DAME ANASTASIE: OPÉRATION DIVERSION?
La publicité la moins onéreuse, la moins coûteuse,
la plus rentable pour un écrit, une émission ou un film est
la censure.
Dame Anastasie a fait pour les “Versets sataniques”, de Salman Rushdie,
plus qu’aucune campagne de presse des plus sophistiquées.
Traduit dans plus de vingt langues, alternant les réceptions
de prix littéraires et recevant des menaces, l’illustre inconnu,
Rushdie, grâce à ses “Versets” se retrouve, un beau matin
un best-seller... Son livre, en fait, distille l’ennui le plus parfait
et on ne l’aurait pas lu s’il n’avait été interdit.
Voilà le pouvoir de Dame Anastasie.
Au Liban, une faute similaire vient d’être commise. Gaffe, bévue
involontaire, le fait est que le livre de “Cobra”, écrit en anglais
et qu’à peine une centaine de personnes s’y étaient intéressées,
se retrouve au lendemain de son interdiction circulant sous le manteau,
parmi des gens qui ignorent l’A.B.C. de la langue de Shakespeare.
Aux dernières nouvelles, le livre est selon la rumeur en train
d’être traduit en arabe, sinon déjà traduit à
l’heure où ces lignes sont écrites.
On pourrait croire que le timing de cette affaire, est plutôt
une opération de diversion pour occuper l’opinion publique qui commence
à crier tout haut son malaise de la situation actuelle, sans compter
les problèmes entre magistrats qui viennent d’éclater au
grand jour.
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ÉCONOMISTES DISTINGUÉS: CAPITALISME
SAUVAGE
“L’avenir radieux”, Lénine l’avait promis.
“Notre radieux avenir”, ce sont les responsables libanais qui nous
l’avaient promis... Mais après “la sueur, le sang et les larmes...”
En attendant cet “avenir radieux” ou ce “radieux avenir”, les Libanais
vivent dans le présent des plus grisâtres et grisonnants...
Moins que 3% de la population continuent à se partager les richesses;
les autres crèvent... Les jeunes émigrent...
Que font les responsables?
Ils font de l’économie politique et de l’économie philosophique.
Ils ne sont pas désintéressés, mais leurs actions
jusqu’à présent ne sont pas très réalistes.
Bien sûr et ils le répètent assez souvent, ils
ne peuvent rebâtir en quelques mois, ce qui a été détruit
en plusieurs années.
Mais, au moins, ils pourraient s’abstenir de prendre des mesures inopportunes,
d’écorcher le Libanais plutôt que de le tondre, sous prétexte
de redresser l’économie!
Ces dirigeants se permettent de ne pas appliquer (alors qu’ils l’avaient
promis haut et clair) la nouvelle échelle des salaires aux retraités
et à leurs familles.
Ces pensionnés n’ont donc pas eu droit à l’augmentation
de leur misérable retraite pour laquelle ils avaient cotisé
du temps où la livre valait quelque chose...
Par contre, ils ont eu droit aux factures faramineuses, décidées
en raison de hausse des salaires...
Ils ont eu droit aux coupures sauvages du téléphone,
de l’électricité, de l’eau... et aux menaces de saisie...
Pourtant, si le gouvernement n’a pas les moyens de payer, comment ces
contribuables auront-ils eux les moyens de payer?
Ayant retardé ou suspendu le paiement, il était logique
qu’on suspende, pour la même période, ou que l’on retarde
le paiement de ces factures sans amende et sans coupure.
Payez; puis, protestez auprès de nos économistes distingués.
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BEYROUTH, CAPITALE CULTURELLE OU “A-CULTURELLE”
Plutôt que d’interdire un livre en anglais, il faut que les autorités
s’intéressent davantage aux émissions débiles et abrutissantes.
Car ces dernières, on sait du moins ce qu’elles contiennent.
Il n’en est pas de même de ces soi-disant jeux culturels où
on recrute n’importe qui, n’importe comment et où on fait des sondages
qui révèlent - s’ils sont vrais - la dégradation terrifiante
de l’intellect à tous les niveaux et à tous les âges.
Dans une certaine émission TV populaire, tous les participants
- ou presque tous - ont pour hobbies la lecture et la musique, disent-ils.
Mais essayez de leur faire nommer n’importe quel écrivain ou n’importe
quel compositeur libanais, arabe ou étranger et ils offrent un regard
vide. Incapables de susurrer le moindre son.
Par ailleurs, les questions semblent souvent inspirées de jeux
similaires passant à la TV en Australie, aux USA, en France, en
Italie et même en Turquie!
La dernière des dernières: on demande à une brave
femme emmitouflée, comme si nous étions au mois de décembre
en Sibérie, ce qu’elle ferait au cours d’un après-midi très
pluvieux, d’un dimanche ou jour de congé? La réponse fuse:
“J’irais à la plage, au bord de la mer. Tant qu’à être
mouillée.”
Il est vrai qu’être devant la caméra est très différent
que d’être confortablement installée dans son fauteuil chez
soi.
Quant aux autres questions, on se demande sur quelle planète
vivent les “concocteurs” des jeux! L’animateur, quant à lui, ne
peut que lire les cartons qu’on lui remet.
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