L'ACCUEIL DE 52 CHEFS D'ETAT ET DE GOUVERNEMENT
EST PREPARE DEPUIS UN AN ET DEMI PAR LE SECRETARIAT D'ORGANISATION
LE SOMMET DE LA FRANCOPHONIE TIENT SES ASSISES A MONCTON DU 3 AU 5 SEPTEMBRE

Pour recevoir 52 chefs d’Etat et de gouvernement accompagnés de 1.200 à 1.500 délégués, ainsi que quelque 700 journalistes et techniciens, le secrétariat d’organisation n’a cessé de planifier depuis un an et demi, faisant preuve d’une gestion des détails et d’un raffinement des scénarios exemplaires.


Le château Moncton sur le “coude” du Peticodiac,
nouvel hôtel construit spécialement pour le sommet.

Le Canada (Etat membre), le Nouveau-Brunswick et le Québec (gouvernements participants), co-hôtes du VIIIème sommet de Moncton (3-5 septembre), ont mis sur pied un secrétariat d’organisation où, avec un budget de 11,2 millions de dollars (sans compter la sécurité et l’apport de la municipalité), plus de 200 personnes travaillent comme dans une ruche. Dans les bureaux aménagés, les écrans grouillent et tentent de résoudre les problèmes: débrouiller 500 chaises pour la cérémonie d’ouverture, les transporter pour le dîner offert par le Premier ministre, étudier l’arrosage des aménagements floraux, coordonner le transport, trouver les fourgonnettes, les navettes, les chauffeurs. Une vraie épopée pour Moncton, la plus petite ville, à accueillir un sommet international.
 

L’Hôtel Beauséjour et la Place du sommet
où se déroulent les séances de travail.

Le Parc des Arts du Sommet offert 
par Patrimoine Canada, la Province 
du HN.-B. et la mairie de Moncton.
LE SOMMET DE TOUTE LA VILLE
Pour faire face aux défis logistiques gigantesques, les municipalités, la Chambre de commerce, les ONG, le gouvernement et l’ensemble de la population ont collaboré avec entrain et ferveur à faire de ce sommet un événement qui a engendré plus de 50 activités périphériques. Le sommet se veut être “vert” et “branché”, pour reprendre les termes du directeur du secrétariat d’organisation, M. Fernand Landry où, dans le respect des normes environnementales et l’usage des innovations technologiques et de par sa thématique, les jeunes sont impliqués dans des projets spécialement conçus pour eux. “On ne peut pas acheter la pub médiatique de cet événement. Tous se sentent forcément concernés”, affirme Carole Payne, directrice adjointe des communications et affaires publiques. Même la table de conférence est faite avec le bois des forêts du Nouveau-Brunswick.
En partenariat avec la communauté, une campagne de commandites a été organisée. L’objectif de récolter 4,4 millions de dollars en biens, services et espèces a été atteint bien plus tôt que prévu. Quelque 300 bénévoles ont offert leur service et ont pu, après une formation adéquate, s’occuper auprès des centres d’accueil, médias, kiosques d’information, au service des bagages, dans les cliniques médicales, etc. Plus de 2.300 employés des secteurs de la restauration, de l’hôtellerie et des transports ont pu bénéficier de la part de la Chambre de commerce d’une formation concernant le service à la clientèle, la langue, le protocole et la culture francophone. Un programme de 350.000 dollars...
 

75.000 dollars alloués 
à l’aménagementdes paysages.

