PAR LE PAPE JEAN-PAUL II AUX PÈLERINS LIBANAIS:
“JE VEUX VOUS DIRE AVEC LA FORCE DE L’AMOUR:
JE SUIS À VOS CÔTÉS COMME UN PÈRE ET UN FRÈRE”

Je me demande si les Libanais ont pris conscience et compris toute l’importance de la “Journée maronite mondiale” qui a été célébrée à Rome le 9 février, jour de la Saint-Maron et de l’audience que Sa Sainteté Jean-Paul II a accordée à S.Em. le cardinal Sfeir, aux prélats et aux fidèles venus dans la Ville éternelle pour célébrer le Grand Jubilé de l’Année Sainte 2000.
 
Le Saint-Père accordant une audience 
aux pèlerins maronites...
Une accolade témoignant de la grande 
affection du Saint-Père au cardinal Sfeir.

Les messages sont multiples. Tout d’abord, le Saint-Père a voulu que le pèlerinage des Libanais à Rome venus de partout, inaugure celui des Eglises catholiques orientales. En deuxième lieu, lors de l’audience du jeudi 10 février, le Souverain Pontife a témoigné, une fois de plus, de toute l’affection et de l’intérêt qu’il accorde au Liban, à tous ses fils résidents et de la Diaspora. Dans son message, il a montré à quel point “la terre bien-aimée du Liban” a toujours été et demeure au cœur des préoccupations de Sa Sainteté et du Vatican. Plus fort encore, S.S. Jean-Paul II a transgressé le protocole, en accordant après la bénédiction collective, une bénédiction individuelle à chacun des cinq cents fidèles présents à l’audience papale, malgré son état de santé fragile. Pouvait-il y avoir de sa part un plus grand témoignage d’amour? Ce pèlerinage jubilaire voulu par le Saint-Père a témoigné, une fois de plus, des liens séculaires existant entre le Siège de Rome et l’Eglise maronite d’Antioche, à travers le patriarcat et les différents Ordres présents à Rome. Ce que S.S. Jean-Paul II vient de faire pour le pays des Cèdres, cher à son cœur, il ne l’a jamais fait à personne d’autre et les regards sont tournés vers la capitale de la chrétienté. Pour cette même raison, on aurait tant souhaité une présence officielle, des ministres, des députés, des forces vives du pays à cette journée maronite mondiale du Vatican. Mais heureusement, les fidèles étaient présents en force et ce sont eux qui expriment la véritable maronité; c’est par eux que la vocation du “Liban message” se perpétue. Les prières qui se sont élevées de Rome, de Beyrouth et partout dans le monde, le 9 février, pourront-elles opérer le miracle attendu et permettre au Liban de redevenir ce havre de paix, de sécurité, de quiétude, ouvert aux cultures et civilisations, libéré de toutes présences étrangères, tel que le souhaitent ses fils?
Le Liban attend beaucoup du Vatican et du successeur de Pierre.
 
... et écoutant attentivement, le message 
de S.Em. le cardinal Sfeir.
Les couloirs du Vatican.

L’AUDIENCE PAPALE
Plus de quatre cents fidèles libanais venus de la mère-patrie et des pays d’émigration ont été reçus par le Saint-Père, dans l’une des belles salles du Vatican, où le regard se détache difficilement des fresques murales et du plafond, comme partout à Rome.
Il est midi. Jean-Paul II pénètre dans le salon des audiences sous de frénétiques applaudissements et une émotion difficilement contenue. Il s’installe dans son fauteuil, la tête légèrement inclinée appuyée sur sa main et écoute avec une profonde attention le message de S.B. le patriarche Sfeir. “Venus du Liban, ce pays qui a toujours été près de votre cœur de père commun des fidèles et des pays d’émigration, nous nous estimons heureux de pouvoir accomplir notre devoir de pèlerins en cette année jubilaire”, affirme le chef de l’Eglise maronite.
“Nous avons prié, pasteurs et fidèles, à l’intention de Votre Sainteté, en vue de gagner l’indulgence plénière attachée à ce pèlerinage.
“Nous avons prié, aussi, pour que la paix règne au Proche-Orient et particulièrement au Liban; qu’elle soit une paix juste et globale. Nous l’appelons de nos vœux, mais, malheureusement, elle s’avère jusqu’ici insaisissable.”
Le cardinal Sfeir évoque la situation au Sud, la persistance d’une guerre larvée de plus en plus meurtrière, parce qu’insidieuse, “car, dit-il, elle continue à charrier la crème de notre jeunesse vers l’étranger” et conclut: “Jamais nous n’oublions ce que Votre Sainteté a fait, pendant les années de guerre et ne cesse de faire pour notre pays.
“(...) Tout cela encourage les Libanais de toutes confessions religieuses à avoir confiance en eux-mêmes et à poursuivre, l’expérience de vivre ensemble entamée, il y a déjà près de quinze siècles. Ils demandent, simplement, l’application des résolutions prises au niveau du Conseil de sécurité en leur faveur, ce qui leur permettra d’assurer leur responsabilité à l’égard d’eux-mêmes et de leur pays, à l’exclusion de toute ingérence, d’où qu’elle vienne.”

