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Le
désaccord qui a rebondi entre Koraytem et Moukhtara autour du problème
des personnes déplacées, - le chef du gouvernement et le
ministre des Déplacés s’accusant, mutuellement, de retarder
le retour de ces sinistrés à leurs villages et à leurs
terres - ne provoquera pas de crise ministérielle à quelques
mois de l’échéance présidentielle. De fait, après
la rencontre lundi entre M. Hariri et Khaddam à Damas (notre photo),
on s’attend que le vice-président syrien, en charge du dossier libanais,
intervienne incessamment pour raccommoder les deux hommes ou, tout au moins,
geler cette affaire...
Les brouilles interministérielles ont pour conséquence, sans doute, d’entraver l’action gouvernementale et, aussi, de compromettre la crédibilité des gouvernants. Nous écrivons cela, suite à la polémique qui oppose depuis près d’une semaine le président du Conseil au ministre des Déplacés, d’une manière directe ou par alliés interposés. Celui-ci a déclenché la bagarre, à l’occasion du congrès de Beiteddine tenu sur le thème du retour des personnes déplacées, sous le parrainage du parti socialiste progressiste et des Kataëb. En effet, M. Walid Joumblatt a prononcé un violent réquisitoire contre le Premier ministre, lui faisant assumer la responsabilité du retard mis par les déplacés à réintégrer leurs villages. “Il n’existe plus d’obstacles politiques à leur retour, dit-il; le problème à trancher se ramène à une question d’argent dont la clé se trouve avec M. Rafic Hariri”. Il l’accuse même de bloquer les crédits nécessaires à ce retour “qu’il n’accepte qu’à ses propres conditions, pour en tirer des avantages politiques”. Aussi, pour lever cette exclu-sive, le congrès a-t-il demandé que la caisse des déplacées relève, directement, du ministre des Déplacés et ne soit plus placée sous la tutelle du Sérail. La riposte de M. Hariri n’a pas tardé à se manifester, par le tru-chement de son bureau média-tique qui s’en est pris à M. Joum-blatt, dénonçant sa philippique injustifiée et l’accusant “de perturber le climat de confiance dans la montagne, sans lequel les personnes déplacées n’oseront pas revenir à leurs foyers et à leurs terres”. Cette épreuve de force, une de plus entre le chef du gouvernement et l’un de ses ministres, vient après les bisbilles ayant opposé, dernièrement, le président du Conseil au chef de la diplomatie et le ministre de l’Intérieur à son collègue des Affaires municipales et rurales. Mais si ces dernières ont fini par se tasser, une normalisation des rapports entre MM. Hariri et Joumblatt s’avère difficile à réaliser, étant donné le ton de leurs diatribes. A moins que Damas, où M. Hariri s’est rendu au début de la semaine, juge nécessaire d’intervenir pour raccommoder les deux hommes dont les rapports ne sont pas toujours au beau fixe... Quoi qu’il en soit, des voix se lèvent au sein de l’Assemblée, pour réclamer un changement de Cabinet et la formation d’un “gouvernement de transition”, bien que l’échéance présidentielle ne soit plus éloignée. Telle est la suggestion proposée par M. Issam Farès, député de Akkar, pour la raison que l’équipe ministérielle n’est plus en mesure de faire œuvre utile, ni même d’expédier les affaires courantes... Cela dit, le timing de l’épreuve de force Hariri-Joumblatt intrigue et porte à réfléchir, d’autant qu’elle intervient à quelques mois de l’élection présidentielle. Mais on peut douter que l’incohérence politique se répercute sur le Cabinet; les deux hommes en désaccord sur le dossier des déplacés sont forcés de ne pas provoquer de crise ministérielle, étant donné la conjoncture régionale. |