lui causer du tort,
car un destin commun nous lie et le Liban ne peut vivre sans elle.
“Toujours est-il, que nous blâmons le pays voisin, car il n’est
pas intervenu pour arrêter le massacre dont nous étions la
victime”.
- Comment expliquez-vous votre réapparition subite après
une longue éclipse?
“Notre absence a été motivée par des raisons que
vous connaissez. Mais il s’agissait d’une éclipse partielle et momentanée”.
- Quels sont les objectifs du MUI?
“Notre mouvement vise à ramener l’homme au giron sacré,
car l’homme doit aimer Dieu et son frère l’homme. Les êtres
humains sont appelés à œuvrer à l’effet de réformer
la terre, car Dieu a créé l’homme à son image; aussi,
ne doit-il être ni un criminel, ni un dictateur. Nous souhaitons
que Hariri tourne le dos au diable et à Madeleine Albright, pour
adorer de nouveau le Créateur”.
- D’aucuns vous accusent de financer votre mouvement par des fonds
venus de l’extérieur. Qu’avez-vous à leur répondre
et comment parvenez-vous à assumer vos responsabilités financières
vis-à-vis de vos partisans?
“Certaines de nos institutions nous assurent des revenus suffisants.
Nos écoles et nos biens-fonds répondent à nos besoins;
nous n’en demandons pas davantage”.
NOUS NOUS RETROUVONS AVEC TOUT HOMME LIBRE
- Coordonnez-vous votre action avec cheikh Soubhi Toufayli, promoteur
de la “révolte des affamés”?
“Pas de coordination entre nous, mais il existe une communauté
d’objectifs, en tête desquels la liberté de l’homme et la
lutte contre l’injustice. Nous nous retrouvons avec cheikh Toufayli et
avec tout homme libre, qu’il soit musulman ou chrétien. Les hommes
libres doivent s’attendre à une même victoire, celle de la
liberté”.
- Et auriez-vous des contacts avec “Amal”?
“Par rapport à ce mouvement, nous nous considérons comme
les fils d’une même famille. Notre relation avec “Amal” part du même
principe sur base duquel nous traitons avec les autres: nous rendons le
bien par le bien et le mal par le mal”.
- Et qu’auriez-vous à dire d’Abou-Mahjan qui s’est dit proche
de vous par la pensée?
“Je ne le connais pas personnellement et ne l’ai jamais rencontré.
Mais l’homme a son opinion, sa liberté et sa manière de se
comporter. Il est responsable de ses actes comme nous le sommes par rapport
aux nôtres”.
L’IRAN EST NOTRE MÈRE
- Entretenez-vous des relations avec l’Iran et quelle en est la
nature?
“L’Iran est notre mère et notre sœur aînée. C’est
un Etat que Dieu a gratifié de la liberté, en l’affranchissant
de la soumission à l’Amérique et à Israël; c’est
la plus grande des grâces divines, alors que certains Etats arabes
s’agenouillent devant Madeleine Albright et Netanyahu, ce vil ennemi.
“L’honneur de l’Iran réside en ce qu’il refuse de se soumettre
et l’opprobre d’autres est dans leur soumission; que Dieu les guide. Cette
nation se relèvera, à plus ou moins brève échéance,
lorsqu’Allah lui donnera des gouvernants valables ayant foi dans le droit”.
- Les liens qui vous rapprochent, politiquement, de la République
islamique, sont-ils du même niveau que ceux que vous avez établis
avec la révolution islamique?
“La relation de l’homme avec son frère ne change pas. Des causes
exigent notre coopération. L’Iran n’a pas besoin de nous, mais quand
le besoin se fait sentir, nous sommes toujours à ses côtés,
près de l’Egypte et des autres Etats, à condition qu’ils
soient proches de Dieu”.
- On dit que le congrès populaire islamique animé de
Khartoum par le Dr Hassan el-Tourabi est compromis par les divergences
et on doute de la possibilité de le réunir. Quels sont vos
renseignements à ce sujet?
“Le congrès populaire islamique n’a été bloqué
qu’à cause de l’embargo américain. A vrai dire, ce congrès
rassemblait bien des groupes islamiques ou non-islamiques dans le monde.
Toutes les nations, des Etats-Unis, à la France et au Canada s’emploient
à le combattre. Il fait l’objet d’un embargo de la part de l’Amérique
et, malheureusement, de l’Egypte, ces deux pays s’étant concertés
en vue de combattre le Soudan. C’est une erreur historique de la part de
l’Egypte”.
- Quelle est la nature de vos relations avec les instances religieuses
islamiques?
“Elles sont excellentes”.
- On constate que, contrairement au “Hezbollah”, vous n’avez pas
établi de relations avec des hommes politiques ou des instances
religieuses du côté chrétien...
“Sa Béatitude le patriarche devrait prononcer un mot pour nous
défendre et pour que nous sentions qu’il voudrait établir
une relation avec nous”.
- Comment évaluez-vous la visite de Madeleine Albright au
Proche-Orient et, en particulier, au Liban?
“C’est une juive qui complote pour obtenir des garanties sécuritaires
à Israël, en extirpant le “Hezbollah”, le Mouvement de l’unification,
en annihilant la résistance, l’honneur et la bravoure chez les Arabes,
afin d’en faire des esclaves à la solde de l’Etat hébreu.
“La politique américaine est sioniste et Madeleine Albright
n’est pas venue dans l’intérêt des Arabes mais, uniquement,
dans l’intérêt du sionisme”.
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