AMBASSADEUR DE POLOGNE:
TADEUSZ STRULAK
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Né
le 10 juillet 1932 à Varsovie, M. Tadeusz Strulak, ambassadeur de
Pologne, est un diplomate de carrière. Titulaire d’un MA en relations
internationales modernes, il a fait ses études à la Faculté
diplomatique et consulaire, ainsi qu’à l’Ecole centrale pour le
service étranger à Varsovie.
Il a assumé depuis 1955, diverses fonctions au sein de la
commission internationale de contrôle et de surveillance au Vietnam;
a été en poste en Indonésie, en Inde, au Népal
et au Sri Lanka.
Il a, également, fait partie du comité de décolonisation
des Nations Unies dans les années 70 et garde des souvenirs spéciaux
de missions qu’il a accomplies dans plusieurs pays africains (Namibie,
Mozambique, Angola et Zimbabwé, ex-Rhodésie du Sud).
Il a été membre du comité du désarmement
et de la non-prolifération des armes nucléaires et pris part
aux négociations de Vienne, en 1973, en vue de la réduction
des forces en Europe centrale. Il lui a été donné
de coopérer avec des personnalités illustres, entre autres:
Garcia Robles (Prix Nobel), Olof Palme et Edgar Faure.
SIMILITUDES ENTRE BEYROUTH ET VARSOVIE
- Qu’est-ce qui vous a le plus impressionné depuis votre
arrivée au Liban et y aurait-il quelque similitude entre votre pays
et le nôtre?
“Dès notre arrivée au Liban, ma femme et moi avons été
impressionnés, d’un côté, par la beauté du Liban
et sa nature mais de l’autre côté, nous avons été
frappés par la négligence de cette dernière et par
la prédominance du béton sur la verdure.
“Quant aux similitudes, il y a des zones de Beyrouth qui nous ont rappelé
notre capitale, Varsovie, complètement anéantie par les nazis
en 1944 et d’autres qui nous ont rappelé la grande œuvre de renaissance
et de reconstruction que la nation polonaise avait assumée avec
enthousiasme et dévouement après la Deuxième Guerre
mondiale.
“Sur le plan spirituel, on ne peut mieux dire que de citer Michel Chiha
qui a écrit, en 1953: “Entre la Pologne et le Liban, il y a une
communauté de pensées et de traditions née des vicissitudes
de l’existence nationale et un goût de l’hospitalité qui rapprochent
davantage.”
- Quels sont la nature des relations entre Varsovie et le monde
arabe, en général et Beyrouth en particulier et, l’état
des échanges dans les domaines économique, culturel et commercial?
“Ce sont des relations d’amitié et de coopération, basées
sur des liens anciens entre notre pays et ceux de l’Orient, la fascination
par la fine culture arabe. De plus, aujourd’hui s’ajoutent les intérêts
économiques mutuels, ainsi que la sollicitude commune pour la paix.”
CONTACTS REMONTANT AU XVIÈME SIÈCLE
“Dans le cas du Liban il y a, en effet, une tradition de contacts datant
du XVIème siècle. Voyageurs, pèlerins, militaires
et missionnaires polonais venaient ici.
“Le séjour dans “un couvent au-dessous des nuages”, à
Ghazir, a inspiré le grand poète, Jules Slowacki, pour y
écrire une de ses œuvres les plus célèbres. Un événement
bien gardé dans notre mémoire est le séjour au Liban
de milliers de réfugiés polonais dans les années quarante,
l’hospitalité chaleureuse qui leur a été accordée
par les autorités et le peuple libanais.
“Quant à l’état présent des échanges économiques,
commerciaux et culturels, je regrette de dire qu’ils se sont détériorés
pendant les dernières années. Premièrement, à
cause de la guerre au Liban; deuxièmement, à cause des profondes
transformations économiques en Pologne. Cependant, il y a de la
part de la Pologne, une nouvelle volonté de développer les
relations avec le Liban, dans les domaines politique, économique
et culturel. D’ailleurs, c’est en cela que consiste ma mission en tant
qu’ambassadeur dont le poste a été rétabli après
seize ans de rupture.”
RELATIONS AVEC L’EUROPE DE L’EST
- Comment évoluent les relations entre la Pologne, la Russie
et les pays de l’Est?
“Le développement des relations avec les pays voisins de l’Europe
de l’Est est un sujet d’intérêt et d’efforts particuliers
dans la politique étrangère de la Pologne. Bon voisinage
avec la Russie et partenariat stratégique avec l’Ukraine, ainsi
que coopération étroite avec la Lituanie et les autres pays
baltes, sont des éléments essentiels de notre “politique
orientale”.
“La Russie est un important partenaire de la Pologne et le gouvernement
polonais désire développer avec elle la coopération
de bon voisinage, notamment dans les domaines économique et culturel.
Comme l’a dit le Premier ministre, Jerzy Buzek, son gouvernement va œuvrer
pour renforcer les contacts polono-russes.
