LE LIBAN, PATRIE
AUX CINQ FRONTIERES
ce
qui s’est produit la semaine dernière autour des libertés
au Liban a engendré des empreintes et des données constructives
et, aujourd’hui, sa vague commence à s’estomper. En effet, il a
été renoncé à onze des treize procès
et poursuites judiciaires. La Presse a trouvé auprès de l’Autorité
une compréhension et une réaction positive. Le durcissement
dans les positions s’est terminé par une réconciliation loin
de toute crispation. L’entente s’est réalisée sur cette base:
“On nous a dit à votre sujet, comme il vous a été
dit de nous. Qu’il est bon de renouer entre nous comme auparavant.”
Nous avons renoué les uns avec les autres
et nous sommes avec le président Salim Hoss qui soutient: “Il existe
au Liban beaucoup de liberté et peu de démocratie”.
Nous sommes avec la préservation de la
liberté, non son bâillonnement et ne voulons pas parler de
martyre qui finit par des victimes.
Certains disent: “La cause ne meurt pas tant
qu’il y a des gens prêts à mourir pour elle”. Nous ne poussons
pas l’action jusqu’à un tel degré, car nous ne sommes pas
fatalistes, mais pratiques.
Nous voulons la liberté non jusqu’à
la mort, mais jusqu’à la vie, pour rester vivants et défendre
la liberté qui exige des luttes incessantes. Ce n’est pas une gratification,
ni un cadeau. Le Pouvoir n’aime pas, généralement, la liberté.
Mais aujourd’hui, c’est autre chose. Nous détectons une compréhension
et une souplesse de la part des gens du Pouvoir, alors qu’à la tête
de l’Etat se trouve un chef modèle, le Président Emile Lahoud.
Il est le gardien de la Constitution et voulons qu’il veille à la
satisfaction des justes revendications de la Presse, partant de notre foi
dans son abnégation et sa haute moralité.
L’occasion est propice avec le climat de la compréhension,
de la souplesse et de l’esprit responsable, pour réaliser une réconciliation
totale que le président Lahoud veut traduire sous la forme d’une
plus grande coopération entre l’Autorité et la Presse.
Ici, il m’importe d’enregistrer un fait que je
sussure à l’oreille de la démocratie. La démocratie
ne peut rien contre la liberté ni contre le terrorisme. La cause
de cela est que, si elle combat la liberté, elle s’aligne sur les
régimes totalitaires et perd quelque chose de sa virginité
(la démocratie). Et si elle combat le terrorisme par le terrorisme,
elle institue le terrorisme d’Etat, face à celui des bandes et des
mafias. A cela, fait mention Jean-François Revel dans son livre:
“Ainsi, les démocraties finissent”.
Point n’est besoin de rappeler au président
Hoss les paroles qu’il prononçait au temps où il était
dans l’opposition. Le président Hoss tient toujours le même
langage qu’il soit au Pouvoir ou en dehors du Pouvoir. Ceci est un fait
public au Liban et ailleurs qu’au Liban. Nous constatons que l’opposition
est l’alliée de la liberté et de la démocratie. Et
nous voyons aussi, ce qui est regrettable, que l’opposition en accédant
au Pouvoir, change de rôles et de positions, celles-ci étant
contraires à celles qu’elle adoptait lorsqu’elle n’était
pas au Pouvoir.
Notre mission, notre rôle et notre souci
est de maintenir nos gouvernants dans la case de l’authenticité,
leur authenticité et la case de la franchise, leur franchise. La
liberté et la démocratie resteront, alors, les piliers d’une
conduite et les bases d’une fidélité dont les gouvernants
et nous sommes les garants.
Parlons avec franchise: nul n’est leurré
par la séparation des pouvoirs et aucun de nous n’est berné
par cette équation, car celle-ci existe depuis le jour où
Montesquieu a écrit “L’esprit des lois” et Thomas Hobbes “Le Léviathan”.
Après cela, l’équation est tombée, comme est tombée
la loi sur l’enrichissement illicite, le jour où cette loi a été
élaborée et où elle a été appliquée
avec celui qui l’a établie en premier, à savoir Omar Ben
el-Khattab. Depuis lors, quiconque parle de la loi sur l’enrichissement
illicite, fait partie des porteurs de couronnes qu’il dépose sur
la tombe de celui qui meurt le jour de sa naissance.
