Saturnale


Par MARY  YAZBECK AZOURY

HEUREUSEMENT QU’ILS NE SONT PAS EXPLOSIFS
Suite au commentaire publié dans cette rubrique, la semaine dernière, sous le titre: “Même pas un cocktail Molotov”, deux lecteurs A.S. et B.T. m’ont fait parvenir ce commentaire dont je publie un extrait:
“Vous écrivez que les ministres libanais pris dans l’ensemble ou en particulier ne forment “même pas un cocktail Molotov”, ce que nous sommes ravis d’apprendre...
“Des mélanges détonants, nous en avons eu plus que notre quote-part... Nous préférons à n’importe quel explosif, cette sagesse, ce calme, même cette monotonie...”
Ces lecteurs ont parfaitement raison en ce qui concerne le calme, la sagesse. Mais ce qui est voulu dans ce commentaire, c’est dénoncer la passivité du Cabinet en exercice qui donne l’impression d’expédier les affaires courantes plutôt que de pratiquer une politique dynamique, active, performante. Ce qui dérange? Cette indolence. Le pouvoir ne doit pas renoncer aux réformes. Le rôle du gouvernement est de faire disparaître les causes du mécontentement en utilisant toute son imagination, toute sa tenacité. Il faut un effort sincère et avisé des responsables, où il n’y a plus de place à la complaisance, à la compromission. Telle était mon intention.

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LE MINISTÈRE DES FINANCES, CLÉ DE TOUTES LES RÉFORMES
On ne gouverne pas seulement avec de bons sentiments et des idées justes. La rapidité de l’action s’impose. La vertu d’un Etat est souvent dans le ministère des Finances, car il possède la clé de toutes les réformes. Or, ce ministère au Liban est un véritable panier à crabes. Les erreurs sont humaines et l’informatisation n’a pas arrangé les choses.
L’ordinateur est, souvent, le bouc-émissaire de nombre de malentendus. Mais quand l’erreur est décelée, pourquoi faut-il des mois pour la corriger?
On nous taxe de pessimisme, comme si le journaliste goûtait quelque sombre plaisir à prédire les catastrophes et à prêcher les pénitences.
La sévérité de ces jugements ne repose, en réalité, que sur un profond optimisme à l’égard des moyens du Liban et des chances qui lui sont offertes. C’est parce que nous pouvons nous redresser en nous appuyant sur des réalités que nous dénonçons les illusions.
Voici venu le temps où le Liban doit retrouver sa fierté et son espérance.
Voici venu le moment où de vieux abus, de vieux privilèges, longtemps et âprement défendus contre l’intérêt général, doivent tomber d’un seul coup.
Il ne faut pas que le gouvernement fasse sienne la recommandation que donne Shakespeare dans “Antoine et Cléopâtre”: “Abandonnez ceux qui s’abandonnent eux-mêmes.” Les Libanais sont, de plus en plus, résignés; c’est aux responsables d’agir. Les combats en retraite ne sont pas nécessairement défaites; au gouvernement de le prouver.

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L’EMBALLAGE INTELLIGENT
Aux Etats-Unis et dans les pays de l’Union européenne, “l’emballage intelligent” vient de faire une entrée fracassante sur les marchés.
De quoi s’agit-il, en fait? Une capsule bleue indique si la chaîne du froid a été respectée. Si elle ne l’a pas été, la capsule bleue vire au rouge. Le produit ne doit pas être consommé.
A quand l’introduction de cette capsule au Liban?
Née en 1999... mariée et lettrée!
Les tribulations des Libanais dans le domaine des “cartes d’identité” sont dignes d’un feuilleton. Nous demandons à toutes les “victimes” de nous faire part de leurs aventures toujours inédites.
La dernière en date? Madame Thérèse R... a besoin de sa nouvelle carte d’identité pour renouveler son passeport. La demande en a été faite - dans le Haut Metn - depuis plus de deux ans. Or, cette carte ne lui a jamais été remise du fait que la première prise d’empreintes digitales n’était pas claire. Une autre avait dû suivre. Puis, une erreur s’est glissée dans la date de naissance et il avait fallu la faire rectifier à... Jounieh. Enfin, après maints coups de fil, on les informe que les cartes de la famille sont prêtes. Monsieur Mansour R..., l’époux, se rend donc à Jounieh pour les retirer.
Quelle n’est sa surprise de constater que la carte d’identité de sa femme porte la date de naissance, “née le 9/9/1999”. Il refuse de la prendre, arguant que c’était ridicule, qu’un “bébé” de quelques mois ne peut être mariée et lettrée, puisque la carte porte la signature de sa femme Thérèse. Le préposé insiste, se fâche et menace. Il demande à l’époux de prendre immédiatement possession de la carte, de signer le récipissé. “Allez-vous plaindre auprès du ministère de l’Intérieur; moi j’en ai marre de cette affaire...!”
Ce sont, en fait, les rôles inversés. C’est au citoyen de se plaindre de toutes ces erreurs et, pourtant, c’est le fonctionnaire qui en a marre!
Bien entendu, la carte d’identité ne sert à rien et la dame est obligée pour obtenir son passeport d’obtenir un nouvel extrait d’état-civil, un autre extrait de son casier judiciaire (vierge), des photos certifiées par le moukhtar et le tout dûment légalisé à... Baabda.
Quand elle arrive au bout de son calvaire, Thérèse R... dit au préposé de la Sûreté générale en retirant son passeport: “Quand on pense que mes deux fils ont obtenu la citoyenneté française, à Paris en moins de deux ans, sans embarras et que moi, jusqu’à présent, je n’ai pu obtenir ma carte d’identité, après avoir effectué des centaines de kilomètres...” Le responsable de la Sûreté rétorque le plus sérieusement du monde: “Et alors! Chez nous, il y a des étrangers qui ont obtenu la nationalité libanaise... en quelques minutes”.
Qui dit mieux?
 
BOUFFÉE D’OXYGÈNE ET BAIN DE JOUVENCE
Nous critiquons, souvent, aussi est-il juste d’applaudir la TV quand elle le mérite.
L’émission d’Elie Nacouzi sur la MTV ce lundi, a été un véritable bain de jouvence, a apporté une bouffée d’oxygène dans cette atmosphère sclérosée, stéréotypée et poussiéreuse de la vie politique libanaise.
Sur le plateau, des moins de 35 ans; cela fait plaisir à voir: Karim Abdallah Racy, Camille Dory Chamoun, Karim Sarkis et David Issa, candidats potentiels aux législatives 2000 analysent, sans complaisance, le contexte politique libanais avec des yeux neufs, jeunes, enthousiastes.
Ce qu’ils ont dit?
Trop long à présenter dans cette rubrique, mais il suffit de constater que les jeunes présentent un programme vivifiant des principes à respecter.
- La fierté nationale et la volonté de défendre le Liban contre toute pression et toute menace.
- La volonté délibérée d’être utile et secourable aux plus humbles, aux plus fragiles, aux plus souffrants.
- La détermination de bâtir ensemble la demeure libanaise, d’où puissent rayonner les vertus de justice, d’équité, du courage, du savoir et du cœur.
Que ceux qui s’inquiètent et guettent se rassurent donc: les jeunes sont décidés à prendre la relève!


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