Ex-bâtonnier de l’Ordre des avocats de Beyrouth (1995-1997),
Me Chakib Cortbaoui a suivi un parcours professionnel bien chargé.
Après des études de droit à l’Université St
Joseph, il effectue son stage à l’étude de feu Me Chahine
Hatem (1967-1970). Il fonde en 1974 sa propre étude et fait partie
depuis 1984 d’un cabinet d’avocats associés. Il est l’auteur
d’un recueil de jurisprudence depuis 1974.
L’insurrection des détenus de Roumié.
Les familles des détenus rassemblées
dans la cour intérieure de la prison.
Une révolte à mains “ensanglantées”.
L’un des prisonniers japonais derrière les
barreaux
de Roumié.
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Politisée,
la mutinerie de la prison de Roumié a réussi, néanmoins,
à lever le rideau sur les lacunes d’un système pénitentiaire
défectueux: encombrement des prisons, promiscuité, oisiveté,
manque d’hygiène... Qui blâmer? La désuétude
d’une législation libanaise? La violation de ses dispositions dans
l’exercice pratique de la loi? Ou le laisser-aller des responsables politiques
affirmant que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes?
Il serait pourtant injuste de prétendre
que le problème se situe, uniquement, au niveau des établissements
pénitentiaires. C’est tout le processus judiciaire qui devrait être
remis en question. Pour une meilleure compréhension du contexte
actuel où théorie et pratique se confrontent, nous nous proposons
d’étudier la procédure pénale dans toutes ses étapes:
constatation de l’infraction, instruction du dossier, arrestation, jugement
et emprisonnement de l’inculpé.
Me Chakib Cortbaoui, ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats
de Beyrouth, dénonce les exactions vécues sur le terrain
et propose des solutions de rechange. Pour souligner le grand retard
à rattraper dans ce domaine, nous complétons cette
étude par un aperçu exhaustif sur l’évolution des
méthodes pénitentiaires dans les pays évolués.
LES PRINCIPES DE LA PROCÉDURE PÉNALE
ET SON APPLICATION PRATIQUE
Dans une première
phase, l’infraction est portée à la connaissance de la justice
par la plainte de la victime, la dénonciation d’un tiers ou l’arrestation
en flagrant délit. L’inculpé est, alors, interrogé
par la brigade judiciaire (commissariat de police) qui enquête auprès
des plaignants et des co-inculpés, opère les confrontations
nécessaires et transmet, immédiatement, le dossier au procureur
général. Légalement, l’inculpé ne peut être
retenu au commissariat de police plus que 24 heures.
Le procureur général étudie, à son tour,
le dossier et le confie à un juge d’instruction. Ce dernier se charge
d’instruire l’affaire, de rassembler les preuves et de fournir au tribunal
tous les renseignements utiles sur l’inculpé. Il peut, également,
décerner contre lui des mandats d’arrêt s’étalant sur
toute la période de l’instruction.
Enfin, l’inculpé est traduit devant le tribunal qui se charge
de le juger et de le condamner à une peine d’emprisonnement proportionnelle
à l’infraction commise.
Malheureusement, l’application de ces principes dévoile une
carence législative et une transgression répétée
de la loi. Très souvent, la brigade judiciaire se permet de retenir,
illégalement, l’inculpé pendant plusieurs jours dans les
locaux du commissariat de police.
En outre, la loi libanaise ne prévoit pas de délai-limite
pour l’arrestation de l’inculpé durant l’instruction du dossier.
Cette faculté d’appréciation laissée au juge d’instruction,
constitue une porte ouverte aux abus. En effet, la détention traîne
des mois et des années avant que l’inculpé soit déféré
devant le tribunal pour être jugé. C’est une des raisons multiples
qui expliquent l’encombrement des prisons au Liban. Le ministre de la Justice
vient d’élaborer un projet de loi en vue de définir les limites
de la période d’arrestation.
Un troisième problème se rapporte au retard que mettent
les tribunaux pour rendre leur verdict. Le manque de magistrats en serait
l’une des causes principales, 200 juges n’ayant pas été recrutés
en période de guerre. Ce retard ne peut être rattrapé
de sitôt, vu le délai qu’exige la formation de nouvelles promotions
de candidats.