L’histoire a commencé le jour où
il a été dit au calife Omar Ben Al-Khattab, le premier à
avoir été appelé “prince des croyants”: “Votre représentant
en Egypte, Omar Ben El-Ass est devenu riche. Il lui a écrit pour
lui dire dans la plus courte des missives: “Votre main sur la lettre et
votre pied dans l’étrier”. Il ne lui a pas dit: “En recevant ce
fax, prenez le premier Boeing et rentrez”, selon le langage de ce temps.
Le jour où Omar Ben El-Ass s’est présenté
devant le “prince des croyants” celui-ci s’est adressé à
lui en ces termes: On m’a dit que vous êtes devenu riche. D’où
avez-vous eu cela?” C’était la première fois où on
utilisait cette expression. Omar Ben El-Ass répondit: J’avais un
peu d’argent, ô “prince des croyants”. J’ai fait du commerce et j’ai
réalisé des profits. Il lui a répliqué: Nous
vous avons envoyé à titre de représentant et non de
commerçant. Versez au Trésor tout ce que vous avez gagné.
Et il s’est exécuté. L’expression: “D’où tenez-vous
cela?” est devenue courante et nous souhaitons qu’elle soit bien utilisée
par le Dr Joseph Chaoul, ministre de la Justice.
Le mot de “Le Léviathan” (la pieuvre,
le grand monstre aquatique) a été évoqué, dernièrement,
par Roland Dumas, président du Conseil constitutionnel français,
qui est poursuivi dans une affaire de commissions par la société
“Elf”, alors qu’il était ministre des Affaires étrangères
ayant usé de son influence avec sa compagne, Christine Duvier Goncour.
Il a écrit son livre “Les avocats” où il dit: ”Le plus tentaculaire
de tous les Léviathans, est le palais de Justice”. Naturellement,
nous ne partageons pas son opinion.
La Presse a réclamé une amnistie
générale, l’indépendance de la magistrature, la création
d’un Parquet général à plein temps pour les imprimés,
l’octroi au journaliste d’une immunité, en vertu d’une législation
exigeant une autorisation de son Ordre avant de poursuivre les confrères
syndiqués et appelé à la tenue d’un congrès
international en vue de consolider la liberté, l’indépendance
et la sécurité des journalistes.
De plus, elle a attiré l’attention sur
la fréquence des poursuites judiciaires qui ont totalisé
treize en l’espace d’un mois et sur le procédé suivi, dénotant
de la précipitation, des poursuites ayant été entreprises
en vertu de dispositions inexactes de la loi. Tout cela a excédé
les journalistes. Le président Emile Lahoud a compris les sujets
de plainte, partant du fait qu’il est le symbole du Liban, de sa liberté
et de sa dignité.
Les journalistes comptent sur lui pour obtenir
la satisfaction de leurs justes doléances qui ne sont pas un luxe,
mais proviennent de nécessités imposées à une
profession considérée comme la conscience du Liban. Nous
visons de tout ce qui s’est passé à empêcher l’exploitation
et la mobilisation de ce qui se produit pour porter atteinte à la
stabilité du Liban et au Général-Président
Emile Lahoud à qui il coûte, comme il nous coûte, d’entendre
que deux faits indisposent les gens: la liberté de la Presse et
le secret bancaire.
Le président considère ces deux
faits comme des acquis nationaux, donnant au Liban un cachet et une caractéristique
qu’il mérite.
Nul ne fixe un plafond aux libertés. Seule
la foi dans la liberté en constitue le plafond. Elle consiste à
comprendre les responsabilités par ceux qui jouissent de la liberté
et se soucient de conserver ce droit.Et ce, partant de leur foi en ce que
ce droit dans la liberté n’est ni une gratification, ni un cadeau.
Elle est le fruit d’une lutte quotidienne et persévérante,
aux fins de préserver les droits de ceux qui les méritent.
Et pour poursuivre l’action destinée à raffermir le concept
de ces droits dans la société.
Nous n’avons cessé aucun jour de répéter
que le Liban est une patrie à cinq frontières, la cinquième
étant la liberté. Et il en sera toujours ainsi. |
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