LA RELIQUE
DE SAINT-MARON RAMENÉE À KFARHAY
Alors que les
musulmans célébraient le Fitr en prêchant la complémentarité
entre le Christianisme et l’Islam et que les orthodoxes fêtaient
le dernier Noël du second millénaire à la basilique
de la Nativité à Bethléem, les maronites du Liban
récupéraient la relique de Saint-Maron confiée, il
y a environ neuf cents ans, à un moine bénédictin
pour être honorée en Italie.
Le cardinal Sfeir: “Nous honorons les vertus incarnées par le
fondateur de notre communauté”
D’après l’historien italien Ludovico Jacobelli, un abbé
bénédictin venu d’Italie en pèlerinage en Terre Sainte
avait obtenu en 1130 l’autorisation de prendre la relique de Saint-Maron
pour l’honorer dans l’église de Sassovino (Italie) où, par
son intercession, on obtenait grâces et miracles.
En 1180, à la demande des habitants de Volperino, proche de
Sassovino, la relique fut déposée dans leur église
dédiée spécialement à Saint-Maron.
En 1490, Mgr Luca Cibo Borsciani, évêque de Foligno, ordonna
le transfert de la relique à la cathédrale de Foligno où,
chaque année, le 10 mars, elle est exposée à la piété
des croyants.
En 1499, la relique comprenant plusieurs pièces, est placée
dans un buste plaqué argent représentant le jeune Maron:
œuvre d’art du XVème siècle enregistrée dans les archives
italiennes.
Depuis 1998, grâce à plusieurs interventions de la part
de Mgr Emile Boulos Saadé, archevêque de Batroun, en coordination
avec S.B. le patriarche Sfeir, auprès des autorités religieuses
et civiles d’Italie, le ministère de la Culture et la direction
des Musées en Italie ont permis la récupération de
la relique de Saint-Maron, placée dans un nouveau buste, offert
par Mgr Bertoldo, évêque de Foligno: le premier étant
un patrimoine à conserver. Ainsi, la relique a été
envoyée par la valise diplomatique à la Nonciature apostolique
(Harissa) et, de là, à Bkerké.
S.Em. le cardinal Sfeir, entouré
des prélats durant la procession. |
La relique de Saint-Maron portée
par les habitants de Batroun. |
DE BKERKÉ À MAR YOUHANNA MAROUN
Le vendredi 7 janvier à 14 heures, une délégation
présidée par Mgr Saadé se rend à Bkerké,
en vue d’accompagner la relique de Saint-Maron jusqu’à la cathédrale
Saint-Etienne à Batroun où les diocésains l’accueillent
par la prière et les cantiques.
Mgr Saadé concélèbre la messe avec Mgr Arduino
Bertoldo, venu spécialement de Foligno (Italie) pour participer
à la cérémonie. Jusqu’à 22 heures, la cathédrale
est ouverte pour une affluence de fidèles venus prier et méditer.
Les thèmes d’oraison sont centrés sur la spiritualité
maronite face aux défis du troisième millénaire. Le
lendemain, au cours de la matinée, les visiteurs accourent de tous
les coins du diocèse. A 13 heures, le cortège se dirige vers
le monastère de Kfarhay, résidence du premier patriarche
maronite, d’où la relique de Mar Maroun avait été
envoyée en Italie.
A 15 heures, S.Em. le cardinal Nasrallah Sfeir concélèbre
l’Eucharistie avec Mgr Saadé, ordinaire du lieu et plusieurs prélats,
en présence du Nonce apostolique, Mgr Antonio Maria Veglio, du représentant
du président de la République, de hautes personnalités
religieuses, civiles et d’une foule de croyants.
L’église Saint-Maron, en
restauration, à Volperino. |
Le couvent Saint-Maron sur le Assi. |
POURQUOI KFARHAY?