En attendant, le parlement étudie un projet de loi autorisant
le Conseil supérieur de la magistrature à recruter des avocats
ayant de l’expérience. N’empêche que ce problème persistera
encore longtemps et un grand nombre d’inculpés continueront d’attendre
leur jugement.
Cet état de fait entraîne deux conséquences:
1- Certains prévenus vivent une période d’incarcération
qui dépasse de loin la peine correspondante à l’infraction
commise.
2- La lenteur des tribunaux provoque un phénomène très
grave dont les mutins de Roumié se sont plaints: encombrement des
prisons et promiscuité dans les cellules.
CONDITIONS DE DÉTENTION
Selon Me Cortbaoui,
priver un inculpé de sa liberté, n’équivaudrait pas
à le dépouiller de ses droits. Toutefois, au lieu d’œuvrer
à sa rééducation pour le guérir de ses tendances
antisociales, les établissements pénitentiaires le soumettent
à de pénibles conditions de vie et de détention, capables
de le corrompre au lieu de l’amender.
PROMISCUITÉ
Roumié, seule prison qui mérite son nom, devrait abriter,
à l’origine, un maximum de mille prisonniers. En fait, elle regroupe,
actuellement, 3.300 détenus environ dont 1700 attendant toujours
d’être jugés. Cette promiscuité très néfaste
à tous les niveaux, s’explique par le manque d’établissements
pénitentiaires.
L’encombrement des cellules où s’entassent trois fois plus de
personnes que prévu, engendre de graves problèmes de triage,
d’hygiène, de santé, d’aération et de moralité.
En effet, les critères de triage des prisonniers définis
par la loi de 1949, à savoir: la durée d’emprisonnement,
le délit ou le crime commis, le niveau intellectuel et moral, ne
sont pas respectés.
L’encombrement des cellules est tel que les détenus sont contraints
de se serrer l’un contre l’autre pour dormir et de se piétiner pour
pouvoir se déplacer. Cet entassement favorise de même l’homosexualité,
provoque un bruit assourdissant et un manque d’aération, sans oublier
les odeurs nauséabondes qui se dégagent des WC saturés.
OISIVETÉ
Aucune activité n’est prévue pour occuper les détenus
et les rendre utiles durant la période d’incarcération. Cette
oisiveté nocive et dépravante les incite à la délinquance
et développe en eux un sentiment de haine contre la société!
L’expérience de feu Me Roland Abou-Chédid vient attester
cet état de fait. De connivence avec un juge d’instruction, il a
réussi dans les années 60 à se faire emprisonner dans
les prisons des sablons pendant une dizaine de jours.
A sa sortie, il rédige un ouvrage où il décrit
l’oisiveté tuante des prisonniers et ses répercussions néfastes
sur leur personnalité. Ceux-ci passent leurs journées à
ruminer des idées noires et à nourrir une haine aveugle contre
le magistrat, leur avocat, leur propre famille et contre la société
tout entière.
En outre, aucun suivi psychologique ou psychiatrique n’est assuré
pour les préparer à une réintégration sociale.
Cette coupure avec le monde extérieur (interdiction de TV et de
journaux), exerce sur eux un effet dépersonnalisant et désocialisant.
Me Cortbaoui considère qu’il est dans l’intérêt de
la société de traiter les détenus en tant qu’êtres
humains, sinon les prisons sécrèteraient un nombre croissant
de criminels et de récidivistes.
TOXICOMANIE ET PROBLÈME DE PERSONNEL
Un phénomène bien plus grave vient s’ajouter à
cette longue liste. C’est celui des toxicomanes, considérés
par la loi comme étant des criminels et condamnés à
purger une peine de prison. Aucun centre de désintoxication n’est
prévu pour les traiter. Citons le cas d’un père et de son
fils, tous deux toxicomanes, emprisonnés puis relâchés
récemment, grâce à l’amnistie que Me Cortbaoui qualifie
de “honteuse”.
Désespérés, toujours aussi dépendants de
la drogue, leur vie s’est transformée en enfer. Ils finissent par
résoudre, dramatiquement, leur problème: le père tue
son fils; puis, se suicide.
