EN MARGE DE L'ACTION DIPLOMATIQUE DONT BEYROUTH EST LE THEATRE
VERS UN CONTACT DIRECT ENTRE LE SERAIL ET L'OPPOSITION

Le Liban-Sud reste et, pour cause, au centre des préoccupations des instances locales, régionales et internationales, suite aux agressions israéliennes quasi-quotidiennes.

Pendant ce temps, les efforts continuent à être déployés en vue de favoriser la reprise des négociations de paix sur les volets libanais et syrien. Dans ce cadre s’inscrivent les entretiens que M. Hubert Védrine, chef du Quai d’Orsay et M. David Satterfield, ambassadeur des Etats-Unis, ont eus avec les responsables.
Le président Emile Lahoud a qualifié la situation de “délicate”, tout en invitant l’Armée à rester vigilante, “car les ennemis qui ont été incapables de compromettre la concomitance des volets libanais et syrien et l’unité de notre position avec le président Assad, tentent de perturber la conjoncture locale.
“Si, a dit encore le chef de l’Etat, les Israéliens veulent se retirer du Sud et de la Békaa-ouest sans une solution juste et globale, la paix ne sera pas instaurée dans la région... Notre position est inébranlable, partant de la conviction qu’on ne peut imposer de solution sans un retrait préalable du Liban et de Syrie et, aussi, sans reconnaître aux Palestiniens le droit de retour à leur terre”.
“Cette étape est très délicate, a conclu le président de la République, mais elle n’est pas dangereuse.”
Pendant ce temps, le ministre de l’Intérieur, M. Michel Murr, a mis en garde contre certaines fractions palestiniennes qu’il soupçonne de vouloir susciter des problèmes au plan sécuritaire: “Le fait d’entraîner quatre-cents éléments dans les camps du Sud n’a pas pour but de libérer la Palestine”, a-t-il observé.
M. Murr a fait cette déclaration à l’issue de la réunion mensuelle du Conseil central de sécurité, au cours de laquelle ont été passés en revue les moyens à mettre en œuvre pour faire face à d’éventuels remous pouvant être provoqués par le retrait israélien en juin ou juillet prochains.
Selon des sources fiables, un contrôle strict est effectué sur les camps, surtout à la suite des réactions enregistrées après l’arrêt de la Cour criminelle condamnant à la peine capitale un responsable palestinien, en l’occurrence le “général” Sultan Aboul-Aynaïn, représentant de Fateh au Liban.

LA VISITE DE VÉDRINE
Il y a lieu de faire état de l’accueil favorable qui a été réservé à Beyrouth à la réflexion émise par le chef de la diplomatie française, avant d’entamer son périple proche-oriental, par laquelle il s’est opposé au règlement du problème des réfugiés au détriment du Liban. “Ce serait, dit-il, une bombe à retardement qui éclaterait à tout moment”.
La visite du ministre français des Affaires étrangères a été suivie par tous les milieux qui l’ont accueillie avec satisfaction, en raison de la position adoptée par Paris envers les problèmes inhérents au conflit israélo-arabe et, précisément, le volet concernant le Liban, le rôle de la FINUL, le retrait de “Tsahal” et ses répercussions, surtout si ce dernier devait intervenir sans un accord bipartite.
M. Védrine a réitéré l’invitation du président Jacques Chirac au président Lahoud à visiter la France. Cette invitation avait été faite par le chef de l’Elysée lors de sa rencontre avec son homologue libanais au sommet de la francophonie à Moncton (Canada). Le président Lahoud a promis d’y répondre dans le plus bref délai.
Les observateurs ont déduit des déclarations du chef du Quai d’Orsay que celui-ci n’avait pas apporté du nouveau. En fait et d’après certains renseignements, M. Védrine aurait transmis un message israélien rédigé sur le ton de la menace, insinuant que l’Etat hébreu pourrait retirer ses troupes, unilatéralement, quelles qu’en soient les conséquences, forcément négatives, pour le Liban.
Mais à Beyrouth, le chef du Quai d’Orsay a constaté que le Liban officiel n’attachait aucune importance au “message israélien”, partant du fait que le retrait de “Tsahal” doit s’effectuer sur base d’un accord ou pas, en vertu de la résolution 425 du Conseil de Sécurité, cette dernière exigeant une évacuation inconditionnelle de notre territoire.
De plus, les responsables libanais ont réaffirmé la concomitance des volets libanais et syrien et leur insistance à ce que toute solution doit prévoir un retrait du Liban et du Golan et la reconnaissance aux réfugiés palestiniens du droit de retour.

