DES LE RETOUR, ENFIN DE SEMAINE, DU CHEF DU LEGISLATIF
LE COUP D'ENVOI SERAIT DONNE A LA BATAILLE PRESIDENTIELLE

L’affaire des consulta-tions est au centre du débat. Les milieux proches du président Nabih Berri lui prêtent l’inten-tion de vouloir les entre-prendre en vue de recueil-lir l’avis des membres de l’Assemblée à propos de l’amendement de l’article 49 de la Constitution.

Dans le même temps, le Grand Sérail a connu au début de la semaine de telles consultations, vraisemblable-ment, à l’effet de court-circuiter celles du chef du Législatif. De plus, la coterie du président Rafic Hariri lui a fait dire: “Si le président Berri insiste à procéder aux consultations, je ne m’y rendrai pas.”
Cependant, les milieux proches du Premier ministre démentent que celui-ci ait critiqué le président de l’Assemblée, en précisant que ce dernier a toute latitude “de consulter les députés pour avoir une idée de leur opinion et de leur tendance.”
De leur côté, les proches de M. Berri lui attribuent des propos dont il ressort qu’il n’a pas l’intention d’effectuer des consultations parlementaires en rapport avec l’échéance présidentielle.

CONSULTATIONS ET CONTRE-CONSULTATIONS
Quoi qu’il en soit, le président du Conseil a entamé des consultations avec les diverses personnalités et forces politiques, ainsi qu’avec les présidentiables. Il a commencé par s’entretenir à Faqra, durant le dernier week-end, avec M. Nassib Lahoud, membre de la “Rencontre nationale” (groupe d’opposition) qu’il a retenu à déjeuner. De même, il a reçu la visite de MM. Mohamed Youssef Beydoun et Marwan Hamadé, députés de Beyrouth et du Chouf.
Aussitôt, le bureau médiatique de M. Hariri a ébruité ces visites, celles ayant eu lieu auparavant n’ayant pas fait l’objet d’un tel tapage médiatique.
Des cercles ministériels en déduisent que le chef du gouvernement a agi de la sorte à l’effet de devancer le président Berri, pour faire comprendre qu’il figure parmi les “grands électeurs” aux prochaines présidentielles. Bien qu’il insinue en permanence qu’il soutiendrait le candidat bénéficiant de l’encouragement et de l’appui de Damas.
Les milieux politiques ne voient pas d’un bon œil la tension qui caractérise, en ce moment, les relations entre les chefs du Législatif et du gouvernement à l’approche de l’échéance présidentielle, cette tension ayant été exacerbée par les rumeurs propagées (d’après les Berristes) par la coterie de M. Hariri, relatives à un éventuel raccourcissement du mandat du président de la Chambre.
Ceci a incité M. Mohamed Abdel-Hamid Beydoun, connu pour être le porte-parole du chef du Législatif, à déclencher une nouvelle attaque contre le Premier ministre, l’accusant de manœuvrer aux fins de forcer la Chambre à lui accorder des pouvoirs exceptionnels après qu’il aurait formé un nouveau Cabinet dont il choisirait lui-même les membres, ou la plupart d’entre eux.
De même, M. Beydoun s’en prend à M. Hariri pour continuer à dilapider les fonds du Trésor, en ayant affecté à la restauration du Grand Sérail des sommes dépassant dix fois plus celles affectées à la remise en état du palais de Baabda. “C’est cela, a-t-il ajouté d’un ton sarcastique, le début de l’austérité et de la réforme à tous les niveaux.”

