Editorial


Par MELHEM KARAM 

 
LE CONFLIT ENTRE CATHOLIQUES ET PROTESTANTS A-T-IL PRIS FIN?
TONY BLAIR, L’HOMME AUX INITIATIVES TRANSCENDANTES
Les guerres ont ra-rement des inter-prétations ration-nelles, surtout lors-qu’elles durent des dizaines d’années. Et quand les Etats concer-nés par ces guerres vivent, depuis long-temps, la démocratie et se réclament de l’Eu-rope de la paix.
Cette fierté, les négociateurs irlandais et britanniques, les catholiques et les protestants, les républicains et les unionistes devaient la dépasser pour parvenir à l’entente.
Il est exagéré de dire que ce qui s’est produit est historique, car il n’est pas permis de qualifier un conflit d’“historique” juste pour sa longue durée. Ce à quoi ont abouti les médiateurs, s’est limité à la récupération de la fierté, sans plus. Tous ont joué un rôle principal louable: l’Américain George Mitchel, les deux “ennemis” jurés: Gerry Adams, chef du “Sinn Fein” et David Trimble, leader du parti unioniste en Ulster. Ces deux leaders qui devaient rendre des comptes à leurs partisans, ont manifesté un courage hors pair. Le plus important de ce qui s’est passé entre les protestants et les catholiques réside en ce que l’accord a été réalisé, parce que tous deux ont accompli un pas en avant sans renier leurs principes.
Pour les unionistes protestants (Anglais), l’Irlande du Nord reste partie intégrante du Royaume Uni. Et pour les catholiques (Irlandais), l’espoir en l’instauration d’une Irlande unie jouissant de la souveraineté, est consigné dans le texte de l’accord.
Mais cette paix, si elle était réalisée, demeurerait, politiquement, la paix de Tony Blair, le Premier ministre britannique qui a dépassé sa bonne réputation en tant qu’homme d’Etat moderne. Il a prouvé que la politique ne capitule pas devant les grandes difficultés à la dimension d’une guerre dont on dit qu’elle n’est pas sujette à être réglée, sauf “par une guerre remontant aux racines, à laquelle prendraient part nos ancêtres.”
Ainsi, Tony Blair est devenu le symbole d’une nouvelle génération de jeunes et de politiciens, avec un style propre et une pratique nouvelle. Avec ce style, il a mérité l’honneur de pratiquer la politique d’une position très élevée.
Naturellement, tout n’a pas encore pris fin. Des blessures corporelles et morales prennent beaucoup de temps et de longues années pour se cicatriser, tout en laissant des séquelles. Nous sommes donc avec une paix faible et inconsistante: des attentats ou un acte de sabotage perpétrés par l’une des parties peuvent la compromettre, du moins jusqu’au 22 mai prochain, date à laquelle le référendum décidera de la solidité de la paix ou de sa faiblesse.
Le jour de la commémoration de 1921, date de la scission de l’Irlande en deux parties, les porte-parole des protestants ont signé un accord politique de trêve avec les représentants des nationalistes au sein de la minorité catholique.
La fin de la guerre ne signifie pas la fin de la violence et la capitulation de tous les dissidents qui souscriraient au processus de paix.
Ce serait du pessimisme ou une tentative de minimiser l’importance de l’accord de la part des fatalistes qui invoqueraient le processus de paix au Proche-Orient et son enlisement dans les sables mouvants. Cependant, le cadre européen n’a aucun rapport avec ce qui se passe dans le dépôt de poudre au Moyen-Orient. La guerre d’Irlande a été une exception gênante en Europe, alors que la paix au Proche-Orient reste un espoir.
Les guerres ne se ressemblant pas et se différenciant toujours les unes des autres, il est puéril de comparer une paix à une autre.
Ainsi, nous disons: Bienvenue à Tony Blair. Bienvenue aux dirigeants irlandais: Bertie Ahern, Gerry Adams et David Trimble. Le réalisme a triomphé dans leur action, alors que la force s’est incarnée dans la médiation américaine et c’est ce que nous devons relever avec gratitude.
Ce qui rassure quelque peu, c’est que les jours ayant suivi l’accord ont prouvé sa justesse, les deux parties ayant été persuadées de sa validité et dénoncé la guerre.
Les dernières solennités de la fête de Pâques n’ont enregistré aucun incident, bien qu’elles aient commémoré la rébellion républicaine de 1916.
De même, la marche du lundi de Pâques s’est déroulée en paix. Quant à Tony Blair, il n’a pas perdu une seconde de son temps. Dès la signature de l’accord, il a appelé les habitants de la ville verte à voter en masse au référendum du 22 mai et à approuver l’accord de Belfast sur les nouveaux règlements concernant l’Ulster et la république du Nord.
Pour gagner son pari, Blair a invité le président Bill Clinton à se rendre à Belfast, une semaine avant le référendum. Et ce, pour lui rendre la pareille lorsqu’il s’est tenu à ses côtés à la Maison-Blanche, au moment où il s’était trouvé dans l’embarras à la suite du scandale de Paula Jones.
De même, il a invité son prédécesseur, John Major à qui il reconnaît le mérite d’avoir lancé le processus de paix en 1992.
De plus, il a demandé au républicain Gerry Adams et au protestant David Trimble de faire approuver l’accord au niveau de leurs bases populaires, après que le premier eut obtenu un appui quasi-officiel de l’IRA (l’organisation militaire irlandaise) et, le second, le soutien du conseil exécutif du parti unioniste de l’Ulster, partie protestante disposant de la majorité et se distinguant par la modération au Nord. 
Photo Melhem Karam

Home
Home