LE ROI FAHD
Dans son interview, il y a quelques jours, À
Melhem Karam
le roi fahd souriant:
“Le Liban va bientôt récupérer
sa sérénité”.
L’intransigeance israélienne
et la normalisation entravent le processus de paix
Rien à espérer
sans la réintégration des territoires et la création
de l’Etat de Palestine ayant Jérusalem comme capitale
L’action ferme et réaliste
garantira un meilleur avenir aux Etats membres du Conseil de coopération
du Golfe
Le Liban s’est engagé
sur la bonne voie
La concertation est un principe
fondamental de l’Islam et nous n’en dévierons pas
Notre soutien à
la Bosnie et aux musulmans du Kosovo est une action ferme et non une réaction
Les relations avec les Etats
de l’ex-bloc communiste sont vitales et naturelles
L’information doit s’adresser
aux collectivités dans le langage qu’elles comprennent
La “séoudisation” n’est
pas nouvelle et vise à assurer du travail à la main-d’œuvre
séoudite
“La Revue du Liban” et ses
consœurs: “Al-Hawadess”,
“Al-Bayrak” et “Monday Morning” ont réalisé un scoop international,
en enregistrant la première interview avec S.M. le roi Fahd, “Serviteur
des deux saintes mosquées” (dans les langues arabe, française
et anglaise), plusieurs années après son dernier entretien
journalistique et après la propagation de rumeurs mensongères
sur son état de santé que cette interview vient démentir.
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La curiosité
de m’assurer des rumeurs concernant sa santé m’a conduit à
lui, doublée d’une affection et d’une appréciation que je
voue à sa personne qui se distingue par une moralité arabe
authentique et une logique saine, vous portant à le respecter. Tout
ce que j’ai entendu à son sujet, j’en ai trouvé la réponse
claire, avec le sourire paternel et la foi en l’avenir, que Dieu le préserve.
Lecteur toujours avide de plus de connaissances, il se prête
volontiers au dialogue sérieux et vous répond à toute
question. Sa largesse d’esprit l’habilite à trouver une solution
à tout problème, quel qu’il soit et il s’accorde un moment
de réflexion avant d’émettre son avis.
Il a intégré les règles de la théologie
islamique (Fikh), de la direction lucide et sage. Ce qui vous frappe en
vous entretenant avec le “Serviteur des deux saintes mosquées”,
le roi d’Arabie séoudite, Fahd Ben Abdel-Aziz Al-Séoud, est
sa parfaite connaissance de tout ce qui se passe dans le monde, tant à
l’Est qu’à l’Ouest.
Il ne connaît pas la morosité, son attitude laissant
poindre un sérieux mêlé à de la gaieté,
son sourire permanent irradiant la confiance, la promesse et l’espoir.
Fahd Ben Abdel-Aziz voit dans chaque jour une espérance nouvelle.
Ces idées que je lui connaissais, que Dieu le garde, se sont confirmées
au cours de cette rencontre d’une manière certaine et se sont incrustées
dans ma conviction.
Quiconque est reçu par Sa Majesté, remarque une présence
permanente et une disponibilité à toute épreuve, en
plus d’une fraîcheur tant spirituelle que physique, d’une facilité
d’élocution et d’une présence d’esprit hors pair.
Le “Serviteur des deux saintes mosquées” m’a reçu
dans son bureau au palais d’Al-Yamama, à Ryad, la capitale séoudite
où j’ai enregistré cette interview.
TOUJOURS EN FAVEUR DE L’UNANIMITÉ ARABE
Melhem Karam: - Approuvez-vous, Majesté, la tenue d’un sommet
arabe dans un proche avenir? L’Arabie séoudite est-elle disposée
à l’accueillir et l’Irak sera-t-il invité à y prendre
part?
Le roi Fahd: “Par rapport à la tenue d’un sommet, le royaume
est toujours pour l’unanimité arabe. Naturellement, on peut l’envisager
dans le cadre de l’entente commune.”
