SCRUTIN SERRÉ MAIS SANS HISTOIRE À BEYROUTH ET AU LIBAN-SUD
QUATRIÈME PHASE CHAUDE DANS LA BÉKAA: LES HRAOUI DT LES SKAFF S'AFFRONTENT À ZAHLÉ, "AMAL" DT LE "HEZBOLLAH" À BAALBECK-HERMEL

Quelle est la différence entre la nomination du tiers des membres du conseil municipal dans les grandes villes et entre les résultats du scrutin dans toutes les cités ou la plupart d’entre elles?
Des sources renseignées ayant suivi de près l’opération électorale, disent que les résultats obtenus jusqu’ici, font prévaloir le principe de la “nomination”, sans que cela ait eu lieu, effectivement. En fait, les candidats élus peuvent être considérés comme un substitut à la nomination.
Ainsi, on peut dire que la Chambre des députés a écarté le principe de la nomination, sans le faire suivre de dispositions propres au scrutin municipal. Ce qui a assuré l’élection des listes préparées à l’avance d’une manière quasi-unanime, surtout dans les villes et villages où l’Autorité a la haute main sur le corps électoral.
 

Le Premier ministre Rafic Hariri votant.
 

L’ex-Premier ministre Salim Hoss.
 

M. Tammam Salam déposant son bulletin dans l’urne.
 

La liste “consensuelle de Beyrouth”.
 

LISTES “PRÉFABRIQUÉES”
Des listes “préfabriquées”? Comment, observent les sources mentionnées, ne pourrait-il pas en être ainsi, alors que l’immixtion a été confirmée par les photos prises par les candidats aux municipales, en compagnie de leurs “parrains”? Pouvait-on nier, alors, que telle liste était soutenue par tel ministre ou tel député?
A-t-on laissé aux forces politiques, la liberté du choix pour mettre sur pied des listes, d’autant que la plupart de ces dernières étaient imposées? Où est dans tout cela la neutralité que les responsables prétendent avoir assurée?
Les mêmes sources ajoutent: La neutralité était assurée, mais uniquement du point de vue technique, administratif et sécuritaire. En d’autres termes, le ministre de l’Intérieur, Michel Murr, est parvenu à assurer le bon déroulement de l’opération électorale.
Cependant, il faut reconnaître que l’institution militaire, sous le commandement du général Emile Lahoud, a été le premier gagnant dans cette échéance nationale: les effectifs de l’Armée et des FSI ont appliqué la loi et fait respecter les règlements, tout en préservant la sécurité; même dans des régions considérées par certains comme échappant au contrôle de l’Autorité.
Ainsi, les électeurs ont eu la possibilité d’exercer leur devoir électoral dans un climat démocratique, en votant pour les candidats de leur choix, sans être soumis aux pressions habituelles.

LA TROISIÈME PHASE DES MUNICIPALES
Quant à la troisième phase des municipales ayant eu lieu à Beyrouth et au Liban-Sud, elle s’est déroulée presque dans les mêmes conditions que les deux précédentes. En ce sens qu’il n’a pas été possible de former des “listes d’entente”, tant la rivalité était forte.
Toujours est-il que le panachage a été pratiqué dans la capitale, à Saïda et Nabatieh, ce qui a permis à l’opposition de percer certaines listes.
M. Abdel-Hamid Fakhoury, chef de la “liste de Beyrouth”, ayant bénéficié du soutien du “Cercle de l’action nationale” (du président Salim Hoss), de M. Najah Wakim et du courant aouniste, a pu se faire élire, provoquant l’échec d’un membre de la “liste d’entente beyrouthine” soutenue par le président Rafic Hariri, M. Tammam Salam, député, président de l’Association des Makassed et M. Fouad Boutros, ancien ministre.
M. Fakhoury a pris la place de M. Fadi Chahrour, candidat du mouvement “Amal”, du président Nabih Berri. De ce fait, la communauté chiite a perdu l’un de ses représentants au sein du Conseil municipal de Beyrouth. Dans une déclaration au “Hawadess”, M. Wakim a dit que trois candidats de la “liste de Beyrouth” ont percé la “liste haririenne”. Mais il y a eu des falsifications pour en faire échouer deux au moins, dont Bachar Kouatly.
“Nous nous préparons, dit-il, à présenter une demande en invalidation des résultats des municipales à Beyrouth et à réclamer un nouveau décompte des voix dans tous les bureaux de vote.”
 


