QUID DU DÉFICIT BUDGÉTAIRE?
- Le Cabinet s’engage à ne pas laisser le déficit
du budget 98 dépasser la proportion de 37,36%, alors qu’il n’a pu
tenir un tel engagement en 1997. Qu’auriez-vous à répondre
à ce sujet?
“Entendons-nous, d’abord, sur des principes fondamentaux. Le déficit
grandit lorsque l’Etat dépense au-delà de ses revenus. Or,
il affecte d’importantes sommes aux traitements des fonctionnaires, à
la gestion de la chose publique et au financement des projets d’utilité
publique. Ainsi, les dépenses engendrent le déficit, lequel
entraîne les dettes. On se trouve, ainsi, dans un cercle vicieux,
le déficit donnant des résultats peu sains au plan économique.
Ceci provoque une émulation entre l’Etat et le secteur privé
sur les ressources financières, d’où la hausse des taux d’intérêt
et influe sur les investissements au Liban. En effet, le Libanais préfère
investir dans les bons du Trésor réalisant, ainsi, des profits
sans déployer aucun effort.
“La hausse des taux cause du préjudice à l’économie
nationale et, partant, aux investisseurs. Nous nous préoccupons
d’intensifier les investissements, afin d’amener beaucoup plus de personnes
au marché de l’emploi et d’assurer un gagne-pain aux jeunes. Or,
on ne peut atteindre cet objectif sans de nouveaux investissements.
“Il faut réduire le déficit à l’effet de maintenir
la stabilité, encourager les investissements et permettre au secteur
privé de trouver de nouveaux emplois. En ce qui concerne le déficit,
nous avons pris l’habitude de le calculer par rapport à la totalité
des dépenses.
“Ainsi, à titre d’exemple: si nous dépensons cent livres
et en percevons soixante, on calcule la proportion du déficit à
40 pour cent, cette dernière étant considérée
comme la valeur du déficit. Ce n’est pas, ainsi, qu’on détermine
le déficit, mais en le comparant avec le produit local.
“Chez nous, le déficit s’est élevé à 18
ou 19% en 1997, par rapport au produit local. Nous œuvrons en vue de le
réduire, les dépenses prévues dans le budget 98 étant
estimées à 7375 milliards de livres libanaises. Pour la première
fois, nous avons dit aux gens, cette année, que les dépenses
seront prélevées sur les crédits reportés des
années précédentes et ceci exige de nous de recourir
à l’emprunt”.
L’ÉTAT DOIT PRÉVOIR L’AVENIR
“La question qui se pose, ici, est de savoir comment disposer de ressources suffisant à répondre aux besoins actuels et de celles devant satisfaire les besoins futurs. Telles sont les règles et les options de base en économie. Nous devons nous interroger sur les charges que les générations présente et future ont à supporter. Cette question, la société est appelée à lui trouver une réponse convaincante. Partant de là, l’Etat ne peut ni ne doit dépenser tout ce qu’il possède pour assurer les besoins d’aujourd’hui; il est tenu, aussi, de prévoir les besoins de demain. C’est ce que nous tentons de réaliser. “Les dépenses de la Santé ont décuplé. Nous avons concentré nos efforts sur les problèmes en rapport avec l’eau, le ramassage des déchets, les égouts qui constituent autant de projets essentiels. “En 1992, l’électricité était au centre de nos préoccupations et nous avons atteint le but souhaité. Nous avons, également, accompli des réalisations fondamentales au plan du réseau routier; le citoyen peut s’en rendre compte. |
LE DEFICT BUDGETAIRE EST UN PHENOMENE UNIVERSEL AUQUEL LES GRANDES PUISSANCES N'ECHAPPENT PAS |
IL N'EST NULLEMENT QUESTION DE NOUVELLES CHARGES FISCALES AUX PERSONNES A REVENU LIMITE | L’HOMME ET LA PIERRE
“Une rengaine est ressassée au Liban depuis la fin de la guerre, tournant autour de l’homme et de la pierre. Il s’agit de propos à caractère politique n’ayant aucun lien avec l’économie. Lorsque l’Etat assure l’électricité aux citoyens, peut-on parler de la pierre? Comment les gens peuvent-ils travailler et vivre sans électricité? Et s’ils ne disposent pas de routes facilitant leurs déplacements, comment peuvent-ils assurer leur subsistance? “Dans le passé, on se plaignait de la difficulté à assurer les télécommunications. Aujourd’hui, il existe plus de 30.000 téléphones cellulaires au Liban. Nous œuvrons en vue d’exécuter les projets destinés à assurer le bien-être du citoyen, dans le but d’édifier une société saine à l’avenir. Tels sont les objectifs du budget que nous avons élaboré. Pour rendre le budget acceptable, tout en maintenant la stabilité économique et financière, nous devions rechercher des ressources. “Mais l’Etat ne peut pas tout faire; dans chaque pays il existe un problème ayant pour nom déficit, même au Japon et aux Etats-Unis. Chez nous, la proportion du déficit est élevée, car le Liban sort d’une guerre destructrice. Les autres pays ne rencontrent pas de difficultés pour percer des routes, aménager des égouts et leur infrastructure n’a pas été démolie comme au Liban. Nous devons faire face à des dépenses supplémentaires; aussi, sommes- nous tenus d’accroître nos recettes en renforçant la perception des impôts et taxes. |
DES IMPÔTS ET DES DÉPENSES
- Les recettes devant provenir des impôts et taxes prévus
dans l’annexe NÞ9 combleront-elles le déficit ou bien accroîtront-elles
les dépenses gouvernementales?
