ANCIEN CHEF DU GOUVERNEMENT AMINE EL-HAFEZ:
“L’IMPLANTATION MENACE L’UNITÉ NATIONALE ET LA VIE EN COMMUN”

Ancien chef du gouvernement ayant assumé les responsabilités officielles à une période parmi les plus délicates, le Dr Amine el-Hafez assume, actuellement, la présidence de la conférence permanente pour la lutte contre l’invasion culturelle sioniste.
Il avait accordé à ce sujet un intérêt particulier durant tout le temps - trente-et-un ans - où il a présidé la commission parlementaire des Affaires étrangères.
Homme politique averti, doublé d’un journaliste s’étant signalé par ses analyses pertinentes de la situation, il expose son point de vue en ce qui concerne les retombées du règlement du conflit israélo-arabe (s’il vient à se réaliser), sur la conjoncture locale.

SATISFACTION TEINTÉE DE MÉFIANCE
La relance des négociations de paix, dit-il, a suscité une vague de satisfaction parmi notre peuple qui a tant pâti de la perpétuation du conflit proche-oriental. Cependant, cette satisfaction est entachée de méfiance. De fait, en plus de maintes déceptions enregistrées dans le proche et lointain passé, les milieux d’affaires et les chefs d’entreprises appréhendent le danger de la normalisation des relations avec l’Etat hébreu.
Puis, on ignore la position d’Israël par rapport à l’implantation des réfugiés palestiniens dans les pays où ils sont établis.
Quant à ceux qui soutenaient la résistance au Liban-Sud, partant de sa conviction que “ce qui a été pris par la force ne sera repris que par la force”, ils ont perdu quelque peu de leur en-thousiasme, dans l’attente des résul-tats des négocia-tions.

L’OPINION ISRAÉLIENNE ET LA PAIX
Qu’adviendrait-il si les pourparlers arabo-israéliens venaient à tré-bucher, suite à un “accident” qui empêcherait Barak de les poursuivre, comme  ce fut le cas de Rabin?
Il ne fait pas de doute que l’opinion publique israélienne n’est pas encore persuadée, en son for intérieur, comme elle l’est en apparence, des avantages de la paix. Car le juif, par nature, n’est pas enclin à donner; aussi, hésite-t-il à accorder des concessions contre les acquis obtenus par le passé. D’autant qu’il considère son armée comme étant la plus puissante dans la région, l’Etat hébreu bénéficiant du soutien sans réserve des Etats-Unis et disposant de l’arme nucléaire, tout en contrôlant les moyens de communication et la finance dans le monde.
Le peuple juif pourrait ne pas faciliter la tâche au Premier ministre Barak et freiner son action par la voie démocratique, sans qu’il ait besoin de l’éliminer physiquement.

PRÉMUNIR LE LIBAN CONTRE L’IMPLANTATION
Selon certains renseignements non confirmés, l’Irak serait choisi comme le pays d’accueil des réfugiés palestiniens...
En ce qui concerne l’implantation des réfugiés palestiniens, le discours politique libanais s’attache à leur droit au retour en Palestine. Mais cette question doit être tranchée dans le cadre des pourparlers palestino-israéliens sur le statut final.
L’Autorité palestinienne se contentera de proclamer l’Etat palestinien, ne serait-ce que sur quelques mètres carrés du territoire récupéré d’Israël, mais je ne pense pas qu’elle ira jusqu’à soulever des questions sensibles et exiger leur règlement, telles celles de Jérusalem, des réfugiés et de la souveraineté.
A ce moment, il faudra trouver un moyen de prémunir le Liban contre le danger de l’implantation palestinienne, car elle menace son unité nationale et le désir de vivre en commun des Libanais.

Jusqu’à quand la Résistance poursuivra-t-elle ses opérations et est-il logique qu’elle les poursuive en même temps que les négociations de paix?
Le concept de la résistance ne se limite pas aux armes. Elle vise, également, à combattre le danger sioniste de différentes façons.
Si la paix était instaurée, la Résistance troquerait son rôle de libérateur, contre celui de gardien de la patrie au moyen des armes. Elle aura à mettre en échec la normalisation et les plans sionistes visant à faire mainmise sur les ressources de la nation arabe au triple plan économique, technologique et culturel.
Il faudra, aussi, se méfier des politiques que suivra l’Etat hébreu après le règlement du conflit régional.
Ici, me revient à l’esprit ce qu’a déclaré M. Farouk Chareh, ministre syrien des Affaires étrangères, en répétant cette réflexion du président Hafez Assad: “Notre cause est une question d’existence et non seulement de frontières”.

Propos recueillis par
JOSEPH MELKANE

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