Il serait utile, avant de clore cette partie, d’évoquer la mentalité
de certains responsables et gardiens de prisons. L’émeute de Roumié
éclate, d’ailleurs, lorsqu’un officier essaye de brûler un
prisonnier pour le punir du crime odieux dont il se vantait (viol d’une
fillette). Il se prend pour justicier et s’arroge le droit d’exécuter
une sentence.
SOLUTIONS RADICALES
L’ex-bâtonnier
de l’Ordre des avocats de Beyrouth considère qu’un tel problème
nécessite des mesures radicales. Le programme qu’il préconise
débute par l’application du décret nÞ17315 du 28/8/1964
qui rattache la direction des prisons au ministère de la Justice
(actuellement cette direction est assurée par le ministère
de l’Intérieur) et ce, pour deux raisons:
1 - Les Forces de Sécurité Intérieure (FSI), qui
font sans doute de leur mieux, ne sont cependant pas qualifiés pour
ce genre de travail. C’est comme si l’on demandait à un avocat de
pratiquer une intervention chirurgicale pour le blâmer, par la suite,
en cas d’échec. C’est une tâche que seuls doivent assumer
des spécialistes du domaine carcéral.
2- Logiquement, le ministère de la Justice est habilité
plus que quiconque à gérer les établissements pénitentiaires.
En effet, ses prérogatives et ses différentes juridictions
lui permettent de connaître à fond le dossier de chaque inculpé.
Il apporte, ainsi, à l’exécution de la sentence une optique
plus humaine.
Mais le simple fait de changer de ministère ne résout
qu’une partie du problème. Le plus important serait de mettre en
place un plan d’action quinquennal de plusieurs points:
1- Réhabiliter les prisons existantes et en construire de nouvelles.
Ce projet exige d’énormes investissements, mais le financement pourrait
s’échelonner sur plusieurs années. S’il est vrai que l’Etat
est à court d’argent, les dépenses actuelles échappent
à tout contrôle.
2- Former un personnel civil qualifié pour la direction et la
gestion des prisons qui comprendrait à fond le monde carcéral.
3- S’investir à rééduquer les détenus,
tout en s’occupant de leur santé physique et morale Faire appel
à des experts et spécialistes pour suivre ces prisonniers
de près tout au long de la période d’incarcération.
Mettre à leur disposition des ateliers équipés
pour les occuper et leur permettre de gagner un peu d’argent. Ils seront
ainsi en mesure de subvenir à leurs besoins et à ceux de
leurs familles.
Prévoir un large éventail de loisirs divertissants et
instructifs.
Ces activités professionnelles, récréatives et
culturelles donneront au condamné de véritables chances de
réhabilitation et de réintégration sociales.
NON AUX DEMI-MESURES
Les demi-mesures récemment avancées pour pallier, tant
bien que mal, les problèmes des prisons, ne peuvent mener loin.
C’est, selon les dires de Me Cortbaoui, comme si l’on prescrivait un calmant
à un homme souffrant, sans jamais vouloir examiner de près
les causes de ses malaises.
La réactivation de l’article 108 du règlement des prisons
ne résout aucun problème de fond; (art. 108: les 15 juin
et 15 décembre de chaque année, le responsable de la prison
peut proposer les noms des détenus qui ont fait preuve de bonne
conduite, en vue d’une éventuelle remise de peine et même
une grâce).
Il en est de même pour la réduction de l’année
d’emprisonnement (9 mois au lieu de 12). Ainsi, les peines décidées
par les magistrats ne seront, en réalité, que partiellement
purgées. Il serait plus logique de promulguer une nouvelle loi qui
diminuerait tout simplement les peines d’emprisonnement.
Cependant, pour ne pas se montrer trop catégorique, il serait
utile, dans l’attente d’une mise en application des projets à long
terme, de procéder à de petites améliorations ponctuelles
à l’intérieur des prisons. Nous citons, à titre d’exemple,
le réaménagement des toilettes et l’installation de douches
au “lieu de garde à vue” de Baabda. Avec de petits moyens, les conditions
d’hygiène ont été considérablement améliorées,
là où, quelques mois auparavant, les agents même de
la police judiciaire répugnaient à entrer.