“Quant à l’Ukraine, on considère son indépendance
comme essentielle pour la sécurité de la Pologne et la stabilité
de toute la région. C’est pourquoi, les relations privilégiées
entre la Pologne et l’Ukraine ayant pour but l’établissement du
partenariat stratégique, sont dans l’intérêt aussi
bien des deux pays que du renforcement de la sécurité européenne.”
- A quels problèmes le gouvernement polonais est-il confronté
actuellement, auxquels il est appelé à trouver des solutions
urgentes?
“La Pologne est toujours dans la phase de profondes transformations
économiques et sociales. Elle est en train de construire une économie
de marché libre et un système démocratique, en attachant
une grande importance aux problèmes sociaux. Etroitement liées
avec ces tâches sont les priorités de la politique étrangère
de la Pologne: l’adhésion à l’OTAN et l’intégration
aussi vite que possible avec l’Union européenne.”
EVÈNEMENT HISTORIQUE
- Après la signature des protocoles
d’adhésion en 1999 de la Pologne, de Prague et de Budapest à
l’OTAN, quelles seront les obligations des trois capitales à l’égard
de l’Organisation atlantique?
“La signature, le 16 décembre dernier, par les ministres des
Affaires étrangères des Etats membres de l’OTAN du protocole
d’adhésion en 1999 de la Pologne, de la République tchèque
et de la Hongrie a été jugée comme un événement
d’importance historique.
“Elle dénote l’expansion de la zone de sécurité
et de stabilité dans la région euro-atlantique, conformément
aux vœux et aux intentions des Polonais. La Pologne accepte, pleinement,
les obligations du traité de l’Atlantique Nord, en ce qui concerne
l’unification des efforts pour la défense commune, le maintien de
la paix et de la sécurité. Les principes de la politique
polonaise de sécurité sont en plein accord avec celles formulées
dans les documents de l’OTAN, notamment la conception stratégique
de 1991. La Pologne est bien disposée à participer au développement
et à la réalisation de la stratégie de l’alliance.
Les forces armées polonaises sont prêtes à conduire
les opérations prévues par l’article V du Traité de
Washington et à prendre part à de nouvelles missions de l’alliance.
“Au moment de devenir membre, la Pologne mettra à la disposition
de l’alliance, toutes ses forces opérationnelles. Elle a une grande
expérience de plusieurs années de participation aux opérations
et missions de paix de l’ONU et de la CSCE. Plus que 31 mille soldats polonais
y ont participé, leur nombre à l’heure actuelle étant
1500 (dont plus de 600 au Liban). En Bosnie, 500 soldats polonais participent
à l’opération de SFOR dans le cadre de la brigade nordique
- polonaise et la Pologne s’est déclarée prête à
maintenir cette présence en cas de besoin. A la demande de l’alliance,
on a décidé de mettre un bataillon polonais à la disposition
des forces internationales de stabilité.
“La Pologne serait prête à installer sur son territoire
des comman-dements de l’OTAN et d’autres éléments de l’infrastructure
de l’alliance. Des efforts systématiques sont déployés
pour améliorer l’interopérabilité du système
de défense polonais et pour y introduire les standards de l’OTAN.
Au cours des prochaines années, la Pologne prendra les mesures nécessaires
afin de moderniser ses forces armées. Les tâches de ces forces,
ainsi que leurs besoins, sont déjà coordonnés dans
le processus de planification de la défense de l’alliance. Les autorités
polonaises se rendent compte des conséquences financières,
à la suite de l’adhésion polonaise à l’alliance et
sont prêtes à y faire face.”
COMMERCE EXCÉDENTAIRE AVEC LE MONDE
ARABE
- Le commerce extérieur de la Pologne est-il excédentaire
ou affiche-t-il un déficit; par rapport à quels pays d’Europe
et du monde arabe?
“Le commerce extérieur de la Pologne montre, en général,
un déficit de 11.289 millions de dollars US (exportations environ
27 milliards, importations environ 38 milliards). Le bilan négatif
du commerce est lié, principalement, au taux élevé
du développement du pays (6,9% en 1997) et les transformations de
l’économie en cours. Le principal partenaire commercial de la Pologne
est l’Union Européenne, dont les pays sont destinataires de 70%
de nos marchandises exportées et contribuent à 74% de nos
importations.
“Quant au commerce de la Pologne avec le monde arabe, il était
en 1997 excédentaire et a montré la balance positive de presque
200 millions de dollars US - contre le chiffre total du commerce de presque
600 millions de dollars.”
- Le sommet trilatéral (polono-roumano - ukrainien) ayant
eu lieu en novembre dernier à Budapest, a décidé d’établir
entre les trois pays une zone de stabilité politique, de coopération
économique, de la Baltique à la mer Noire, selon le modèle
franco-allemand: des projets de coopération ont-ils été
déjà élaborés entre eux et dans quels domaines
précis?
