Il
se dit “opposant dans le loyalisme et loyaliste dans l’opposition” et ne
cache pas le fait qu’il traduit la pensée du chef du Législatif
dont il est le membre le plus en vue de son bloc parlementaire.
M. Mohamed Abdel-Hamid Beydoun critique le “Cabinet des 16” pour n’avoir pas effacé les séquelles des gouvernements successifs de M. Rafic Hariri, en adoptant un plan efficace et estime que le “système haririen” s’est perpétué, partiellement, dans la politique financière. En ce qui concerne les rapports entre le Pouvoir et l’opposition, il soutient “qu’on ne peut parler d’une trêve politique, mais d’un début de dialogue entre les deux parties, la relation étant bonne entre les opposants et le président de la République, mais non entre ces derniers et le chef du gouvernement”. |
Dans quel domaine le gouvernement a échoué ou réussi?
Ceci dépend de ce que nous attendons du Cabinet. Les citoyens
fondaient beaucoup d’espoir sur le “Cabinet des 16”, notamment de le voir
effacer les séquelles des précédents gouvernements
haririens, en ce qui a trait, principalement, à la dette publique,
au déficit budgétaire, au gaspillage des fonds publics et
à la gestion des affaires étatiques, en général,
sans perdre de vue la crise socio-économique qui se traduit par
un marasme dont le pays n’a pas connu de pareil.
Si les Cabinets qui se sont succédé au Sérail
n’ont pas attaché l’intérêt voulu aux problèmes
intéressant les citoyens dans leur vie quotidienne, le gouvernement
actuel tarde à créer un ministère de la Planification.
Puis, il devrait demander au CDR d’élaborer un plan de relèvement
économique qui constitue un acte technique et non politique.
Cela prouve que le gouvernement place la planification au bas de ses
priorités, ce qui n’est pas admis, seule la planification étant
en mesure de déterminer le meilleur moyen de profiter au maximum
de nos ressources humaines et économiques.
Nous constatons, à ce propos, que la façon de traiter
les problèmes revêtant un caractère d’urgence, n’a
pas été au niveau des espoirs.
En revanche, on peut dire que le gouvernement a établi un plan
de redressement financier bien qu’il ne l’ait pas appliqué dans
son intégralité, car il a opté pour une politique
d’austérité. Puis, le système financier institué
par les Cabinets de M. Hariri est adopté bien que partiellement,
par le gouvernement Hoss qui aurait dû prendre des mesures radicales
pour favoriser le redressement.
Huit mois après sa formation, le “Cabinet des 16” n’a pu concrétiser
le projet de la réforme, bien que nous portons à son actif
sa capacité de maintenir la stabilité de la monnaie nationale,
ce qui est important pour le relèvement économique. Mais
ceci ne suffit pas à assurer la survie de l’équipe gouvernementale
au cours des deux prochaines années.
Etes-vous pour le maintien du gouvernement jusqu’après les
élections législatives de l’an 2000?
Il s’agit, tout d’abord, d’élaborer une nouvelle loi électorale.
Quant au gouvernement, il n’a pas de poids, à mon avis, au plan
électoral et un Cabinet neutre dont aucun des membres ne serait
candidat, est une idée démagogique, car cela ne garantirait
nullement sa neutralité. L’important est que le scrutin ne soit
pas falsifié et, à cet effet, il faut mécaniser l’opération
du vote et la superviser électroniquement. Dans ce cas, il n’est
pas important que les ministres ne posent pas leur candidature.
L’élaboration de la nouvelle loi électorale bute contre
le découpage des circonscrip-tions; quelle est la position de votre
bloc parlementaire à ce sujet?
Notre projet prévoit la transposition du Liban, pour la première
fois, du système de la majorité à celui de la proportionnelle,
afin d’assurer à toute liste un nombre d’élus proportionnel
au nombre des voix obtenues par ses membres. De cette façon, toutes
les parties seraient représentées à la Chambre et
aucune d’elles ne serait exclue du jeu politique. Nous estimons que l’évolution
de notre système politique dépend, dans une large mesure,
de l’adoption de la proportionnelle, surtout si cette formule est accompagnée
de la transformation du Liban en circonscription unique. Ainsi, nous pourrons
garantir la stabilité politique et permettre à tous les Libanais
d’être représentés au parlement par des éléments
de leur choix.
Le retard mis à élaborer la nouvelle loi électorale,
laisse craindre l’adoption au dernier moment d’un projet admettant certaines
exceptions. Qu’en pensez-vous?
Il importe de respecter les termes de l’accord de Taëf qui se
prononce en faveur du mohafazat en tant que circonscription électorale,
en prévision de la transformation du pays en circonscription unique.
Et ce, dans le but d’assurer une représentation saine de la volonté
populaire.
Certains font grief au projet de loi de la décentralisation
adminis-trative de contredire celui de la loi électorale. Quel est
votre avis?
En effet, les Libanais n’ont pas d’expérience dans la décentrali-sation.
Ils ont vécu une période de centralisation excessive, où
l’Etat constituait un centre d’attributions. La loi sur la décentralisation
mise au point par le gouvernement, répartit les attributions du
pouvoir central, de façon à élargir celles des administrateurs
et des caïmacams. Ce projet qui n’a pas défini les prérogatives
des conseils élus et leur autonomie vis-à-vis du pouvoir
central, a besoin d’un changement radical.
D’aucuns reprochent au président Nabih Berri d’avoir arrêté
le processus de la réforme administrative. Qu’en pensez-vous?
Cela relève de l’hérésie politique. La durée
du gouvernement dépend de la confiance que lui accorde l’Assemblée
nationale que préside M. Berri. Le problème réside
dans le fait que le gouvernement ne dispose pas d’un plan pour la réforme
administrative.
La réforme consiste à développer les organismes
de l’Etat, à recycler les fonctionnaires et à mobiliser l’administration
au service des citoyens.
Beaucoup considèrent l’ouverture des dossiers comme une atteinte
à la Justice, parce qu’elle a attendu une décision politique
pour être soulevée. Qu’en pensez-vous?
Il fallait procéder, d’abord, à la réforme de
la Justice. L’Organisme judiciaire qui existe, actuellement, est celui-là
même qui exerçait ses fonctions durant les six ans de mandat
des Cabinets précédents. La question de l’ouverture des dossiers
est suspecte, d’autant que l’Organisme judiciaire qui était au service
d’un certain Pouvoir exécutif est chargé aujourd’hui de le
juger.
Dans tous les pays du monde, la Justice est influencée par le
climat politique. Mais le magistrat doit être probe et éviter,
autant que possible, d’en être influencé. En tout cas, le
gouvernement s’est rendu compte du problème et projette de réformer
la Justice.
Le Liban fait face au danger de l’implantation, d’autant plus que
le Premier ministre israélien, veut installer les réfugiés
palestiniens dans les pays où ils se trouvent. Comment se traduit
le refus libanais de l’implantation?
La résolution 194 du Conseil de Sécurité relative
au droit de retour des réfugiés palestiniens à leurs
terres et approuvée par les Américains, doit être irrévocable.
Quant au refus de l’implantation, il doit être concrétisé
par une entente libano-arabe, afin d’exercer une pression sur les forces
internationales et imposer le droit de retour des Palestiniens. Le Liban,
la Syrie, l’Egypte, la Jordanie et les Palestiniens, ne peuvent vivre en
paix avec Israël, si celui-ci refuse le retour des Palestiniens. Le
processus de paix n’aura pas de signification, si le droit de retour des
réfugiés palestiniens n’est pas consacré.