Comme si le gouvernement avait la possibilité matérielle
d’arrêter le déchaînement de la nature et de parer aux
chutes torrentielles ayant totalisé plus de 50mm de pluie en une
heure, fait rare au Liban. Aussi, certains secteurs de la capitale ont-ils
été noyés par les eaux, surtout les quartiers les
plus exposés, tel Wata Mousseitbé où un jeune homme,
Mohamed Chakar (21 ans), est mort par électrocution, alors qu’il
tentait de sauver sa mère. Un autre a été grièvement
blessé et a eu la vie sauve grâce à la rapide intervention
des éléments de la Défense civile.
Ceux-ci, soutenus par les équipes des pompiers et les secouristes
de la Croix-Rouge libanaise, ont déployé de grands efforts
pour dégager les personnes coincées dans leurs demeures qui
ont été englouties. Ces équipes ont, également,
œuvré sans répit dans les différents quartiers de
la ville où la circulation était rendue impossible, non seulement
en raison de l’eau et de la boue, mais des troncs d’arbres que le vent
avait brisés; ils gisaient en travers des rues où de nombreux
télescopages de voitures ont été signalés.
Les secteurs de Tallet el-Khayat, des Arts et métiers (Sanayeh),
les rues Béchara el-Khoury, Gemmayzé, Saïfi et Wata
Mousseitbé ont été les plus affectés par la
tempête.
M. Michel Murr, vice-président du Conseil, ministre de l’Intérieur,
a inspecté les zones sinistrées. A l’issue de sa tournée,
il devait présider une réunion des administrateurs et des
responsables des organismes de sécurité.
M. Murr a rassuré les habitants en promettant de les dédommager,
à la lumière du rapport qu’une commission ad hoc de sept
membres a été chargée d’établir, pour évaluer
les dégâts et déterminer les responsabilités.
“Les présidents de la République et du Conseil, a-t-il déclaré,
sont déterminés à traiter ce problème et à
lui trouver une solution le plus rapidement possible.”
La tempête de dimanche n’a pas relégué la politique
au second plan. Au contraire, dès lundi, les opposants ont fait
de cette affaire leur nouveau cheval de bataille, taxant le gouvernement
de négligence.
Ceux-ci ont la mémoire courte, puisqu’ils oublient qu’en 1993,
des inondations aussi graves que celles du dernier week-end avaient causé
des dégâts considérables. Ils perdent de vue, également,
que l’infrastructure réalisée de 1992 à 1998 et l’étroitesse
des caniveaux sont la cause des dernières inondations.
Pour minimiser la cabale déclenchée contre son gouvernement,
le président Salim Hoss s’est empressé de constituer une
commission d’enquête pour tirer les choses au clair. Cette dernière
devait remettre son rapport mercredi matin, avant la réunion hebdomadaire
du Conseil des ministres dont on attendait des décisions importantes
sur ce plan.
Une source ministérielle commentant la campagne antigouvernementale
de la néo-opposition a émis ces réflexions: “Les opposants
prennent leur rêve pour la réalité. En effet, ils espèrent
pouvoir renverser le Cabinet et prendre sa place, ce qui constitue une
utopie aussi irréelle que le mirage dans le désert. Ce gouvernement
est appelé à durer jusqu’aux législatives de l’an
2000, d’autant qu’il bénéficie du soutien de l’Assemblée
nationale”.
D’ailleurs, plusieurs parmi les visiteurs de la capitale syrienne,
en sont revenus, dernièrement, avec la nette impression que Damas
continue à apporter son soutien total au régime et au gouvernement
Hoss.
LA VISITE DE JOUMBLATT À LAHOUD
Dans le même temps, les observateurs s’attendent que la visite
de M. Walid Joumblatt, prévue pour jeudi (hier) au président
Emile Lahoud en sa résidence de Baabdate, ait pour conséquence
de provoquer un net changement dans le climat politique...
... Bien que M. Rafic Hariri feigne de ne pas tenir compte du rapprochement
entre le palais de Baabda et Moukhtara, laissant entendre qu’il poursuivra
l’exécution de son plan visant à déboulonner le “Cabinet
des 16”...
