Editorial


Par MELHEM KARAM 

POUR PRÉVENIR UNE NOUVELLE GUERRE,
PAREILLE À UN SÉISME, DONT LES PROLONGEMENTS 
MEURTRIERS ATTEINDRAIENT L’EUROPE
Les manifestations monstres devant le ministère israélien de la Défense et les banderoles que portaient des dizaines de milliers de juifs avec cette inscription: “Sortez du Liban”, ont beaucoup changé du style israélien, celui de Benjamin Netanyahu. De même, elles ont modifié le ton d’Ouzi Arad, son conseiller diplomatique qui tré-buche à Paris durant les négo-ciations autour des conditions du retrait militaire israélien du Liban-Sud et de la Békaa ouest.
Le Liban a renouvelé son refus des “arrangements sécuritaires” signifiant sa garantie de la renonciation du “Hezbollah” à frapper Israël.
Le texte de la résolution 425 ne fait pas mention d’arrangements sécuritaires, mais de retrait inconditionnel de tout le territoire libanais, ce à quoi s’attache le Liban.
Il y a trois ans, Benjamin Netanyahu gagnait les élections, en promettant d’instaurer la paix dans la sécurité. Tout le monde sait quel a été le résultat au plan intérieur palestino-israélien, la “sécurité” ayant prévalu sans que la paix avance d’un pas.
A l’intérieur, à l’exception de la Cisjordanie, l’échec paraît plus clair et les négociations ayant été entamées avec la Syrie par le premier gouvernement travailliste sont, aujourd’hui, dans l’impasse. Israël refuse de restituer le Golan contre la paix. Et vis-à-vis du Liban, Netanyahu paraît impuissant à désolidariser Beyrouth de Damas et à évacuer 800 kilomètres carrés qu’il occupe au Liban-Sud.
Il est apparu avec le temps que cette région, supposée assurer la sécurité au nord d’Israël, n’a pas atteint le but pour lequel elle a été créée. Elle est devenue une terre dangereuse où “Tsahal” s’enfonce chaque jour davantage dans les sables mouvants.
Au cours d’une semaine, l’Etat hébreu y a perdu sept hommes, dont un général tué dans l’explosion d’un engin placé par des résistants libanais du “Hezbollah”.
La menace de vengeance par voie de terre, de mer et d’air proférée par Netanyahu, n’améliorerait pas la situation. Si elle était mise à exécution. Le gouvernement israélien se comporte comme si l’inutilité de ces vengeances n’était pas apparue clairement en 1993 et 1996.
Le Premier ministre candidat aux élections anticipées, a choisi la fuite en avant, parce qu’il n’a pu constituer un Cabinet de rechange. De même est apparue son impuissance à renouveler un projet nébuleux pour un retrait unilatéral du Liban.
Le gouvernement israélien a réalisé qu’il récolte une sorte de disloca-tion. Il ne voit pas dans la perte du général, une raison de dénoncer le cessez-le-feu auquel il a souscrit après l’opération “Grappes de la colère” en 1996.
Si le devoir commande un compromis, ce dernier ne peut être que politique. Tous sont d’accord sur ce fait. C’est une mission vis-à-vis de laquelle doit s’engager et œuvrer en vue de son exécution, la prochaine administration israélienne qui sortira des urnes au mois de mai.
Ici, il est demandé aux Européens d’exercer un rôle en vue d’imposer la paix à Israël. La perte du général Erez Gerstein, chef des opérations israéliennes au Liban-Sud, est un message que Tel-Aviv ne peut que comprendre, les responsables israéliens de la sécurité n’y voyant pas une violation des règles du cessez-le-feu.
Depuis vingt ans, les forces israéliennes occupent 800 km2 du Liban-Sud et transgressent ainsi les résolutions 425 et 426 du Conseil de Sécurité exigeant un retrait immédiat et inconditionnel du Liban.
Puis, l’Etat hébreu refuse, avec le soutien américain, de se conformer à ces deux résolutions. Depuis trente deux ans, l’armée israélienne occupe, en dépit des résolutions des Nations Unies, le Golan syrien. Dernièrement, l’outrecuidance de Netanyahu l’a poussé à demander à sa majorité fanatique et extrémiste à la Knesset, de ratifier une loi interdisant l’évacuation de cette terre qui a été annexée, sans référendum, par Israël.
Le Liban, la Syrie et la Palestine sont les trois pages d’une même injustice. C’est l’injustice d’une occupation militaire, d’un colonialisme et de la violation d’une terre. Ceci attise le feu de la colère et de la révolte chez les peuples concernés. Et les opérations de vengeance qu’accomplissent les occupants ajoute le sang au sang, contrairement aux calculs israéliens.
En Israël, des voix s’élèvent appelant “au sang”. Dimanche dernier, des manifestants pacifistes ont brandi des banderoles à Jérusalem portant cette inscription: “C’est le Liban, gens stupides”. Et ce, pour rappeler une vérité que Benjamin Netanyahu refuse de reconnaître.
Netanyahu proclamait qu’il ne pouvait passer sous silence des attaques contre la terre israélienne. Pourtant, l’armée elle-même a admis l’impossibilité d’éliminer la Résistance sans en payer le prix.
Trois mois après les élections, le chef du gouvernement de droite et ses alliés d’extrême-droite seront plongés dans une opiniâtreté sans issue, laquelle pourrait provoquer l’explosion du conflit dans toute la région, mais à quel prix?
La question la plus importante est la suivante: Jusqu’à quand les grandes forces pourront-elles se contenter de prêcher la modération, ainsi que le fait Washington ou d’exprimer leur inquiétude, comme la France?
Le défaitisme face à la confrontation de la vérité dans sa profondeur, encourage les tentations. Nous devons ne pas nous tromper, en ne reconnaissant pas qu’une nouvelle guerre au Proche-Orient serait un séisme dont les vagues meurtrières s’étendraient, d’abord, à l’Europe.
Quand les Européens auront-ils la volonté politique efficace, pour imposer aux responsables israéliens une paix juste, utile et bénie pour les peuples libanais, syrien, palestinien et israélien?
Photo Melhem Karam

Home
Home