Robin Cook reçu par Slobodan Milosevic.
C’est là qu’avait pris son départ, sous d’heureux augures,
en novembre 1975, le premier sommet des sept pays les plus industrialisés
(G7). Et c’est là que pourrait être scellé le destin
des Serbes et des indépendantistes kosovars qui, depuis un an, ont
déjà enterré 2000 morts. Le plan de paix, toujours
hypothétique, a été concocté le 29 janvier
à Londres par le Groupe de contact (Allemagne, Etats-Unis, France,
Italie, Royaume-Uni, Russie) sous l’impulsion de la France, de la Grande-Bretagne
et de l’Allemagne et a fait prévaloir la volonté européenne
sur l’intransigeance américaine. Tandis que Madeleine Albright défendait
toujours un ultimatum à adresser au président Milosevic,
ses homologues européens prônaient une solution négociée,
renforcée par une menace d’intervention militaire de l’Otan.
En fait, le plan de paix proposé aux belligérants reprend
les grandes lignes du projet sur lequel l’ambassadeur américain,
Christopher Hill travaille depuis l’été et qui prône
une “autonomie substantielle” au Kosovo à négocier entre
Serbes et Albanais. Selon leur nouveau statut, les Albanais disposeraient
d’un parlement et d’un gouvernement autonomes issus d’élections
libres organisées sous contrôle international, d’une police
structurée en proportion avec la répartition ethnique de
la province de près de deux millions d’habitants peuplée
à 90% d’Albanais. Le statut de cette province serait réexaminé
dans trois ans.
Les négociations de paix seront co-présidées par
les ministres des Affaires étrangères de France et de Grande-Bretagne,
avec la participation de leurs homologues du Groupe de contact et devraient
être menées à terme en l’espace de trois semaines.
Le temps sera compté à tous à l’instar des protagonistes
du drame bosniaque qui s’étaient réunis à Dayton en
1995 sous la houlette de Richard Holbrooke; ils avaient quitté les
lieux avec un plan de pacification de la Bosnie-Herzégovine. En
attendant cette pacification, le Groupe de contact a sommé les parties
serbe et indépendantiste à “mettre fin aux opérations
offensives et répressives”, à faciliter le retour des réfugiés
et à accélérer l’enquête sur le massacre de
Racak. Belgrade et l’UCK sont renvoyés dos à dos et se partagent
les reponsabilités des affrontements. Dans le cas où ils
n’obtempèrent pas aux injonctions du Groupe de contact, l’Otan passera
à l’action. Son secrétaire général, Javier
Solana a, désormais, les pleins pouvoirs pour déclencher
des frappes en Yougoslavie après une dernière consultation
des Alliés.
“Toutes les options demeurent ouvertes”, comme l’a annoncé Robin
Cook, secrétaire au Foreign Office. Et ce n’est pas “une gentille
invitation” qu’il a adressée à Slobodan Milosevic à
Belgrade et aux Kosovars rencontrés à Skopje en Macédoine
en raison du mauvais temps. Si le président yougoslave a réservé
sa réponse, le représentant politique de l’UCK, Adem Demaqi,
donnerait la sienne dans quelques jours. Seul le leader modéré
des Kosovars a accepté l’invitation du Groupe de contact, estimant
que tout accord mènerait nécessairement à l’indépendance.
L’indépendance, but ultime des séparatistes albanais, est
une option exclue par les Européens. L’accord de Dayton avait évité
le démembrement de la Bosnie. Celui de Rambouillet ne devrait pas
précipiter celui de la RFY. D’autant qu’une éventuelle indépendance
des Albanais du Kosovo propagerait le feu dans tous les Balkans avec des
frontières recomposées.
D’ores et déjà, les Occidentaux s’apprêtent à
déployer une force multinationale de 36.000 hommes au Kosovo. Une
force de 32.000 hommes se trouve actuellement en Bosnie. Comme ils sont
déjà présents dans l’une, les Américains pourraient
l’être dans l’autre. L’idée circule à Washington: les
Boys pourraient être embarqués dans une nouvelle opération
de paix.