PRÉMICES D’ACTIONS POSITIVES
Le tableau
noir que nous venons de bros-ser s’éclaircit de quelques points
positifs dont les résultats satisfaisants, nous l’espérons,
ne se feront pas trop attendre:
1- Le ministère de la Justice entreprend, actuellement,
la construction d’une prison moderne pour mineurs a Baassir (Chouf).
2- Le procureur général de la République, ainsi
que les procureurs généraux des districts œuvrent pour:
a- Un meilleur contrôle de la brigade judiciaire, afin de mettre
un terme aux arrestations arbitraires prolongées, dépassant
les 24 heures et contraires à la loi.
b- Surveiller de près l’évolution de la situation dans
les prisons.
Ce coup d’œil rapide sur les conditions des établissements pénitentiaires
au Liban nous incite à poser deux questions:
Pourquoi le silence et l’inaction des responsables politiques?
Pourquoi faut-il attendre les mutineries et les révoltes spectaculaires
pour que les Pouvoirs publics réagissent?
Il ne s’agit pas de susciter un sentiment de pitié envers des
criminels professionnels, endurcis, récidivistes et multirécidivistes
que tout effort de rééducation moderne ne saurait remettre
dans le droit chemin.
Une seconde catégorie de criminels retient plutôt notre
attention. Elle concerne la majorité des détenus victimes
de leur milieu social, de leur éducation familiale, des conditions
dans lesquelles ils ont vécu et grandi. Ces criminels présentent
une plus grande aptitude à la réinsertion sociale pourvu
que la société leur assure l’éducation et la formation
de base qu’ils auraient dû recevoir.
RÉGLEMENTATION DES ÉTABLISSEMENTS
PÉNITENTIAIRES AU LIBAN
Le décret
n°14310 du 11 février 1949 prévoit l’organisation
des prisons sur tout le territoire libanais. Il constitue une référence
juridique de base, remaniée et complétée par une série
de décrets ultérieurs dont le dernier en date a été
promulgué le 15/11/79.
Sans, toutefois, traduire textuellement ce décret, nous en dégageons
quelques extraits, compte tenu de l’esprit et de la lettre du texte.
Le règlement intérieur de la prison
l Les détenus ayant fait l’objet d’une condamnation, sont enfermés
dans des cellules qui leur servent de dortoir et de salle à manger
en même temps. Ils ne peuvent les quitter que pour la courte promenade
quotidienne ou pour le travail. Ceux d’entre eux qui font preuve de bonne
conduite, sont autorisés à participer aux travaux collectifs
de l’établissement en tant que cuisinier, infirmier, blanchisseur...
(Art. 59)
Les prévenus incarcérés dans l’attente d’un
jugement sont regroupés dans une salle commune. Certains, sur ordre
du juge d’instruction, sont retenus dans une cellule isolée. (Art.
61)
Ces prisonniers sont strictement isolés l’un de l’autre, notamment
au cours des promenades dans la cour intérieure. (Art. 62)
La correspondance est autorisée sous certaines conditions
et limitée à deux lettres par semaine. (Art. 63)
Les prestations en nature et en espèce, fournies
par la famille ou les amis, doivent être remises à la direction
de la prison et non à l’inculpé en personne (art 73). Celui-ci
peut effectuer les achats nécessaires à ses besoins, auprès
de la boutique même de l’établissement, en contrepartie d’une
autorisation signée par le directeur. (Art 64-65)
LES SOINS MÉDICAUX
Les visites médicales s’effectuent à raison de trois
fois, au moins, par semaine. Le médecin assume la responsabilité
de l’inspection sanitaire, du soin des malades et de la prévention
des maladies contagieuses.
Il exerce un droit de regard sur l’hygiène alimentaire et rédige
des rapports réguliers sur les conditions d’hygiène et la
salubrité des lieux. (Art. 52-53-54). Le texte prévoit, également,
la visite régulière d’un dentiste.
HYGIÈNE DES CELLULES ET SANTÉ
En plus de la toilette quotidienne (nettoyage du visage et des mains)
(art. 109) et de la propreté des sous-vêtements renouvelés
une fois la semaine, les détenus doivent assurer le nettoyage des
cellules et la désinfection des WC. (Art 59-89-112).
