Tout indique que ce sommet serait possible à partir de la semaine
prochaine, après que la réunion de la commission mixte aura
siégé, lundi et mardi, sous la co-présidence des deux
chefs de gouvernement, les présidents Hoss et Zohbi.
Les responsables libanais et syrien semblent attendre le rétablissement
de M. Farouk Chareh, ministre syrien des Affaires étrangères,
après l’opération chirurgicale qu’il a subie à l’hôpital
de l’Université Américaine à Beyrouth.
Les présidents Lahoud et Assad ont maintenu le contact, presqu’en
permanence, avec cet établissement hospitalier et l’équipe
de chirurgiens ayant opéré le chef de la diplomatie syrienne,
pour s’enquérir de son état de santé. Dans le même
temps, un flux incessant de personnalités était signalé
à l’hôpital américain où Oum Moudar (Mme Chareh),
sa fille et des membres de sa famille rassuraient les visiteurs quant à
l’amélioration de l’état du grand malade.
Les observateurs s’attendent que le prochain sommet bipartite engage
le Liban dans une nouvelle étape, les opposants espérant
qu’à cette occasion le dossier gouvernemental serait ouvert, en
vue d’un éventuel changement du “Cabinet des 16” ou, tout au moins,
de son remaniement. Mais les indices ne permettent pas une évolution
dans ce sens; au contraire, ils portent à penser que le gouvernement
Hoss sera maintenu et même supervisera les législatives de
l’an 2000.
Pendant ce temps, M. Rafic Hariri, désespérant de voir
changer le gouvernement, s’emploie à consolider sa position, surtout
dans la capitale, en prévision des prochaines élections générales.
Lui-même prétend respecter la “trêve politique”, mais
les médias considérés comme ses porte-parole poursuivent
leur cabale contre le régime et le gouvernement.
L’ancien Premier ministre multiplie les démarches auprès
de certains leaders politiques et chefs de missions diplomatiques, l’ambassadeur
US en tête, pour les convaincre d’intervenir auprès des hautes
autorités en vue de changer l’équipe ministérielle.
Le président Nabih Berri que M. Hariri a rencontré dimanche
soir à Aïn el-Tiné et M. Sleimane Frangié, ministre
de l’Agriculture, ne sont pas épargnés...
CHAREH OCCULTE LES PROBLÈMES INTERNES
Il va sans dire que les problèmes de santé de M. Chareh
ont occulté, dans une large mesure, les problèmes internes.
Le ministre syrien des A.E. avait été amené d’urgence
en ambulance de Damas à Beyrouth, suite à un malaise cardiaque
et soumis à une opération ayant duré près de
cinq heures, celle-ci ayant été effectuée par une
équipe formée des meilleurs cardiologues libanais: les Drs
Samir Alam, Jaber Sawaya, Walid Gharzeddine, Antoine Nasrallah; les chirurgiens
qui l’ont opéré étant les Drs Ibrahim Dagher, Mounir
Obeid et Raja Haddad.
Ceux-ci ont traité une déchirure de l’aorte provoquée,
vraisemblablement, par le surmenage et la tension artérielle élevée.
L’opération a pleinement réussi et le Dr Karam Karam,
ministre de la Santé, devait annoncer la bonne nouvelle qui a rassuré
tous ceux que l’état de santé du chef de la diplomatie syrienne
inquiétait.
M. Chareh devait être transféré, mercredi, de la
salle des soins intensifs à une suite au cinquième étage
de l’hôpital américain. Cependant, il avait été
réintroduit mardi matin au bloc opératoire, pour ligaturer
un point de suture extérieur qui avait sauté. “Mais dans
l’ensemble, a déclaré l’un des médecins ayant participé
à l’intervention chirurgicale, M. Chareh n’a pas eu de complications
cérébrales qui accompagnent parfois les opérations
du cœur. Certains opérés peuvent être frappés
d’une sorte de paralysie ou de ralentissement des mouvements, mais cela
ne s’est pas produit.”
De son côté, le ministre de la Santé a précisé
que M. Chareh sera placé pendant une semaine à dix jours
au maximum, dans le service de chirurgie cardiaque.
“Tout nous rassure, a dit une source officielle syrienne: le ministre
Chareh est conscient et après une surveillance médicale,
il devra regagner Damas dans une semaine où il passera sa convalescence.”
Pour en revenir au sommet libano-syrien, le président Berri
y avait fait allusion en recevant les reporters de presse qui couvrent
les activités du parlement, en précisant que “la rencontre
Lahoud-Assad sera précédée d’une réunion de
la commission supérieure mixte.”
