Bloc - Notes

Par ALINE LAHOUD
LE LIBAN MALADE SE SA CLASSE POLITIQUE
Si l’on devait donner un nom aux années que nous vivons actuellement, nous les appellerions le temps des rumeurs ou la guerre des déclarations. On nous avait promis une ère de transparence; nous découvrons, à la pratique, une véritable Babel où chacun parle une langue que nul ne comprend, y compris celui qui la parle.
Ainsi, à quoi rime la sortie de M. Mohsen Dalloul, à propos d’écoutes téléphoniques? Il y a, nous révèle-t-il, dans la banlieue de Beyrouth, un centre d’écoutes dirigé par la CIA pour recueillir des informations au profit d’Israël.
Comment M. Dalloul le sait-il? Comment sait-il que l’ambassadeur Satterfield va tous les jours cafarder chez Barak? Il le sait parce qu’il était pendant de longues années ministre de la Défense nationale, non pas d’Israël ou des Etats-Unis, mais du Liban. En a-t-il fait part quand il l’a appris à son chef de gouvernement? Mohsen Dalloul, qui figure sur la liste des fidèles des autorités de Damas, n’a-t-il jamais eu l’idée d’en parler aux frères syriens? C’est pour le moins bizarre!
De plus, pourquoi M. Dalloul n’a dévoilé le pot-aux-roses que maintenant? Est-ce pour rendre la vie impossible à Salim Hoss? Possible. Mais Mohsen Dalloul oublie-t-il que Hoss, depuis 1992 est soigneusement tenu à distance du Pouvoir. Alors? Cafouillage ou existe-t-il un code d’accès à ce qui semble être un jeu-vidéo particulièrement complexe?
Après Dalloul, c’est M. Assem Kanso qui se met à pousser la chansonnette. D’après le député de Baalbeck-Hermel, tout le monde à peu près est un agent israélien. Preuve en est - à en croire M. Kanso - la conduite scandaleuse du ministre de l’Intérieur, M. Michel Murr. Un Michel Murr qui se fait appeler “Dawltou” long comme le bras, qui est en train de tirer le tapis de sous les pieds du Premier ministre et dont les grandes dents - celles de M. Murr - (à en croire toujours M. Dalloul) sont spécialement affutées “pour mieux te manger mon enfant”. Lequel petit Chaperon rouge, alias Salim Hoss, s’en est allé jusqu’à Manhattan essayer d’attirer l’attention sur sa galette et son pot de beurre sans réussir, semble-t-il, à intéresser personne.
Quand on sait que Kanso était secrétaire général du Baas syrien et est toujours membre de ce parti, on peut se demander à quoi rime cet incroyable mic-mac et s’il y a une action délibérée derrière ce qui apparaît comme une véritable pagaille.
Troisième événement pour le moins bizarre, le pèlerinage de M. Walid Joumblatt au Kesrouan. Qu’est-il donc allé faire chez ceux qu’il a toujours considérés - à travers ses déclarations depuis au moins vingt ans - comme pire que la peste, la rage et choléra réunis? Ces cannibales de maronites, propagateurs d’un mal plus ravageur que le sida, que Walid bey et ses partisans appellent “le maronitisme politique”?
Nous ne le saurons pas. Tout ce que nous savons, c’est que la visite a pris une tournure non souhaitée par le leader du PSP qui n’a pas tenté de cacher son mécontentement et qui s’en est pris aux journalistes qu’il a qualifiés d’agents d’Israël.
Ici une question se pose: comment se porterait le Liban sans sa classe politique? Répondant indirectement à cette question, un de mes amis m’a raconté un jour l’histoire de ce politicien, sorcier à ses heures, qui avait trouvé le moyen de dialoguer avec la rivière qui bordait sa maison.
- Voyez-vous, dit un jour le politicien à la rivière, je sais tout ce qui vous concerne. Il n’y a qu’une seule chose que je ne comprends pas.
- Et c’est? demanda la rivière.
- Je ne comprends pas, dit le politicien, sachant ce que je sais sur vous, pourquoi vous autres rivières vous vous précipitez toutes vers la mer pour vous y noyer?
- Comme c’est curieux, dit la rivière. La seule chose que moi je ne comprends pas, c’est, sachant tout ce que je sais sur vous, pourquoi vous autres politiciens ne vous décidez-vous pas à en faire autant. 

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