SUITE À UNE INTERVENTION DE DAMAS

CLIMAT POLITIQUE MOINS SURVOLTÉ, EN PRÉVISION DU VOTE DE LA LOI DE FINANCES


La reprise de l’activité politique après le chômage de Pâques, a connu un état d’apaisement ayant ouvert la voie à un examen, dans une atmosphère calme, des questions économico-financières, à commencer par le projet de budget 99 dont la Chambre doit être saisie avant la fin de la semaine. Quant au plan quinquennal qui n’a pas encore été approuvé en Conseil des ministres, il fera l’objet d’une étude approfondie de la part de la commission parlementaire de l’Economie et des Finances, en même temps que le préambule du projet de budget, au cours de la réunion qu’elle doit tenir vendredi, au lieu de samedi, ce jour étant férié car il coïncide avec le Nouvel An de l’Hégire.

Le retour au calme est dû, sans doute, à l’action entreprise par Damas pour calmer le jeu, celle-ci ayant été couronnée par une rencontre séparée entre le Dr Bachar el-Assad, les présidents Salim Hoss et Rafic Hariri. Les entretiens ont été qualifiés de très fructueux, les derniers développements de la conjoncture locale et régionale ayant été passés en revue. Selon une source fiable, le chef du gouvernement est revenu de la capitale syrienne, fort de l’appui renouvelé des responsables syriens, aux moyens dont use le “Cabinet des 16” pour traiter le lourd legs hérité du précédent gouvernement. On s’attend après ces rencontres, que la loi de finances pour l’année courante soit ratifiée sans histoire par l’Assemblée. Les dirigeants syriens ont fait part à M. Hoss de la teneur de leurs échanges de vues avec MM. Hariri et Walid Joumblatt, après la visite effectuée par le président Nabih Berri. Aussitôt revenus à Beyrouth, l’ancien président du Conseil et le leader du PSP ont mis de l’eau dans leur vin et renoncé à leur cabale contre le Pouvoir.
Entre-temps, les milieux officiels ont repris l’étude des dossiers précédemment ouverts et qui avaient été bloqués, en attendant la mise au point de la loi de finances. Cela dit, la surprise du chômage pascal a été la visite du chef de l’Etat à Cana, une semaine avant le troisième anniversaire de cet odieux carnage perpétré par l’artillerie israélienne en avril 1996 et qui s’est soldé par plus d’une centaine de victimes. La visite du président Lahoud à ce village sudiste confirme, une fois de plus, l’intérêt que le Général-Président accorde au Liban-Sud dont il a dit, dans son discours d’investiture, qu’il figurait en tête de ses préoccupations. (voir page ci-contre). Le Conseil des ministres avait approuvé au cours de sa dernière réunion, le projet de budget 99 et on s’attend que le mécanisme de son approbation soit établi vers la fin du mois courant. D’après des indications de source sûre, la loi de finances serait ratifiée au terme d’un débat relativement court, après que son chiffre global eut été ramené à 8,360 milliards de livres, en augmentation de 731 milliards par rapport au chiffre de l’année précédente, en dépit de la hausse du coût de la dette publique et du paiement, à dater du 1er janvier, de la nouvelle échelle des salaires dans le secteur public. Il y a lieu de relever que le gouvernement a évité de surtaxer les produits de consommation courante, seuls les produits de luxe ayant été frappés d’une mesure pareille. Si le prix de l’essence a été majoré de 2.000 livres, ainsi que l’a précisé le ministre de l’Information, c’est qu’il est ramené à ce qu’il était en 1997. Les baisses d’impôts ont, en revanche, affecté l’impôt sur le revenu. Ainsi, le gouvernement suivant les directives du président Lahoud, a évité de surcharger les citoyens de condition modeste et à revenu limité. De ce fait, les détracteurs du Pouvoir qui s’attendaient à voir le “Cabinet des 16” ployer sous le poids du budget, ont perdu leur pari, d’autant que les prévisions budgétaires n’ont pas provoqué des réactions hostiles si l’on excepte quelques voix discordantes, dont celle de la centrale ouvrière. Celle-ci envisage d’organiser deux manifestations en signe de protestation contre le relèvement du prix de l’essence notamment.