“L’annexe NÞ9 accroîtra les recettes et non les dépenses.
Je tiens à préciser que tant qu’il existe un déficit,
le montant de la dette a tendance à augmenter. C’est pourquoi, il
m’est demandé d’assurer une limite minima de recettes, aux fins
d’empêcher l’accroissement de la dette”.
- Qu’en est-il des aides promises au Liban?
“Notre politique économique exige de nous de déployer
tous les efforts possibles partout et à tous les niveaux, même
en Chine. Si des possibilités s’offrent à nous pour contracter
des emprunts auprès des marchés mondiaux moyennant des taux
d’intérêt réduits, nous le ferons. Tout Etat pâtissant
du déficit compte toujours sur les subventions.
“Il existe à New York des quartiers plus désastreux que
certains de nos quartiers. Il en est de même en Grande-Bretagne.
A l’exception des pays pétroliers, notre situation est meilleure
que celle de n’importe quel Etat arabe, que ce soit par rapport au niveau
du revenu ou par rapport à l’un des critères relatifs au
niveau de vie.
“Les Etats donateurs n’accordent pas l’argent sans rien en retour,
mais en contrepartie de leurs besoins; ils n’acceptent pas de financer
des projets gratuitement.
“Je n’ai pas perdu l’espoir d’obtenir des aides; je continuerai donc
à frapper à toutes les portes, en œuvrant afin d’assurer
ce dont notre peuple a besoin. Lorsque le monde constatera que nous agissons
avec sérieux et détermination, il nous viendra en aide.
“Quand une personne est mariée, a un enfant et un revenu annuel
de cinq millions de livres, elle est exemptée de l’impôt.
Quant à l’impôt sur le revenu dont s’acquittent les citoyens,
il n’excède pas 5,5 pour cent. Maintenant, nous connaissons les
rentrées des citoyens d’une manière précise, ce qui
me permet de contrôler les rentrées du Trésor.
“Le jour de mon entrée en fonctions aux Finances, ce département
ne disposait pas d’une calculatrice; aussi, les fonctionnaires procédaient-ils
selon une méthode empirique.
“A présent, nous avons franchi un grand pas au plan de la réorganisation
administrative, c’est pourquoi les malversations sont devenues plus difficiles
que par le passé.
CRÉER DE NOUVELLES POSSIBILITÉS
D’INVESTISSEMENTS
“Sur les 274 milliards de livres, montant des recettes, 11.88 milliards
seulement proviennent de l’impôt sur le revenu.
“Pour en revenir à notre sujet fondamental, nous œuvrons aux
fins de créer de nouvelles possibilités d’investissement
au Liban et, à cet effet, nous nous employons à remettre
en état nos infrastructures; à élaborer des législations
adéquates et stables que nous ne devons pas réviser à
tout bout de champ.
“Nous croyons que la guerre a pris fin sans espoir de retour et que
tout évolue d’une manière normale, ce qui n’est pas vrai,
car les séquelles de la guerre persisteront pendant plusieurs années.
Nous ne devons pas perdre de vue que notre pays pâtit encore de l’occupation.
Le congrès des hommes d’affaires et des investisseurs arabes a tenu
ses assises au “Summerland”, à quelques kilomètres de Naamé
qui a fait l’objet de raids israéliens. L’Etat hébreu
a visé par cette nouvelle agression à prouver aux congressistes
que le Liban ne se prête pas aux investissements. Sinon pourquoi
l’aviation ennemie aurait-elle pris pour cible cette localité où
n’existe aucun objectif militaire, comme c’était le cas en 1982?”
LE CONGRÈS DES INVESTISSEURS ARABES ET CELUI DE DOHA
- Le congrès des hommes d’affaires et des investisseurs arabes,
serait-il le substitut à celui qui doit avoir lieu vers la mi-novembre
à Doha?
