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Le
regard franc et scrutateur; le visage expressif, son sourire, sa voix ont
une étrange façon de dompter les sens: personnalité,
gentillesse, modestie et finesse. Mme Ruth Dreifuss, présidente
de la Confédération suisse (la seule depuis 1848), militante
de la cause féminine, nous reçoit avec chaleur et souligne
“les affinités qui permettent au Liban et à la Suisse d’intensifier
leurs relations”.
Tout en reconnaissant le droit du peuple palestinien à l’autodéter-mination, autant que celui de l’Etat hébreu à l’existence et à la sécurité, elle se dit préoccupée par la grave situation humanitaire du peuple d’Irak. Mme Dreifuss se prononce, franchement, contre la peine de mort, “parce que c’est un acte intolérable” et soutient les initiatives d’Amnesty International. |
GRAND POTENTIEL HUMAIN AU LIBAN ET EN SUISSE
Quelle idée vous faites-vous du Liban
que d’aucuns surnomment “Suisse de l’Orient” et lui trouvez-vous des affinités
avec votre pays?
Oui, je suis convaincue qu’il y a des affinités
entre nos deux pays montagneux, dont la principale richesse réside
dans le grand potentiel humain. Dans nos deux pays, la diversité
des identités tant régionales, linguistiques que confessionnelles,
a des conséquences importantes sur l’organisation de la société
et la structure politique. Je souhaite, d’ailleurs, que ces affinités
nous permettent d’intensifier nos relations bilatérales.
La Confédération helvétique
peut-elle contribuer à la relance des négociations de paix
au Proche-Orient et, surtout, au règlement du problème des
réfugiés palestiniens pour prévenir leur implantation
dans les pays où ils sont actuellement établis?
Le Conseil fédéral soutient pleinement
le processus de paix engagé à Madrid, en décembre
1991. La Suisse joue, surtout, un rôle dans le processus multilatéral
de paix où elle rappelle la dimension humaine dans ce processus,
c’est-à-dire la promotion des droits civils, politiques, sociaux,
économiques et culturels, ainsi que la compréhension interculturelle.
Nous sommes, en effet, convaincus que ces efforts sont indispensables pour
garantir une paix durable dans la région qui permette à tous
ses habitants de vivre dans la dignité.
Le sort des réfugiés palestiniens
me touche tout particulièrement au regard des expériences
dramatiques. Les parties se sont engagées à trouver une solution
politique à cette question d’importance majeure, dans le cadre des
négociations sur le statut définitif. La Suisse les incite
à entamer ces négociations le plus vite possible, car chaque
jour de plus passé dans la précarité à tous
les niveaux que connaissent tant de réfugiés, est un jour
de trop.
La Suisse contribue, également, au budget
de l’UNRWA (sa contribution annuelle de 8 millions de francs suisses la
place au 10ème rang des donateurs). Elle joue, en outre, un rôle
dans la coordination entre donateurs, Etats hôtes - dont le Liban
- et l’UNRWA.
DROITS DES PALESTINIENS ET D’ISRAËL
Etes-vous en faveur de la proclamation d’un
Etat palestinien indépendant et du retour des réfugiés
palestiniens vivant dans les pays arabes, dont le plus grand nombre vit
au Liban?
La Suisse reconnaît, d’une part, le droit
d’Israël à l’existence et à la sécurité
dans des frontières internationalement reconnues et, d’autre part,
le droit du peuple palestinien à déterminer son propre avenir,
y compris l’option de fonder son propre Etat. J’espère que ce droit
sera concrétisé à bref délai.
La Suisse considère que la création
d’un Etat palestinien souverain, viable, démocratique et pacifique
dans le cadre d’une solution politique, serait le meilleur moyen de garantir
une paix durable pour les Israéliens et les Palestiniens et de promouvoir
l’acceptation d’Israël comme partenaire et facteur de développement.
La Suisse se déclare disposée à envisager la reconnaissance
d’un Etat palestinien, conformément aux principes fondamentaux évoqués
ci-dessus.
Mme Dreifuss et notre collaboratrice,
Jeanne Massaad.
POUR UN PROCESSUS DÉMOCRATIQUE EN RFY
Les hautes autorités helvétiques
ont-elles souscrit au règlement élaboré pour la crise
du Kosovo et approuvent-elles la demande d’exclusion de Slobodan Milosevic
exigée par les Etats-Unis, pour accepter d’aider à la reconstruction
des régions yougoslaves dévastées par les frappes
aériennes?
La Suisse salue et soutient la solution politique
du conflit au Kosovo sur la base de la résolution 1244 du Conseil
de sécurité des Nations Unies. La Suisse souhaite qu’un processus
démocratique dans la République fédérale de
Yougoslavie conduise, aussi, ce pays à profiter de l’aide internationale
à la reconstruction.
