Le
Cabinet haririen ne cache pas sa joie et son enthousiasme: l’Arabie séoudite
a décidé de placer 600 millions de dollars à la Banque
du Liban, “ce qui, assure-t-il, renforcera la monnaie nationale”. Mais
un expert économico-financier affirme le contraire, disant qu’il
s’agit plutôt d’un “soutien artificiel” de la Livre. En attendant,
la commission parlementaire des Finances (notre photo) se perd en conjectures,
avec les milieux financiers: s’agit-il d’un prêt séoudien
ou d’un dépôt à terme?
Le fait pour
le royaume séoudite d’avoir placé 600 millions de dollars
auprès de la Banque du Liban, est diver-sement accueilli et commenté
par les milieux officiels et économiques.
Les premiers s’en félicitent parce que, disent-ils, cette somme
renforcera la monnaie nationale face au dollar.
Mais les seconds ne parta-gent pas cet enthousiasme et soutiennent
qu’il s’agit d’un “soutien artificiel” de la livre libanaise.
Le chef du gouvernement observe que “l’argent séou-dien dont
l’intérêt est de 5%, sera couverti en livres liba-naises,
ce qui consolidera la parité de notre monnaie.”
Cependant, il reste un point à éclaircir: les 600 mil-lions
de dollars d’Arabie séoudite représentent-ils un prêt
ou un dépôt? “C’est un dépôt, précise
le ministre d’Etat pour les affaires finan-cières... Et en cas de
pression sur la livre, ce montant permettra de maintenir la stabilité
monétaire”. Rappe-lons qu’en 1997, la BDl a dû intervenir
à hauteur de deux milliards de dollars - la moi-tié de ses
réserves en cette devise - pour soutenir la livre libanaise.
Mais le ministre d’Etat s’est bien gardé de dire quel usage
il serait fait des 600 millions de dollars et si, le cas échéant,
le Liban est habilité à en disposer à sa guise...
Or, un expert économique, en l’occurrence M. Elie Yachouhi,
pense qu’il s’agit bel et bien d’un prêt. “Si le gouvernement
présente le montant sous forme de dépôt, dit-il, c’est
pour n’avoir pas à rendre compte à l’Assemblée, tout
projet de prêt ou d’accord ayant besoin d’être ratifié
par la Chambre des députés”.
Or, la majorité parlemen-taire est hostile à la politique
d’endettement suivie par le Cabinet haririen.
Aussi, le même expert pense-t-il que ce nouveau prêt affaiblirait
la monnaie nationale au lieu de la ren-forcer. De plus, il s’est pro-noncé
contre sa conversion en livres libanaises, “car il s’agi-rait d’un soutien
artificiel à notre monnaie, l’appui réel ne pouvant venir
que du renforcement de l’économie nationale, à travers la
relance des secteurs productifs, un taux d’emploi suffisant et une politique
de taux d’intérêt.’
Et de soutenir que la cause de la crise financière dans laquelle
le pays se débat, provient du financement de projets improductifs
non rentables.
Tout compte fait il s’agit, une fois de plus, d’une question de confiance.
Or, l’opinion publique accueille désormais avec scepticisme toute
initiative gouvernemen-tale, quelle qu’en soit la nature, étant
donné le résultat désastreux de la politique suivie
jusqu’ici par le Sérail...
Car “chat échaudé, craint l’eau froide”; autrement dit,
on redoute jusqu’à l’appa-rence de ce qui a déjà causé
du tort... |