Comme partout au Nouveau-Brunswick,
l’affichage est bilingue. La ruelle du 
Sommet Line - (Ln) n’y échappe pas.
LA MUNICIPALITÉ MET LE PAQUET
La mairie de Moncton n’est pas en reste. Pour le jeune maire anglophone, parfaitement bilingue, Brian Murphy, cet événement d’envergure mondiale est la meilleure occasion que sa ville ait jamais connue “pour démontrer la relation dynamique qui existe entre deux grandes cultures”. Difficile à croire, mais pourtant vrai. La participation directe de la ville aux projets d’embellissement et d’infrastructure en préparation du sommet a été fait, indépendamment du fait francophone. “Depuis le début, les deux communautés se sont impliquées, car ce sommet est important pour toute notre ville; il va faire parler de nous partout dans le monde”.
Vingt-deux recommandations précisent les détails concernant le parc routier, l’accueil, le pavoisement, l’embellissement de la ville, la signalisation, la fierté civique, le caractère bilingue de la cité, la promotion du sommet auprès des résidents de Moncton et celle de Moncton auprès des autres pays. En bref, 150 suspensions de corbeilles de fleurs aux couleurs de la francophonie, 150 pots fraîchement peints, arbres, arbustes et pelouses plantées, sentier riverain tout le long de la rivière, dons d’espaces, renseignements cartographiques, aménagement de l’aéroport pour accommoder le premier vol Paris-Moncton, efforts supplémentaires dans le pavage des routes, dans les services spéciaux d’égouts, d’ordures, de nettoyage, kiosques touristiques, participation financière aux événements culturels, à la création d’un parc, de la Place du sommet, aux cadeaux aux chefs d’Etat et aux médias, etc.
La ville débourse plus de 1.187.000 dollars d’aides et se lustre. Il y a de quoi. Les retombées économiques du sommet s’évaluent à environ 40 millions de dollars: fonctionnaires en détachement, touristes, artistes, sportifs, journalistes... c’est une très bonne saison pour Moncton...
 

L’Hôtel de ville est un des centres 
d’information touristique de la ville.

La place du sommet en préparation 
qui a coûté plus de 400.000 $. 
L’ensemble des échafaudages servira 
à monter un marché de fermiers.
PLANIFICATION DRACONIENNE
Mais à part le financement et les ressources humaines (beaucoup d’employés ont été “prêtés” par le gouvernement fédéral d’Ottawa), c’est tout un monde d’organisation logistique que ce sommet a exigé.
Pour héberger tous les participants, une étude de faisabilité a défini les infrastructures. Il a fallu loger dans 4.300 chambres, selon leur degré d’importance, les chefs d’Etat et de gouvernement, les délégués officiels (quatre par pays) dans un rayon de quinze minutes du site; dans un cercle plus ou moins proche, délégués d’accompagnement, médias, agents de sécurité, de liaison, opérateurs de la francophonie (agences universitaires, TV5), commanditaires principaux, invités des treize organisations internationales.
Plus loin, les membres des équipages, les artistes, les invités spéciaux et de soutien et d’autres agents de la sécurité... Les résidences, studios et appartements du Campus universitaire logent les médias. L’hébergement a même nécessité la mise sur pied d’une banque de données qui a recensé toutes les offres de logement (chambres, maisons, chalets) des particuliers.
Même système d’information et de réservation pour la restauration. Les restaurants du centre-ville et des proches localités ont été recensés (ils sont prêts à servir 7.600 repas chauds par jour) le nombre de places assises à l’intérieur et celles à l’extérieur décompté. Mais, aussi, prévoir le transport des cortèges officiels, des services de messagerie, du secrétariat... Aménager les sites, etc.
Une section “protocole et liaisons” a dû assurer le contact entre les trois paliers fédéral, provincial et municipal, avec la population locale, les intervenants, les groupes qui ont des intérêts, etc. Soixante personnes, un agent par délégation, sont chargées de l’accueil dans les aéroports internationaux de Toronto, Halifax, Montréal, Vancouver, ainsi qu’à l’aéroport de Moncton (qui a subi un aménagement temporaire pour l’occasion), assurer les navettes, les hôtels, les suites, les réponses aux questions, les trousses officielles (aide-mémoire, taux de change, climat...); recevoir les journalistes et leur offrir les services disponibles, etc.
 

Le jeune maire de la ville de 
Moncton,M. Brian Murphy.