La Suisse prêtera son assistance humanitaire
à la Serbie, sans égard à la situation politique,
comme elle l’a fait dans le cadre de l’opération “Focus” pendant
les derniers mois.
Comment concevez-vous la solution du problème
kurde?
Le Conseil fédéral est conscient
de la situation difficile dans laquelle vit depuis des années, la
population kurde non seulement en Turquie mais, également, en Irak,
en Syrie et en Iran. Dans le cas de la Turquie, où vit la majeure
partie de la population kurde, une solution requiert le concours de la
communauté internationale. Au cours de ces dernières années,
la Suisse a entrepris des actions répétées, tant au
sein de l’OSCE qu’au Conseil de l’Europe, pour encourager la Turquie à
reconnaître certains droits à la population kurde et à
respecter les droits de l’homme.
En prévision des élections fédérales
“Journée d’information” à l’intention des femmes candidates La date des élections fédérales approchant à grands pas et à l’invitation des femmes parlementaires des deux Chambres fédérales, une journée d’information a eu lieu au somptueux Palais fédéral, à l’intention de toutes les candidates au Conseil National et au Conseil des Etats. Les
femmes siégeant, actuellement, au parlement tiennent, ainsi, à
apporter leur soutien et leurs encouragements aux candidates qui briguent
un siège, cet automne. Mmes Ruth Dreifuss, présidente de
la Confédération et Ruth Metzier, conseillère fédérale,
étaient également présentes.
LE RÔLE DE LA FEMME
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SUISSE - UNION EUROPÉENNE
Quel a été l’impact de l’Euro
sur la Suisse au plan économico-financier? Et quelle est la nature
de vos relations avec l’Union européenne et ses différents
Etats membres?
La Suisse entretient d’excellentes relations
avec l’UE, ainsi qu’avec chacun de ses Etats membres. Les négociations
bilatérales de la Suisse avec l’UE nous permettront d’approfondir
les liens économiques, scientifiques et culturels avec les 380 millions
de citoyens européens, dont plus de 200 millions partagent
nos langues.
La création d’une monnaie unique représente
une étape importante dans le processus d’intégration européenne
et un témoignage concret de la volonté de construire une
Europe forte et capable d’assumer son rôle économique et politique
dans le monde. Même si la Suisse ne fait pas partie de l’Union européenne,
notre économie est profondément intégrée dans
le marché commun: 60% des exportations suisses vont à l’UE,
alors que 80% des importations suisses en proviennent.
CONSOLIDER NOTRE SYSTÈME SOCIAL
A quels problèmes le gouvernement helvétique
est-il actuellement confronté, exigeant des solutions urgentes?
La Suisse est connue dans le monde entier comme
un pays stable et fondé sur la pluralité des langues, des
cultures et des confessions. Ce système a fait ses preuves et jouit
toujours d’une large adhésion de la population. Cependant, le vote
populaire rejetant la participation de la Suisse à l’Espace économique
européen a révélé des divergences profondes
quant aux relations multilatérales de mon pays. La stagnation économique
a également fait apparaître des clivages entre les régions.
Je crois qu’un des défis principaux pour les prochaines années
sera celui de développer notre démocratie à l’intérieur
de la communauté internationale, car tant au sein de l’Union européenne
que de l’ONU, la Suisse a un rôle important à jouer.
La consolidation de notre système d’assurances
sociales - qui font partie de mon département à l’exception
de l’assurance chômage - est, aussi, un des défis majeurs.
Nous avons, en effet, pas à pas, construit un système qui
a refermé l’un après l’autre les pièges de la pauvreté
dus à la vieillesse, à l’invalidité, à la maladie.
Il y a, cependant, de nouveaux pièges qui se sont ouverts, liés
à la difficulté de trouver un travail suffisamment rémunérateur.
Des réformes sont nécessaires pour tenir compte des changements
des structures familiales et de l’évolution démographique,
un problème commun à tous les pays européens.
CURRICULUM VITAE DE LA PRESIDENTE DE LA CONFEDERATION
HELVETIQUE
Originaire d’Endingen (Argovie), Ruth Dreifuss est née le 9 janvier 1940 à Saint-Gall. Sa famille s’établit à Berne de 1942 à 1945, avant de déménager à Genève. C’est dans cette ville qu’elle fait ses études: diplôme commercial en 1958; licence en sciences économiques (mention mathématiques), en 1970. Elle a déployé plusieurs activités professionnelles:
elle a été secrétaire d’hôtel au Tessin, de
1958 à 1959; rédactrice à l’hebdomadaire “Coopération”,
de l’Union suisse des coopératives, à Bâle de 1961
à 1964, avant d’assumer le poste d’assistante au Centre psycho-social
universitaire de Genève de 1965 à 1968; puis, d’assistante
à la Faculté des sciences économiques et sociales
de l’Université de Genève de 1970 à 1972.
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