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COMMENT ACHÈTE-T-ON?
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Le
sujet de la corruption politique et administrative est vieux comme le monde.
Il est inépuisable. Dans sa chronique de “Candide”, intitulée:
“Doit-on le dire?”, l’historien monarchiste et académicien Jacques
Bainville se demandait (c’était en 1931) “Comment achète-t-on?”
Je le cite: “Il n’est question que de parlementaires payés, achetés, vendus, écrit-il. Je me suis souvent demandé où et quand commençait la vente. Offre-t-on tout droit de l’argent à un député, voire à un ministre? “J’ai idée que cela doit se faire tout seul. On se tâte. On se reconnaît. Il est probable qu’on se trompe rarement d’adresse. Le fait est qu’on n’a jamais vu un parlementaire se plaindre qu’on ait cherché à le corrompre, ni un homme d’affaires dénoncer le représentant du peuple qui l’a fait chanter. On est entre gens qui se comprennent. “Et puis, il y a tant de moyens de se faire récompenser! M. Flandin en a indiqué un certain nombre qui ne tombent pas sous la juridiction de la Commission d’enquête. Le plus répandu, le plus honorable consiste, comme il l’a dit, à caser des fils, des gendres et des neveux. “Que de situations à trouver! La dot d’une fille, c’est une préfecture, un poste de procureur général, le secrétariat d’une grande colonie. Père, beau-père, grand-père, oncle, grande-oncle et cousin, le sénateur, assiégé par la tribu, sollicite sans cesse des places. Et c’est ainsi que les gouvernements qui savent s’y prendre, tiennent le Sénat. L’avenir des enfants et la tranquillité des parents dépendent de sa docilité. “S’est-on assez indigné contre les prébendes de l’ancien régime! Nous avons, aussi, nos prébendiers qui offrent cette ressemblance avec ceux d’autrefois qu’ils attaquent la société tout en la trouvant très confortable.” On peut dire, sans que l’allusion risque de choquer: se vendre, le plus vieux métier du monde. Il y avait en France à cette époque (en 1931), une enquête;
mais on s’en doute, elle n’avait pas réussi à changer les
mœurs. Aujourd’hui encore, à Paris, “les affaires” font toujours
recette.
Pour être pratique, on devrait assigner à la réforme
(puisqu’il faut encore l’espérer en dépit de toutes expériences
passées) deux objectifs: la formation du personnel administratif
et l’équipement moderne des services, afin de faciliter les contrôles,
d’une part et, d’autre part, la qualité morale des fonctionnaires
en charge des services de la Fonction publique et de l’Inspection centrale,
le respect de leur liberté d’action et de sanction.
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