![]() avec le Liban. |
![]() Un retrait avant juillet. |
DÉCISION UNANIME DU CABINET ISRAÉLIEN
Dimanche 5 mars 2000, le Cabinet israélien présidé
par Ehud Barak, a approuvé à l’unanimité le plan de
retrait du Liban-Sud d’ici à juillet 2000, même en l’absence
d’un accord avec Damas et Beyrouth. Cette décision prise à
l’issue d’un débat de plus de cinq heures, est venue, de fait, entériner
les engagements électoraux du Premier ministre.
Cette décision désormais officielle, a évidemment
suscité une multitude de réactions, de commentaires et soulève
plus d’un point d’interrogation sur la scène libanaise directement
concernée par ce retrait.
Premier à réagir à la décision du Cabinet
Barak, le chef du gouvernement libanais. M. Salim Hoss affirme: “Que la
décision du Conseil des ministres israélien soit une manœuvre
ou non, notre position a été de tout temps favorable à
un retrait israélien en application de la résolution 425
du Conseil de sécurité de l’ONU qui appelle à un retrait
inconditionnel.
Quant à la formation intégriste, elle crie victoire et
affirme, dans un communiqué: “La décision israélienne
est une reconnaissance de la défaite face au peuple libanais et
son héroïque résistance islamique (...) Le plus petit
pays arabe a réussi à chasser l’envahisseur sioniste.”
Qu’en est-il de la réaction de Damas, étant donné
la concomitance des volets syrien et libanais? Dans un premier temps, le
quotidien gouvernemental “Techrine” se montre sceptique. “Le fait que la
décision israélienne ne prévoie qu’un redéploiement
de ses forces armées, écrit-il, porte les germes de la guerre
dans toute la région et compliquera davantage le processus de paix
gelé par Ehud Barak.”
La position officielle de la Syrie, face à cette décision
sera, toutefois, annoncée à travers un communiqué
émanant du Front national progressiste (FNP), coalition formée
des sept partis au Pouvoir. Cité par l’agence officielle Sana, ce
communiqué affirme: “Si Israël veut vraiment procéder
à un retrait total et inconditionnel au-delà de la frontière
internationale, conformément à la résolution 425 du
Conseil de sécurité, la Syrie et le Liban seront très
heureux de la libération du Liban-Sud.”
PLUSIEURS INCONNUES
La décision du Cabinet israélien de retirer ses troupes
du Liban-Sud avant fin juillet 2000, soulève une multitude d’interrogations,
notamment dans le cas où ce retrait se ferait de façon unilatérale
sans un accord préalable avec Beyrouth et Damas ou même avec
le Liban tout seul.
Tout d’abord, cette annonce est accueillie avec un certain scepticisme
du côté libanais, comme du côté syrien où
on met en doute les véritables intentions d’Israël.
A Tel-Aviv, les sondages donnent 61% d’avis favorables à ce
retrait, mais pour les commentateurs de presse, “la décision constitue
un message à la Syrie pour qu’elle se hâte de conclure un
accord de paix avec Israël”, tel que l’écrit le quotidien “Yediot
Aharonnot”. Pour l’éditorialiste du “Jerusalem Post”, “cette décision
unilatérale pourrait avoir un énorme effet boomerang et serait
une épée à double tranchant.”
Une question primordiale s’impose: Quelle serait l’attitude du “Hezbollah”
face à un retrait unilatéral de “Tsahal”? La résistance
intégriste déposera-t-elle les armes pour s’adonner, uniquement,
à l’action politique et sociale? Ou bien poursuivra-t-elle la lutte
jusqu’à la libération du Golan, en vertu de l’unité
des volets libanais et syrien?
Sur cette question, le “Hezbollah” ne donne pas de réponse,
n’ayant aucun intérêt à dévoiler ses cartes.
Quant à l’Etat libanais, il n’a jusque-là avancé aucun
plan pour combler un vide que laisserait “Tsahal” au plan sécuritaire.
Par contre, Ehud Barak est bien explicite sur ce sujet et dans une
déclaration télévisée, il a nettement mis en
garde contre toute attaque sur le territoire israélien après
un retrait du Liban-Sud: “Je ne conseille à personne, dit-il, de
tester notre réaction lorsque nous serons déployés
le long de la frontière internationale et défendrons à
partir de là nos localités.”
Autre point d’interrogation: le sort de l’ALS? Dans son communiqué
relatif au retrait du Liban-Sud, le Cabinet Barak s’est engagé à
assurer “la sécurité et le bien-être” des membres de
l’Armée du Liban-Sud et de celle de tous les habitants de la zone
de sécurité. Reste à savoir comment? Depuis le 14
mars 1978, “Tsahal” occupe une superficie de 850 km2 entre le Sud et la
Békaa-ouest et l’ALS compte près de 2.500 combattants. Qu’en
est-il, aussi, de la possibilité de déployer une force multinationale
tout au long de la frontière internationale entre le Liban et Israël
pour en assurer la sécurité? En vertu de la résolution
425, la FINUL aurait dû remplir cette mission dès sa création
en 1978, mais Israël a refusé de se retirer, créant
ce qui est devenu la “zone de sécurité”.
Selon une source diplomatique à Beyrouth, citée par l’AFP,
la tâche de la FINUL serait loin d’être facile: “Les 4.500
hommes de la Force intérimaire des N.U. déployés au
Liban-Sud auraient trois missions, affirme ce diplomate qui garde l’anonymat:
veiller au retrait jusqu’aux frontières internationales de 1923,
en vérifier la bonne exécution, assurer la sécurité
des zones évacuées et aider au rétablissement de la
souveraineté libanaise au Sud.”
