Le
double jeu pratiqué par l’opposition, qui consiste à engager
le dialogue avec le chef de l’Etat et à boycotter le chef du gouvernement,
est une “innovation” n’ayant pas sa pareille en démocratie. Car
le Cabinet est une partie intégrante du régime (et du Pouvoir);
en fait, ils sont indissociables. Les opposants ne parviendront pas, quoi
qu’ils fassent, à compromettre les rapports entre le palais de Baabda
et le Grand Sérail.
Le double jeu que le néo-opposition paraît déterminée
à pratiquer aura pour conséquence d’envenimer le climat politique
et c’est, probablement, l’objectif qu’elle se propose d’atteindre.
En effet, après les audiences accordées par le chef de
l’Etat aux chefs de file des opposants, en l’occurrence MM. Rafic Hariri
et Walid Joumblatt, ceux-ci restent résolus à maintenir le
dialogue avec le président Lahoud et à boycotter le président
du Conseil.
En d’autres termes, ils établissent une distinction entre le
chef du régime et le chef de son premier gouvernement qu’ils n’ont
cessé d’attaquer, déclenchant contre lui des cabales virulentes
dans le but de le déboulonner.
Pourtant, le président de la République qui tient à
garder son rôle d’arbitre et à se tenir à égale
distance de toutes les parties, a recommandé à MM. Hariri
et Joumblatt d’engager un dialogue avec le Premier ministre et à
ne pas le limiter à la présidence de la République.
L’un et l’autre ont laissé entendre qu’ils préféraient
pour le moment restreindre le dialogue au chef de l’Etat, invoquant des
griefs, peu défendables, les empêchant de traiter avec le
“Cabinet des 16”, notamment sa gestion et ses orientations.
Ainsi, MM. Hariri et Joumblatt persistent à dissocier le régime
du gouvernement. En dépit de cela, le rencontre Lahoud-Hariri, dimanche
dernier à Baabda, a été qualifié par les milieux
proches de Koraytem de “très positive, caractérisée
par un climat franc et cordial” (sic).
Ces mêmes milieux indiquent que la réforme électorale
a été évoquée “d’une manière générale
et non en détail”, le chef de l’Etat et M. Hariri ayant convenu
que la nouvelle loi en cours de gestation, devrait faire l’objet d’un consensus
entre toutes les parties.
Cependant, tout en ayant été “très positive, franche
et cordiale”, la rencontre n’aura en rien contribué à décrisper
le climat politique. Au contraire, elle l’aura enfiévré davantage,
si l’on en juge par la réaction du Premier ministre.
De fait, le président Salim Hoss a dénoncé le
boycottage de son équipe ministérielle par l’opposition.
“Le
boycott, dit-il, est l’arme du faire pratiquant la politique des deux poids
et deux mesures, en dialoguant avec le président de la République
et en boycottant le président du Conseil... Il s’agit, au fond,
d’une demi-ouverture et d’un demi-dialogue avec le régime. Cette
manœuvre ne peut être qualifiée d’ouverture ou de dialogue
démocratique.”
Le Premier ministre rappelle, à juste raison, qu’au temps où
il était dans l’opposition il pratiquait une “opposition constructive,
sans jamais boycotter ou calomnier personne.
M. Hoss en vient à la déduction que l’opposition vise
à compromettre les rapports entre la présidence de la République
et la présidence du Conseil: “Ceci n’arrivera jamais, quelles que
soient les circonstances... De toute façon, le dialogue avec ces
opposants ne saurait nous profiter, tout comme leur boycott ne nous porterait
aucun prejudice.” |