Melhem Karam: - Existe-t-il des problèmes frontaliers en suspens
avec le Yémen? Quand vous attendez-vous à les régler
définitivement?
Le roi Fahd: “Les commandements dans les deux pays sont tombés
d’accord sur les bases d’un règlement. Les commissions techniques
doivent disposer de plus de temps pour achever leurs travaux de la meilleure
manière possible et c’est ce qui est le plus important.”
Melhem Karam: - Le Conseil de coopération du Golfe est l’unique
rassemblement régional arabe jouissant d’une entité, d’une
présence et d’une efficacité à l’heure actuelle. Comment
concevez-vous l’avenir de cette entité?
Le roi Fahd: “Quiconque revient aux statuts du CCG et aux objectifs
que les chefs des Etats membres veulent atteindre, déployant leurs
efforts dans ce but, à travers les cadres établis, peut entrevoir
les horizons d’un avenir meilleur, car l’action en cours est réaliste
et lucide, éloignée de l’impulsivité et de l’improvisation.”
L’AIDE AU PEUPLE DU KOSOVO
Melhem Karam: - L’Arabie séoudite ne cesse de venir en aide
à la Bosnie et aux peuples islamiques en diverses régions
du globe. Aujourd’hui, le peuple du Kosovo pâtit de la persécution
des Serbes: le royaume dispose-t-il de programmes d’aide à ce peuple,
en plus du soutien politique?
Le roi Fahd: “Le royaume n’agit pas dans ce domaine à partir
de réactions; il existe des règles sur base desquelles il
traite les développements qui surviennent. Les commissions de secours
sont multiples, chacune d’elles connaissant son rôle. Elles œuvrent
d’une manière convenable et au moment opportun.”
Melhem Karam: - Le processus de paix serait-il moribond ou bien y aurait-il
encore quelque espoir de le relancer?
Le roi Fahd: “La paix est une demande fondamentale pour tous les peuples
de la terre. C’est pourquoi, elle doit triompher partout, à plus
ou moins brève échéance, car la volonté de
paix mérite le soutien de la communauté internationale qui
a foi dans la légalité.”
JÉRUSALEM REVIENDRA À LA SOUVERAINETÉ
ARABE
Melhem Karam: - Avez-vous l’espoir de voir Jérusalem ou sa partie-est
revenir à la souveraineté arabe? L’Arabie séoudite
accepte-t-elle son internationalisation pour maintenir la Ville sainte
ouverte à toutes les religions célestes, ce qui était
possible avant le revers de 1967?
Le roi Fahd: “L’espoir en Dieu est grand et rien n’entravera la création
de l’Etat de Palestine, car le droit l’emportera en définitive.
Cet Etat n’aura pas la position qu’il mérite dans le cœur des musulmans,
des chrétiens et de tous les gens équitables, si Jérusalem
n’est pas sa capitale.”
Melhem Karam: - Quel est l’état des relations du royaume avec
les Etats islamiques d’Asie centrale qui faisaient partie de l’ex-Union
soviétique? Quel est le degré d’activité avec ces
Etats au double plan commercial et culturel?
Le roi Fahd: “Les relations avec ces Etats, à l’instar des autres,
sont naturelles, vitales et servent les intérêts communs.
Ce qui les renforce, c’est le fait pour l’économie du royaume de
suivre le système libéral. Aussi, constate-t-on que la coopération
s’exerce au double plan public et privé, le plus capable de favoriser
le développement et l’action intensive multi-dimensionnelle”.
Melhem Karam: - Sur le plan intérieur, quelle est la part de
succès des efforts déployés par le royaume pour “séoudiser”
les fonctions professionnelles et administratives? Ceci a-t-il aidé
le royaume à se passer de la main-d’œuvre étrangère?