Un travail de réfection 
des routes systématique.
PRÉVOIR LES IMPRÉVUS
Même un plan santé d’intervention en cas de problème médical (en collaboration avec Santé-Canada) a été prévu pour répondre aux besoins médicaux des participants. Coordonnées par les deux hôpitaux anglophone et francophone de la ville et une équipe d’une douzaine de personnes, cinq cliniques médicales ont été montées et installées dans les cinq hôtels qui reçoivent les chefs d’Etat et les quatre membres officiels de leur suite.
Denise Boucher, coordonnatrice à l’équipement, est claire: “Chaque clinique mobile, équipée de façon à ne pas engorger les services réguliers hospitaliers, a son défibrillateur, son électrocardio-gramme, sa trousse de trauma respiratoire, de chocs allergiques... Elle peut assurer les premiers traitements, établir un diagnostic et acheminer le cas vers les spécialistes...”. Services ambulanciers, infirmières, salles d’urgence, médecins (quelques-uns même du Nord de la Province) offrent leur contribution et certains professionnels resteront sur appel, au cas où leurs services sont requis: opticien, dentiste, physiothérapeute, pharmacien, etc.

SÉCURITÉ OPTIMALE
Mais c’est certainement la sécurité qui a exigé une organisation titanesque où strictement rien n’est laissé à l’imprévu. C’est qu’il s’agit non moins que de la sécurité de rois, de chefs d’Etat (40 en principe) et de gouvernement. Ils sont, d’ailleurs, classifiés, par une unité d’événements majeurs et selon les standards internationaux, de 1 à 5, en fonction de leur niveau de sécurité. Certains sont en guerre, d’autres font l’objet de menace de mort ou sont en situation critique...
Nous n’en saurons pas plus, le sergent Roger Somers, coordonnateur médiatique, ne livre pas plus de détail. Membre de la Gendarmerie royale du Canada, il sait que la GRC est précise, prévoyante et efficace. Le département des services secrets et des enquêtes s’est renseigné sur toutes les personnes qui seront présentes, qu’elles soient du pays ou de l’étranger. En étroite collaboration avec Ottawa, les douanes, l’émigration, la défense nationale, l’Agence de sécurité canadienne et les gouvernements concernés, la GRC a donné ou refusé l’accréditation à toutes les personnes qui approchent de près ou de loin le sommet. Jusqu’à 15.000 accréditations ont été délivrées pour raisons de sécurité.
Plus de 32 personnes s’assurent qu’à chaque cérémonie, les 60 journalistes autorisés à couvrir l’événement sont bien et bel accrédités et vérifiés à chaque barrage. Les toits seront occupés, les hôtels sous surveillance 24h/24 durant trois jours, les chambres fouillées, les employés inspectés... Des fiches ont été établies aussi bien sur le livreur du pain, la femme de ménage que les chauffeurs ou les préposés à la réception. Quinze chiens sont prévus pour renifler tout ce qui touche aux “dignitaires” et même un vétérinaire est mis en appel au cas où un des chiens viendrait à être malade.
Alors que tout le Nouveau-Brunswick compte 1.800 agents de la GRC, pas moins de 1.500 ont été affectés au sommet (150 de Moncton, avec un renfort de 200 de la Province, le reste venant de partout du Canada). A eux seuls, ils nécessitent une équipe médicale spéciale et une organisation de ressources humaines privée: formation et cours aux chauffeurs et gardes de corps (leur montrer la ville et les y entraîner), hébergement et déplacement, équipement et inventaire, etc. Rien qu’au département informatique, 53 personnes coordonnent 17 sites reliés au centre nerveux de contrôle (liaison avec les pompiers, la défense nationale, etc). 22 techniciens s’occupent de tout un réseau télécom: 200 radios mobiles, 200 téléphones cellulaires, 200 pièces d’équipement (radio, batterie, caméras, TV...).
Les agents de la sécurité ont une tâche minutieuse et détaillée. Ils doivent savoir combien de personnes seront présentes ici et là; qui sera debout ou assis; quelles seront les routes empruntées. 19 sites seront passés au peigne fin dont 7 en permanence (5 hôtels, l’aéroport, le centre de presse), 7 où se déroulera un événement, un déjeuner ou une visite, mais aussi cinq sites possibles, comme les hôpitaux ou des endroits susceptibles d’intéresser les chefs d’Etat. Ils devront s’occuper de la sécurité de 285 véhicules. Chaque délégation jouissant de 3 à 5 voitures et de 4 à 5 gardes de corps, avec préséance pour telle délégation avant l’autre, chaque déplacement nécessitant une heure et demie. Et comme au Canada, il n’est pas question, au passage du cortège de couper les routes et de bloquer les habitants dans des embouteillages interminables, lorsque certaines rues seront fermées à la circulation, des alternatives seront offertes aux gens de la ville pour emprunter d’autres voies que des agents de la circulation veilleront à appliquer.
Outre ces mesures précises et leur présence partout, un support opérationnel prévoit une panoplie de services au cas où quelque chose d’exceptionnel venait à survenir: services d’inspection des hélicoptères, de vérification des ponts, de récupération sous-marine, équipes d’intervention en cas d’attaque biologique, chimique ou nucléaire, en cas de prise d’otages, groupe de désamorcement d’explosifs, tireurs d’élite, négociateurs, services spécialisés pour les empreintes, lecture des films, traitement des prisonniers, équipe anti-émeute, d’enquête, de reconstitu-tion d’accident... Tout a été prévu, sauf que si le ciel ne venait à leur tomber sur la tête.
 