On a constaté que le marché local n’a subi aucun changement, malgré la majoration des taxes sur les produits de luxe. Le président de la République n’a pas caché sa satisfaction quant à la loi de finances en recevant plusieurs membres de l’Assemblée, alors que le président Hoss a déclaré aux reporters de presse: “Le budget 99 est le meilleur possible dans les circonstances présentes, le gouvernement devant le transmettre à la Chambre en même temps que le plan quinquennal, à l’effet de réduire le volume de la dette et, partant, son coût et mettre fin au déficit budgétaire dans un délai de cinq ans.” Les milieux renseignés s’attendent à la persistance de ce climat politique, pour permettre le vote du projet de budget sans tapage. D’ailleurs, les milieux parlementaires observent que le gouvernement a gagné cette “bataille”, qui compense les pertes qu’il a subies au plan politique au cours des deux premiers mois de sa constitution, suite aux cabales menées à son encontre par la néo-opposition. Les contacts effectués avec Damas au cours de la semaine écoulée, ont convaincu les opposants de la nécessité de rester calmes, d’autant que certains parmi eux ont craint d’être éclaboussés par de nouveaux dossiers qu’on prête aux gouvernants l’intention d’ouvrir. De plus, ils ont touché du doigt la détermination des responsables syriens à soutenir le Cabinet Hoss et le régime du président Lahoud, depuis que le Dr Bachar Assad a pris en charge le dossier libanais. Puis, les détracteurs du Pouvoir ont eu la certitude que ce gouvernement sera maintenu jusqu’après les prochaines élections législatives, lesquelles pourraient avoir lieu au printemps prochain.
Quant à l’agenda gouvernemental pour l’étape future, il s’établit comme suit:
- achever les nominations administratives pour les fonctionnaires de la première catégorie et à tous les niveaux avant fin avril;
- entreprendre la réforme de l’administration par le bas à dater du 1er mai prochain;
- élaborer la nouvelle loi électorale et le projet relatif à la décentralisation administrative, cette loi devant être approuvée par la Chambre dans un délai expirant au mois d’août au plus tard (Certains ministres ne croient pas en la possibilité de mettre au point la nouvelle loi électorale avant l’automne).
- élaborer une nouvelle loi sur la naturalisation, à l’effet de mettre fin aux protestations et aux lacunes ayant émergé depuis la promulgation du décret de naturalisation en 1993.
- préparer une nouvelle loi sur les partis dont l’approbation coïnciderait avec celle de la loi électorale, de manière à permettre la modification, de fond en comble, de la vie politique et, partant, d’abolir le confessionnalisme et le sectarisme, en vue d’édifier l’Etat de la loi et des institutions. Par ailleurs, les milieux proches du chef du Législatif ont clarifié sa position envers l’institution des nouveaux taxes et impôts. Le président Nabih Berri avait émis un avis défavorable en ce qui concerne le relèvement du prix de l’essence ou, tout au moins, que la majoration n’excède pas 1.500 livres pour les vingt litres. En définitive, cette question a fait l’objet d’un compromis, la hausse de la benzine ayant été limitée à 2.000 livres. Le président Berri, rapporte sa coterie, a été surpris par le fait que le gouvernement n’a pas taxé les bénéfices provenant des bons du Trésor. A son avis, si cette taxe avait été imposée, les recettes auraient pu atteindre plus de 200 milliards de livres. Ce à quoi a fait allusion la CGTL au cours de sa réunion de vendredi dernier. Le président de la Chambre s’est, également, étonné de ce que l’étude effectuée sur le cellulaire n’ait pas été prise en considération, les sociétés exploitant ce secteur vital n’ayant payé aucune piastre pour obtenir leurs licences, alors qu’en Egypte, elles ont versé 600 millions de dollars, ainsi que l’a révélé M. Anouar el-Khalil, ministre de l’Information et des Déplacés, au cours de sa récente visite au siège de l’Ordre des journalistes. Par ailleurs, des contacts sont effectués par des amis communs, pour arranger une rencontre entre les présidents Berri et Hoss, un certain froid caractérisant depuis peu les rapports entre les deux hommes qui se sont peu abouchés depuis le vote de confiance. D’autre part, on signale l’apparition à Saïda de tracts signés “Rassemblement des honnêtes gens du Sud”, prenant la défense du président Rafic Hariri et devançant la décision que prendrait le Parquet à propos du rapport de la Cour des comptes impliquant l’ancien chef du gouvernement et trois de ses ministres dans des “irrégularités financières”. Des tracts similaires avaient été distribués, précédemment, à Beyrouth.
 

NADIM El-HACHEM

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