- Douches obligatoires deux fois par semaine en hiver et trois fois
par semaine le reste de l’année. (Art. 109)
- Les cheveux doivent être coupés courts et le rasage
assuré au moins deux fois par semaine par un barbier (prisonnier
ou non).
- L’établissement fournit 20 grammes de savon/jour et par prisonnier.
(Art 111)
Tenue vestimentaire: Pour les condamnés aux travaux
forcés, l’établissement fournit une tenue vestimentaire standard
imposée par le règlement. Les autres prisonniers conservent
leurs habits personnels fournis le plus souvent par leur famille. (Art
82).
Matériel de couchage: Ce matériel est très
rudimentaire et inconfortable. Il se réduit à une simple
natte, un matelas de paille, un oreiller, un drap et une couverture. (Art.
86).
Pratique religieuse: Le règlement autorise la visite
d’un homme de religion à l’établissement. (Art. 56).
Loisirs:
La promenade quotidienne, limitée à trois heures,
se situe à l’intérieur d’une cour fermée, sous l’œil
vigilant des forces de sécurité. (Art. 60).
La bibliothèque: L’établissement met à
la disposition des prisonniers des livres à thèmes littéraire,
social et médical. (Art. 67).
La lecture de journaux est interdite. (Art. 60).
Le règlement prévoit, également, des cours d’instruction
et d’orientation dispensés par des fonctionnaires relevant du ministère
concerné. (Art. 67).
Visites:
La famille doit obtenir une autorisation écrite:
1 - Du ministre de l’Intérieur et des Forces de Sécurité
de l’établissement, s’il s’agit d’un détenu “condamné”.
2 - Du Procureur général, pour la visite d’un prévenu.
(Art. 68).
Durée de la visite: un quart d’heure, en présence d’un
gardien. (Art. 69).
La visite de l’avocat: Le règlement autorise un aparté
entre l’avocat et son client, en l’absence du gardien. (Art. 69).
SANCTIONS EN CAS D’INFRACTION
À L’INTÉRIEUR DE LA PRISON:
Type d’infraction: (Art. 102).
- Querelles, coups et combats entre détenus.
- Infraction aux règles d’hygiène.
- Refus de travail.
- Détérioration des équipements et bâtiments.
- Tentative de fuite.
- Rébellion et désobéissance.
- Infractions diverses au règlement intérieur.
Type de Sanction: (Art. 103).
- Corvée supplémentaire.
- Suppression de la promenade quotidienne.
- Interdiction de visites et de contacts.
- Suppression des prestations, en espèces et en nature, provenant
de la famille.
- Interdiction d’achats alimentaires.
- Détention dans une cellule isolée.
La durée de la sanction (1 à 30 jours) varie selon la
gravité ou la récidive de l’infraction. Dans les cas graves,
l’inculpé est transféré à une prison “correctionnelle”.
RÉCOMPENSE POUR BONNE CONDUITE
L’article 108 prévoit une remise de peine ou même une
grâce, sur la base d’un rapport fourni par le directeur de l’établissement
pénitentiaire. Cette faveur est accordée deux fois l’an:
le 15 juin et le 15 décembre.
Dans la pratique et compte tenu des témoignages des prisonniers
et de leurs familles, bon nombre de ces dispositions ne sont pas appliquées.
ÉVOLUTION DU SYSTÈME PÉNITENTIAIRE
DANS LES PAYS ÉVOLUÉS
Les objectifs
et méthodes pénitentiaires adoptés dans le monde moderne
ont beaucoup évolué.
En France, le concept d’emprisonnement, en tant que sanction pénale,
remonte à une date relativement récente. En effet, c’est
avec la réforme pénale concomitante à la Révolution
française, que les châtiments corporels cèdent la place
à la privation de liberté! La détention de l’inculpé
se déroulait dans des conditions afflictives, dans l’espoir que
la sévérité inciterait le détenu au repentir.
Cependant, les responsables des services pénitentiaires se sont
vite aperçus que les condamnés quittaient la prison plus
endurcis et plus enracinés dans la délinquance qu’ils ne
l’étaient en y entrant. De sérieux efforts ont, alors, été
déployés pour humaniser la prison.
