Expert
en matière financière et économique, M. Nasser Saïdi
a acquis une expérience de bon aloi en tant que premier vice-gouverneur
de la Banque centrale, poste qu’il a occupé durant plusieurs années.
Aussi, son choix en tant que ministre de l’Economie, du Commerce et de l’Industrie a-t-il été favorablement accueilli. Il a laissé son empreinte sur le plan de redressement économique et financier, en même temps que M. Georges Corm, ministre des Finances et les autres membres de la commission ministérielle ad hoc. |
Il se dit optimiste quant à l’avenir de la situation économique.
Une année, dit-il, est trop brève pour évaluer les
résultats de toute politique économico-financière.
Cependant, au cours des douze derniers mois, les ministères dont
je détiens les portefeuilles, ont élaboré un plan
d’action et établi le cadre d’une politique générale.
Notre plan a visé à atteindre les objectifs suivants:
parachever la libéralisation progressive de notre secteur commercial;
ratifier les conventions commerciales, dont l’accord de coopération
avec la Syrie; les accords conclus avec Bahrein, l’Indonésie, le
Yémen; élaborer un projet en vue de l’aménagement
d’une zone franche avec la Jordanie; préparer l’adhésion
du Liban à l’Organisation mondiale pour le Commerce, après
avoir acquis la qualité de membre observateur le 14 avril; consolider
la position du Liban sur la scène internationale; effectuer des
visites officielles à de nombreux pays: la Syrie, l’Egypte, la Grande-Bretagne,
l’Espagne, les Etats-Unis, le Canada, l’Irak et l’Arménie.
Autre objectif: établir le cadre légal et institutionnel
dans le domaine de la protection de la propriété littéraire
et artistique, à travers une loi propre.
SECTEURS DE L’INDUSTRIE ET DE L’ASSURANCE
Nous avons, également, procédé à la réorganisation
du secteur de l’assurance, à travers une législation réglementant
l’action et le contrôle des compagnies opérant dans ce domaine;
à organiser les secteurs des changes, de la bourse, des marchés
financiers, du secteur privé, en général et de la
privatisation, par la mise au point d’une stratégie déterminant
le mécanisme de participation du secteur privé à la
privatisation.
D’autre part, il a été procédé à
la modernisation de certaines législations et à leur adaptation
aux impératifs du moment, tout en tenant compte des évolutions
mondiales, en vue de la protection de la propriété industrielle
et commerciale, d’encourager les investissements, le commerce électronique,
la protection du consommateur, de combattre l’accaparement; de faire évoluer
le secteur de l’informatique par la création d’une commission nationale
pour la technologie.
Par ailleurs, la commission chargée de traiter le problème
qui se posait au début de l’an 2000, s’est acquittée de sa
tâche de la meilleure manière possible.
De plus, un nouveau règlement a été élaboré
en vue de l’organisation des foires, des centres commerciaux et d’autres
manifestations de caractère industriel et économique au Liban
et à l’étranger.
Le mois du tourisme et du marketing a été conçu
de façon à réactiver les divers secteurs commerciaux
et touristiques qui souffraient jusqu’ici d’immobilisme. Une étude
a été effectuée autour de la politique des prix et
un programme a été établi aux fins de faciliter les
formalités relatives aux sociétés commerciales et
autres.
AU PLAN DES INFRASTRUCTURES
Au plan industriel, le ministère concerné a œuvré
à l’effet de renforcer l’industrie par un relevé destiné
à rectifier la politique industrielle pour la rendre plus efficace;
à faire évoluer l’infrastructure propre à ce secteur
en classifiant les industries et les zones industrielles; à réduire
le coût de revient des produits locaux en réduisant les taxes
douanières sur les matières premières (de 6 à
3%); d’assurer le financement industriel en améliorant les conditions
de l’octroi des prêts, par la création d’un Institut pour
la garantie des prêts et par l’élaboration d’un projet visant
à contracter un prêt de 30 millions d’Euros avec la Banque
européenne pour l’investissement, ce montant étant destiné
à financer les petites et moyennes entreprises.
Et, aussi, par l’institution d’un fonds spécial en coopération
avec l’Union européenne, pour l’octroi de mini-crédits à
l’intention des régions rurales.
Le ministère s’est employé à développer
le mouvement des exportations par la recherche de nouveaux marchés
et, à cette fin, est envisagée la création d’un Conseil
pour le développement des exportations libanaises.
L’Institut des recherches industrielles n’a pas été oublié,
en ce sens que ses laboratoires ont été rééquipés,
deux autres laboratoires devant y être aménagés dans
les domaines de la microbiologie et de la chimie, etc...
AUTOUR DU MARASME ÉCONOMIQUE
Le marasme économique persiste se répercutant sur
la vie quotidienne des citoyens: dans quelle mesure le plan gouvernemental
peut-il contribuer à dépasser cette étape?
