Le retrait israélien a été au centre de l’entretien
que le président de la République a eu lundi dernier, au
palais de Baabda, avec M. Farouk Chareh, ministre syrien des A.E., celui-ci
ayant fait escale à Beyrouth avant de gagner Paris où il
devait transmettre au président Chirac un message verbal du président
Assad et conférer avec son homologue français. (Quelques
jours plus tôt, le chef de l’Etat français avait eu un entretien
au téléphone avec le Premier ministre israélien, Ehud
Barak).
En quittant le palais de Baabda, le chef de la diplomatie syrienne
a déclaré que les intérêts libanais n’étaient
pas en contradiction avec les intérêts syriens. “Quiconque
pense le contraire se trompe”. M. Chareh a transmis un message personnel
du président Assad à son homologue libanais traitant des
développements de la conjoncture régionale.
Cela dit et d’après des sources renseignées, des indices
permettent de prévoir une reprise en force des négociations
syro-israéliennes, dès que sera assuré le climat propice
à leur succès. Les rencontres ayant eu lieu, récemment,
entre différentes personnalités et chefs d’Etat corroborent
cette information. Damas que le ministre français de la Défense
a soupçonné de maintenir ses troupes en territoire libanais,
pour faire perpétuer sa mainmise sur le Liban, a donné, cette
semaine, la preuve de sa bonne foi en réduisant le nombre des barrages
dans la capitale et sur la route de la Békaa.
Le redéploiement des forces syriennes est assez significatif,
d’autant qu’il s’est étendu à des secteurs qualifiés
de “stratégiques”. Ainsi, la Syrie prouve, une fois de plus, qu’elle
n’a aucune visée au Liban.
Dans le même temps, les responsables syriens œuvrent, en coopération
avec leurs homologues libanais, aux fins de mettre en échec tout
projet israélien visant à semer le trouble dans notre pays
et à y compromettre la sécurité, ainsi qu’il est apparu
dernièrement, suite à des attentats perpétrés
par des éléments séditieux qu’il n’a pas encore été
possible d’identifier.
DOSSIERS À TRANCHER
Par ailleurs, plusieurs dossiers ont besoin d’être tranchés
dont les suivants:
1 - Le dossier de l’eau sous l’angle du partage du précieux
liquide entre les Etats de la région proche-orientale. Il s’agit
des ressources du lac de Tibériade, du Golan, du mont Hermon, du
Jourdain, des eaux libanaises et de ce que la Turquie est en mesure de
fournir.
A ce propos, il y a lieu de signaler la rencontre à Eilat entre
le roi Abdallah II de Jordanie et Ehud Barak, au cours de laquelle a été
évoqué, notamment, le projet relatif au barrage à
construire sur le Yarmouk qui a déclenché la guerre de 1967.
2 - Le problème des réfugiés palestiniens et les
projets de solutions proposés pour le résoudre, dont celui
suggéré par M. Jean Chrétien, Premier ministre du
Canada. Ce dernier a préconisé l’installation des réfugiés
au Liban, en Syrie, en Jordanie, en Irak et au Canada. Ce qui a laissé
accréditer les nouvelles faisant état de concertations en
vue de rendre l’implantation “possible et acceptable”.
3- L’intention prêtée à l’Etat hébreu de
conserver tout le territoire de Jérusalem et une partie de Cisjordanie
non inférieure à 30 pour cent de la superficie totale, de
cette région.
4 - Les tentatives israéliennes de fomenter des troubles au
Liban, afin d’assurer le retrait de “Tsahal” avec le minimum de pertes,
d’autant qu’il s’agit d’une zone relativement vaste s’étendant de
Nakoura au Arkoub.
Selon des rapports officiels, Israël a commencé à
démonter certaines installations militaires dans la région
frontalière, en prévision de son évacuation, peut-être
au moment où on s’y attendrait le moins...
TOURNÉE EUROPÉENNE DE LAHOUD?
D’autre part, on fait état avec insistance d’une tournée
que le président Lahoud effectuerait en Europe, après celle
du Golfe qu’il a clôturée par une visite à Téhéran
et au Caire.
