Saturnale


Par MARY  YAZBECK AZOURY

EDUCATION DIPLOMATIQUE
Nombreux sont les pays qui ont opéré un remaniement complet dans leurs ministères des Affaires étrangères.
Avant le concours proprement dit, les candidats aux postes du service diplomatique sont examinés, “amicalement”, au cours d’invitations, d’un repas ou d’une réception, pour s’assurer que les postulants ont bien le profil requis.
A la suite de ce premier contact qui révèle, plus ou moins, l’aspect social, psychologique et culturel du futur diplomate, le concours a lieu.
De nos jours, les priorités ne sont plus les mêmes. Les économistes ont la cote et l’emportent haut la main sur les littéraires et même sur les diplômés en sciences politiques. Les relations entre Etats se font, désormais, aux plus hauts niveaux, en raison de la facilité des communications interplanétaires et des transports.
Que le concours oral ou écrit suive, l’important est de recruter non seulement sur les connaissances spécifiques, mais surtout sur les facultés d’analyse et de synthèse du candidat. Car pour les connaissances proprement dites, il lui suffit de presser un bouton et toutes les informations sine qua non pour son étude lui sont fournies par un ordinateur.
En conclusion, il faut absolument repenser le recrutement des candidats à la Carrière (avec un C majuscule) et reformuler les conditions du concours.

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DAUBER SUR LES MONDANITES?
L’ambassadeur de France, Henri Froment-Meurice, un des grands diplomates du Quai d’Orsay, a publié récemment ses “Mémoires” intitulés: “Vu du Quai”, aux Editions Fayard.
Il apporte des informations, des précisions et un humour valables pour tous les diplomates.
Il écrit entre autres, ce passage plus que révélateur de la mentalité de certains profanes qui ne comprennent pas grand- chose à la Carrière:
“Il est fréquent d’entendre dauber sur ces “mondanités”, auxquelles les diplomates consacreraient une bonne partie de leur temps. C’est, pourtant, dans ces salons que l’échange d’informations est le plus fructueux; que les a parte font progresser dans la discrétion bien des négociations; que se nouent des amitiés durables, que se retrouvent des interlocuteurs qui ne pourraient, officiellement, se rencontrer. J’en tirai rapidement au moins trois enseignements qui m’accompagnèrent tout au long de ma vie professionnelle.
Le premier est que les heures de travail d’un diplomate débordent, largement, l’horaire strict de la “chancellerie”.
Le deuxième est que l’épouse d’un diplomate doit “servir” tout autant que son mari et contribuer au rayonnement de son ambassade par sa présence, ses propres réceptions et contacts et qu’elle n’est pas seulement une personne privée.
Le troisième est que les indemnités qui sont allouées au diplomate en poste à l’étranger, ne doivent pas lui servir à constituer un magot pour les années de vaches maigres, quand il revient au Quai pour sa retraite; c’est sur place qu’il lui faut les dépenser. Tout salon d’un ambassadeur qui, assisté de son épouse, aime recevoir et qui accepte de ne pas ménager sa bourse, peut devenir un petit “Congrès de Vienne”.

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“QUE DIEU LUI PARDONNE”
Les enseignements qui précèdent sont ceux prodigués aux diplomates de tous les pays civilisés.
Au Liban, on n’insiste pas assez sur ce sujet et deux incidents me reviennent en mémoire.
Le premier a lieu à l’occasion de l’investiture du président finlandais, Mauno Henrik Koïvisto.
Mon époux étant ambassadeur résident à Moscou et accrédité aussi en Finlande, reçoit une invitation. Une autre me parvient ainsi qu’à toutes les autres ambassadrices. Le Protocole finlandais insiste, gentiment, sur la présence des dames, car toutes les manifestations prévues sont mixtes. Un programme exceptionnel a été organisé.
Mon mari envoie un Fax à l’Administration Centrale à Beyrouth, leur faisant part de ces invitations. La réponse ne se fait pas attendre: “L’ambassadeur est autorisé à se déplacer et recevra les indemnités nécessaires. Quant à son épouse, il n’en est pas question, à moins que l’ambassadeur Antoine Yazbek assume à ses frais personnels son déplacement”. (Loc. cit)
La raison invoquée? “Le précédent ambassadeur résidant à Moscou et accrédité à Helsinki s’est toujours déplacé seul...”
Le plus drôle de l’histoire est que l’ambassadeur du Liban qui nous avait précédés n’avait pas d’épouse.
Conclusion de l’affaire? J’ai participé quand même...
Voilà la mentalité du responsable de l’époque.
Quelques années plus tard, revenue au Liban, après le décès tragique de mon époux à Moscou, je suis reçue par un ancien très haut fonctionnaire de la République. Son épouse est présente à l’entretien et me reçoit par ces mots, en guise de condoléances:
“Que Dieu pardonne à Antoine” (mon époux).
Très surprise, je demande la raison de ce commentaire.
Elle me répond: “N’aurait-il pas mieux valu, à la place de toutes ces fastueuses réceptions, invitations et des déplacements, qu’il les économise, en prévision d’un imprévu?”
En fait de “somptueuses invitations”, deux d’entre elles avaient été données en l’honneur de son époux venu à Moscou à la tête d’une importante délégation.
Telle était la mentalité qui prévalait, alors, dans l’Administration.
Heureusement qu’aujourd’hui ce n’est plus le cas.
Tant le ministre des A.E. que le nouveau secrétaire général du palais Bustros, Zouhair Hamdane savent que, dans cette carrière, le plus important c’est le panache.
 
EMILE LAHOUD ET SAÏD AKL:TABLEAU D’HONNEUR
- Le général Emile Lahoud, président de la République qui s’est appliqué la règle de la transparence et fait une déclaration officielle de son patrimoine.
- Le grand poète Saïd Akl, né un 4 juillet (Independance Day aux USA) qui a toujours été Grand, indépendant dans ses actes et qui vient de reprendre  l’attribution de son prix.
Pour ce poète à la cravate et au mouchoir rouges perpétuels, la grandeur se définit ainsi: “99% d’honnêteté, 1% de génie...”


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