VERS LE RENFORCEMENT DE LA FINUL?
Les responsables ont interrogé M. Védrine à propos de l’intention prêtée à la France de proposer le renforcement des effectifs de la FINUL au Liban-Sud et le long des frontières communes avec Israël.
Le responsable français a assuré aux présidents Lahoud, Berri et Hoss que son pays était disposé à déployer des efforts pour aider à régler la situation au Liban-Sud, dans le cadre de l’opération de paix et à jouer tout rôle qu’il lui serait demandé de jouer dans ce contexte.
M. Védrine a cité, à titre d’exemple, l’action entreprise par Paris lors de l’agression d’avril 96, date à laquelle Cana a été lâchement pilonné par l’artillerie israélienne. Et ce, en vue d’aider à l’aboutissement des pourparlers relatifs à l’arrangement en vertu duquel a été constitué le groupe de surveillance de la trêve.
Au préalable, la visite rendue par le Dr Bachar Assad au président Lahoud, la semaine dernière, avait éclipsé les événements sur la scène locale. D’autant que le fils du président Assad avait conféré, quelques jours plus tôt, avec le président Chirac au palais de l’Elysée.
L’entretien du chef de l’Etat libanais avec le Dr Assad a porté sur la conjoncture régionale, en prévision d’une éventuelle reprise des négociations sur les volets syrien et libanais.
Les deux responsables ont réaffirmé la concomitance des deux volets et leur solidarité dans la bataille engagée en vue de la récupération de la terre et des droits spoliés.

LE PROCESSUS DE PAIX DANS L’IMPASSE?
Cela dit, il semble que l’action menée par Washington en vue de relancer les négociations de paix sur tous les volets ait abouti à une impasse, les parties directement concernées par le conflit du Proche-Orient persistant dans leurs positions.
En effet, le président Hafez Assad n’a pas renoncé à la condition fondamentale qu’il pose pour accepter de s’aboucher avec les Israéliens; il exige de l’Etat hébreu de s’engager au préalable à évacuer tout le Golan.
Les observateurs constatent que l’entrée en scène du “Jihad islamique” au Liban-Sud aux côtés du “Hezbollah”, avec le consentement de ce dernier, est de nature à compliquer davantage la situation, la réapparition des commandos palestiniens dans la région frontalière risquant de faire changer d’attitude les stratèges de Tel-Aviv, quant à un éventuel retrait du territoire libanais d’ici au printemps prochain.
Aussi, le chef du Législatif a-t-il mis en garde contre la gravité de la conjoncture locale au cours des trois prochains mois, ainsi qu’il l’a confié à M. Adel Khodary, ambassadeur d’Egypte.
Celui-ci attend de nouvelles concertations égypto-syriennes en vue d’une stratégie qu’exigent les derniers développements. M. Khodary a rappelé la prise de position du Caire favorable à la Syrie, au Liban et à l’Autorité palestinienne.

VERS UN DIALOGUE SÉRAIL-OPPOSITION?
Sur un autre plan, il y a lieu de signaler un premier contact direct entre le gouvernement et ses détracteurs. De fait, le président Hoss a reçu la visite de MM. Marwan Hamadé et Akram Chéhayeb, membres du Front de lutte nationale, bloc parlementaire joumblattiste. Ceux-ci ont soulevé l’affaire des wakfs druzes, mais on présume qu’ils ont évoqué une possible visite que les chefs de file de l’opposition seraient disposés à lui faire. M. Hoss a répondu que “sa porte était ouverte à quiconque voudrait le rencontrer”.
Cette rencontre se baserait sur la position identique adoptée par MM. Hoss, Joumblatt et Hariri envers le découpage des circonscriptions, tous trois étant opposés au partage de la capitale “pour préserver son unité”.

NADIM EL-HACHEM

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