MISE AU POINT DU “BUREAU MÉDIATIQUE”
A la suite de quoi, le bureau médiatique du chef du gouvernement a fait paraître une mise au point, assurant que “M. Hariri ne peut être mêlé, ni de près ni de loin, aux rumeurs relatives au raccourcissement du mandat du chef du Législatif.”
De plus, le chef du gouvernement réitère son souci de rasséréner le climat politique, à l’approche de l’échéance présidentielle “qui doit préparer le terrain à une nouvelle étape politique.”
Et la mise au point d’ajouter: “Nous tenons à affirmer, à cette occasion, que la relation entre les présidences de l’Assemblée et du Conseil n’est pas tributaire des rapports personnels ni de prétendus complots comme certains le prétendent. Elles reposent plutôt sur les règles énoncées par la Constitution, sur base desquelles sont régies les relations entre les pouvoirs dans notre système parlementaire et démocratique.”
Enfin, le bureau médiatique haririen insiste sur “la nécessité de changer la manière de traiter la chose publique dans l’étape future, en vue d’édifier l’Etat de droit et de consolider les institutions publiques.”
De toute façon, on s’attend que la semaine à venir connaisse les préparatifs de la bataille présidentielle, bien que le Conseil des ministres n’ait pas siégé, mercredi dernier pour la seconde fois consécutive, en raison de la présence du président Hariri au Caire, où il a participé aux travaux de la commission supérieure mixte. Et aussi, afin d’occulter les questions épineuses, celles-ci étant gelées jusqu’à la fin du régime actuel, le Cabinet se contentant d’expédier les affaires courantes.

HARIRI DANS LE SECRET DES DIEUX?
Cela dit, des cercles ministériels constatent que le chef du gouvernement se comporte en tant que “principal électeur”, étant donné son souci d’entretenir ses visiteurs parmi les députés de l’échéance présidentielle. Ces derniers croient savoir, en effet, que le Premier ministre serait dans “le secret des dieux”, connaîtrait déjà le nom du futur président de la République et consacrerait ses efforts à préparer le scénario à suivre pour l’élection présidentielle. Aussi, s’em-ploierait-il à brouiller les pistes, en avançant des présidentiables n’ayant pratiquement pas de chance d’accéder à la magistrature suprême, pour garder toutes ses chances au candidat dont l’élection est, d’ores et déjà, assurée...
Dans ce contexte, les milieux de l’opposition taxent M. Hariri d’hégémonisme, l’accusant “de ne pas dévier de la politique qu’il a suivie dès son accession au palais du gouvernement, politique ayant valu au pays tant de déboires et de crises.”
Et ce, en agissant de façon à tailler la présidence de la République à sa mesure et à mettre sur pied une équipe ministérielle qui lui serait entièrement acquise, quitte à rendre compte de sa gestion à la Chambre des députés.
Aussi, ces mêmes milieux prévoient-ils bien des remous que susciterait cette tendance du chef du gouvernement à accaparer tous les pouvoirs, lors de la formation de la prochaine équipe gouvernementale - si jamais il est chargé de constituer le nouveau gouvernement - ce dernier devant être le fruit de concertations entre les trois présidences, aucune d’elles ne pouvant s’arroger le droit de désigner les membres du Cabinet sans l’agrément des autres.

HRAOUI CHEZ HÉLOU ET SALAM
En ce qui concerne les entretiens que M. Hariri a eus, récemment, à Damas avec les responsables syriens, selon des sources fiables, il aurait procédé avec Abdel-Halim Khaddam, vice-président en charge du dossier libanais et avec d’autres responsables damascènes, à l’évaluation des développements de la conjoncture libanaise, en prévision de l’échéance présidentielle. Dans le même temps, le chef du gouvernement aurait fait part à ses interlocuteurs syriens de la conception qu’il se fait de la forme du prochain Cabinet, du point de vue du nombre et des noms de ses membres.
Entre-temps, les observateurs ont interprété différemment, la visite du président Hraoui aux présidents Charles Hélou, à Kaslik et Saeb Salam, à Mousseitbé, deux mois et demi avant l’expiration de son mandat, le chef de l’Etat s’étant contenté de déclarer à l’issue de ses deux rencontres, qu’il avait évoqué avec MM. Hélou et Salam “des questions d’ordre national, l’échéance présiden-tielle, en tête”...

NADIM EL-HACHEM

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