“Tout d’abord, le congrès du “Summerland” était une rencontre arabe fondamentale. Puis, les congressistes ont voulu montrer qu’ils peuvent se réunir sans la présence des Américains et des Israéliens ou sans qu’il soit nécessaire de passer par Tel-Aviv ou Washington.” - On dit que la Banque Centrale intervient en permanence pour sauver
la livre. Est-ce exact et, dans l’affirmative, pourquoi?
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Le gouvernement n’est nullement attaché à “l’annexe No 9” jointe au projet du budget 98 |
QUID DU PRIX DE L’ESSENCE?
- Le gouvernement serait-il encore déterminé à
relever le prix de l’essence?
“Nous n’insistons sur aucune majoration, prenons en considération
les différents points de vue et sommes disposés à
adopter la proposition qui nous paraît la plus plausible. Encore
une fois, je ne tiens à aucune clause de “l’annexe NÞ9.”
- Les citoyens protestent contre le relèvement au décuple
de la taxe sur la mécanique, celle-ci étant calculée
sur la base de la puissance du moteur, non sur la marque et l’ancienneté
du véhicule...
“Je suis prêt à adopter tout autre point de vue
qui me paraît valable, étant entendu que partout dans le monde,
la taxe sur la mécanique est basée sur l’utilisation du réseau
routier et non sur la marque de la voiture ou la puissance de son moteur.”
- Al-Capone a pu échapper à tous ses crimes, sauf à
fuir le fisc. Mais au Liban, les personnes influentes parviennent à
échapper aux impôts et taxes; comment expliquez-vous cela?
“Avant les douloureux événements, l’impôt sur le
revenu ne constituait pas la source essentielle des recettes du Trésor.
Puis, l’organisation du service du Fisc requiert plusieurs années,
ce à quoi nous nous attelons depuis 1992. Le service des recettes
compte trois cents contrôleurs fiscaux pour toutes sortes d’impôts,
soit un contrôleur pour 13.000 habitants, alors que dans les pays
européens la proportion est d’un contrôleur pour chaque groupe
de 500 à 800 contribuables.
“De plus, nous avons ouvert un centre pour la réhabilitation
et le recyclage des fonctionnaires où plus d’un millier ont déjà
suivi un cycle de formation. Tout cela exige du temps et de la patience.
Que Dieu nous inspire pour que nos décisions soient saines à
70 pour cent; je n’agis pas seul et suis ouvert à toutes les propositions
constructives.”
J’AGIS SELON MA CONVICTION ET MA CONSCIENCE
- Comment expliquez-vous le rapport établi par la Cour des
comptes ou l’inspection centrale, faisant état d’irrégularités
et de gaspillage dans les services étatiques?
“Le rapport émane de l’inspection et les faits qu’il invoque ne sont pas exacts. En réalité, il a établi une comparaison entre les chiffres du budget de 1996 et 97 que la Chambre des députés avait ratifiés après une étude approfondie. “L’Inspection centrale a le droit de s’interroger sur les raisons du relèvement des crédits d’une année à l’autre, mais pourquoi n’a-t-elle pas réclamé des comptes aux autorités qualifiées? Si les réponses qui lui auraient été fournies se seraient avérées peu convaincantes, elle aurait pu, alors, présenter un rapport. “Quant à s’étonner du fait pour un ministre de s’entourer de conseillers dont les indemnités se montent à six millions de livres par mois et même à vingt-six millions où est le problème? Il ne s’agit pas d’une question d’indemnités accordées à ces conseillers, mais de la façon dont ces derniers s’acquittent de leur mission. Je ne suis pas un dieu, mais j’agis conformément à ma conviction et à ma conscience, en veillant à ce que mes décisions soient dans l’intérêt du pays. “D’aucuns suscitent des batailles fictives pour réaliser des victoires illusoires et certains ne voient qu’un point noir dans un grand mur blanc. Nous devons traiter nos problèmes avec calme, loin de toute crispation. Israël occupe toujours une partie du Sud et nous devons montrer au monde que nous restons solidaires face à l’ennemi et à tous ceux qui cherchent à déstabiliser le Liban.” |
Le congrès
des hommes d’affaires et des investisseurs arabes ne remplace pas le forum de doha |
- Les hôpitaux privés ont menacé de ne plus admettre
les malades pris en charge par le ministère de la Santé,
pour n’avoir pas perçu les arriérés de leurs factures:
pourquoi aux Finances tarde-t-on à les régler?
“Ce sont autant de pressions. En fait, nous avons payé leur
dû aux hôpitaux et il ne leur reste que le reliquat des deux
dernières années. Ce dernier exige le feu vert de la Chambre
des députés et ne relève pas du gouvernement.”