MESSAGE DE JEAN-PAUL II
Le Saint-Père s’adresse, alors, à l’assistance: “Je vous souhaite la bienvenue dans la maison du successeur de Pierre et dans la Ville éternelle. Votre pèlerinage à Rome inaugure celui des Eglises catholiques orientales.
“La célébration eucharistique solennelle, présidée par votre bien-aimé patriarche, à la basilique Sainte-Marie Majeure, tout comme l’audience d’aujourd’hui renforcent le lien étroit qui existe entre le Siège de Rome et celui d’Antioche, cette ville très ancienne où les disciples furent pour la première fois appelés chrétiens et où Saint Pierre lui-même a vécu.
S.S. Jean-Paul II parle de l’importance de “l’unité ecclésiale avec Rome”, des nombreux saints et saintes que l’Eglise maronite “fille spirituelle de Saint Maron a vu fleurir au cours des siècles”, la joie qu’il a ressentie en procédant, le 17 novembre 1985, à la béatification de Rafqa et, le 10 mai 1998, à celle de Neemtallah al-Hardini.
“Il m’est agréable, ajoute-t-il, d’évoquer ici les heures que j’ai passées au Liban où l’Eglise maronite a ses racines et son centre effectif.
“L’espérance nouvelle pour le Liban exprimée dans l’exhortation post-synodale, a été mon cri de résurrection et de paix par lequel j’ai présenté à nouveau la terre biblique des Cèdres à la conscience du monde. J’encourage tous les pasteurs et fidèles des communautés catholiques du Liban à accueillir et à assimiler toujours davantage les propositions et les suggestions de cette exhortation.”
Puis, il exprime “le plaisir d’annoncer que le Collège pontifical maronite a rouvert, officiellement, ses portes grâce, surtout, aux efforts inlassables de Mgr Emile Eid, Procureur patriarcal à Rome. Cet Institut voulu par le pape Grégoire XIII et remontant au XVIème siècle, a formé d’innombrables et illustres élèves...
(...) Je forme le vœu que les jeunes maronites qui vivront désormais dans ce collège historique contribuent, efficacement, comme leurs prédécesseurs, à la vie ecclésiale maronite, dans la fidélité à l’esprit de l’Eglise universelle.”
 

Les fidèles se pressent pour 
recevoir la bénédiction pontificale.

Plus de 500 prélats et fidèles ont 
assisté à cette audience 
particulière réservée aux Libanais.

On reconnaît sur la photo Marianne
et Henri Hélou et notre collaboratrice.

FIDÉLITÉ À SA VOCATION
Le Saint-Père termine par ces paroles qui vont droit au cœur: “Quant à la terre bien-aimée du Liban, vers laquelle se tourne avec nostalgie le cœur des croyants, je lui souhaite de continuer à rester fidèle à sa vocation de Message: un lieu où les chrétiens peuvent vivre en paix et en fraternité avec les adeptes d’autres croyances, où ils soient capables de promouvoir une telle convivialité. Je veux, aussi, vous dire, aujourd’hui, avec la force de l’amour: Le pape est toujours proche de vous tous. Je suis à vos côtés, comme un père et un frère dans cette période où l’intolérance conduit, parfois, à raviver la haine que nous voudrions voir disparaître pour toujours.”
Il demande au Seigneur que ce soit là “le premier fruit du Grand jubilé que vous célébrez à Rome” et accorde aux fidèles “la bénédiction apostolique”.
En plus de cette bénédiction apostolique, S.S. Jean-Paul II devait accorder une bénédiction individuelle à une trentaine de personnes ou plus avant de se retirer. Il a dû voir dans le regard de chacun des fidèles, le désir profond de venir individuellement s’agenouiller devant lui et obtenir sa bénédiction. Le chef du protocole indique que l’audience est terminée. Le Saint-Père qui s’était levé pour quitter la salle, se rassied sur son fauteuil; il accorde la bénédiction à chacun et risque même de manquer d’air, car toutes les personnes présentes se pressent autour de lui, pour être sûres d’obtenir cette faveur.
Son geste demeurera à jamais gravé dans les annales du Vatican et du Liban.

NELLY HÉLOU

Home
Home