Nous avons pleinement conscience de cet état de choses et n’épargnons
aucun moyen ni effort pour y remédier. Cependant, les crises de
cette nature ne peuvent être résorbées par des solutions
improvisées et du jour au lendemain.
Le marasme actuel n’est pas né d’aujourd’hui; il est, d’abord,
la conséquence de facteurs régionaux, extérieurs et
intérieurs. Puis, notre économie est influencée par
l’instabilité qui affecte toute la région et par la baisse
des prix de l’or noir sur les marchés mondiaux. Ceci a eu pour conséquence
de faire baisser le volume des investissements arabes et des virements
de capitaux. Enfin, le Liban a été affecté par les
crises financières internationales ayant résulté des
crises asiatique et russe.
Quant aux causes intérieures, elles se ramènent aux suivantes:
l’accroissement de la dette publique, la hausse des taux d’intérêt
et le retard à acquitter les montants dus à leur échéance,
en plus de l’arrêt de projets que le Conseil du développement
et de la reconstruction était chargé d’exécuter.
PLAN QUINQUENNAL DE REDRESSEMENT
Le gouvernement a mis au point un plan quinquennal de redressement
financier et économique visant, notamment, à réduire
le déficit budgétaire et la dette publique.
Actuellement, les prix du pétrole ont tendance à hausser,
ce qui a ramené les capitaux sur le marché local et ravivé
les exportations libanaises par rapport à ce qu’elles étaient
l’an dernier.
Puis, la seconde moitié de l’année écoulée
a connu un accroissement des dépenses, suite à la ratification
du budget général de l’Etat, spécialement en ce qui
concerne les projets exécutés par le CDR et le paiement des
arriérés des sommes dues à leur échéance.
On s’attend que le secteur de l’habitat et du bâtiment connaisse
un regain d’activité, conséquence de l’octroi de nouveaux
prêts à travers le programme de l’Institut national de l’Habitat,
en plus des prêts accordés par la Banque européenne
pour l’investissement en vue de la construction d’hôtels.
QUID DU MOUVEMENT REVENDICATIF?
On constate, ces derniers temps, des mouvements revendicatifs de
la part de certains secteurs du monde du travail: le gouvernement est-il
en mesure de satisfaire les doléances et le Trésor est-il
en mesure de supporter des dépenses supplémentaires?
L’Etat a établi un ordre des priorités, afin de pouvoir
satisfaire les citoyens dans les limites de son budget, dont les recettes
sont inférieures à ses dépenses, d’autant que le service
de la dette représente, actuellement, 80 pour cent des dépenses
publiques. Ceci empêche l’Etat de répondre à toutes
les requêtes avec la célérité requise. Cependant,
le projet de budget de l’an 2000 prévoit l’augmentation des dépenses
à des fins sociales (santé, éducation et autres),
à travers l’intensification de la contribution des Pouvoirs publics
au domaine social.
Il va sans dire que bien des revendications salariales se justifient
et le gouvernement s’emploie à les satisfaire dans la mesure des
possibilités.
LE BUDGET DE L’AN 2000
Vous attendez-vous à ce que la Chambre des députés
souscrive à la loi de finances sans que les séances qui lui
seront consacrées se transforment en tractation politique entre
le gouvernement et l’opposition?
Nous nous trouvons à la veille d’élections législatives
et nous savons, par expérience, que les membres de l’Assemblée
profitent du débat budgétaire pour redéfinir leur
position et exposer leurs vues futuristes. C’est leur droit légal
qu’ils exercent, tant les loyalistes que les opposants mais, en définitive,
l’intérêt national l’emporte. Je m’attends, toutefois, à
ce que la discussion du projet de budget se concentre cette année
sur ses aspects social et économique plus que sur d’autres.
DÉVELOPPER LES EXPORTATIONS ET AMÉLIORER
LA PRODUCTION NATIONALE
Que se propose de faire votre ministère pour faire face à
la mondialisation, laquelle suppose une production industrielle distinctive
pour pouvoir supporter la concurrence?
Les lois et règlements libanais en vigueur comportent bien des
motivations de nature à favoriser cette tendance, telle la loi 27/80
du 18 juillet 1980 qui a modifié les dispositions relatives à
l’impôt sur le revenu, à la taxe sur les propriétés
bâties et à la perception des impôts directs.
Le ministère de l’Industrie a décidé de créer
un conseil pour le développement des exportations, comme nous appliquerons,
incessamment, le projet relatif aux services consultatifs de l’Institut
industriel, en coopération avec l’Union européenne, afin
d’aider les entreprises industrielles à améliorer la qualité
de leur production, à moderniser leur administration et leurs méthodes
de travail.