Le chef du parti socialiste progressiste avait concentré ses
critiques au gouvernement, disant que “sa gestion était défectueuse,
la politique d’austérité suivie ayant appauvri le pays et
les gens”, avant d’ajouter: “L’austérité est appliquée
sur tout, sauf sur les organismes sécuritaires, la science des chiffres
étant celle du mensonge”...
Aussi, les commissions parlementaires ont-elles été renouvelées
sans aucun changement, une nouvelle commission - celle de l’Environnement
- ayant été constituée sous la présidence d’un
député membre du PSP.
Cela prouve que la tension ayant caractérisé, dernièrement,
les rapports entre le gouvernement et la Chambre des députés,
s’est estompée, preuve en est que le projet sur l’enrichissement
illicite, renvoyé aux commissions, a été examiné
dans une atmosphère décontractée.
Le président Nabih Berri a infirmé, indirectement, les
rumeurs selon lesquelles il agirait en vue de torpiller ce projet, en convoquant
les commissions qualifiées dès lundi dernier, en dépit
de son départ en visite officielle pour la Pologne et la Bulgarie.
Cette visite a, dit-on, donné des résultats positifs,
des accords bilatéraux ayant été parafés entre
les deux pays. Le chef du Législatif était accompagné
de son épouse et de trois parlementaires: MM. Talal Arslan, Sebouh
Hovnanian et Elias el-Khazen; de deux fonctionnaires du parlement: Bilal
Charara et Charles Khoury, en plus d’une délégation médiatique.
Le président Berri qui a conféré avec les hauts
responsables polonais et bulgares, a rappelé dans ses discours les
constantes libanaises, telles les suivantes: “Le Liban et la Syrie veulent
une paix juste et globale à cent pour cent... Nous soutenons l’opération
de paix et la Résistance, celle-ci étant la conséquence
de l’occupation israélienne. Le Liban est en mesure de jouer un
rôle actif entre l’Europe et le monde arabe... Quant à Barak,
il ne diffère pas de son prédécesseur”.
M. Berri a émis le souhait de voir la Pologne et la Bulgarie
renforcer leurs relations avec le Liban dans tous les domaines, avant d’ajouter:
“Les vieilles amitiés durent plus que les nouvelles” allusion à
peine voilée à l’intention prêtée à certains
Etats de l’Est de vouloir se rapprocher de l’Europe, de l’OTAN et de prendre
leur distance des pays arabes.
Fait à signaler: le président de la Chambre a transmis
au chef de l’Etat polonais un message personnel du président Lahoud,
traitant des relations bilatérales et des moyens à mettre
en œuvre pour les raffermir davantage.
QUID DES NOMINATIONS?
Sur un autre plan, il importe de signaler les nouvelles nominations
opérées par le Conseil des ministres, qui semblent devoir
être suivies d’autres dans les prochaines semaines.
Ceci indique que les organismes de contrôle ont mis au point
leur rapport, sur base duquel le gouvernement reprendra la réforme
administrative, dans l’idée de la terminer à la fin de l’année
courante, en adoptant le principe de la rotation des fonctions de la première
catégorie.
Par ailleurs, la concertation se poursuit entre les responsables libanais
et syriens autour de la conjoncture régionale et locale, celle-ci
ayant été marquée par une rencontre entre le président
Hussein Husseini et le Dr Bachar Assad, après celle ayant réuni
précédemment le fils du président Assad et M. Tammam
Salam, député de Beyrouth. On s’attend qu’il confère
avec d’autres personnalités libanaises dans les jours à venir.
En ce qui concerne la nouvelle loi électorale et malgré
la promesse qu’elle sera élaborée avant la fin de l’année,
il semble qu’une décision à ce sujet dépend d’un consensus
national qui est loin de se réaliser, le découpage des circonscriptions
constituant le principal, voire l’unique, obstacle à aplanir.
En tout cas, osn attend la rentrée du président Berri
pour que l’Assemblée tranche des dossiers chauds, tels ceux de l’enrichissement
illicite et de la levée de l’immunité couvrant M. Habib Hakim,
député du Metn, avant d’entamer le débat budgétaire.