C’est là que les électeurs pouvaient rencontrer 
les candidats et discuter avec eux.

 

Devant le bureau de vote face l’église Mar Mitr.
 

Un électeur inscrivant avec soin les noms choisis de sa liste.
 

Un vieil homme s’apprêtant  à aller voter.
 

À SAÏDA ET NABATIEH
A Saïda où les “Haririens” se sont coalisés avec la “Jamaa islamiya”, l’ancien ministre et député Nazih Bizri et son fils, le Dr Abdel-Rahman, le Dr Oussama Saad, chef de la liste adverse, a percé la “liste de la décision de Saïda”, patronnée par Mme Bahia Hariri. Celle-ci avait tenté, vainement, de former une liste consensuelle avec M. Moustapha Saad, autre député de la circonscription, mais celui-ci ne s’est pas montré coopératif.
Les observateurs pensent que, dans la capitale sudiste, le principal gagnant est la “Jamaa islamiya” qui est parvenue, pour la première fois, à se faire représenter à la municipalité.
A Nabatieh, “Amal” a percé la liste du “Hezbollah”, de ses alliés assaadistes et communistes, en faisant élire quatre candidats amalistes. Mais le “parti de Dieu” a fait passer tous ses hommes dans le caza, alors que “Amal” a remporté une victoire certaine à Tyr et dans les villages de ce caza.
Le président Berri et M. Mohamed Raad ont tenu des conférences de presse pour prouver, chiffres à l’appui, la victoire de leurs mouvements (Amal et le Hezbollah) et on s’attend que leur polémique quelque peu virulente, soit le prélude à un nouveau bras de fer entre eux, dimanche prochain à Baalbeck-Hermel.
Pour en revenir au scrutin municipal à Beyrouth, il est certain que l’équilibre confessionnel a été assuré, contrairement à ce qui s’est passé à Tripoli.
A vrai dire, le chef du gouvernement n’a épargné aucun moyen pour garantir l’élection d’un Conseil municipal équilibré, au sein duquel chrétiens et musulmans seraient à égalité; il a atteint son objectif.
Cependant, Me Fouad Boutros, l’un des artisans de la “liste consensuelle” dans la capitale observe, à juste raison, que “l’entente nationale s’est opérée par le bas”, entendre par là que le peuple tient à l’entente davantage que les gouvernants, ces derniers ayant politisé à outrance les élections municipales.
Me Boutros a justifié le faible taux de participation de l’électorat chrétien par le fait que ce taux n’avait pas excédé 8 pour cent aux législatives de 1996, alors qu’il a dépassé, cette fois, 20 pour cent, ce qui constitue un net progrès.

NÉCESSITÉ DE RÉVISER LA LOI ÉLECTORALE
“D’autre part, poursuit M. Boutros, l’opinion chrétienne et la plupart de ses porte-parole formulent des griefs contre la loi sur les municipalités, y relevant de nombreuses lacunes; aussi, l’électorat chrétien manifeste-t-il de la méfiance à l’égard de toute consultation populaire organisée sur base de la loi en question.
“Puis, en plus du fait qu’un grand nombre d’électeurs chrétiens se trouvent à l’étranger depuis la guerre, il ne faut pas perdre de vue qu’une large fraction de l’opinion chrétienne, si ce n’est son écrasante majorité, ressent de la prostration depuis la conférence de Taëf d’autant que, de l’avis de personnalités officielles, l’accord de Taëf devrait être révisé, surtout qu’il est appliqué d’une manière sélective.
“Tout cela, conclut l’ancien ministre des Affaires étrangères, me porte à réclamer la réalisation de l’entente nationale afin de consolider le désir de vivre en commun, l’entente étant la base sur laquelle doit être édifié le Liban d’après-guerre, celui de la véritable convivialité. Il existe une anomalie à ce niveau qu’il importe de dissiper sans plus de retard.”
Interrogé sur le point de savoir si les responsables seraient acquis à la nécessité d’élaborer une nouvelle loi électorale, M. Boutros émet ces réflexions: “Je l’ignore. Cependant, ce qui s’est passé à Tripoli et les conditions conformément auxquelles a été constituée la liste consensuelle à Beyrouth, devraient inciter les gouvernants à se pencher sur cette question pour la traiter avec courage et lui trouver une solution adéquate.”
 


