LA TRÊVE POLITIQUE APPELÉE À SE PERPÉTUER JUSQU’AU VOTE DE LA LOI DE FINANCES
De fait, l’Etat hébreu a mis en garde les Libanais, à
travers la “Voix du Sud” (porte-parole de l’Armée du général
Lahd), contre toute tentative de libérer la localité, “celle-ci
devant être réprimée avec une extrême vigueur”.
De plus, la même station radiophonique a laissé entendre que
“Tsahal” pourrait occuper toute localité où l’Armée
libanaise ne se déploierait pas, comme le réclame Benjamin
Netanyahu, afin d’empêcher la Résistance nationale de s’y
infiltrer.
Les soldats israéliens ont été aperçus
consolidant leur position à Arnoun, plus exactement près
du domicile de Nasser Alaouié qui en a été expulsé
avec sa famille.
Ainsi, Arnoun ajoute un nouveau sujet de préoccupation au “Cabinet
des 16” qui a du pain sur la planche. Mais cela ne lui fera pas changer
d’attitude: le Liban officiel continuera à rejeter les conditions
posées par notre voisin du Sud et à raffermir sa solidarité
avec la Syrie en tout ce qui touche Israël, ainsi que le chef de l’Etat
l’a affirmé en recevant M. David Satterfield, ambassadeur US.
En effet, le président Lahoud a dit qu’il n’incluera pas Arnoun
dans le “bazar électoral” où l’Etat hébreu cherche
à entraîner le Liban, à l’effet de susciter des divergences
entre l’Etat et la Résistance. De plus, il considère les
manigances israéliennes comme autant de violations à l’arrangement
d’avril, réaffirmant son attachement à la souveraineté
de l’Etat sur tout pouce du territoire national.
“Alors que le monde après l’effondrement du mur de Berlin, a-t-il
dit, est entré dans une phase nouvelle supposant l’élimination
des barrières entre les fils d’un même peuple, Israël
veut nous ramener en arrière, employant la force militaire pour
installer une barrière en fers barbelés à Arnoun.
En ce faisant, elle dresse un nouveau mur de Berlin dans cette localité
sudiste.”
Le président Lahoud a, également, réaffirmé
le droit légal du Liban de combattre l’occupation et, aussi, de
mettre en échec toute tentative visant à compromettre l’unité
nationale ou de semer les germes de la discorde entre l’Etat, le peuple
et la Résistance.
Par ailleurs, il a assuré l’engagement de notre pays vis-à-vis
d’une paix juste et globale dans le cadre de la concomitance des volets
libanais et syrien.
De son côté, le président Salim Hoss a dit: “Nous
usons de tous les moyens disponibles pour expulser les Israéliens
d’Arnoun, en maintenant le contact avec les grandes puissances, en particulier
celles qui sont concernées par le groupe de surveillance de la trêve.
Nous avons demandé une réunion urgente de ce groupe où
le délégué du Liban a reçu des instructions
pour réclamer le retrait israélien.”
Le chef du gouvernement a réfuté les informations selon
lesquelles le Liban aurait été notifié, par Washington,
du refus d’Israël d’évacuer ce village. Il a dit encore que
le gouvernement s’opposait à placer l’Armée libanaise en
confrontation directe sur le terrain avec “Tsahal” à Arnoun, “ceci
pouvant l’exposer à des risques graves”. Le Premier ministre a précisé
que les Forces de sécurité intérieure, avaient pris
position dans cette localité et que le gouvernement était
disposé à en accroître les effectifs, si “Tsahal” ne
l’avait pas investie une fois de plus.
RENCONTRE BERRI-HOSS
Sur un autre plan, il importe de faire état du dîner de
travail ayant réuni à Aïn Tiné les présidents
Nabih Berri et Salim Hoss. C’était la première rencontre
depuis longtemps entre les deux hommes qui ont jeté les bases d’une
nouvelle coopération dans l’étape présente et future
entre les Pouvoirs exécutif et législatif.
