L’importance de cette visite ne provient pas du fait que c’est la première
depuis 1965, mais parce qu’elle intervient à une étape délicate
au plan régional. Les entretiens bipartites ont porté sur
le processus de paix, le souverain hachémite ayant annoncé
que les négociations sur les volets libanais et syrien reprendraient
dans un délai de deux mois, Ehud Barak, Premier ministre israélien,
étant paraît-il, sérieux quand il s’engage à
rapatrier “Tsahal” du Liban-Sud avant le 7 juillet de l’an 2000.
Sa Majesté a, également, fait état de démarches
visant à régler le problème des réfugiés
palestiniens, en dehors de l’implantation dans les pays d’accueil, à
commencer par le nôtre.
Ces questions, en plus d’accords bilatéraux entre les deux pays
aux plans économique, sécuritaire et du développement,
ont fait l’objet des pourparlers, le président Lahoud ayant rappelé
à son éminent hôte les constantes libanaises sur base
desquelles le Liban reprendrait les négociations avec Israël,
en insistant sur une paix juste et globale et la concomitance des volets
syrien et libanais.
De même, le chef de l’Etat a exposé au roi Abdallah la
situation au Liban-Sud et l’action de la Résistance libanaise contre
l’occupant israélien.
VERS LA TENUE D’UN SOMMET ARABE?
On présume que le souverain hachémite, tout en préconisant
un axe tripartite libano-syro-jordanien pour faire face aux défis
de l’étape future, a proposé la tenue d’un sommet, à
l’effet de réaliser la réconciliation interarabe. Et ce,
afin d’unifier la position des Etats membres de la Ligue, en prévision
des échéances régionales, spécialement au niveau
des volets libanais et syrien et des négociations pour l’étape
finale qui ont été entamées lundi dernier au passage
d’Eretz.
Le roi Abdallah II en avait discuté à la faveur d’entretiens,
en tête-à-tête, qu’il a eus avec plusieurs personnalités
politiques libanaises: les présidents Nabih Berri, Salim Hoss, Omar
Karamé, Hussein Husseini, Rafic Hariri, MM. Walid Joumblatt et Dory
Chamoun.
A propos de l’éventuelle relance des négociations arabo-israéliennes
sur les volets libanais et syrien, le président Hoss a dit que Sa
Majesté qui a annoncé leur reprise d’ici à deux mois,
n’a pas fixé de date.
Le chef du gouvernement a rappelé ses précédentes
prises de position, en réponse à une déclaration du
Premier ministre israélien promettant de rapatrier ses forces du
Liban-Sud avant le mois de juillet de l’an 2000. “Je réaffirme,
a dit M. Hoss, notre attachement à la résolution 425 du Conseil
de Sécurité exigeant le retrait immédiat et inconditionnel
d’Israël de notre territoire jusqu’aux frontières libanaises
internationalement reconnues, sans accepter la condition de Tel-Aviv relative
à des arrangements de sécurité.”
POLITIQUE D’OUVERTURE
Il y a lieu de relever, à cette occasion, la politique d’ouverture
instaurée par le roi Abdallah dès son intronisation, politique
dont il a proclamé les principes de base lors de visites officielles
qu’il a effectuées, dernièrement, en Syrie et au Koweit.
Il y a lieu de préciser que la visite du roi Abdallah au Koweit
a dissipé les séquelles de l’invasion irakienne de la principauté.
A la suite de la visite royale au Liban, des contacts intensifs ont
été entamés entre Beyrouth et Damas, en vue d’un échange
de vues sur les développements de la conjoncture régionale,
d’autant que le souverain hachémite a laissé entendre que
la relance des négociations sur les volets libanais et syrien pourrait
intervenir d’ici à deux mois.
QUID DES DOSSIERS INTERNES
Cependant, la visite royale n’a pas occulté les dossiers internes,
en particulier ceux en rapport avec la nouvelle loi électorale,
la corruption et le gaspillage des fonds publics.
