LES “OPPOSANTS”...
Le projet d’amendement de l’article 49 de la Constitution avait été
approuvé lundi par la commission parlementaire de l’Administration
et de la Justice, au terme d’une brève discussion portant sur un
point juridique relatif aux conditions à remplir par tout candidat
à la magistrature suprême parmi les fonc-tionnaires de la
première caté-gorie.
Les membres de l’Assemblée s’étant opposés à
la révision de l’article précité sont: MM. Boutros
Harb, Najah Wakim, Camille Ziadé, Nassib Lahoud, en plus de M. Walid
Joumblatt et deux membres de son bloc parlementaire: Akram Chéhayeb
et Alaëddine Terro.
Des démarches ont été effectuées auprès
du ministre des Déplacés pour l’amener à changer d’attitude.
Mais la veille du départ de M. Joumblatt pour Damas, le Parti socialiste
progressiste diffusait une déclaration réitérant son
opposition à l’élection du général Lahoud.
QUID DU NOUVEAU CABINET?
Pendant ce temps, le président Hariri intensifie ses contacts
dans la plus grande discrétion, en prévision de la formation
du premier Cabinet du nouveau régime.
La tendance serait, dit-on, en faveur d’un gouvernement de vingt-quatre
membres, au cas où certains départements ministériels
seraient annulés ou regroupés. Mais rien de définitif
ne sera décidé avant la passation des pouvoirs entre les
présidents Hraoui et Lahoud.
Cependant, certains milieux croient savoir que la future équipe
ministérielle sera représentative de toutes les franges politiques
ou presque et comprendra de nouveaux visages, les critères sur base
desquels ces derniers seront choisis étant la compétence,
la représentativité et l’intégrité, le nouveau
chef de l’Etat étant acquis à l’idée qu’il faut d’urgence
mettre un terme à la corruption, au clientélisme et aux passe-droits.
Le président Hariri n’a d’autre choix que d’y souscrire, d’autant
qu’il a déjà reconnu ses erreurs et en endosse l’entière
responsabi-lité; il se doit donc de les réparer.
On lui prête l’intention de vouloir exclure de son Cabinet les
“composantes” ou les ministres qualifiés “d’inamo-vibles” et, aussi,
à ne pas y faire représenter les partis, marquant sa préférence
aux technocrates, du moins à la tête des départements
dont la gestion exige de tels éléments.
Quoi qu’il en soit, le futur gouvernement sera formé sur base
du principe “qu’il faut placer l’homme qu’il faut à la place qu’il
faut”.
PLUS DE TROÏKA
Cela dit, les cercles renseignés assurent que “la troïka
est morte et enterrée, sans espoir de retour”, le président
Lahoud étant, assurent ses proches, déterminé à
restaurer l’Etat des institutions, qui aurait dû être édifié
au lendemain de Taëf.
A ce propos, il semble que les présidents Berri et Hariri auraient
décidé “d’enterrer aussi, la hache de guerre”, preuve en
est que le chef du gouvernement a pris contact, personnellement, avec le
chef du Législatif après l’amende-ment constitutionnel et
l’a invité “à tourner la page et à entamer une nouvelle
ère de coopération.”
Mais les milieux parlemen-taires s’attendent, au con-traire, que les
rapports entre les deux hommes s’enveni-ment davantage, au moment où
il s’agira de choisir les membres du nouveau Cabinet, l’un et l’autre voulant
y placer des hommes de leur bord...
Ici, interviendra le rôle du président Lahoud qui insistera
pour la formation d’une équipe gouvernementale équilibrée,
en mesure de répondre aux impératifs de l’heure. D’autant
qu’il jouit d’un soutien au triple plan local, régional et international,
ce qui l’habilitera à remettre le pays sur les rails et à
l’engager sur la voie de l’entente et de la reconstruction.
Le président Hariri a pris conscience de la situation; aussi,
a-t-il tenu ces propos devant ses proches et alliés politiques qu’il
a réunis mardi dernier à Koraytem: “Nous nous engageons dans
une nouvelle phase qui doit commencer par l’élection du général
Emile Lahoud à la présidence de la République, dont
l’accession au pouvoir est un fait très positif et servira l’intérêt
de la nation.
“Ceci exige de nous d’apporter au nouveau chef de l’Etat un soutien
illimité, la coopération sans réserve devant être
notre mot d’ordre.”
LE NOUVEAU CABINET À FEU DOUX
En ce qui concerne le nouveau gouvernement, M. Hariri s’abstient d’en
parler et refuse d’en discuter avec qui que ce soit avant l’entrée
en fonction du président Lahoud.
Mais en dépit de ses propos, M. Hariri s’emploie à mettre
sur pied son prochain Cabinet loin des feux de la rampe, les tractations
portant, en ce moment, sur deux points essentiels: le nombre et les noms
des ministres ainsi que les portefeuilles à leur attribuer.
D’aucuns croient savoir que ces noms seraient déjà connus
(et agréés) après avoir été soumis aux
“décideurs”, le général Lahoud ayant déjà
donné, au préalable, son feu vert.
Les milieux de l’opposition pensent, quant à eux, que rien n’a
encore été tranché au plan gouvernemental et que M.
Hariri se trouverait en butte à maints obstacles, surtout s’il persistait
à vouloir faire prévaloir ses vues personnelles et à
ne pas se maintenir à égale distance de toutes les parties.
Un fait paraît certain: le chef du gouvernement ne cèdera
pas le portefeuille des Finances, car il a élaboré un nouveau
système fiscal qu’il tentera de faire adopter par le président
Lahoud, parce qu’il considère ce système comme l’unique moyen
- et non les impôts directs - d’accroître les rentrées
du Trésor et, partant, de couvrir les charges provenant de la dette
publique.
M. Hariri tient toujours, dit-on, à relever le prix de l’essence,
en dépit de la baisse du prix de ce carburant sur les marchés
mondiaux et essaiera de convaincre le nouveau chef de l’Etat de la justesse
de sa politique dans ce domaine; tâche qui s’annonce, d’ores et déjà,
malaisée!