Mais ces retrouvailles ont été perturbées par
l’affaire d’Arnoun qui a eu ses répercussions au triple plan local,
régional et international.
Sur fond de blâme, les présidents Berri et Hoss ont évoqué
la plupart des dossiers faisant l’objet d’enquêtes, en plus du projet
de budget 99 et des problèmes de l’heure.
Au moment où ils échangeaient les vues sur ces questions,
ils ont été informés du retour des Israéliens
à Arnoun. MM. Berri et Hoss ont pris contact, aussitôt, avec
le président de la République, avant de décider de
saisir les instances internationales de cet événement grave
dont le Liban-Sud était le théâtre.
Le président Hoss a contacté les ambassadeurs des Etats-Unis
et de France, ces pays étant représentés au sein du
groupe de contrôle de la trêve, pour demander l’intervention
de leurs gouvernements en vue du retrait de “Tsahal” du village sudiste.
Pour en revenir au “dîner de travail” de Aïn Tiné,
les chefs du Législatif et du gouvernement sont tombés d’accord
sur la nécessité de coordonner leur action en prévision
du débat sur le projet de budget, partant du fait que la responsabilité
est collective, en ce sens que le gouvernement et l’Assemblée sont
appelés à coopérer pour faire ratifier, sans accroc,
la loi de finances - la première du nouveau régime - considérée
comme “la meilleure possible”.
Le président Berri a informé le président Hoss
de la disposition du président Rafic Hariri - que le chef du Législatif
avait rencontré quelques jours plus tôt - à faciliter
la tâche du “Cabinet des 16”, en ne mettant pas des bâtons
dans les roues du char gouvernemental.
Il y a lieu de signaler que le calme ayant suivi la tempête au
plan politique, est en quelque sorte l’œuvre de M. Berri qui avait préparé
le terrain, à Damas à des conciliabules entre M. Hariri et
les dirigeants syriens. Et ce, aux fins de dissiper la tension qui caractérisait
les rapports entre la néo-opposition et le Pouvoir. L’ancien chef
du gouvernement a, dit-on, pris conscience de la gravité de la situation
au plan économico-financier, c’est pourquoi il a mis de l’eau dans
son vin et donné ordre à ses alliés de mettre une
sourdine, du moins jusqu’à la ratification du projet de budget,
à la cabale dont le Grand Sérail était la cible.
PAS DE COMPROMIS ENTRE LE POUVOIR
ET L’OPPOSITION
A ce propos, les milieux officiels ont infirmé les rumeurs et
nouvelles de presse d’après lesquelles l’apaisement a été
le fruit d’un compromis entre le Pouvoir et ses détracteurs, en
ce sens que les autorités auraient promis de ramener aux archives
certains dossiers chauds où sont impliqués des responsables
du précédent régime. Une personnalité responsable
a dit qu’un tel bazar n’est pas possible, car la renonciation par l’Etat
aux enquêtes en cours sur le gaspillage des fonds publics et les
infractions, lui ferait perdre sa crédibilité et torpillerait
son projet visant à instaurer l’Etat des institutions.
Les investigations en cours se poursuivront donc jusqu’à leur
terme, le gouvernement étant déterminé, une fois votée
la loi de finances, à entamer une nouvelle phase d’action en profondeur,
destinée à concrétiser le programme du régime,
tel que défini dans le discours d’investiture du président
Lahoud. Ceci apparaîtrait dans les prochaines semaines, à
la lumière des décisions et initiatives que prendrait le
Conseil des ministres aux plans de la réforme administrative et
des mesures destinées à favoriser le redressement.
En ce qui a trait au “cas Corm”, les responsables ont écarté,
semble-t-il, toute possibilité de démission du ministre des
Finances à laquelle les présidents Lahoud et Hoss ont opposé
un refus catégorique, surtout après la propagation de rumeurs
insinuant que M. Georges Corm serait décidé à rendre
le tablier, en raison de divergences profondes avec les autres membres
du Cabinet, quant à certaines options d’ordre économico-financier.