“Parmi les problèmes discutés entre la Pologne, l’Ukraine
et la Roumanie, figuraient ceux de la sécurité régionale,
de la sécurité économique (en particulier nouvelles
sources d’énergie pour l’Europe Centrale) et de la coopération
dans le cadre de l’Eurorégion Carpathes. La discussion visait, principalement,
à désigner l’espace de coopération possible entre
les trois pays.
“La Pologne attache une grande importance à la coopération
régionale et y prend part dans plusieurs Eurorégions dont
des provinces polonaises font partie. Un accord établissant la plus
grande Eurorégion a été signé le 22 février
à Malbork (Pologne) par six pays littoraux de la mer Baltique: Danemark,
Lettonie, Lituanie, Pologne, Russie et Suède. L’accord prévoit
une intégration des activités dans les domaines de l’industrie,
de l’agriculture, de l’économie forestière, du transport,
des échanges de jeunesse, de la coopération culturelle, de
l’amélioration des communications et de l’uniformisation des procédures
aux passages frontaliers.”
LIBAN-POLOGNE
- La Pologne peut-elle contribuer et dans quel domaine à
la reconstruction des régions libanaises dévastées
par la guerre ou à la remise en état de nos infrastructures?
“La Pologne a un potentiel économique, technique et de know
- how considérable, ainsi qu’une expérience de la reconstruction
et des projets réalisés dans divers pays, notamment au Proche
Orient. Les entreprises polonaises importantes s’intéressent aux
possibilités de participation aux projets de reconstruction et de
développement de l’infrastructure au Liban.
“Ainsi, un projet majeur de réhabilitation des réservoirs
et des châteaux d’eau détruits pendant la guerre, a été
réalisé par une firme polonaise dans la formule de “joint
venture” avec un partenaire libanais. La même firme s’est adjugé
l’adjudication pour un projet d’irrigation au Sud de la Békaa. Elle
s’intéresse aussi, comme d’autres entreprises polonaises, à
la construction de stations d’épuration dans différents endroits
du Liban, la Pologne disposant d’un potentiel spécialisé
dans ce domaine.”
LE CONFLIT DU P.-O.
- Le gouvernement polonais est-il en mesure de réactiver
le processus de paix au Proche-Orient et, dans la négative, peut-il
aider les peuples de cette région, spécialement les Pales-tiniens,
à améliorer leurs conditions de vie?
“Il serait abusif de parler d’une capacité du gouvernement polonais
de réactiver le processus de paix au Proche-Orient. Mais, sans aucun
doute, la Pologne reste fortement intéressée au progrès
de ce processus. Le ministre polonais des Affaires étrangères,
M. Bronislaw Geremek qui est, également, président de l’Organisation
de Sécurité et de Coopération en Europe en 1998, a
exprimé dans son exposé devant le parlement polonais, l’espérance
que les négociations en vue d’une solution du conflit israélo-arabe
seront accélérées, avec le souci de respecter les
droits et les intérêts de toutes les parties. S’adressant
au corps diplomatique à Varsovie, il avait souligné
la volonté du gouvernement polonais de renforcer son engagement
dans la solution des conflits régionaux. La présence de mille
soldats polonais au Liban-Sud et au Golan est certainement une preuve de
notre engagement vis-à-vis du processus de paix au Proche-Orient.”
- Quel est votre meilleur souvenir de diplomate?
“Je garde plusieurs souvenirs de ma carrière diplomatique de
plus que 40 ans. De ma première mission diplomatique, en 1955, à
la Commission internationale de surveillance et de contrôle au Vietnam,
je me souviens d’un accueil chaleureux réservé à un
groupe d’inspecteurs de la commission par les paysans vietnamiens d’un
village éloigné qui nous ont offert des œufs comme expression
de leur reconnaissance et de leur foi en la capacité de la diplomatie.
Mon séjour et ma mission en Indonésie, en Inde, au Népal
et au Sri Lanka, m’ont laissé des impressions indélébiles
de la beauté de ces pays asiatiques, de leur riche et vieille culture,
de l’hospitalité et de l’amitié des gens.
“De mon travail au comité de décolonisation des Nations-Unies
dans les années soixante-dix, j’ai retenu des souvenirs spéciaux
d’une première mission du comité en Afrique, afin d’établir
des contacts avec les “leaders” des mouvements de libération de
Namibie, du Mozambique, d’Angola et du Zimbabwe (alors Rhodésie
du Sud).
“De mes activités dans le domaine du désarmement durant
presque 25 ans, je me souviens d’une atmosphère de pionniers qui
a accompagné le début des négociations de Vienne en
1973, sur la réduction des forces en Europe centrale et l’achèvement
en 1989, sous ma présidence, des rencontres et des travaux communs
avec les grands hommes de notre époque comme le prix Nobel Garcia
Robles, Olof Palme et Edgar Faure, des efforts internationaux déployés
en vue de consolider l’usage pacifique de l’énergie nucléaire
à l’Agence internationale de l’Energie atomique, des conférences
consécutives de révision de traité de non-prolifération
nucléaire. J’ai présidé plusieurs comités,
au sein du groupe de fournisseurs nucléaires.”
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