Il était, désormais, aussi important de prévenir
le crime que de punir le criminel. Le meilleur moyen de protéger
la société contre le futur récidiviste consiste à
lui donner une formation et des habitudes telles, qu’une fois sorti de
prison, il aurait la volonté et les aptitudes de rectifier son comportement.
Sans attendre la consécration internationale de cette nouvelle
orientation sociale de la peine, diffusée en 1955 à Genève
par les Nations Unies, de nombreux pays avaient déjà légalisé
la rééducation sociale du détenu: la Suisse (1937),
la Suède (1945), l’Allemagne fédérale, l’Italie et
certains Etats d’Amérique latine, la France (1944) et, plus tardivement,
l’URSS (1958) et la Pologne (1969).
MESURES COMPLÉMENTAIRES
Les pouvoirs publics se sont également préoccupés
du sort du condamné après l’accomplissement de sa peine.
Convaincus que tout effort de rééducation risque d’être
vain, quand une fois libéré, le détenu se trouve laissé
à lui-même, ils interviennent désormais pour lui fournir
une assistance post-pénale (aide morale et matérielle) et
le soumettre à un contrôle destiné à garantir
son reclassement.
A ce stade de l’évolution, l’emprisonnement de courte durée
a fait l’objet de nombreuses critiques: non seulement il favorise le contact
de l’inculpé avec d’autres criminels, mais prive, également,
sa famille d’une source importante de revenus.
De plus, comment mener une action éducative sérieuse
et efficace en un si court laps de temps?
De nouvelles solutions de remplacement ont été adoptées
dont seuls pouvaient bénéficier les délinquants qui
ne présentaient pas un grand danger pour la société:
les arrêts de fin de semaine, l’emprisonnement discontinu, la semi-détention,
les arrêts à domicile, le sursis avec mise à l’épreuve
et la libération conditionnelle.
Le sursis ayant trouvé son origine dans la “probation” des pays
anglo-saxons est le plus pratiqué de nos jours. Il consiste en une
suspension conditionnelle de la peine assortie de mesures d’assistance
et de contrôle: le délinquant s’engage à suivre une
formation professionnelle, à réparer les dommages causés
par l’infraction et à éviter la fréquentation de certaines
personnes...
La libération conditionnelle est, quant à elle, uniquement
accordée au détenu qui présente des signes d’amendement
suffisants.
Parmi les solutions qui excluent la privation de liberté, citons
la prestation pénale, tel que le système espagnol du rachat
des peines par le travail.
MODALITÉS PRATIQUES DU TRAITEMENT
La répartition des détenus dans les divers établissements
pénitentiaires se fait, généralement, compte tenu
de leur personnalité, leur âge, leurs antécédents,
le danger social qu’ils présentent et leurs chances d’amendement.
Des centres spécialisés les soumettent à des examens
biosomatiques, psychiatriques et psychotechniques.
Une enquête sociale détaillée sur leur milieu,
l’éducation et la formation qu’ils ont reçues, complète
l’étude du dossier.
Le diagnostic ainsi établi permet de formuler un pronostic sur
leurs capacités de réadaptation.
En matière de traitement pénitentiaire, le travail constitue
la base de la rééducation du prisonnier. Non seulement, il
lui assure un salaire frôlant la normale mais, aussi, l’apprentissage
d’un métier, s’il en est dépourvu.
Le programme prévoit de même l’instruction générale
et la formation socio-mentale du détenu.
La notion de loisir occupe, également, une place de choix dans
la méthode éducative. Elle prend la signification d’activités
tout aussi récréatives que culturelles: conférences,
projections cinématographiques, représentations théâtrales,
séances auditives et musicales, ainsi que jeux et sports collectifs.
Le personnel carcéral a, lui aussi, changé de visage.
Le gardien cède la place au surveillant qui prend part aux tâches
de rééducation confiées à des équipes
d’éducateurs spécialement formées.
Actuellement, les portes des prisons s’ouvrent de plus en plus aux
assistants sociaux, psychologues et psychiatres, dont l’apport bénéfique
transforme la mentalité et le concept caduc de l’administration
pénitentiaire.
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