Le ministère agit en vue d’améliorer la qualité
de la production libanaise, en appliquant certains critères. De
plus, nous œuvrons aux fins d’assurer le financement à long terme,
moyennant des taux d’intérêt réduits, pour encourager
les entreprises nationales à renouveler leurs équipements.
La hausse réelle des prix est-elle due au système
du marché ouvert et libre? Y a-t-il un contrôle sur les prix?
L’Etat est-il capable de les freiner?
Dans notre économie libérale, les prix sont déterminés
par l’offre et la demande. Le gouvernement intervient en déterminant
le plafond des prix pour un petit nombre de produits élémentaires
à la portée des couches populaires, tels le pain, l’essence,
le gaz, le poulet et ses dérivés, les livres scolaires édités
localement. Il n’y a pas une intervention directe pour freiner les prix
qui obéissent à la loi de la concurrence. Selon les indices,
nous ne pouvons parler de hausse des prix, puisque le taux d’inflation
est d’environ de 1 ou 0%.
En ce qui concerne le ministère de l’Economie et du Commerce,
il dispose d’un bureau dont la tâche consiste à contrôler
les prix des produits alimen-taires ou de consommation courante, à
étudier les facteurs influents, à analyser le mouvement des
prix, de l’importateur aux points de vente au détail. En outre,
le Service pour la protection du consommateur contrôle les prix,
ainsi que la validité et la qualité des produits exposés
à la vente.
CONTRÔLER LES COMPAGNIES D’ASSURANCES
Avez-vous trouvé une solution au problème des compagnies
d’assurances en difficulté, telle la fusion?
Afin de consolider le secteur des assurances, le ministère de
l’Economie et du Commerce a appliqué une série de mesures,
dont les suivantes:
- Amendement de la loi régissant les compagnies d’assurances,
en ce qui concerne le taux de solvabilité financière, la
déduction de la réserve technique et l’incitation à
la fusion et l’appropriation.
- Retrait des licences des compagnies n’ayant pas appliqué la
loi et redressé leur situation, malgré les avertissements
et les mesures judiciaires prises à leur encontre.
- Suivi de la situation des compagnies en difficulté.
- Imposition d’amendes aux compagnies n’ayant pas respecté la
loi et les règlements en vigueur.
Collaboration avec les autorités de contrôle des assurances
à l’étranger, afin de contrôler les réassureurs
accrédités auprès des compagnies d’assurances au Liban.
- Préparation de nouveaux exemplaires du rapport de l’actuaire,
en collaboration avec la société PWC.
D’autre part, nous encourageons les fusions et tenons qu’elles soient
conformes aux règlements.
Le Liban est-il prêt à adhérer à l’accord
de partenariat européen et au Gatt?
Alors que le Liban pâtissait des problèmes internes et
régionaux, le monde a connu des développements à l’échelle
commerciale telle l’apparition de l’Union européenne et l’Organisation
mondiale du Commerce (OMC). Le Liban se prépare à y adhérer,
dans le but de réaliser davantage de croissance économique.
Cela requiert une réorganisation intérieure. Aussi, notre
action se base-t-elle sur trois points essentiels:
1- La mise sur pied du cadre institutionnel chargé de diriger
le mécanisme d’adhésion à l’Organisation mondiale
du Commerce. Nous avons constitué, à cet effet, un comité
national représentant les administrations concernées et sommes
sur le point de former une unité technique s’occupant des affaires
de l’OMC et du partenariat européen.
2- La réhabilitation de nos lois et administrations pour répondre
aux impératifs du moment, tout en tenant compte des spécificités
de notre économie et de notre société. Nous avons
commencé par la loi pour la protection de la propriété
intellectuelle et préparons la loi de la concurrence et d’interdiction
du monopole et de l’accaparement.
3- L’étude des répercussions de ces accords sur les secteurs
économiques.
D’ailleurs, le Liban jouit d’une économie libérale, le
taux des taxes douanières étant relativement bas (14%). Il
serait influencé d’une façon limitée par ces accords.
En cas d’adhésion au partenariat européen, quelles
sont les taxes de rechange aux taxes douanières, à part la
taxe sur la valeur ajoutée (TVA)?
Les pays de l’U.E. savent bien que l’Etat libanais compte sur les taxes
douanières comme source principale de ses rentrées.
L’accord de partenariat européen tend à nous accorder
des aides financières et techniques pour nous permettre d’améliorer
notre système fiscal, d’adopter la TVA et de renforcer notre économie
afin que nous nous dispensions des recettes douanières.
Nous tentons, à travers nos négociations avec l’U.E.,
d’élever au maximum ces aides. La TVA constitue le principal moyen
adopté par les pays membres du partenariat euro-méditerranéen
ou d’un autre groupement régional. Selon le budget de 1999, il a
été décidé d’augmenter la part des impôts
directs.