Un électeur assailli par des partisans 
lui tendant leurs différentes listes.

 

Le ministre de l’Economie, M. Yassine Jaber, 
suivant de son salon le déroulement du scrutin.

 

Mme Bahia Hariri, MM. Ammar et Bizri.
 

Boulevard Maarouf Saad à Saïda, des 
supporters du député Mustapha Saad en plein travail.

 

LA BATAILLE À ZAHLÉ ET LA RECONDUCTION
La quatrième phase des municipales dans la Békaa, sera la plus virulente à Baalbeck-Hermel et à Zahlé, un peu moins dans la Békaa-ouest où M. Elie Ferzli, vice-président de l’Assemblée, sera aux prises avec M. Sami el-Khatib, autre député de la circonscription.
C’est, surtout, dans le chef-lieu du district que la consultation populaire sera féroce, pour la raison que les listes qui s’y affrontent sont soutenues: l’une, par le chef de l’Etat, deux ministres et un député; l’autre, par M. Elie Skaff, député, dont le leadership dans la région est mis à rude épreuve, celui-ci s’étant allié à M. Georges Hraoui, fils aîné du président Hraoui.
Ceux qui sont acquis à la reconduction du mandat présidentiel, attachent beaucoup d’importance à ce scrutin. En ce sens qu’un éventuel échec du chef de l’Etat serait mal vu et aurait des répercussions pouvant tourner à son désavantage...
Cependant, les partisans d’une élection présidentielle en bonne et due forme, n’établissent aucun lien entre les municipales à Zahlé et l’échéance présidentielle.
Les observateurs s’attendent que les candidats des deux listes se partagent les sièges à égalité ou presque au sein du nouveau conseil municipal, les représentants des communautés chiite et sunnite risquant, de ce fait, d’en subir les conséquences et l’équilibre confessionnel serait rompu.
A Baalbeck-Hermel, la bataille revêt un cachet spécial, en particulier par rapport au “Hezbollah” qui tient à consolider ses assises populaires, suite aux remous suscités, il y a quelques mois par son ancien secrétaire général, cheikh Soubhi Toufayli, lesquels ont failli ébranler sa base. Le “parti de Dieu” se propose de redorer son blason, en effaçant les séquelles de la “révolte des affamés”.
Bien que le mouvement “Amal” ait laissé entendre, par la voix de son chef, le président Nabih Berri, qu’il n’est pas concerné par la bataille à Baalbeck-Hermel, tout indique que celui-ci s’y engagera aux côtés d’une liste bénéficiant de l’appui des partis Baas, communiste, social national (ex-PPS), de certaines familles et tribus.
Des pressions seraient exercées, dit-on, pour amener les candidats sunnites à se retirer de la liste du “Hezbollah” à Baalbeck afin d’affaiblir le parti et le contraindre à former une liste d’une même couleur, exclusivement chiite...
Mais les “Hezbollahis” préfèreraient ne pas compléter leur liste que de la priver de l’élément sunnite.
A Chémistar, des conciliabules étaient en cours en vue de la mise sur pied d’une liste de coalition entre le “Hezbollah” et le président Hussein Husseini. Mais jusqu’à la rédaction de ces lignes, aucun accord n’avait été conclu et il est possible que deux listes s’affrontent dans cette localité.

DE BRITAL À RACHAYA
A Brital, village natal de cheikh Toufayli, promoteur de la “révolte des affamés”, tout indique que les familles et tribus parviendront, en définitive, à la constitution d’une liste d’entente, ayant à sa tête Ziad Tleiss, frère de l’ancien député Khodr Tleiss, qui a trouvé la mort dans les incidents de Ain Bourday.
Au Hermel, le crime abject dont a été victime la fillette Nasser Eddine, continue à envenimer l’atmosphère et il ne serait pas impossible que les habitants du village boycottent les urnes en signe de protestation contre le retard mis par les responsables à identifier les coupables et à les arrêter.
A Rachaya où les druzes sont majoritaires, une liste de coalition a été mise sur pied, suite à un accord intervenu entre MM. Walid Joumblatt, ministre des Déplacés, leader du PSP et Fayçal el-Daoud, député de la circonscription.
Il restera, ensuite, à préparer les municipales du 4 octobre prochain, dans les localités où le scrutin a été ajourné.

NADIM EL-HACHEM


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