Le roi Fahd: “Le plan de séoudisation des fonctions professionnelles
et administratives n’est pas nouveau, son objectif fondamental étant
de faire travailler, en premier lieu, la main-d’œuvre séoudite,
partant du fait que cela est un devoir national.
“Les efforts déployés dans ce domaine donnent satisfaction,
surtout après que le royaume eut achevé la mise au point
de l’infrastructure, celle-ci ayant nécessité l’appel à
la main-d’œuvre “importée” pour gagner du temps.”
LES RELATIONS SÉOUDO-IRANIENNES
Melhem Karam: - Comment jugez-vous l’évolution des relations
séoudo-iraniennes après la visite de Rafsandjani et Kharazi
au royaume; celle prévue du prince Saoud Al-Fayçal à
Téhéran et l’invitation que vous avez adressée au
président iranien?
Le roi Fahd: “Ces relations ne cessent de s’améliorer, l’échange
de visites entre les responsables des deux pays, en est un bon indice,
de nature à servir les intérêts des deux peuples musulmans
et de ceux qui ont en charge ses problèmes. Le Conseil supérieur
compte sur cela et bénit les initiatives qui sont prises.”
Melhem Karam: - Qu’en est-il des relations séoudo-yéménites
et pourquoi les réunions visant à régler le problème
des frontières se sont-elles arrêtées?
Le roi Fahd: “Les relations séoudo-yéménites sont
profondément enracinées et ne cessent de s’améliorer.
En ce qui concerne les réunions, elles ne se sont pas arrêtées,
car les deux pays manifestent le désir de réaliser plus de
progrès sur ce plan.”
Melhem Karam: - Les relations fraternelles solides existant entre le
royaume, l’Egypte et la Syrie constituent la base de l’action arabe: sur
quoi reposent-elles dans cette étape et à l’avenir?
Le roi Fahd: “Ces relations reposent sur des fondements tirant leur
force de maints facteurs qu’on ne peut résumer maintenant. C’est
pourquoi, leur avenir est bénéfique et on les envisage avec
beaucoup d’optimisme.”
Melhem Karam: - Jusqu’à quel point les relations avec l’Afrique
du Sud ont-elles évolué après la visite de Nelson
Mandela au royaume?
Le roi Fahd: “Ces relations prennent des dimensions positives, en vue
de consolider les liens dans l’intérêt des deux peuples amis
qui ont été éloignés, en raison de la discrimination
raciale dont pâtissait ce pays ami, ses négativismes s’étant
estompés sans espoir de retour.”
Melhem Karam: - L’information arabe s’acquitte-t-elle de son rôle
au sein et en dehors du monde arabe, face aux campagnes occidentales suspectes?
Le roi Fahd: “L’information arabe s’acquitte d’un rôle louable,
mais ceux qui s’y dépensent ou lui apportent leur contribution devraient,
chacun dans la mesure de ses possibilités, s’adresser aux autres
collectivités dans les langues qu’elles comprennent. Il n’est pas
nécessaire que cela s’effectue à travers les moyens médiatiques
arabes, car des opportunités se présentent pour faire entendre
la voix arabe à travers l’information étrangère, laquelle
donne l’occasion à l’autre d’exprimer son opinion.”
NORMALISATION ET JUDAÏSATION
Melhem Karam: - A la conférence des ministres des Affaires étrangères
des Etats membres de l’Organisation islamique ayant tenu ses assises à
Qatar, les Syriens ont proposé le gel de toute normalisation des
relations arabes avec Israël. L’Arabie séoudite appuie-t-elle
cette proposition, d’autant que l’opération de paix est bloquée?
Le roi Fahd: “Ce qu’exprime, à ce sujet, la République
arabe syrienne sœur est la conséquence naturelle du gel des négociations
de paix, à cause de l’intransigeance israélienne. La normalisation
et l’espoir fondé par certains sur elle, ne peut se réaliser
sans la concrétisation des objectifs à atteindre, en tête
desquels la récupération des terres arabes et la création
de l’Etat palestinien ayant Jérusalem comme capitale.”
