Venu, dernièrement, au Liban, Ashley avait déjà
visité les horribles carrières de Shnanhir, ex-réceptacle
sinistre des déchets industriels toxiques italiens déposés
là en septembre 1987. Il avait étudié ce problème
à l’échelle mondiale depuis 1979.
Son plan actuel consistait à mettre en évidence la relation
de cause à effet produite par des déchets industriels toxiques,
oubliés en haute montagne. Les troupeaux de moutons et de chèvres
broutent l’herbe contaminée et boivent les eaux polluées
qui s’infiltrent dans les réservoirs phréatiques qui alimentent
nos sources et nos rivières.
UN IMMENSE DÉPOTOIR ENCORE INCONNU
Après notre passage à côté d’un dépotoir
utilisé par les municipalités du Kesrouan, nous dépassâmes
le croisement de Tallet Al-Midane, notre destination vers les gîtes
résiduels de déchets toxiques.
Constatant notre erreur, nous fîmes demi-tour et fûmes
stupéfaits par la vue et, surtout, l’odeur insupportable d’un immense
dépotoir s’étendant de la route jusqu’au sommet de la colline
et même plus loin.
Cette calamité, plus haute que celle de Bourj-Hammoud, suit
une route ascendante d’à peu près 1.500 mètres aménagée,
à cet effet, pour acheminer toute une noria de bennes qui alimentent,
très tôt le matin, ce très illégal dépotoir.
Il est constitué de milliers de tonnes de déchets plus ou
moins frais ou puants, de déchets d’abattoirs et ménagers
non triés, de barils et contenants d’huiles brûlées
d’autos, de solvants, de peintures périmées, de pesticides,
de déchets d’hôpitaux et de restes de médicaments...
De place en place, des zones noires d’incinération encore fumantes,
marquées sur leur bord par des torchons imbibés de mazout
ou des pneus à demi-carbonisés, de nouveaux facteurs de pollution
atmosphérique...
L’ancien dépotoir en voie d’incinération... |
... Et recevant de nouveaux déchets. |
FACTEURS DE POLLUTION CHIMIQUE SUPPLÉMENTAIRES
Après avoir tout enregistré, nous revînmes à
la région de Tallet Al-Midane.
Sur cette colline parsemée de gîtes résiduels de
poudres de colorants toxiques organiques: noirs, jaunes, violets et, surtout,
rouges, tous dérivés des méthyle aniline. Ces éléments
dangereux ont été officiellement analysés par la “Lyonnaise
des Eaux” et l’Université anglaise d’Exeter (Greenpeace).
D’ailleurs, les bergers de la région n’y font plus paître
leurs troupeaux dont certains ont été empoisonnés
à mort en y broutant l’herbe, en aspirant les légères
poudres en surface ou en buvant les mares d’eau situées en contrebas.
(Voir les études des années 1993 à 1995).
En creusant, légèrement, on met rapidement à jour
des dizaines de petits filons de ces poisons multicolores.
M. Ashley Bruce, après avoir tout examiné et enregistré,
a pris plusieurs échantillons de la poussière rouge.
Il va les présenter à l’ambassade britannique et aux
autorités concernées pour les persuader, encore une fois,
de ramasser ces éléments éminemment dangereux, oubliés
sur le sommet de nos montagnes depuis plusieurs années.
LA Tallet Al-Midane, Ashley Bruce et Wilson Rizk prélevant des échantillons de méthyle aniline. |
Des milliers de tonnes d’ordures couverts de neige, sous laquelle s’effectuera unebiodégradation dangereuse. |
MESURES URGENTES À PRENDRE
Les autorités concernées ont été alertées.
Elles devraient, le plus tôt possible, procéder à visualiser
ces catastrophes écologiques. Et surtout à prélever
sur place des échantillons en vue d’analyses complètes chimiques
avec de plus des recherches bactériologiques en ce sens.
A part le contrôle de toutes les sources dépendant de
cet aquifère gravement contaminé, comme Nabeh el-Assal, Nabeh
el-Laban, Nahr el-Kalb, Kashkouche et Geïta.
Parallèlement, on devrait mener une enquête relativement
facile, en rapport avec les sociétés et municipalités
dont dépendent les centaines de bennes d’ordures déversées,
illégalement, en haute montagne.
Il suffit simplement d’interroger, par ordre hiérarchique, les
militaires qui contrôlent les barrages de l’Armée libanaise,
sur la route d’Ouyoune As-Simane. Avec des ordres stricts d’empêcher,
dorénavant, tout passage de déchets de toute sorte vers nos
cimes.
Ce serait un premier pas vers la constitution d’une police verte omniprésente
et efficace.
DANS LE CAS OÙ RIEN N’EST ENTREPRIS...
Avec ces renseignements, il est très facile à l’Etat
de pénaliser gravement les organismes qui, avec l’argent du peuple,
ne traitent pas nos déchets et les jettent, anarchiquement, en montagne.
Et, aussi, de les obliger à tout ramasser comme les trente mille
tonnes des déchets du Monteverde, l’année passée.
Et être ramenés vers leur lieu d’origine pour y être
traités efficacement.
Et ceci, rapidement avant la chute de neige qui va recouvrir ces dizaines
de milliers de tonnes d’ordures avec une nappe blanche épaisse et
isolante, sous laquelle va s’effectuer une biodégradation anaérobie
très dangereuse. Les skieurs passant au-dessus de ces déchets
enfouis dans la neige, risquent de sauter avec les explosions des poches
d’hydrocarbures, surtout au début du printemps avec la fonte des
neiges. Des masses d’eau pure vont se contaminer en s’infiltrant à
travers ces déchets ayant libéré des substances très
toxiques qui, ajoutées aux méthyle aniline, risquent de polluer
gravement nos réservoirs phréatiques et nos nombreuses sources.
Nous devons traiter, préventivement et effectivement, avant
le troisième millénaire tous les facteurs de pollution dus
aux déchets solides et liquides que nous rejetons dans notre belle
nature, pour que le Liban ne se transforme pas en un énorme dépotoir.