REBONDISSEMENT SPECTACULAIRE DE L’AFFAIRE
DES RÉSIDUS PÉTROLIERS
L’EX-MINISTRE BARSOUMIAN
PLACÉ EN GARDE-À-VUE
“POUR DILAPIDATION DE FONDS PUBLICS”
L’affaire des
résidus pétroliers a connu, hier, un rebondissement spectaculaire.
En effet, M. Chahé Barsoumian, ancien ministre du Pétrole,
a été mis en garde-à-vue, après son interrogatoire
dans la matinée d’hier, sur ordre de M. Khaled Hammoud, avocat général
près le Parquet financier, sous ce chef d’inculpation: dilapidation
des fonds publics durant l’exercice de ses fonctions officielles.
L’ancien ministre a été maintenu en état d’arrestation,
en même temps que son chauffeur, Sarkis Kouyoumdjian et mis à
la disposition du juge d’instruction. Celui-ci prendra la décision
adéquate, à la lumière de l’enquête en cours,
le magistrat étant tenu de se prononcer dans un délai déterminé,
une semaine tout au plus. Selon une source judiciaire, des éléments
compromettants, relevés dans les investigations, ont nécessité
l’arrestation de M. Barsoumian et de son chauffeur.
Dans le même temps - au moment où nous mettons sous-presse
- M. Nicolas Nasr, ancien directeur général du Pétrole,
venait d’être arrêté à son tour.
L’ancien ministre détenait le portefeuille du département
du Pétrole au cours des trois dernières années, période
durant laquelle une trentaine de navires-citernes transportant les résidus
non conformes aux critères, avaient été introduits
au Liban, ainsi que l’a révélé M. Nicolas Andraos,
l’un des propriétaires de la société “Techno Mar”,
spécialisée dans l’analyse des dérivés du pétrole.
Celui-ci a, également, précisé, que les pétroliers
avaient vidé leurs cargaisons sur ordre du ministre, lequel n’a
pas tenu compte des résultats des analyses effectuées par
“Techno Mar”.
En plus de M. Barsoumian, le procureur financier devait recueillir
la déposition de MM. Nicolas Nasr qui n’avait pas répondu
à une première convocation et de Naji Azar, employé
de la compagnie Aéro-Golf impliquée dans l’affaire.
La veille, le magistrat avait repris ses investigations avec les responsables
de plusieurs sociétés d’importation et de stockage, entre
autres: MM. Jamil Saïd, propriétaire de “Al-Taka” et Adib Bassatini,
co-propriétaire de la “Cedra Energy Corporation”. Ce dernier s’est
excusé de l’absence de ses deux frères (Bahaa et Riad) pour
n’avoir pas répondu à la convocation du juge, parce que se
trouvant à l’étranger.
En plus de M. Barsoumian, le magistrat a, également, entendu
M. Ziad Nasr, conseiller de l’ancien ministre pour les questions d’informatique,
après avoir consigné, au préalable, les dépositions
des directeurs en poste à la raffinerie de Tripoli.
Selon les sources judiciaires, les importateurs de dérivés
pétroliers savaient que les produits qu’ils manipulaient sont d’une
importance stratégique, en rapport avec la sécurité
nationale. C’est pourquoi, ajoutent les sources mentionnées, quiconque
enfreint cette règle touchant aux intérêts du Trésor,
encourt des sanctions très sévères.
Fait à signaler: la réouverture de ce dossier a permis
à de nombreuses sociétés exclues, ces dernières
années, des adjudications, de reprendre leurs activités,
après les avoir transférées à l’étranger,
suite à la fermeture du marché local.
Un premier rebondissement était signalé lundi dernier,
avec la découverte d’effets financiers totalisant plus de sept millions
de dollars, parmi les documents saisis par les inspecteurs du bureau pour
la répression des fraudes, lors d’une perquisition au domicile de
Naji Azar.
Par la suite, un membre du Barreau a été impliqué
dans l’affaire. Ce dernier avait été entendu par le procureur
financier, en même temps qu’un employé de la société
Petro-Trade, promu au poste de directeur général, alors que
lui-même dirigeait la société à distance.
D’après des sources judiciaires, cette société
aurait acheté 35.000 tonnes de produits pétroliers au ministère
du Pétrole au prix de sept dollars la tonne, pour les revendre à
quinze dollars à un intermédiaire qui les a cédées
à un prix supérieur à une firme italienne.
A son tour, celle-ci a vendu les 35.000 tonnes à la société
américaine “Amco”, laquelle les a livrées, en fin de compte,
à une raffinerie de Houston (USA) au prix de 70 dollars, soit dix
fois plus cher. Il a été établi, par ailleurs, que
les produits réexportés n’étaient pas des résidus
pétroliers, mais du pétrole léger.
En ce qui concerne l’avocat impliqué dans le trafic des résidus,
l’avocat général Hammoud a avisé l’Ordre des avocats
de la situation illégale de l’un de ses membres qui a admis sa qualité
de commerçant.
L’enquête s’oriente, actuellement, vers la dilapidation et détournement
de fonds publics; la fraude dans les spécifications techniques et
les opérations illégales.
L’avocat général du Parquet financier a déjà
interrogé depuis l’ouverture de l’enquête: Youssef Issa, chef
du département aux installations de Tripoli; Samih Hammoud, chef
de département au ministère du Pétrole; Badaoui Semaan,
chef du département financier; Nadim Khoury, directeur général
des installations; Georges Abed, directeur du terminal de Tripoli; Hassan
Mokaddem, directeur de la raffinerie; Hussein Daher, responsable technique;
Abdallah Awada, chef du laboratoire; Khalil Ambriz, directeur des installations
à Zahrani; Wadad Saadé, responsable des affaires commerciales
et Barakat Barakat, fonctionnaire.
Toujours dans le cadre de l’enquête, M. Hammoud a recueilli les
dépositions de: Naji Azar, Elie Najjar, Georges Abou-Haïdar,
Farès Moursel et Béchara Dib.
TRABOULSI: “JE NE PEUX RIEN DIRE EN CE MOMENT...”
M. Sleiman
Traboulsi, ministre du Pétrole, des Ressources hydrauliques et électriques,
se trouvait en tournée à Tripoli, quand nous avons pu le
toucher au téléphone.
Traboulsi: la Justice tranchera.
Il venait d’apprendre l’arrestation de son prédécesseur,
mais s’est excusé de ne pouvoir rien nous déclarer. “Le procureur
financier, dit-il, a fermé son cellulaire et ne communique avec
personne. L’affaire est entre les mains de la Justice et elle seule est
habilitée à décider du sort à réserver
aux personnes qui y sont impliquées.”
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