LE MONDE DE LA FRANCOPHONIE
La Francophonie est un réseau de 52 Etats et gouvernements qui ouvre les portes à un marché de 500 millions de personnes disséminées aux quatre coins du globe, dont 120 millions parlent le français et œuvrent pour des buts communs, afin de développer la connaissance et le progrès, la culture et la communication, la liberté et la démocratie, l’économie et le développement et, bien sûr, la francophonie 

Le premier sommet de la francophonie eut lieu à Paris en 1986, suivi des sommets de Québec (1987), Dakar (1989), Chaillot (1991), Maurice (1993), Cotonou (Bénin) (1995) et Hanoi (1997).
Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement: instance suprême, se réunit tous les deux ans, traite de questions internationales et définit les orientations de la francophonie.
Conférence ministérielle de la francophonie: composée de ministres des Affaires étrangères ou ministres de la francophonie: veille à l’exécution des décisions du sommet, se réunit une fois l’an (cette année, les 31 août et 1er septembre).
Conseil permanent de la francophonie: conseil d’administration de l’Agence de la francophonie, formé des représentants personnels des chefs d’Etat et de gouvernement, chargé de la préparation et du suivi du sommet (s’est réuni les 29 et 30 août).
Secrétariat général de la francophonie, placé sous l’autorité du Secrétaire général, porte-parole politique et représentant officiel de la francophonie.
Agence de la francophonie: organisation intergouvernementale unique de la communauté francophone, opérateur principal des programmes de coopération culturelle, scientifique, technique, économique et juridique décidés par le sommet.
Assemblée parlementaire de la francophonie: composée de parlementaires de langue française, qui participent aux travaux du sommet, de la CMF et du CFP.
Opérateurs directs: Agence universitaire de la francophonie (AUF); TV5, Université Senghor d’Alexandrie; Association internationale des maires francophones (AIMF).
Conférences ministérielles permanentes: Conférence des ministres de la Jeunesse et des Sports (CONFEJES) et de l’Education nationale (CONFEMEN)
52 pays et gouvernements: Albanie, Belgique, Bénin, Bulgarie, Burkina Faso, Burundi, Cambodge, Cameroun, Canada, Canada/Nouveau-Brunswick, Canada/Québec, Cap-Vert, Centrafrique, Communauté française de Belgique, Comores, Congo (République du), Congo, (République démocratique du), Côte d’Ivoire, Djibouti, Dominique, Egypte, France, Gabon, Guinée, Guinée-Bissau, Guinée Equatoriale, Haïti, Laos, Liban, Luxembourg, Macédoine (ex-République yougoslave de), Madagascar, Mali, Maroc, Maurice, Mauritanie, Moldavie, Monaco, Niger, Pologne, Roumanie, Rwanda, Sainte-Lucie, Sao Tomé et Principe, Sénégal, Seychelles, Suisse, Tchad, Togo, Tunisie, Vanuatu, Vietnam. 

PAR GISELE EID

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