Après lecture de l’Evangile, Sa Béatitude prononce une
homélie où il relate le fait historique de la relique, en
se référant à l’historien Mgr Youssef Debs. Il l’introduit
par cette exclamation: “Qu’ils sont grands les saints sur la terre! Toute
ma joie est de demeurer avec eux”. (Ps. 116:3)
Aussi, avec beaucoup de précision, répond-il aux points
d’interrogation qui se dessinent autour de cet événement
ecclésial.
Pourquoi déposer cette relique au monastère Mar Youhanna
Maroun de Kfarhay?
D’après la tradition maronite, Saint Jean-Maron, premier patriarche
de l’Eglise maronite, a vécu au VIIème siècle. Il
fut, d’abord, évêque de Batroun. Puis, alla s’installer en
Syrie où, en 636, il fut élu patriarche par les moines. D’après
Mgr Debs, les moines avaient, en Syrie, plusieurs monastères, dont
le principal était situé aux bords du fleuve El-Assi, entre
Homs et Hama (Page 7, “Histoire des maronites”, de Mgr Youssef Debs).
Huit cents moines y résidaient. De retour au Liban, le patriarche
édifia le couvent Saint-Maron à Kfarhay, y déposa
la relique qu’il avait apportée de son couvent à El-Assi
(p. 43 du même document). Il est plus vraisemblable que cette relique
soit prise de ce couvent en Italie.
Voilà qu’elle y revient après huit cent soixante neuf
ans pour être honorée des croyants, dit Mgr Sfeir.
*Dans le livre “Histoire de l’Eglise maronite”, de Mgr Pierre Dib,
nous lisons à la page 9: “...Toutes ces indications permettent de
placer dans la première moitié du Xème siècle
la destruction du célèbre monastère, berceau de l’Eglise
maronite”, ce qui confirme que l’abbé bénédictin Michel,
venu au XIIème siècle, a dû prendre la relique de Saint-Maron
au monastère de Kfarhay.
Une autre question se pose: Cette relique est-elle authentique?
Il est notoire que Saint-Maron vécut au milieu du IVème
siècle et mourut au début du Vème, c’est-à-dire
entre l’an 350 et l’an 410. Trois siècles se sont écoulés
depuis son décès à Quroch jusqu’au transfert de sa
relique au monastère Mar Youhanna Maroun. Environ quatre siècles
et demi jusqu’à son transfert de ce monastère en Italie.
Tout au long de ces sept siècles, le Liban a connu maintes invasions,
conquêtes et de nombreuses calamités qui ont modifié
son Histoire. Loin d’affaiblir les maronites, ces épreuves ont consolidé
leur foi en Dieu, la confiance en soi et le courage de défendre
les vraies valeurs avec ardeur.
BATROUN, “DIOCÈSE DE DROIT”
D’ailleurs, les propos du patriarche Sfeir sont révélateurs:
“Tant que la tradition et l’histoire confirment l’authenticité de
cette relique, nous n’avons qu’à y croire bien que ce ne soit pas
un dogme. Ce que nous honorons, ce n’est pas une personne humaine et ses
cendres. Nous honorons les vertus et les valeurs spirituelles que cette
personne a incarnées... Maintenant que nous avons sa relique, elle
est pour nous une source de force et d’espérance nouvelle. Par sa
vie austère passée dans le dépouillement total et
les sacrifices, il cherchait à plaire à Dieu et à
gouverner, au sein des persécutions, un peuple qui porte son nom...
Sur les pas de leur patron, les maronites prennent le chemin vers Dieu.
Parmi eux, des anachorètes, des saints, des moines, des missionnaires,
des savants et des poètes sont allés jusqu’aux confins de
la terre portant la spiritualité de Saint-Maron puisée dans
l’Evangile”.
Et Sa Béatitude de clore son homélie en déclarant
Batroun, “DIOCÈSE DE DROIT” implorant sur lui et sur son archevêque,
par l’intercession de Saint-Maron, la bénédiction divine
et la fidélité dans la foi.
Enfin, il souhaite que “le Liban demeure une terre de valeurs humaines,
de civilisation, d’amour et de paix dans la foi en Dieu.
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