Le précédent régime, observe-t-on, vient de recevoir
une nouvelle “gifle”, suite à l’arrestation de l’ancien directeur
général de l’exploitation et de l’entretien au ministère
des Télécommunications, Abdel-Monhem Youssef. Ce dernier
a été appréhendé par les forces de l’ordre
au moment où il tentait de se rendre, clandestinement, à
Chypre pour, de là, gagner la France, alors qu’il devait comparaître
le lendemain devant le magistrat instructeur chargé d’instruire
l’affaire relative à la dilapidation des fonds au département
mentionné.
Youssef avait été affecté à ce poste en
1994 par le Cabinet Hariri, après l’avoir amené à
démissionner du poste qu’il occupait à la société
France Télécom.
En ayant essayé de fuir, Youssef a confirmé sa culpabilité
et son interrogatoire permettra de démêler l’écheveau
d’un dossier particulièrement complexe.
À QUAND LA NOUVELLE LOI ÉLECTORALE?
En ce qui concerne la nouvelle loi électorale, on s’attend que
les principes sur base desquels elle sera élaborée se concrétisent
d’ici à la fin du mois. Mais ceci n’empêche pas les personnes
concernées de poursuivre leurs campagnes électorales officiellement
non proclamées...
A ce propos, on signale une tentative effectuée par M. Rafic
Hariri aux fins de garantir les suffrages des électeurs arméniens,
en ayant rendu visite, récemment, à S.S. le catholicos Aram
Kéchichian. L’ancien chef du gouvernement craint que l’électorat
arménien le lâche et s’abstienne de soutenir sa liste aux
législatives de l’an 2.000. Ceci pourrait le contraindre, peut-être,
à ne plus poser sa candidature à Beyrouth et de revenir à
sa base, Saïda étant sa circonscription initiale.
A vrai dire, le ministre de l’Intérieur, Michel Murr a relancé
les tractations, en annonçant que les consultations ont été
entamées, au plan officiel, en prévision de l’élaboration
de la nouvelle loi électorale. Aussi, la controverse a-t-elle repris
de plus belle autour du découpage des circonscriptions et celle-ci
gagnera en férocité au fur et à mesure qu’on approchera
du délai constitutionnel durant lequel le projet gouvernemental
doit être déposé sur le bureau de la Chambre.
Quoi qu’il en soit, le chef de l’Etat, étant donné la
fermeté de ses prises de position, restera l’arbitre et les milieux
proches du palais de Baabda laissent entendre qu’il retournera au parlement
tout projet de loi électorale qui ne viserait pas à assurer
deux objectifs: une représentation saine de la volonté populaire
et l’intégration nationale.
LAHOUD POUR UNE LOI ÉQUILIBRÉE
Le président Lahoud insiste pour que la nouvelle loi traite
tous les candidats et les régions sur le même pied d’égalité.
Dans ce même ordre d’idées, il y a lieu de faire état
de la cabale dont le ministre de l’Intérieur est actuellement la
cible, certains de ses adversaires politiques réclamant son éloignement
de ce département ministériel à qui incombe la responsabilité
de superviser la consultation populaire.
Dans le même temps, les opposants reprennent leur ancienne rengaine,
par laquelle ils réclament un changement gouvernemental.
Mais tout indique que le “Cabinet des 16” sera maintenu jusqu’aux prochaines
législatives, la plupart de ses membres ne briguant pas un siège
sous l’hémicycle.
Pendant ce temps, M. Hariri intensifie ses contacts très discrètement,
avec les associations de quartiers et les familles beyrouthines en vue
de renforcer sa position au plan électoral.
De son côté, le président Nabih Berri ne reste
pas inactif, son action visant en ce moment à récupérer
les éléments qui ont pris leur distance du mouvement “Amal”,
le meeting organisé à l’occasion de l’anniversaire de la
disparition de l’imam Sadr - auquel ont assisté plus de cent mille
personnes - ayant donné la mesure de sa représentativité.
Enfin, il importe de signaler une rencontre, la première depuis
longtemps, entre MM. Walid Joumblatt et Talal Arslan, à Baakline,
les deux leaders druzes ayant échangé les vues autour des
problèmes de l’heure et, aussi, de la prochaine bataille électorale.