Le diplomate poursuit: “La FINUL pourra-t-elle empêcher d’éventuels
combattants palestiniens ou du “Hezbollah” de tirer sur le Nord d’Israël,
ou les règlements de comptes entre diverses fractions armées
ou les représailles contre des groupes minoritaires?”
On voit bien que cette éventualité n’est pas, non plus
aussi, simple à adopter.
APPUI UNANIME DES ARABES
C’est dans ce contexte, que se tient à Beyrouth les 11 et 12
mars courant, le Conseil politique de la Ligue à l’échelon
des ministres des Affaires étrangères. Cette rencontre qui
se déroule normalement au Caire, a été déplacée
à Beyrouth en signe de soutien au Liban face à l’agression
israélienne, notamment suite aux raids aériens israéliens
dans la nuit du 7 au 8 février contre des objectifs civils. Ces
attaques avaient détruit des sous-stations électriques, causant
des dégâts estimés à une quarantaine de millions
de dollars et fait vingt-deux blessés.
Le gouvernement libanais avait, alors, mené une intense activité
diplomatique en direction de l’Occident et du monde arabe, afin de les
amener à prendre pleinement conscience du rôle primordial
que joue le Liban en faveur d’une paix juste et globale et des dangers
qu’il encourt du fait de sa ferme résistance aux visées d’Israël.
Cette campagne diplomatique a porté ses fruits et les frères
arabes se sont mobilisés pour défendre la cause du Liban.
Le geste le plus spectaculaire fut, évidemment, la visite inopinée
du chef de l’Etat égyptien le samedi 19 février. Le président
Hosni Moubarak est venu apporter son appui au Liban, ce qui a déplu
à M. Barak.
Au fil des jours, l’élan de solidarité arabe n’a fait
que s’amplifier. Le jeudi 2 mars, le prince héritier Abdallah Ben
Abdel-Aziz, d’Arabie séoudite, a effectué une visite à
Beyrouth de 24 heures, afin d’apporter son soutien moral à la politique
du régime et accorder au Liban une aide de 130 millions de dollars.
Une semaine auparavant, Beyrouth avait accueilli, pour une visite de
quelques heures, cheikh Sabah el-Ahmed As-Sabah, ministre koweitien des
Affaires étrangères, qui avait transmis au président
Lahoud un message d’appui de l’émir du Koweit, cheikh Jaber el-Ahmed
As-Sabah et annoncé que son pays financera, en partie, la reconstruction
des trois sous-stations électriques détruites par l’aviation
israélienne.
Plusieurs autres messages de solidarité ont afflué à
Beyrouth de la part du roi Abdallah de Jordanie, du président iranien
Khatami et de dirigeants du monde arabe...
La Ligue arabe: un appui unanime.
ADOPTER DES RÉSOLUTIONS FERMES
La tenue à Beyrouth de la Conférence des ministres arabes
des A.E. est, sans aucun doute, la résultante de cet élan
de solidarité arabe qui a nettement dérangé l’Etat
hébreu. Israël ne voit pas non plus d’un très bon œil
la tenue du conseil arabe à Beyrouth et c’est pour cette raison
qu’elle a choisi un timing bien précis pour annoncer, officiellement,
son retrait du Liban-Sud avant fin juillet 2000.
Le président de la Chambre, M. Nabih Berri exprime nettement
ce point de vue: “Je pense, dit-il, que le but recherché par le
timing de cette annonce avant la tenue, à Beyrouth, de la réunion
des ministres arabes des A.E., est de prévenir les éventuelles
résolutions fermes que pourraient adopter ces assises interarabes
au bénéfice du Liban et de la Syrie.”
Ni le Liban, ni les pays arabes ne doivent se laisser intimider par
l’annonce du retrait israélien et tout au long de la semaine écoulée,
les préparatifs de la réunion des 11 et 12 mars allaient
bon train. Hier, jeudi 9 mars, M. Esmat Abdel-Magid, secrétaire
général de la Ligue arabe, est arrivé à Beyrouth
pour les ultimes mises au point de cette conférence à laquelle
le Liban attache une grande importance. Le Premier ministre, M. Salim Hoss
a, d’ailleurs, indiqué que le Liban soumettra un mémorandum
portant sur la condamnation des attaques israéliennes contre des
objectifs civils, la concrétisation de la solidarité arabe,
la réactivation du fonds de soutien arabe décidé à
Taëf, le refus de l’implantation palestinienne, l’attachement aux
arrangements d’avril 96 et la confirmation de la concomitance des volets
libanais et syrien.
“La question du Liban et l’agression israélienne contre son
territoire, a précisé M. Abdel-Magid, seront les points les
plus importants de l’ordre du jour de la session ordinaire du Conseil de
la Ligue, qui sera appelé à adopter une position arabe appuyant
le Liban, au double plan politique et financier.
“Le retrait israélien du Liban-Sud règle une partie
du problème, en l’absence d’une paix juste et globale entre le Liban
et la Syrie, d’une part et l’Etat hébreu, d’autre part”, a déclaré
le président Emile Lahoud en ouvrant, mercredi, la séance
hebdomadaire du Conseil des ministres.
“Dans un tel cas, a observé le chef de l’Etat, la présence
armée palestinienne pourrait constituer à nouveau un facteur
d’instabilité dans la région frontalière, surtout
en l’absence d’un règlement de la question des réfugiés
palestiniens dont l’implantation est rejetée autant par ces derniers
que par les Libanais eux-mêmes.
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![]() Le président Hafez Assad a accepté, le mardi 7 mars, la
démission du Premier ministre, Mahmoud el-Zohbi (65 ans), en poste
depuis treize ans et a chargé Mohamed Moustapha Miro (59 ans), gouverneur
d’Alep, de former le nouveau gouvernement.
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