Melhem Karam: - Jérusalem a toujours occupé une place
de choix dans la politique étrangère du royaume pour des
raisons religieuse, politique et nationale. On constate, à ce propos,
que la judaïsation progresse en force: de quelles cartes disposez-vous
pour faire pression sur cette politique de judaïsation active et la
freiner?
Le roi Fahd: “La foi absolue dans la justesse de la cause; puis, la
réactivation de toutes les forces éprises de paix, pour les
amener à prendre le parti du droit et empêcher l’amplification
des périls qui menacent l’une des plus importantes régions
du globe.”
LA JEUNESSE, PILIER DE LA NATION
Melhem Karam: - L’intérêt que vous portez à la
jeunesse modèle est-il permanent et jusqu’à quel degré
pariez-vous sur elle?
Le roi Fahd: “La jeunesse est le pilier de la nation et, après
Dieu, elle est notre espoir dans la poursuite de l’œuvre de l’édification
bénéfique. C’est pourquoi, l’intérêt que nous
lui portons et le fait de lui assurer la connaissance, tout en l’habilitant
à assumer les charges de la responsabilité de la meilleure
façon possible, constituent l’un des objectifs stratégiques
dans nos ambitieux plans de développement.”
Melhem Karam: - Qu’en est-il du Conseil consultatif et comment évaluez-vous
son action? Le “Serviteur des deux saintes mosquées” est-il satisfait
de la constitution de cette entité et l’expérience a-t-elle
donné les preuves de son succès en Arabie séoudite
et dans le Golfe? La démocratie de la concertation est-elle dépassée
ou bien est-elle appelée à évoluer?
Le roi Fahd: “Avant toute chose, je dois être clair: la concertation
est un principe fondamental dans l’Islam, dont on ne doit pas dévier.
Nous l’appliquons d’une manière stricte dans toutes nos affaires
publiques et privées. Le Conseil consultatif est constitué
sur cette base; aussi, ses membres œuvrent-ils, chacun dans le domaine
de sa spécialisation, mus par l’esprit d’équipe et soucieux
de servir l’intérêt public, pour satisfaire leur Créateur
et non par complaisance à qui que ce soit.”
LE LIBAN S’EST ENGAGÉ DANS LA BONNE
VOIE
Melhem Karam: - Comment voyez-vous l’avenir du Liban, dont vous avez
été l’artisan de son unification et de son essor à
Taëf?
Le roi Fahd: “Dieu merci, le Liban s’est engagé dans la bonne
voie, ce qui sert l’intérêt du peuple libanais tout entier.
Ceci nous réjouit et nous tranquillise quant à son évolution
vers un état meilleur. D’autant que le peuple libanais auquel nous
vouons toute affection et appréciation, est fidèle, aimant
et habilité à assumer les charges difficiles qui accélèrent
le progrès et la prospérité.”
Melhem Karam: - Craindriez-vous pour sa stabilité au cas d’un
retrait subit d’Israël?
Le roi Fahd: “Il n’y a pas lieu de craindre sur son avenir, car le
Liban, président, gouvernement et peuple, vit intensément
les soucis de la patrie; il sait comment s’immuniser et consolider sa souveraineté.”
Melhem Karam: - Que souhaitez-vous, Majesté, pour son peuple
et sa Presse, à l’approche de l’échéance présidentielle?
Le roi Fahd: “Je souhaite au peuple du Liban plus de bien-être
et de stabilité. De même, je souhaite que la Presse libanaise,
qui dispose de cadres professionnels spécialisés, réalise
les besoins de la patrie et poursuive ses efforts louables, à l’effet
de renforcer l’action destinée à édifier le Liban
dans son ensemble et de le rendre meilleur qu’il n’a jamais été
sous son ère la plus prospère." |