PETERSBERG, LE SOMMET DES QUINZE DÉSUNIS

Au sommet de Vienne, en décembre dernier, les Quinze désunis autour de l’Agenda 2000 initié en juillet 1997 par la Commission européenne, s’étaient quittés dans l’espoir d’aplanir leurs divergences lors du premier semestre de 1999 où la présidence tournante de l’UE revenait à l’Allemagne qui passait de l’ère Kohl à l’ère Schröder. Mais le cap de l’année ayant été franchi, la présidence était passée de main et les problèmes étaient demeurés les mêmes.
 
 
 
 
 
 
Réunion de travail du sommet. A gauche,  
Lionel Jospin et Jacques Chirac. 
 
 
Chirac et Schröder: mettre tout sur la table. 
 
 
 
Tony Blair avec le chancelier Viktor Klima.

 
 

 
Schröder, perplexe. 
 
 
 
Des fermiers déguisés en animaux protestant  
à Petersberg contre le volet agricol de “l’Agenda 2000”.
 
 
 
 

 

Au sommet de Vienne, en décembre dernier, les Quinze désunis autour de l’Agenda 2000 initié en juillet 1997 par la Commission européenne, s’étaient quittés dans l’espoir d’aplanir leurs divergences lors du premier semestre de 1999 où la présidence tournante de l’UE revenait à l’Allemagne qui passait de l’ère Kohl à l’ère Schröder. Mais le cap de l’année ayant été franchi, la présidence était passée de main et les problèmes étaient demeurés les mêmes.

Ces problèmes ont été exacerbés, la semaine dernière, à l’occasion de la réunion, à Bruxelles, des ministres de l’Agriculture de l’UE planchant sur la réforme de la PAC ou politique agricole commune qui absorbe plus de la moitié du budget européen et dont la France est le principal bénéficiaire. 30.000 paysans étaient venus à bord de 577 autobus protester bruyamment contre la réforme projetée qui allait réduire la manne leur permettant de subsister. Profondément divisés, les ministres ont fini par se quitter sur un constat d’échec pour se retrouver quelques jours plus tard.
Leur conflit éclatant au grand jour a opposé principalement la France à l’Allemagne, mettant en péril l’axe franco-allemand, pilier de l’Union européenne. Depuis décembre dernier, le chancelier Schröder dénonçait “l’argent allemand flambé à Bruxelles” et préconisait, par la suite, un cofinancement de la PAC de l’ordre de 25% des budgets nationaux, ce qui lui permettrait d’économiser 700 millions d’euros par an. L’Allemagne est le plus gros contributeur net au budget européen dont elle couvre plus de 60% (11 milliards d’euros). Elle voudrait réduire son solde net de 11 à 9 milliards d’euros avec “une contribution qui n’aille pas vers le haut , mais vers le bas”.
La France, principalement visée par la réforme de la PAC, a rejeté le cofinancement et proposé une “dégressivité” des dépenses agricoles, en refusant de séparer la PAC des autres dossiers de  “l’Agenda 2000”. Celui-ci, conçu dans l’optique de l’élargissement de l’UE à dix pays de l’Europe de l’Est ainsi qu’à Chypre et Malte dans les dix prochaines années, porte sur la stabilisation des dépenses pour la période 2000-2006 et tient compte des contraintes budgétaires imposées par l’euro. L’Europe voudrait dépenser moins pour envisager ces nouvelles échéances et, dans le cadre de “l’Agenda 2000”, reconsidérer la contribution de chaque Etat membre, de même que les fonds stucturels accordés aux pays les moins favorisés tels que l’Espagne, le Portugal, la Grèce et l’Irlande.
Pour atténuer les divergences et décrisper l’atmosphère, le chancelier Schröder avait fait circuler une lettre-document où il proposait des idées en vue d’un accord sur “l’Agenda 2000” qui allait être discutée le 26 février lors du sommet informel de Petersberg, à quelques kilomètres de Bonn. Là, les chefs d’Etat et de gouvernement des Quinze se sont entendus, selon le chancelier Schröder, à “jeter les bases pour une décision lors d’un sommet spécial à Berlin les 24 et 25 mars”. Les “divergences” sont “surmontables” et les “discussions (ont été) constructives, ouvertes et occasionnellement très claires”.
Lors de ce sommet, Gerhard Schröder, accusé auparavant de tenir compte de considérations nationales lors de la présidence allemande de l’UE, a proposé une sorte de compromis entre le projet maximaliste de la Commission européenne qui entraîne des dépenses élevées et celui des minimalistes rognant considérable-ment sur ces dépenses. Celles-ci, prévues pour la période 2000-2006, s’élèveraient à hauteur de 507.1 milliards d’euros, couvriraient la PAC et les fonds structurels, deux secteurs qui absorbent 80% du budget de l’UE lequel a atteint cette année 85 milliards d’euros.
Mais le succès de ce compromis n’est pas acquis. Chacun des pays membres veut payer moins et bénéficier d’un maximum d’avantages. Or, les concessions douloureuses n’épargneront personne. La Grande-Bretagne estime qu’il est hors de question de toucher aux rabais sur sa contribution au budget européen consentis en 1984 par l’UE au gouvernement de Margaret Thatcher. L’Espagne, de même que le Portugal, la Grèce et l’Irlande, refusent de voir fondre les “fonds structurels”. L’Italie appréhende une nouvelle formule de financement budgétaire. La France est naturellement parmi les plus frondeurs.
Dans ces conditions, on se demande si une solution pourra être trouvée les 24 et 25 mars. “Si des résultats n’étaient pas obtenus en mars, relève José Maria Gil-Robles, président du parlement européen, je pense qu’il y aurait probablement une grande crise, mais l’Union survivrait.” Même si l’accord devait être finalisé au cours du second semestre de 1999 ou même à l’aube de l’an 2000, “ce ne serait pas une tragédie”.
Les Quinze ont bien réussi l’euro. Ils devront réussir à s’entendre sur “l’Agenda 2000”.
 


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