Le nouveau périple présidentiel commencerait par Paris
et sa date serait fixée dès le retour de M. Farouk Chareh
de la capitale française.
Dans ce contexte, certains pays européens, la France et l’Allemagne
en tête, auraient fait part de leur disposition à contribuer
à la reconstruction des régions sudistes dévastées
par les agressions israéliennes. Le Japon, la Chine et la Malaisie
ont également exprimé le désir de participer à
cette opération.
Fait à signaler: la visite du chef de l’Etat au Caire a été
la seule au terme de laquelle un communiqué commun a été
diffusé, consignant la teneur des entretiens. Le président
Hosni Moubarak, apprenons-nous, a réitéré sa disposition
à fournir au Liban tout ce dont il a besoin dans cette étape
délicate, d’autant que l’Egypte entretient de bonnes relations avec
toutes les parties concernées par la crise libanaise.
“Nous avons devant nous, devait déclarer le président
Lahoud, deux mois difficiles et nous devons nous armer de patience, celle-ci
étant exigée dans des étapes déterminées
que traversent les nations.”
Le chef de l’Etat a, en conséquence, invité les Libanais
à se montrer au niveau de la responsabilité nationale et
à resserrer les rangs, pour prémunir leur pays contre tous
les dangers qui le menacent et lui assurer un avenir radieux. “Je parie
sur la compréhension des citoyens et sur leur attachement à
la patrie”, a-t-il conclu.
A Téhéran, le président Lahoud a entendu de l’ayatollah
Khamenei, guide de la Révolution iranienne, des paroles élogieuses.
De fait, il s’est adressé au chef de l’Etat en ces termes: “Vous
êtes le sauveur de l’unité nationale, l’unificateur de l’Armée
et le soutien de la Résistance. Vous avez transformé l’institution
militaire en une entité nationale prééminente.”
Et d’ajouter: “Notre capacité n’a pas de bornes et nous sommes
prêts à aider le Liban.”
Le président de la République a, au cours de toutes ses
rencontres avec les dirigeants des pays qu’il a visités, explicité
la position du Liban de tous les problèmes auxquels il est confronté,
notamment, celui que pose la présence militaire syrienne. Il a assuré
que “cette présence est légale, provisoire et sera traitée
de manière à servir nos intérêts et non ceux
d’Israël.”
De plus, il a dénoncé l’action menée par l’opposition
établie à l’étranger, sans la citer nommément,
disant qu’elle avait fomenté, dans le passé, des “conflits
intercommunautaires”.
Dès sa rentrée, le président Lahoud a conféré,
longuement, avec le président Salim Hoss à propos des derniers
développements survenus au plan intérieur durant son absence.
Et ce, afin de rasséréner l’atmosphère et d’empêcher
tout dérapage, dont Israël pourrait tirer profit. Décision
a été prise d’inscrire à l’ordre du jour du Conseil
des ministres la question de la sécurité intérieure
et les moyens à prendre pour la consolider.
D’ores et déjà, le Conseil central de sécurité
applique des mesures destinées à prévenir toute atteinte
à la stabilité interne.
Dans le même temps, le président Lahoud se soucie de consolider
la situation financière, affirmant que “la monnaie nationale est
bien tenue et protégée au double plan de la Banque Centrale
et du système bancaire”. Et tout en admettant que la situation économique
a besoin d’être traitée rapidement, il ne manque pas de faire
état d’un plan que le gouvernement s’emploie à appliquer
pour la redresser.
D’ailleurs, le cardinal Sfeir y a fait allusion dans son message pascal,
tout en affirmant devant une délégation du CNL (aouniste)
que la liberté se termine là où commence celle des
autres. “Nous devons être tous libres dans le cadre de la loi”, a-t-il
conclu.
Mgr Elias Audé, métropolite de Beyrouth a, également,
mis l’accent dans son homélie dominicale sur la nécessité
de sauvegarder la liberté d’opinion et de ne pas sévir contre
les jeunes au risque de les contraindre à s’expatrier.