Entre-temps, le brigadier Ghazi Kanaan, chef du service de renseignements
des forces syriennes stationnées au Liban, était intervenu
une fois de plus auprès des différentes parties libanaises,
pour les convaincre de mettre une sourdine à leurs dissensions,
aux fins de consolider le front intérieur, face aux développements
dont le Liban-Sud est actuellement le théâtre. Le président
Rafic Hariri qui se trouvait, alors, à Paris, a rencontré
l’officier supérieur syrien à Chtaura dès son retour.
NOUVELLE TRÊVE POLITIQUE... MAIS JUSQU’À
QUAND?
Le brigadier Kanaan avait insisté sur la nécessité
de calmer le jeu dans les circonstances présentes pour faire face
à l’évolution de la conjoncture régionale. Aussi,
MM. Hariri et Walid Joumblatt ont-ils pris le parti de se réserver
pour le débat qui sera institué, fin octobre, autour du projet
de budget de l’an 2000; du projet de loi électorale et de celui
relatif à la décentralisation administrative.
Quant au dialogue entre le Pouvoir et la néo-opposition, les
milieux officiels observent que cette dernière l’avait rompu après
la dernière audience accordée par le chef de l’Etat à
M. Rafic Hariri. En effet, celui-ci n’a pas retenu le conseil du président
de la République qui lui a recommandé de discuter avec le
président du Conseil des problèmes à débattre,
le palais de Baabda tenant à rester au-dessus de la mêlée.
Ainsi, l’échange d’accusations et même d’insultes a repris
de plus belle entre le Sérail et ses détracteurs, par députés
ou ministres interposés, ce qui a amené le président
Nabih Berri à déplorer, publiquement, un tel moyen inadéquat
utilisé par les hommes politiques pour s’invectiver. “On dirait,
a dit le chef du Législatif, qu’ils n’écoutent pas le vrombissement
des avions israéliens au Liban-Sud et n’ont pas connaissance des
pertes en vies humaines et des dégâts matériels considérables
que les raids ennemis causent aux populations sudistes.”
Cependant, on s’attend à un nouvel apaisement du climat politique
dans les jours qui suivront une nouvelle audience que le président
Lahoud doit accorder, incessamment, à M. Hariri, à la demande
de ce dernier.
Les responsables syriens y sont pour quelque chose, eux qui engagent
toutes les parties libanaises à se regrouper autour du régime
et à le soutenir, dans l’action qu’il mène en vue d’édifier
l’Etat des institutions.
QUID DE LA LOI ÉLECTORALE?
Cela dit, la loi électorale recommence à faire l’objet
d’une polémique d’autant plus virulente, qu’aucun délai n’est
fixé par le gouvernement pour l’élaboration du projet gouvernemental.
Ceci fait planer le doute sur ses intentions quant au découpage
des circonscriptions.
Mais il se confirme que la tendance dans les milieux officiels est
en faveur d’une circonscription médiane, plus grande que le caza
et plus petite que le mohafazat. De ce fait, le mohafazat serait coupé
en deux ou davantage. A condition, toutefois, que la même formule
soit retenue pour toutes les régions.
Quoi qu’il en soit, certains milieux renseignés s’attendent
que la nouvelle loi électorale ne soit élaborée qu’au
printemps prochain, la conjoncture régionale devant occuper l’avant-scène
au cours des prochains mois.
Par ailleurs, il y a lieu de faire état d’une double “explosion”
ayant perturbé le climat politique et sécuritaire: il s’agit
de l’attentat perpétré, dimanche dernier, contre l’église
St-Georges à Dékouaneh et de la “bombe” que le ministre des
Postes et Télécommunications, M. Issam Naaman a lancée
le même jour au cours d’une conférence de presse.
On peut se faire une idée de l’attentat contre le lieu de culte
(voir ailleurs notre compte-rendu). Quant à la “bombe” du ministre
Naaman, elle a consisté en un déballage de faits et de chiffres
dénonçant les “grosses têtes” ayant couvert l’ancien
directeur des P. et T. Abdel-Monhem Youssef, poursuivi pour les fraudes
téléphoniques, ce qui a valu au Trésor des pertes
évaluées à 400 millions de dollars.
De son côté, M. Walid Joumblatt a repris ses attaques
contre le régime et le Cabinet, à la faveur d’un meeting
populaire à Batloun (caza du Chouf), accusant les responsables d’avoir
enterré l’accord de Taëf...